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Amitié

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Amitié

Poésies de la collection amitié

    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A M. A. T. Ainsi, mon cher ami, vous allez donc partir ! Adieu ; laissez les sots blâmer votre folie. Quel que soit le chemin, quel que soit l'avenir, Le seul guide en ce monde est la main d'une amie. Vous me laissez pourtant bien seul, moi qui m'ennuie. Mais qu'importe ? L'espoir de vous voir revenir Me donnera, malgré les dégoûts de la vie, Ce courage d'enfant qui consiste à vieillir. Quelquefois seulement, près de votre maîtresse, Souvenez-vous d'un cœur qui prouva sa noblesse Mieux que l'épervier d'or dont mon casque est armé ; Qui vous a tout de suite et librement aimé, Dans la force et la fleur de la belle jeunesse, Et qui dort maintenant à tout jamais fermé.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A M. V. H. Il faut, dans ce bas monde, aimer beaucoup de choses, Pour savoir, après tout, ce qu'on aime le mieux, Les bonbons, l'Océan, le jeu, l'azur des cieux, Les femmes, les chevaux, les lauriers et les roses. Il faut fouler aux pieds des fleurs à peine écloses ; Il faut beaucoup pleurer, dire beaucoup d'adieux. Puis le cœur s'aperçoit qu'il est devenu vieux, Et l'effet qui s'en va nous découvre les causes. De ces biens passagers que l'on goûte à demi, Le meilleur qui nous reste est un ancien ami. On se brouille, on se fuit. Qu'un hasard nous rassemble, On s'approche, on sourit, la main touche la main, Et nous nous souvenons que nous marchions ensemble, Que l'âme est immortelle, et qu'hier c'est demain.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    À mon ami Alfred T Dans mes jours de malheur, Alfred, seul entre mille, Tu m'es resté fidèle où tant d'autres m'ont fui. Le bonheur m'a prêté plus d'un lien fragile ; Mais c'est l'adversité qui m'a fait un ami. C'est ainsi que les fleurs sur les coteaux fertiles Etalent au soleil leur vulgaire trésor ; Mais c'est au sein des nuits, sous des rochers stériles, Que fouille le mineur qui cherche un rayon d'or. C'est ainsi que les mers calmes et sans orages Peuvent d'un flot d'azur bercer le voyageur ; Mais c'est le vent du nord, c'est le vent des naufrages Qui jette sur la rive une perle au pêcheur. Maintenant Dieu me garde ! Où vais-je ? Eh ! que m'importe ? Quels que soient mes destins, je dis comme Byron : "L'Océan peut gronder, il faudra qu'il me porte." Si mon coursier s'abat, j'y mettrai l'éperon. Mais du moins j'aurai pu, frère, quoi qu'il m'arrive, De mon cachet de deuil sceller notre amitié, Et, que demain je meure ou que demain je vive, Pendant que mon coeur bat, t'en donner la moitié.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    À Alfred Tattet Qu'il est doux d'être au monde, et quel bien que la vie ! Tu le disais ce soir par un beau jour d'été. Tu le disais, ami, dans un site enchanté, Sur le plus vert coteau de ta forêt chérie. Nos chevaux, au soleil, foulaient l'herbe fleurie : Et moi, silencieux, courant à ton côté, Je laissais au hasard flotter ma rêverie ; Mais dans le fond du cœur je me suis répété : Oui, la vie est un bien, la joie est une ivresse ; Il est doux d'en user sans crainte et sans soucis ; Il est doux de fêter les dieux de la jeunesse, De couronner de fleurs son verre et sa maîtresse, D'avoir vécu trente ans comme Dieu l'a permis, Et, si jeunes encor, d'être de vieux amis. Bury, le 10 août 1838.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    À Madame A. T Qu'un jeune amour plein de mystère Pardonne à la vieille amitié D'avoir troublé son sanctuaire. D'une belle âme qui m'est chère Si j'ai jamais eu la moitié, Je vous la lègue tout entière.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    À Madame D*** Ne me parlez jamais d'une vieille amitié, Dans vos cheveux dorés quand le printemps se joue Lui, qui vous a laissé — lui, si vite oublié ! — Sa fraîcheur dans l'esprit et sa fleur sur la joue !

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A mon ami Edouard B. Tu te frappais le front en lisant Lamartine, Edouard, tu pâlissais comme un joueur maudit ; Le frisson te prenait, et la foudre divine, Tombant dans ta poitrine, T’épouvantait toi-même en traversant ta nuit. Ah ! frappe-toi le coeur, c’est là qu’est le génie. C’est là qu’est la pitié, la souffrance et l’amour ; C’est là qu’est le rocher du désert de la vie, D’où les flots d’harmonie, Quand Moïse viendra, jailliront quelque jour. Peut-être à ton insu déjà bouillonnent-elles, Ces laves du volcan, dans les pleurs de tes yeux. Tu partiras bientôt avec les hirondelles, Toi qui te sens des ailes Lorsque tu vois passer un oiseau dans les cieux.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    À mon Frère, revenant d'Italie Ainsi, mon cher, tu t'en reviens Du pays dont je me souviens Comme d'un rêve, De ces beaux lieux où l'oranger Naquit pour nous dédommager Du péché d'Ève. Tu l'as vu, ce ciel enchanté Qui montre avec tant de clarté Le grand mystère ; Si pur, qu'un soupir monte à Dieu Plus librement qu'en aucun lieu Qui soit sur terre. Tu les as vus, les vieux manoirs De cette ville aux palais noirs Qui fut Florence, Plus ennuyeuse que Milan Où, du moins, quatre ou cinq fois l'an, Cerrito danse. Tu l'as vue, assise dans l'eau, Portant gaiement son mezzaro, La belle Gênes, Le visage peint, l'oeil brillant, Qui babille et joue en riant Avec ses chaînes.

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    Alfred De Musset

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    @alfredDeMusset

    Souvenir J’espérais bien pleurer, mais je croyais souffrir En osant te revoir, place à jamais sacrée, O la plus chère tombe et la plus ignorée Où dorme un souvenir ! Que redoutiez-vous donc de cette solitude, Et pourquoi, mes amis, me preniez-vous la main, Alors qu’une si douce et si vieille habitude Me montrait ce chemin ? Les voilà, ces coteaux, ces bruyères fleuries, Et ces pas argentins sur le sable muet, Ces sentiers amoureux, remplis de causeries, Où son bras m’enlaçait. Les voilà, ces sapins à la sombre verdure, Cette gorge profonde aux nonchalants détours, Ces sauvages amis, dont l’antique murmure A bercé mes beaux jours. Les voilà, ces buissons où toute ma jeunesse, Comme un essaim d’oiseaux, chante au bruit de mes pas. Lieux charmants, beau désert où passa ma maîtresse, Ne m’attendiez-vous pas ? Ah ! laissez-les couler, elles me sont bien chères, Ces larmes que soulève un coeur encor blessé ! Ne les essuyez pas, laissez sur mes paupières Ce voile du passé ! Je ne viens point jeter un regret inutile Dans l’écho de ces bois témoins de mon bonheur. Fière est cette forêt dans sa beauté tranquille, Et fier aussi mon coeur. Que celui-là se livre à des plaintes amères, Qui s’agenouille et prie au tombeau d’un ami. Tout respire en ces lieux ; les fleurs des cimetières Ne poussent point ici. Voyez ! la lune monte à travers ces ombrages. Ton regard tremble encor, belle reine des nuits ; Mais du sombre horizon déjà tu te dégages, Et tu t’épanouis. Ainsi de cette terre, humide encor de pluie, Sortent, sous tes rayons, tous les parfums du jour : Aussi calme, aussi pur, de mon âme attendrie Sort mon ancien amour. Que sont-ils devenus, les chagrins de ma vie ? Tout ce qui m’a fait vieux est bien loin maintenant ; Et rien qu’en regardant cette vallée amie Je redeviens enfant. O puissance du temps ! ô légères années ! Vous emportez nos pleurs, nos cris et nos regrets ; Mais la pitié vous prend, et sur nos fleurs fanées Vous ne marchez jamais. Tout mon coeur te bénit, bonté consolatrice ! Je n’aurais jamais cru que l’on pût tant souffrir D’une telle blessure, et que sa cicatrice Fût si douce à sentir. Loin de moi les vains mots, les frivoles pensées, Des vulgaires douleurs linceul accoutumé, Que viennent étaler sur leurs amours passées Ceux qui n’ont point aimé ! Dante, pourquoi dis-tu qu’il n’est pire misère Qu’un souvenir heureux dans les jours de douleur ? Quel chagrin t’a dicté cette parole amère, Cette offense au malheur ? En est-il donc moins vrai que la lumière existe, Et faut-il l’oublier du moment qu’il fait nuit ? Est-ce bien toi, grande âme immortellement triste, Est-ce toi qui l’as dit ? Non, par ce pur flambeau dont la splendeur m’éclaire, Ce blasphème vanté ne vient pas de ton coeur. Un souvenir heureux est peut-être sur terre Plus vrai que le bonheur. Eh quoi ! l’infortuné qui trouve une étincelle Dans la cendre brûlante où dorment ses ennuis, Qui saisit cette flamme et qui fixe sur elle Ses regards éblouis ; Dans ce passé perdu quand son âme se noie, Sur ce miroir brisé lorsqu’il rêve en pleurant, Tu lui dis qu’il se trompe, et que sa faible joie N’est qu’un affreux tourment ! Et c’est à ta Françoise, à ton ange de gloire, Que tu pouvais donner ces mots à prononcer, Elle qui s’interrompt, pour conter son histoire, D’un éternel baiser ! Qu’est-ce donc, juste Dieu, que la pensée humaine, Et qui pourra jamais aimer la vérité, S’il n’est joie ou douleur si juste et si certaine Dont quelqu’un n’ait douté ? Comment vivez-vous donc, étranges créatures ? Vous riez, vous chantez, vous marchez à grands pas ; Le ciel et sa beauté, le monde et ses souillures Ne vous dérangent pas ; Mais, lorsque par hasard le destin vous ramène Vers quelque monument d’un amour oublié, Ce caillou vous arrête, et cela vous fait peine Qu’il vous heurte le pied. Et vous criez alors que la vie est un songe ; Vous vous tordez les bras comme en vous réveillant, Et vous trouvez fâcheux qu’un si joyeux mensonge Ne dure qu’un instant. Malheureux ! cet instant où votre âme engourdie A secoué les fers qu’elle traîne ici-bas, Ce fugitif instant fut toute votre vie ; Ne le regrettez pas ! Regrettez la torpeur qui vous cloue à la terre, Vos agitations dans la fange et le sang, Vos nuits sans espérance et vos jours sans lumière : C’est là qu’est le néant ! Mais que vous revient-il de vos froides doctrines ? Que demandent au ciel ces regrets inconstants Que vous allez semant sur vos propres ruines, A chaque pas du Temps ? Oui, sans doute, tout meurt ; ce monde est un grand rêve, Et le peu de bonheur qui nous vient en chemin, Nous n’avons pas plus tôt ce roseau dans la main, Que le vent nous l’enlève. Oui, les premiers baisers, oui, les premiers serments Que deux êtres mortels échangèrent sur terre, Ce fut au pied d’un arbre effeuillé par les vents, Sur un roc en poussière. Ils prirent à témoin de leur joie éphémère Un ciel toujours voilé qui change à tout moment, Et des astres sans nom que leur propre lumière Dévore incessamment. Tout mourait autour d’eux, l’oiseau dans le feuillage, La fleur entre leurs mains, l’insecte sous leurs pieds, La source desséchée où vacillait l’image De leurs traits oubliés ; Et sur tous ces débris joignant leurs mains d’argile, Etourdis des éclairs d’un instant de plaisir, Ils croyaient échapper à cet être immobile Qui regarde mourir ! Insensés ! dit le sage. Heureux dit le poète. Et quels tristes amours as-tu donc dans le coeur, Si le bruit du torrent te trouble et t’inquiète, Si le vent te fait peur? J’ai vu sous le soleil tomber bien d’autres choses Que les feuilles des bois et l’écume des eaux, Bien d’autres s’en aller que le parfum des roses Et le chant des oiseaux. Mes yeux ont contemplé des objets plus funèbres Que Juliette morte au fond de son tombeau, Plus affreux que le toast à l’ange des ténèbres Porté par Roméo. J’ai vu ma seule amie, à jamais la plus chère, Devenue elle-même un sépulcre blanchi, Une tombe vivante où flottait la poussière De notre mort chéri, De notre pauvre amour, que, dans la nuit profonde, Nous avions sur nos coeurs si doucement bercé ! C’était plus qu’une vie, hélas ! c’était un monde Qui s’était effacé ! Oui, jeune et belle encor, plus belle, osait-on dire, Je l’ai vue, et ses yeux brillaient comme autrefois. Ses lèvres s’entr’ouvraient, et c’était un sourire, Et c’était une voix ; Mais non plus cette voix, non plus ce doux langage, Ces regards adorés dans les miens confondus ; Mon coeur, encor plein d’elle, errait sur son visage, Et ne la trouvait plus. Et pourtant j’aurais pu marcher alors vers elle, Entourer de mes bras ce sein vide et glacé, Et j’aurais pu crier :  » Qu’as-tu fait, infidèle, Qu’as-tu fait du passé?  » Mais non : il me semblait qu’une femme inconnue Avait pris par hasard cette voix et ces yeux ; Et je laissai passer cette froide statue En regardant les cieux. Eh bien ! ce fut sans doute une horrible misère Que ce riant adieu d’un être inanimé. Eh bien ! qu’importe encore ? O nature! ô ma mère ! En ai-je moins aimé? La foudre maintenant peut tomber sur ma tête : Jamais ce souvenir ne peut m’être arraché ! Comme le matelot brisé par la tempête, Je m’y tiens attaché. Je ne veux rien savoir, ni si les champs fleurissent; Ni ce qu’il adviendra du simulacre humain, Ni si ces vastes cieux éclaireront demain Ce qu’ils ensevelissent. Je me dis seulement :  » À cette heure, en ce lieu, Un jour, je fus aimé, j’aimais, elle était belle.  » J’enfouis ce trésor dans mon âme immortelle, Et je l’emporte à Dieu !

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    Alphonse de Lamartine

    Alphonse de Lamartine

    @alphonseDeLamartine

    Amitié de femme À Madame L. sur son album. Amitié, doux repos de l'âme, Crépuscule charmant des cœurs, Pourquoi dans les yeux d'une femme As-tu de plus tendres langueurs ? Ta nature est pourtant la même ! Dans le cœur dont elle a fait don Ce n'est plus la femme qu'on aime, Et l'amour a perdu son nom. Mais comme en une pure glace Le crayon se colore mieux, Le sentiment qui le remplace Est plus visible en deux beaux yeux. Dans un timbre argentin de femme Il a de plus tendres accents : La chaste volupté de l'âme Devient presque un plaisir des sens. De l'homme la mâle tendresse Est le soutien d'un bras nerveux, Mais la vôtre est une caresse Qui frissonne dans les cheveux. Oh ! laissez-moi, vous que j'adore Des noms les plus doux tour à tour, O femmes, me tromper encore Aux ressemblances de l'amour ! Douce ou grave, tendre ou sévère, L'amitié fut mon premier bien : Quelque soit la main qui me serre, C'est un cœur qui répond au mien. Non, jamais ma main ne repousse Ce symbole d'un sentiment ; Mais lorsque la main est plus douce, Je la serre plus tendrement.

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    Ami parmi tous les amis Ami parmi tous les amis, De quoi voudrions-nous nous plaindre ? Aucun destin n'est compromis Si l'amitié n'a pu s'éteindre. Tu penses que seuls les amants, Par la hâte et par les délices, Ignorent le dolent supplice De l'immense désœuvrement ;

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    Ô suave ami périssable Ô suave ami périssable, Tu ne pourras laisser de traces Que le temps mobile n'efface Comme fait le vent sur les sables ! Tes doux jeux, charmants, éphémères, Sont faits d'écume et d'âme amère. Et cependant, quoi que tu fasses, Il restera que je t'aimais, Que j'ai dit ta grâce à l'espace, Et penché sur tes yeux ma face Où le soleil se résumait  !

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    A

    Antoine de Latour

    @antoineDeLatour

    L'amitié Oh ! le charmant tableau, la suave peinture Que celle où vers saint Jean, Jésus, le Dieu martyr, Tend ses deux petits bras ! à cette image pure Les mères dans leurs yeux sentent des pleurs venir. C'est là de l'amitié la divine figure : Deux enfants dont les mains se cherchent pour s'unir, Et si prompts à s'aimer que leur double nature Semble se reconnaître et se ressouvenir. Quand l'amour pour régner n'a que l'heure qui passe, L'amitié seule dure, et pare de sa grâce Sur un front dépouillé les rides du vieillard ; L'amour n'est ici-bas que son ombre infidèle, Mais plus d'un pauvre cœur désabusé trop tard S'y laisse prendre, hélas ! tant l'ombre est encore belle.

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    Antoine-Vincent Arnault

    Antoine-Vincent Arnault

    @antoineVincentArnault

    Ami de la tranquillité À Mademoiselle Contat. Vos doigts de rose ont déchiré Le crêpe étendu sur ma vie ; Par vous, belle et sensible amie, De mes fers je suis délivré. Je ne suis plus seul sur la terre ; Je redeviens, par vos bienfaits, Fils, époux, citoyen et père, Ami, frère, et surtout Français. Me savaient-ils cette existence, Ceux qui m'avaient calomnié ? Riche et fier de votre amitié, Pouvais-je abandonner la France ? Ami de la tranquillité, Je ne suis ni guerrier ni prêtre. J'ai fait quelques héros peut-être ; Mais je ne l'ai jamais été. C'est depuis qu'elle m'est ravie Que j'estime la liberté : Elle ressemble à la santé, Que le seul malade apprécie. Mille fois heureux qui par vous Recouvre ce bien que j'adore ; Mille fois plus heureux encore Qui peut le perdre à vos genoux ! À Dunkerque, le 9 décembre 1792

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    Antoine-Vincent Arnault

    Antoine-Vincent Arnault

    @antoineVincentArnault

    L'huître et le marsouin Enfin j'ai trouvé le repos ! » Disait une huître de Marène. « Fidèle au nœud qui nous enchaîne, Ce roc me défendra des flots : Nous ne faisons qu'un ; je défie Au trident de nous séparer ; Je défie au temps d'altérer La tendre amitié qui nous lie. » « — L'amitié, repart un marsouin, De sa nature est peu constante, Quand le besoin qui la cimente N'est pas un mutuel besoin. À maint courtisan qui s'accroche Après maint puissant, c'est pourquoi Je dis : — Crains le flot qui s'approche ; Bien que tu tiennes à la roche, La roche ne tient pas à toi. »

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    Antoine-Vincent Arnault

    Antoine-Vincent Arnault

    @antoineVincentArnault

    Le cachet Sur la cire brûlante imprimons une image ; Elle s'y fixera d'autant plus fortement Que le cachet si mou dans le premier moment En se refroidissant se durcit davantage. Leçon pour nous : par un outrage Avons-nous blessé notre ami, Et du mal dont il a gémi Voulons-nous effacer jusqu'à la cicatrice ; Qu'au plus tôt il soit réparé, Avant qu'en son cœur ulcéré L'amitié se refroidisse.

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    Antoine-Vincent Arnault

    Antoine-Vincent Arnault

    @antoineVincentArnault

    Les amis à deux pieds « Je préfère un bon cœur à tout l'esprit du monde, Et d'amis à deux pieds je me passe fort bien, » Disait certain monsieur qui vit avec son chien Dans une retraite profonde. « Je n'ai pas d'autre ami que lui, Humains ; et s'il tient aujourd'hui La place qu'en mon cœur longtemps vous occupâtes C'est qu'il ne m'est pas démontré Que l'on ait aussi rencontré L'ingratitude à quatre pattes. »

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    A

    Aristide Bruant

    @aristideBruant

    Fantaisie triste I’ bruinait… L’temps était gris, On n’voyait pus l’ciel… L’atmosphère, Semblant suer au d’ssus d’Paris, Tombait en bué’ su’ la terre. I’ soufflait quéqu’chose… on n’sait d’où, C’était ni du vent ni d’la bise, Ça glissait entre l’col et l’cou Et ça glaçait sous not’ chemise. Nous marchions d’vant nous, dans l’brouillard, On distinguait des gens maussades, Nous, nous suivions un corbillard Emportant l’un d’nos camarades. Bon Dieu ! qu’ça faisait froid dans l’dos ! Et pis c’est qu’on n’allait pas vite ; La moell’ se figeait dans les os, Ça puait l’rhume et la bronchite. Dans l’air y avait pas un moineau, Pas un pinson, pas un’ colombe, Le long des pierr’ i’ coulait d’l’eau, Et ces pierr’s-là… c’était sa tombe. Et je m’disais, pensant à lui Qu’j’avais vu rire au mois d’septembre Bon Dieu ! qu’il aura froid c’tte nuit ! C’est triste d’mourir en décembre. J’ai toujours aimé l’bourguignon, I’ m’sourit chaqu’ fois qu’i’ s’allume ; J’voudrais pas avoir le guignon D’m’en aller par un jour de brume.

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    A

    Auguste Angellier

    @augusteAngellier

    A l'Amie perdue Les caresses des yeux sont les plus adorables ; Elles apportent l'âme aux limites de l'être, Et livrent des secrets autrement ineffables, Dans lesquels seuls le fond du cœur peut apparaître. Les baisers les plus purs sont grossiers auprès d'elle; Leur langage est plus fort que toutes les paroles ; Rien n'exprime que lui les choses immortelles Qui passent par instants dans nos êtres frivoles. Lorsque l'âge a vieilli la bouche et le sourire Dont le pli lentement s'est comblé de tristesse, Elles gardent encore leur limpide tendresse ; Faites pour consoler, enivrer et séduire, Elles ont les douceurs, les ardeurs et les charmes. Et quelle autre caresse a traversé des larmes ?

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    A

    Auguste Lacaussade

    @augusteLacaussade

    Les vieux époux Lorsque nos coeurs ont lié connaissance, John, mon ami, votre front était beau; Vos noirs cheveux, dans leur jeune abondance, Brillaient pareils à l’aile du corbeau. Et maintenant chauve et nud il se penche: Sur nos cheveux les hivers ont passé. Mais béni soit ce front lisse et glacé, John, mon vieil homme, et votre mèche blanche! Gais pèlerins qu’un même toit rassemble, John, mon ami, ma main dans votre main, Par tous les temps, sur la colline, ensemble Nous avons fait, heureux, un dur chemin. Et maintenant que le soleil décline, Il faut descendre à pas tremblants et lourds; Mais nous irons, mon John, et pour toujours, Dormir au pied de la même colline! Imité de Burns.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    À M. Eugène Fromentin Il me dit qu'il était très riche, Mais qu'il craignait le choléra ; — Que de son or il était chiche, Mais qu'il goûtait fort l'Opéra ; — Qu'il raffolait de la nature, Ayant connu monsieur Corot ; — Qu'il n'avait pas encor voiture, Mais que cela viendrait bientôt ; — Qu'il aimait le marbre et la brique, Les bois noirs et les bois dorés ; — Qu'il possédait dans sa fabrique Trois contremaîtres décorés ; — Qu'il avait, sans compter le reste, Vingt mille actions sur le Nord ; Qu'il avait trouvé, pour un zeste, Des encadrements d'Oppenord ; — Qu'il donnerait (fût-ce à Luzarches !) Dans le bric-à-brac jusqu'au cou, Et qu'au Marché des Patriarches Il avait fait plus d'un bon coup ; — Qu'il n'aimait pas beaucoup sa femme, Ni sa mère ; — mais qu'il croyait À l'immortalité de l'âme, Et qu'il avait lu Niboyet ! — Qu'il penchait pour l'amour physique, Et qu'à Rome, séjour d'ennui, Une femme, d'ailleurs phtisique, Etait morte d'amour pour lui. Pendant trois heures et demie, Ce bavard, venu de Tournai, M'a dégoisé toute sa vie ; J'en ai le cerveau consterné. S'il fallait décrire ma peine, Ce serait à n'en plus finir ; Je me disais, domptant ma haine : « Au moins, si je pouvais dormir ! » Comme un qui n'est pas à son aise, Et qui n'ose pas s'en aller, Je frottais de mon cul ma chaise, Rêvant de le faire empaler. Ce monstre se nomme Bastogne ; Il fuyait devant le fléau. Moi, je fuirai jusqu'en Gascogne, Ou j'irai me jeter à l'eau, Si dans ce Paris, qu'il redoute, Quand chacun sera retourné, Je trouve encore sur ma route Ce fléau, natif de Tournai.

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    Charles Cros

    Charles Cros

    @charlesCros

    Berceuse Au comte de Trévelec. Endormons-nous, petit chat noir. Voici que j’ai mis l’éteignoir Sur la chandelle. Tu vas penser à des oiseaux Sous bois, à de félins museaux… Moi rêver d’Elle. Nous n’avons pas pris de café, Et, dans notre lit bien chauffé (Qui veille pleure.) Nous dormirons, pattes dans bras. Pendant que tu ronronneras, J’oublierai l’heure. Sous tes yeux fins, appesantis, Reluiront les oaristys De la gouttière. Comme chaque nuit, je croirai La voir, qui froide a déchiré Ma vie entière. Et ton cauchemar sur les toits Te dira l’horreur d’être trois Dans une idylle. Je subirai les yeux railleurs De son faux cousin, et ses pleurs De crocodile. Si tu t’éveilles en sursaut Griffé, mordu, tombant du haut Du toit, moi-même Je mourrai sous le coup félon D’une épée au bout du bras long Du fat qu’elle aime. Puis, hors du lit, au matin gris, Nous chercherons, toi, des souris Moi, des liquides Qui nous fassent oublier tout, Car, au fond, l’homme et le matou Sont bien stupides.

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    À mon ami Leroux « Ma barque est tout-à-l'heure aux bornes de la vie ; Le ciel devient plus sombre et le flot plus dormant ; Je touche aux bords où vont chercher leur jugement Celui qui marche droit et celui qui dévie. Oh ! quelle ombre ici-bas mon âme a poursuivie ! Elle s'est fait de l'Art un monarque, un amant, Une idole, un veau d'or, un oracle qui ment : Tout est creux et menteur dans ce que l'homme envie. Aux abords du tombeau qui pour nous va s'ouvrir, Ô mon âme craignons de doublement mourir ; Laissons-là ces tableaux qu'un faux brillant anime ; Plus de marbre qui vole en éclats sous mes doigts ! Je ne sais qu'adorer l'adorable victime Qui, pour nous recevoir, a mis les bras en croix. » Ainsi vieux et mourant s'écriait Michel-Ange ; Et son marbre à ses yeux était comme la fange, Et sa peinture immense attachée aux autels, Toute sainte aujourd'hui qu'elle semble aux mortels, Lui semblait un rideau qui cache la lumière ; Détrompé de la gloire, il voulait voir derrière, Et se sentait petit sous l'ombre du tombeau : C'est bien, et ce mépris chez toi, grand homme, est beau ! Tu te trompais pourtant. — Oui, le plaisir s'envole, La passion nous ment, la gloire est une idole, Non pas l'Art ; l'Art sublime, éternel et divin, Luit comme la Vertu ; le reste seul est vain. Avant, ô Michel-Ange ; avant que les années Eussent fait choir si bas tes forces prosternées, Raidi tes bras d'athlète, et voilé d'un brouillard Les couleurs et le jour au fond de ton regard, Dis-nous, que faisais-tu ? Parle haut et rappelle Tant de travaux bénis, et plus d'une chapelle Tout entière bâtie et peinte de tes mains, Et les groupes en marbre, et les cris des Romains Quand, admis et tombant à genoux dans l'enceinte, Ils adoraient de Dieu partout la marque empreinte, Lisaient leur jugement écrit sur les parois, Baisaient les pieds d'un Christ descendu de la croix, Et, priant, et pleurant, et se frappant la tête, Confessaient leurs péchés à la voix du prophète ; Car tu fus un prophète, un archange du ciel, Et ton nom a dit vrai comme pour Raphael. Et Dante aussi, Milton et son aïeul Shakespeare, Rubens, Rembrandt, Mozart, rois chacun d'un empire, Tous ces mortels choisis, qui, dans l'humanité, Réfléchissent le ciel par quelque grand côté, Iront-ils, au moment d'adorer face à face Le soleil éternel devant qui tout s'efface, Appeler feu follet l'astre qui les conduit, Ou l'ardente colonne en marche dans leur nuit ? Moïse, chargé d'ans et prêt à rendre l'âme, Des foudres du Sina renia-t-il la flamme ? Quand de Jérusalem le temple fut ouvert, Qui donc méprisa l'arche et l'autel du désert ? Salomon pénitent, à qui son Dieu révèle Les parvis lumineux d'une Sion nouvelle, Et qui, les yeux remplis de l'immense clarté, Ne voit plus ici-bas qu'ombre et que vanité, Lui qui nomme en pitié chaque chose frivole, Appelle-t-il jamais le vrai temple une idole ? Oh ! non pas, Salomon ; l'idole est dans le cœur ; L'idole est d'aimer trop la vigne et sa liqueur, D'aimer trop les baisers des jeunes Sulamites ; L'idole est de bâtir au Dieu des Édomites, De croire en son orgueil, de couronner ses sens, D'irriter, tout le jour, ses désirs renaissants, D'assoupir de parfums son âme qu'on immole ; Mais bâtir au Seigneur, ce n'est pas là l'idole. Le Seigneur qui, jaloux de l'œuvre de ses mains, Pour animer le monde y créa les humains, Parmi ces nations, dans ces tribus sans nombre, Sur qui passent les ans mêlés de jour et d'ombre, À des temps inégaux suscite par endroits Quelques rares mortels, grands, plus grands que les rois ; Avec un sceau brillant sur leurs têtes sublimes, Comme il fît au désert les hauts lieux et les cimes. Mais les hauts lieux, les monts que chérit le soleil, Qu'il abandonne tard et retrouve au réveil, Connaissent, chaque nuit, des heures de ténèbres, Et l'horreur se déchaîne en leurs antres funèbres, Tandis que sur ces fronts hauts comme des sommets, Le mystique Soleil ne se couche jamais. Sans doute, dans la vie, à travers le voyage, Il s'y pose souvent plus d'un triste nuage, Mais le Soleil divin tâche de l'écarter, Et le dore, ou le perce, ou le fait éclater. Ces mortels ont des nuits brillantes et sans voiles ; Ils comprennent les flots, entendent les étoiles, Savent les noms des fleurs, et pour eux l'univers N'est qu'une seule idée en symboles divers. Et comme en mille jets la matière lancée Exprime aux yeux humains l'éternelle pensée, Eux aussi, pleins du Dieu qu'on ne peut enfermer, En des œuvres d'amour cherchent à l'exprimer. L'un a la harpe, et l'orgue et l'austère harmonie ; L'autre en pleurs, comme un cygne, exhale son génie, Ou l'épanché en couleurs ; ou suspend dans les cieux Et fait monter le marbre en hymne glorieux. Tous, ouvriers divins, sous l'œil qui les contemple, Bâtissent du Très-Haut et décorent le temple. Quelques-uns seulement, et les moindres d'entre eux, Grands encor, mais marqués d'un signe moins heureux, S'épuisent à vouloir, et l'ingrate matière En leurs mains répond mal à leur pensée entière ; Car bien tard dans le jour le Seigneur leur parla ; Leur feu couva longtemps ; — et je suis de ceux-là. D'abord j'errais aveugle, et cette œuvre du monde Me cachait les secrets de son âme profonde ; Je n'y voyais que sons, couleurs, formes, chaos, Parure bigarrée et parfois noirs fléaux ; Et, comme un nain chétif, en mon orgueil risible, Je me plaisais à dire : où donc est l'invisible ? Mais, quand des grands mortels par degrés j'approchai, Je me sentis de honte et de respect touché ; Je contemplai leur front sous sa blanche auréole, Je lus dans leur regard, j'écoutai leur parole ; Et comme je les vis mêler à leurs discours Dieux, l'âme et l'invisible, et se montrer toujours L'arbre mystérieux au pacifique ombrage, Qui, par-delà les mers, couvre l'autre rivage, — Tel qu'un enfant, au pied d'une haie ou d'un mur, Entendant des passants vanter un figuier mûr, Une rose, un oiseau qu'on aperçoit derrière, Se parler de bosquets, de jets-d'eau, de volière, Et de cygnes nageant en un plein réservoir, — Je leur dis : Prenez-moi dans vos bras, je veux voir. J'ai vu, Seigneur, j'ai cru ; j'adore tes merveilles, J'en éblouis mes yeux, j'en emplis mes oreilles, Et, par moments, j'essaie à mes sourds compagnons, À ceux qui n'ont pas vu, de bégayer tes noms. Paix à l'artiste saint, puissant, infatigable, Qui, lorsqu'il touche au terme et que l'âge l'accable, Au bord de son tombeau s'asseyant pour mourir Et cherchant le chemin qu'il vient de parcourir, Y voit d'un art pieux briller la trace heureuse, Compte de monuments une suite nombreuse, Et se rend témoignage, à la porte du ciel, Que sur chaque degré sa main mit un autel ! Il n'a plus à monter ; il passe sans obstacle Du parvis et du seuil au premier tabernacle ; Un Séraphin ailé par la main le conduit ; Tout embaume alentour, et frémit, et reluit ; Aux lambris, aux plafonds qu'un jour céleste éclaire, Il reconnaît de l'Art l'immuable exemplaire ; Il rentre, on le reçoit comme un frère exilé ; — C'est ton lot, Michel-Ange, et Dieu t'a consolé ! Septembre 1829.

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    À mon ami Ulric Guttinguer Depuis que de mon Dieu la bonté paternelle Baigna mon cœur enfant de tendresse et de pleurs, Alluma le désir au fond de ma prunelle, Et me ceignit le front de pudiques couleurs ; Et qu'il me dit d'aller vers les filles des hommes Comme une mère envoie un enfant dans un pré Ou dans un verger mûr, et des fleurs ou des pommes Lui permet de cueillir la plus belle à son gré ; Bien souvent depuis lors, inconstant et peu sage. En ce doux paradis j'égarais mes amours ; À chaque fruit charmant qui tremblait au passage, Tenté de le cueillir, je retardais toujours. Puis, j'en voyais un autre et je perdais mémoire : C'étaient des seins dorés et plus blonds qu'un miel pur ; D'un front pâli j'aimais la chevelure noire ; Des yeux bleus m'ont séduit à leur paisible azur. J'ai, changeant tour-à-tour de faiblesse et de flamme, Suivi bien des regards, adoré bien des pas, Et plus d'un soir, rentrant, le désespoir dans l'âme, Un coup-d'œil m'atteignit que je ne cherchais pas. Caprices ! vœux légers ! Lucile, Natalie, Toi qui mourus, Emma, fantômes chers et doux. Et d'autres que je sais et beaucoup que j'oublie, Que de fois pour toujours je me crus tout à vous ! Mais comme un Ilot nouveau chasse le flot sonore, Comme passent des voix dans un air embaumé, Comme l'aube blanchit et meurt à chaque aurore. Ainsi rien ne durait... et je n'ai point aimé. Non jamais, non l'amour, l'amour vrai, sans mensonge. Ses purs ravissements en un cœur ingénu, Et l'unique pensée où sa vertu nous plonge, Et le choix éternel.... je ne l'ai pas connu ! Et si, trouvant en moi cet ennui que j'évite, Retombé dans le vide et las des longs loisirs, Pour dévorer mes jours et les tarir plus vite, J'ai rabaissé mon âme aux faciles plaisirs ; Si, touché des cris sourds de la chair qui murmure. Sans attendre, ô mon Dieu, le fruit vermeil et frais, J'ai mordu dans la cendre et dans la pourriture, Comme un enfant glouton, pour m'assoupir après ; Pardonne à mon délire, à l'affreuse pensée D'une mort sans réveil et d'une nuit sans jour, À mon vœu de m'éteindre en ma joie insensée ; Pardonne. — Tout cela, ce n'était pas l'amour. Mais, depuis quelques soirs et vers l'heure où l'on rêve, Je rencontre en chemin une blanche beauté ; Elle est là quand je passe, et son front se relève, Et son œil sur le mien semble s'être arrêté. Comme un jeune Asphodèle, au bord d'une eau féconde, Elle penche à la brise et livre ses parfums ; Sa main, comme un beau lys, joue à sa tête blonde ; Sa prunelle rayonne à travers des cils bruns. Comme sur un gazon, sur sa tempe bleuâtre Les flots de ses cheveux sont légers à couler ; Dans le vase, à travers la pâleur de l'albâtre, On voit trembler la lampe et l'âme étinceler. Souvent en vous parlant, quelque rêveuse image Tout-à-coup sur son front et dans ses yeux voilés Passe, plus prompte à fuir qu'une ombre de nuage, Qui par un jour serein court aux cimes des blés. Ses beaux pieds transparents, nés pour fouler la rose, Plus blancs que le satin qui les vient enfermer, Plus doux que la senteur dont elle les arrose, Je les ai vus.... Mon Dieu, fais que je puisse aimer ! Aimer, c'est croire en toi, c'est prier avec larmes Pour l'angélique fleur éclose en notre nuit, C'est veiller quand tout dort et respirer ses charmes, Et chérir sur son front ta grâce qui reluit ; C'est, quand autour de nous le genre humain en troupe S'agite éperdument pour le plaisir amer. Et sue, et boit ses pleurs dans le vin de sa coupe. Et se rue à la mort comme un fleuve à la mer, C'est trouver en soi seul ces mystiques fontaines, Ces torrents de bonheur qu'a chantés un saint Roi ; C'est passer du désert aux régions certaines, Tout entiers l'un à l'autre, et tous les deux dans toi : C'est être chaste et sobre, et doux avec courage ; C'est ne maudire rien quand ta main a béni ; C'est croire au ciel serein, à l'éclair dans l'orage ; C'est vouloir qu'ici bas tout ne soit pas fini ; C'est, lorsqu'au froid du soir, aux approches de l'ombre, Le couple voyageur s'est assis pour gémir, Et que la mort sortant, comme un hôtelier sombre, Au plus lassé des deux a crié de dormir ; C'est, pour l'inconsolé qui poursuit solitaire, Être mort et dormir dans le même tombeau ; Plus que jamais c'est vivre au-delà de la terre, C'est voir en songe un ange avec un saint flambeau. Juillet 1819.

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    À mon ami Émile Deschamps Voici quatre-vingts ans, — plus ou moins, — qu'un curé, On plutôt un vicaire, au comté de Surrey Vivait, chétif et pauvre, et père de famille ; C'était un de ces cœurs dont l'excellence brille Sur le front, dans les yeux, dans le geste et la voix ; Gibbon nous dit qu'il l'eut pour maître dix-huit mois, Et qu'il garda toujours souvenir du digne homme. Or le révérend John Kirkby, comme il le nomme, À son élève enfant a souvent raconté Qu'ayant vécu d'abord, dans un autre comté, — Le Cumberland, je crois, — en été, solitaire, Volontiers il allait, loin de son presbytère, Rêver sur une plage où la mer mugissait ; Et que là, sans témoins, simple il se délassait À contempler les flots, le ciel et la verdure ; À s'enivrer longtemps de l'éternel murmure ; Et quand il avait bien tout vu, tout admiré, À chercher à ses pieds sur le sable doré, Pour rapporter joyeux, de retour au village, À ses enfants chéris maint brillant coquillage. Un jour surtout, un jour qu'en ce beau lieu rêvant, Assis sur un rocher, le pauvre desservant Voyait sous lui la mer, comme un coursier qui fume, S'abattre et se dresser, toute blanche d'écume ; En son âme bientôt par un secret accord, Et soit qu'il se sentît faible et seul sur ce bord, Suspendu sur l'abîme ; ou soit que dans cette onde Il crût voir le tableau de la vie en ce monde ; Soit que ce bruit excite à tristement penser ; — En son âme il se mit, hélas ! à repasser Les chagrins et les maux de son humble misère ; Qu'à peine sa famille avait le nécessaire ; Que la rente, et la dîme, et les meilleurs profits Allaient au vieux Recteur, qui n'avait point de fils ; Que, lui, courait, prêchait dans tout le voisinage, Et ne gagnait que juste à nourrir son ménage ; Et pensant de la sorte, au bord de cette mer, Ses pleurs amèrement tombaient au flot amer. Ce fut très peu de temps après cette journée, Que, s'efforçant de fuir la misère obstinée, Il quitta sa paroisse et son comté natal, Et vint en Surreyshire, où le sort moins fatal Le soulagea d'abord du plus lourd de sa chaîne Et lui fit quelque aisance après si dure gêne. Dans la maison Gibbon logé, soir et matin Il disait la prière, enseignait le latin Au fils ; puis, le dimanche et les grands jours qu'on chaume, II prêchait à l'église et chantait haut le psaume. Une fois, par malheur (car il manque au portrait De dire que notre homme était un peu distrait, Distrait comme Abraham Adams ou Primerose), Un jour donc, à l'église, il n'omit autre chose Que de prier tout haut pour Georges II, le Roi ! Les temps étaient douteux ; chacun tremblait pour soi ; Kirkby fut chassé vite, et plaint, selon l'usage. Ce qu'il devint, lui veuf, quatre enfants en bas âge, Et suspect, je l'ignore, et Gibbon n'en dit rien. Il quitta le pays ; mais ce que je sais bien, C'est que, dût son destin rester dur et sévère, Toujours il demeura bon chrétien, tendre père, Soumis à son devoir, esclave de l'honneur, Et qu'il mourut béni, bénissant le Seigneur. Et maintenant pourquoi réveiller la mémoire De cet homme, et tirer de l'oubli cette histoire ? Pourquoi ? dans quel dessein ? surtout en ce moment Où la France, poussant un long gémissement, Et retombée en proie aux factions parjures, Assemble ses enfants autour de ses blessures ? Que nous fait aujourd'hui ce défunt d'autrefois ? Des pleurs bons à verser sous l'ombrage des bois, En suivant à loisir sa chère rêverie, Se peuvent-ils mêler aux pleurs de la patrie ? Pourtant, depuis huit jours, ce vicaire inconnu M'est, sans cesse et partout, à l'âme revenu : Tant nous tient le caprice, et tant la fantaisie Est souveraine aux cœurs épris de poésie ! — Et d'ailleurs ce vicaire, homme simple et pieux, Qui passa dans le monde à pas silencieux Et souffrit en des temps si semblables aux nôtres, Ne vaut-il pas qu'on pense à lui, plus que bien d'autres ? Oh ! que si tous nos chefs, à leur tête le Roi, Les élus du pays, les gardiens de la loi, Nos généraux fameux et blanchis à la guerre, Nos prélats, — enfin tous, — pareils à ce vicaire, Et chacun dans le poste où Dieu le fit asseoir, En droiture de cœur remplissaient leur devoir, Oh ! qu'on ne verrait plus la France désarmée Remettre en jeu bonheur, puissance et renommée, Et, saignante, vouloir et ne pouvoir guérir, Et l'abîme d'hier chaque jour se rouvrir ! Août 1829.

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    À Victor Hugo Votre génie est grand, Ami ; votre penser Monte, comme Élysée, au char vivant d'Élie ; Nous sommes devant vous comme un roseau qui plie ; Votre souffle en passant pourrait nous renverser. Mais vous prenez bien garde, Ami, de nous blesser ; Noble et tendre, jamais votre amitié n'oublie Qu'un rien froisse souvent les cœurs et les délie ; Votre main sait chercher la nôtre et la presser. Comme un guerrier de fer, un vaillant homme d'armes, S'il rencontre, gisant, un nourrisson en larmes, Il le met dans son casque et le porte en chemin, Et de son gantelet le touche avec caresses ; La nourrice serait moins habile aux tendresses ; La mère n'aurait pas une si douce main. Octobre 1829.

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    C

    Chloe Douglas

    @chloeDouglas

    Avec toi Frère-Réfugié Je ferme les yeux L’odeur pourrie Fait mal au cœur Fort douloureux L’enfer est cette guerre Chaude Bouillonnante Et toujours enneigée de l’hiver. Cela s’explose de nouveau Un fracas énorme Dans la tète Puis le tas de débris Et les hurlements Comment le bloquer ? J’ouvre les yeux Je suis là Avec toi mon frère Gelé de terreur Et douleur Dans le cœur brisé C’est ce qui reste De notre passé. Tu es arrivé …enfin ! Je suis avec toi Frère-refugié Et à travers Les nuages perturbés Le ciel se prête à se transformer.

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    C

    Chloe Douglas

    @chloeDouglas

    Main dans la main Nous marchons Nous vivons En discussion En silence Parfois dans nos pensées Dans nos rêves Dans nos plans Dans le noir Sans savoir Où nous allons ! Le jeu est divertissant Même si le résultat N’est pas satisfaisant. Main dans la main Nous allons Nous allons Croiser la rue Tourner un coin Tourner une page De notre vie élue Sans prétention Ni regret, Nous avons reçu Une vie parfaite C’est notre secret.

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    C

    Chloe Douglas

    @chloeDouglas

    Mon ami La lune s’enfuit dans la lutte, entre la nuit et l’aurore. L’argent de la toile d’araignée étincelle dans la brume. Mon ami, mon ami, mon ami, Je t’appelle mon ami. La rosée dans la vallée, Les violettes sur la colline, Les ruisseaux coulent de la montagne, dans le matin de ma vie. Mon ami, mon ami, mon ami, Je t’appelle mon ami. Les chevaux sont dans la prairie, mangeant de l’herbe douce. Les oiseaux chantent dans la fôret, Sauf le rossignol endormi. Mon ami, mon ami, mon ami, Tu es revenu mon amour.

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    Christine de Pisan

    Christine de Pisan

    @christineDePisan

    A Dieu, mon Ami, vous command A Dieu, mon ami, vous command, A Dieu, cil dont tout mon bien vient, Et pour Dieu retournez briefment. En plorant trés amerement, Puis que departir vous convient, A Dieu, mon ami vous command. Or ne m'obliez nullement, Car toudis de vous me souvient; Baisiez moy au departement, A Dieu, mon ami, vous command.

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