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Roberto Juarroz

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Roberto Juarroz (né le 5 octobre 1925 à Coronel Dorrego dans la province de Buenos Aires, Argentine - mort le 31 mars 1995 à Buenos Aires) est un poète argentin, considéré comme un des poètes majeurs de ce temps, dont l'œuvre est rassemblée sous le titre unique de « Poesía vertical ». Seul varie le numéro d’ordre, de recueil à recueil : Segunda, Tercera, Cuarta… Poesía Vertical. Nul titre non plus à aucun des poèmes qui composent chaque recueil. Par ce titre unique et chargé de sens de « Poésie Verticale » qu'il a donnée à toute son œuvre depuis son premier livre, Roberto Juarroz a cherché à traduire la verticalité de la transcendance, « bien entendu incodifiable », précise-t-il dans un entretien. Sa poésie est une poésie différente, un langage de débuts et de fins, mais en chaque moment, en chaque chose. La verticalité s'exprime vers le bas et vers le haut, chaque poème se convertissant en une présence qui représente ce double mouvement, cette polarité qui définit la parole de l'homme lorsque cette parole ne se situe pas dans des limites conventionnelles. Juarroz, en choisissant de donner ce titre unique à chacun de ses recueils, et en ne donnant pas de titre à ses poèmes, a voulu d'une certaine façon tendre vers l’anonymat des couplets ou des refrains populaires que l’on répète sans en connaître l’auteur, depuis longtemps disparu et oublié. Il explique qu'il a fait ce choix, parce que, selon lui « chaque titre, surtout en poésie, est une espèce d’interruption, un motif de distraction qui n’a pas de vraie nécessité. Sans titre, le recueil s’ouvre directement sur les poèmes, un peu comme ces tableaux dont l’absence de titre vous épargne les détours de l’interprétation ». Dans l'un de ses derniers recueils, Treizième poésie verticale, publié en 1993, Roberto Juarroz forme le vœu de parvenir à « dessiner les pensées comme une branche se dessine sur le ciel ».

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Poésies

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    Roberto Juarroz

    @robertoJuarroz

    Chaque texte, chaque mot change Chaque texte, chaque mot change selon les heures et les angles du jour et de la nuit, selon la transparence des yeux qui les lisent ou le niveau des marées de la mort. Ton nom n’est pas le même, ma parole n’est pas la même avant et après la rencontre avant et après avoir repensé que demain nous ne serons plus. Toute chose est différente regardée de jour ou de nuit, mais ils deviennent plus différents encore les mots qu’écrivent les hommes et les mots que n’écrivent pas les dieux. Et il n’y a aucune heure, ni la plus prometteuse, la plus lucide, la plus impartiale, ni même l’heure sans quartiers de la mort, qui puisse équilibrer les reflets, ajuster les distances et faire dire aux mêmes mots les mêmes choses. Chaque texte, chaque forme, qu’on le veuille ou non, est le miroir changeant, chatoyant, de la furtive ambiguïté de la vie. Rien n’a une seule forme pour toujours. Même l’éternité n’est pas pour toujours.

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    Roberto Juarroz

    @robertoJuarroz

    Nous n’avons pas de langage pour les fins Nous n’avons pas de langage pour les fins, pour la chute de l’amour, pour les labyrinthes compacts de l’agonie, pour le scandale bâillonné des enlisements irrévocables. Comment dire à celui qui nous abandonne ou que nous abandonnons qu’ajouter encore une absence à l’absence c’est noyer tous les noms et dresser un mur autour de chaque image? Comment faire des signes à qui meurt, quand tous les gestes se sont figés, quand les distances se brouillent en un chaos imprévu, que les proximités s’écroulent comme des oiseaux malades et que la tige de la douleur se brise comme la navette d’un métier disloqué? Ou comment se parler tout seul quand rien, quand personne ne parle plus, quand les étoiles et les visages sont neutres sécrétions d’un monde qui a perdu le souvenir d’être monde? Peut-être un langage pour les fins exige-t-il l’abolition totale des autres langages, la synthèse imperturbable de la terre brûlée. A moins de créer un langage d’interstices, capable de resserrer les moindres espaces imbriqués entre le silence et la parole et les particules inconnues sans désir, qui seulement là promulguent l’équivalence ultime de l’abandon et de la rencontre.

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    Roberto Juarroz

    @robertoJuarroz

    Toujours au bord Toujours au bord. Mais au bord de quoi? Nous savons seulement que quelque chose tombe de l’autre côté de ce bord et qu’une fois parvenu à sa limite il n’est plus possible de reculer. Vertige devant un pressentiment et devant un soupçon : lorsqu’on arrive à ce bord cela aussi qui fut auparavant devient abîme. Hypnotisés sur une arête qui a perdu les surfaces qui l’avaient formée et resta en suspens dans l’air. Acrobates sur un bord nu, équilibristes sur le vide, dans un cirque sans autre chapiteau que le ciel et dont les spectateurs sont partis.

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