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Amitié

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Amitié

Poésies de la collection amitié

    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    À mes amis S.-B. et L.B Amis, mes deux amis, mon peintre, mon poète ! Vous me manquez toujours, et mon âme inquiète Vous redemande ici. Des deux amis, si chers à ma lyre engourdie, Pas un ne m'est resté. Je t'en veux, Normandie, De me les prendre ainsi ! Ils emportent en eux toute ma poésie ; L'un, avec son doux luth de miel et d'ambroisie, L'autre avec ses pinceaux. Peinture et poésie où s'abreuvait ma muse, Adieu votre onde ! Adieu l'Alphée et l'Aréthuse Dont je mêlais les eaux ! Adieu surtout ces coeurs et ces âmes si hautes, Dont toujours j'ai trouvé pour mes maux et mes fautes Si tendre la pitié ! Adieu toute la joie à leur commerce unie ! Car tous deux, ô douceur ! si divers de génie, Ont la même amitié ! Je crois d'ici les voir, le poète et le peintre. Ils s'en vont, raisonnant de l'ogive et du cintre Devant un vieux portail ; Ou, soudain, à loisir, changeant de fantaisie, Poursuivent un oeil noir dessous la jalousie, À travers l'éventail. Oh ! de la jeune fille et du vieux monastère, Toi, peins-nous la beauté, toi, dis-nous le mystère. Charmez-nous tour à tour. À travers le blanc voile et la muraille grise Votre oeil, ô mes amis, sait voir Dieu dans l'église, Dans la femme l'amour ! Marchez, frères jumeaux, l'artiste avec l'apôtre ! L'un nous peint l'univers que nous explique l'autre ; Car, pour notre bonheur, Chacun de vous sur terre a sa part qu'il réclame. À toi, peintre, le monde ! à toi, poète, l'âme ! À tous deux le Seigneur ! Mai 1830.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Ami Z Ami Z, tu m'es présent en cette solitude. Quand le ciel, mon problème, et l'homme, mon étude, Quand le travail, ce maître auguste et sérieux, Quand les songes sereins, profonds, impérieux, Qui tiennent jour et nuit ma pensée en extase, Me laissent, dans cette ombre où Dieu souffle et m'embrase, Un instant dont je puis faire ce que je veux, Je me tourne vers toi, penseur aux blancs cheveux, Vers toi, l'homme qu'on aime et l'homme qu'on révère, Poète souriant, historien sévère ! Je repasse, bonheur pourtant bien incomplet, Par tous les doux sentiers d'un souvenir qui plaît. Ton Henri, — ton fils Pierre, ami de mon fils Charles, — Et ta femme, — ange heureux qui rêve quand tu parles, Je me rappelle tout : ton salon, tes discours, Et nos longs entretiens qui font les soirs si courts, Ton vénérable amour que jamais rien n'émousse Pour toute belle chose et toute chose douce ! Maint poème charmant que nous disait ta voix M'apparaît... — Mon esprit, admirant à la fois Tant de jours sur ton front, tant de grâce en ton style, Croit voir un patriarche au milieu d'une idylle ! Ainsi tu n'es jamais loin de mon âme, et puis Tout me parle de toi dans ces champs où je suis ; Je compare, en mon coeur que ton ombre accompagne, Ta verte poésie et la fraîche campagne ; Je t'évoque partout ; il me semble souvent Que je vais te trouver dans quelque coin rêvant, Et que, dans le bois sombre ouvrant ses ailes blanches, Ton vers jeune et vivant chante au milieu des branches. Je m'attends à te voir sous un arbre endormi. Je dis : où donc est-il ? et je m'écrie : — Ami, Que tu sois dans les champs, que tu sois à la ville, Salut ! bois un lait pur, bénis Dieu, lis Virgile ! Que le ciel rayonnant, où Dieu met sa clarté, Te verse au coeur la joie et la sérénité ! Qu'il fasse à tout passant ta demeure sacrée ! Qu'autour de ta vieillesse aimable et vénérée, Il accroisse, tenant tout ce qu'il t'a promis, Ta famille d'enfants, ta famille d'amis ! Que le sourire heureux, te soit toujours facile ! Doux vieillard ! noble esprit ! sage tendre et tranquille !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Amis, un dernier mot Toi, vertu, pleure si je meurs ! André Chénier. Amis, un dernier mot ! - et je ferme à jamais Ce livre, à ma pensée étranger désormais. Je n'écouterai pas ce qu'en dira la foule. Car, qu'importe à la source où son onde s'écoule ? Et que m'importe, à moi, sur l'avenir penché, Où va ce vent d'automne au souffle desséché Qui passe, en emportant sur son aile inquiète Et les feuilles de l'arbre et les vers du poète ? Oui, je suis jeune encore, et quoique sur mon front, Où tant de passions et d'oeuvres germeront, Une ride de plus chaque jour soit tracée, Comme un sillon qu'y fait le soc de ma pensée, Dans le cour incertain du temps qui m'est donné, L'été n'a pas encor trente fois rayonné. Je suis fils de ce siècle ! une erreur, chaque année, S'en va de mon esprit, d'elle-même étonnée, Et, détrompé de tout, mon culte n'est resté Qu'à vous, sainte patrie et sainte liberté ! Je hais l'oppression d'une haine profonde. Aussi, lorsque j'entends, dans quelque coin du monde, Sous un ciel inclément, sous un roi meurtrier, Un peuple qu'on égorge appeler et crier ; Quand, par les rois chrétiens aux bourreaux turcs livrée, La Grèce, notre mère, agonise éventrée ; Quand l'Irlande saignante expire sur sa croix ; Quand Teutonie aux fers se débat sous dix rois ; Quand Lisbonne, jadis belle et toujours en fête, Pend au gibet, les pieds de Miguel sur sa tête ; Lorsqu'Albani gouverne au pays de Caton ; Que Naples mange et dort ; lorsqu'avec son bâton, Sceptre honteux et lourd que la peur divinise, L'Autriche casse l'aile au lion de Venise ; Quand Modène étranglé râle sous l'archiduc ; Quand Dresde lutte et pleure au lit d'un roi caduc ; Quand Madrid se rendort d'un sommeil léthargique ; Quand Vienne tient Milan ; quand le lion Belgique, Courbé comme le boeuf qui creuse un vil sillon, N'a plus même de dents pour mordre son bâillon ; Quand un Cosaque affreux, que la rage transporte, Viole Varsovie échevelée et morte, Et, souillant son linceul, chaste et sacré lambeau, Se vautre sur la vierge étendue au tombeau ; Alors, oh ! je maudis, dans leur cour, dans leur antre, Ces rois dont les chevaux ont du sang jusqu'au ventre Je sens que le poète est leur juge ! je sens Que la muse indignée, avec ses poings puissants, Peut, comme au pilori, les lier sur leur trône Et leur faire un carcan de leur lâche couronne, Et renvoyer ces rois, qu'on aurait pu bénir, Marqués au front d'un vers que lira l'avenir ! Oh ! la muse se doit aux peuples sans défense. J'oublie alors l'amour, la famille, l'enfance, Et les molles chansons, et le loisir serein, Et j'ajoute à ma lyre une corde d'airain !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    À mes amis L. B. et S.-B Here's a sigh to those who love me, And a smile to those who hate ; And whatever sky's above me, Here's a heart for every fate. BYRON. Amis ! c'est donc Rouen, la ville aux vieilles rues, Aux vieilles tours, débris des races disparues, La ville aux cent clochers carillonnant dans l'air, Le Rouen des châteaux, des hôtels, des bastilles, Dont le front hérissé de flèches et d'aiguilles Déchire incessamment les brumes de la mer ; C'est Rouen qui vous a ! Rouen qui vous enlève ! Je ne m'en plaindrai pas. J'ai souvent fait ce rêve D'aller voir Saint-Ouen à moitié démoli, Et tout m'a retenu, la famille, l'étude, Mille soins, et surtout la vague inquiétude Qui fait que l'homme craint son désir accompli. J'ai différé. La vie à différer se passe. De projets en projets et d'espace en espace Le fol esprit de l'homme en tout temps s'envola. Un jour enfin, lassés du songe qui nous leurre, Nous disons : " Il est temps. Exécutons! c'est l'heure. " Alors nous retournons les yeux : la mort est là ! Ainsi de mes projets. Quand vous verrai-je, Espagne, Et Venise et son golfe, et Rome et sa campagne, Toi, Sicile que ronge un volcan souterrain, Grèce qu'on connaît trop, Sardaigne qu'on ignore, Cités de l'aquilon, du couchant, de l'aurore, Pyramides du Nil, cathédrales du Rhin ! Qui sait ? Jamais peut-être. Et quand m'abriterai-je Près de la mer, ou bien sous un mont blanc de neige, Dans quelque vieux donjon, tout plein d'un vieux héros, Où le soleil, dorant les tourelles du faîte, N'enverra sur mon front que des rayons de fête Teints de pourpre et d'azur au prisme des vitraux ? Jamais non plus, sans doute. En attendant, vaine ombre, Oublié dans l'espace et perdu dans le nombre, Je vis. J'ai trois enfants en cercle à mon foyer ; Et lorsque la sagesse entr'ouvre un peu ma porte, Elle me crie : Ami ! sois content. Que t'importe Cette tente d'un jour qu'il faut sitôt ployer ! Et puis, dans mon esprit, des choses que j'espère Je me fais cent récits, comme à son fils un père. Ce que je voudrais voir je le rêve si beau ! Je vois en moi des tours, des Romes, des Cordoues, Qui jettent mille feux, muse, quand tu secoues Sous leurs sombres piliers ton magique flambeau ! Ce sont des Alhambras, de hautes cathédrales, Des Babels, dans la nue enfonçant leurs spirales, De noirs Escurials, mystérieux séjour, Des villes d'autrefois, peintes et dentelées, Où chantent jour et nuit mille cloches ailées, Joyeuses d'habiter dans des clochers à jour ! Et je rêve ! Et jamais villes impériales N'éclipseront ce rêve aux splendeurs idéales. Gardons l'illusion ; elle fuit assez tôt. Chaque homme, dans son coeur, crée à sa fantaisie Tout un monde enchanté d'art et de poésie. C'est notre Chanaan que nous voyons d'en haut. Restons où nous voyons. Pourquoi vouloir descendre, Et toucher ce qu'on rêve, et marcher dans la cendre ? Que ferons-nous après ? où descendre ? où courir ? Plus de but à chercher ! plus d'espoir qui séduise ! De la terre donnée à la terre promise Nul retour ; et Moïse a bien fait de mourir ! Restons loin des objets dont la vue est charmée. L'arc-en-ciel est vapeur, le nuage est fumée. L'idéal tombe en poudre au toucher du réel. L'âme en songes de gloire ou d'amour se consume. Comme un enfant qui souffle en un flocon d'écume, Chaque homme enfle une bulle où se reflète un ciel ! Frêle bulle d'azur, au roseau suspendue, Qui tremble au moindre choc et vacille éperdue ! Voilà tous nos projets, nos plaisirs, notre bruit ! Folle création qu'un zéphyr inquiète ! Sphère aux mille couleurs, d'une goutte d'eau faite ! Monde qu'un souffle crée et qu'un souffle détruit ! Le saurons-nous jamais ? Qui percera nos voiles, Noirs firmaments, semés de nuages d'étoiles ? Mer, qui peut dans ton lit descendre et regarder ? Où donc est la science ? Où donc est l'origine ? Cherchez au fond des mers cette perle divine, Et, l'océan connu, l'âme reste à sonder ! Que faire et que penser ? Nier, douter, ou croire ? Carrefour ténébreux ! triple route! nuit noire ! Le plus sage s'assied sous l'arbre du chemin, Disant tout bas : J'irai, Seigneur, où tu m'envoies. Il espère, et, de loin, dans les trois sombres voies, Il écoute, pensif, marcher le genre humain ! Mai 1830.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    À Théophile Gautier Ami, poète, esprit, tu fuis notre nuit noire. Tu sors de nos rumeurs pour entrer dans la gloire; Et désormais ton nom rayonne aux purs sommets. Moi qui t’ai connu jeune et beau, moi qui t’aimais, Moi qui, plus d’une fois, dans nos altiers coups d’aile, Éperdu, m’appuyais sur ton âme fidèle, Moi, blanchi par les jours sur ma tête neigeant, Je me souviens des temps écoulés, et songeant A ce jeune passé qui vit nos deux aurores, A la lutte, à l’orage, aux arènes sonores, A l’art nouveau qui s’offre, au peuple criant oui, J’écoute ce grand vent sublime évanoui. Fils de la Grèce antique et de la jeune France, Ton fier respect des morts fut rempli d’espérance; Jamais tu ne fermas les yeux à l’avenir. Mage à Thèbes, druide au pied du noir menhir, Flamine aux bords du Tibre et brahme aux bords du Gange, Mettant sur l’arc du dieu la flèche de l’archange, D’Achille et de Roland hantant les deux chevets, Forgeur mystérieux et puissant, tu savais Tordre tous les rayons dans une seule flamme; Le couchant rencontrait l’aurore dans ton âme; Hier croisait demain dans ton fécond cerveau; Tu sacrais le vieil art aïeul de l’art nouveau; Tu comprenais qu’il faut, lorsqu’une âme inconnue Parle au peuple, envolée en éclairs dans la nue, L’écouter, l’accepter; l’aimer, ouvrir les coeurs; Calme, tu dédaignais l’effort vil des moqueurs Écumant sur Eschyle et bavant sur Shakspeare; Tu savais que ce siècle a son air qu’il respire, Et que, l’art ne marchant qu’en se transfigurant, C’est embellir le beau que d’y joindre le grand. Et l’on t’a vu pousser d’illustres cris de joie Quand le Drame a saisi Paris comme une proie, Quand l’antique hiver fut chassé par Floréal, Quand l’astre inattendu du moderne idéal Est venu tout à coup, dans le ciel qui s’embrase Luire, et quand l’Hippogriffe a relayé Pégase! Je te salue au seuil sévère du tombeau. Va chercher le vrai, toi qui sus trouver le beau. Monte l’âpre escalier. Du haut des sombres marches, Du noir pont de l’abîme on entrevoit les arches; Va! meurs! la dernière heure est le dernier degré. Pars, aigle, tu vas voir des gouffres à ton gré; Tu vas voir l’absolu, le réel, le sublime. Tu vas sentir le vent sinistre de la cime Et l’éblouissement du prodige éternel. Ton olympe, tu vas le voir du haut du ciel, Tu vas du haut du vrai voir l’humaine chimère, Même celle de Job, même celle d’Homère, Ame, et du haut de Dieu tu vas voir Jéhovah. Monte, esprit! Grandis, plane, ouvre tes ailes, va! Lorsqu’un vivant nous quitte, ému, je le contemple; Car entrer dans la mort, c’est entrer dans le temple Et quand un homme meurt, je vois distinctement Dans son ascension mon propre avènement. Ami, je sens du sort la sombre plénitude; J’ai commencé la mort par de la solitude, Je vois mon profond soir vaguement s’étoiler; Voici l’heure où je vais, aussi moi, m’en aller. Mon fil trop long frissonne et touche presque au glaive; Le vent qui t’emporta doucement me soulève, Et je vais suivre ceux qui m’aimaient, moi, banni. Leur oeil fixe m’attire au fond de l’infini. J’y cours. Ne fermez pas la porte funéraire. Passons; car c’est la loi; nul ne peut s’y soustraire; Tout penche; et ce grand siècle avec tous ses rayons Entre en cette ombre immense où pâles nous fuyons. Oh! quel farouche bruit font dans le crépuscule Les chênes qu’on abat pour le bûcher d’Hercule! Les chevaux de la mort se mettent à hennir, Et sont joyeux, car l’âge éclatant va finir; Ce siècle altier qui sut dompter le vent contraire, Expire ô Gautier! toi, leur égal et leur frère, Tu pars après Dumas, Lamartine et Musset. L’onde antique est tarie où l’on rajeunissait; Comme il n’est plus de Styx il n’est plus de Jouvence. Le dur faucheur avec sa large lame avance Pensif et pas à pas vers le reste du blé; C’est mon tour; et la nuit emplit mon oeil troublé Qui, devinant, hélas, l’avenir des colombes, Pleure sur des berceaux et sourit à des tombes. Hauteville-house, nov. 1872. Jour des Morts.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    À un ami Sur l'effrayante falaise, Mur par la vague entrouvert, Roc sombre où fleurit à l'aise Un charmant petit pré vert, Ami, puisque tu me laisses Ta maison loin des vivants Entre ces deux allégresses, Les grands flots et les grands vents, Salut ! merci ! les fortunes Sont fragiles, et nos temps, Comme l'algue sous les dunes, Sont dans l'abîme, et flottants. Nos âmes sont des nuées Qu'un vent pousse, âpre ou béni, Et qui volent, dénouées, Du côté de l'infini. L'énorme bourrasque humaine, Dont l'étoile est la raison, Prend, quitte, emporte et ramène L'espérance à l'horizon. Cette grande onde inquiète Dont notre siècle est meurtri Écume et gronde, et me jette Parfois mon nom dans un cri. La haine sur moi s'arrête. Ma pensée est dans ce bruit Comme un oiseau de tempête Parmi les oiseaux de nuit. Pendant qu'ici je cultive Ton champ comme tu le veux, Dans maint journal l'invective Grince et me prend aux cheveux. La diatribe m'écharpe ; Je suis âne ou scélérat ; Je suis Pradon pour Laharpe, Et pour de Maistre Marat. Qu'importe ! les coeurs sont ivres. Les temps qui viennent feront Ce qu'ils pourront de mes livres Et de moi ce qu'ils voudront. J'ai pour joie et pour merveille De voir, dans ton pré d'Honfleur, Trembler au poids d'une abeille Un brin de lavande en fleur.

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    Voltaire

    Voltaire

    @voltaire

    A Mme du Châtelet L'un des plus beaux poèmes de Voltaire, À Mme du Châtelet, est un texte d'amour qu'il a écrit pour Émilie du Châtelet. Ils se rencontrent en 1733 et elle fût pendant quinze ans sa maitresse et sa muse. Ce poème est composé de neuf quatrains en octosyllabes avec des rimes embrassées et croisées. Si vous voulez que j’aime encore, Rendez-moi l’âge des amours ; Au crépuscule de mes jours Rejoignez, s’il se peut, l’aurore. Des beaux lieux où le dieu du vin Avec l’Amour tient son empire, Le Temps, qui me prend par la main, M’avertit que je me retire. De son inflexible rigueur Tirons au moins quelque avantage. Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur. Laissons à la belle jeunesse Ses folâtres emportements. Nous ne vivons que deux moments : Qu’il en soit un pour la sagesse. Quoi ! pour toujours vous me fuyez, Tendresse, illusion, folie, Dons du ciel, qui me consoliez Des amertumes de la vie !

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    Voltaire

    Voltaire

    @voltaire

    Aux manes de M. de Genonville Toi que le ciel jaloux ravit dans son printemps, Toi de qui je conserve un souvenir fidèle Vainqueur de la mort et du temps, Toi dont la perte, après dix ans, M’est encore affreuse et nouvelle ; Si tout n’est pas détruit, si sur les sombres bords Ce souffle si caché, cette faible étincelle, Cet esprit, le moteur et l’esclave du corps, Ce je ne sais quel sens qu’on nomme âme immortelle, Reste inconnu de nous, est vivant chez les morts ; S’il est vrai que tu sois, et si tu peux m’entendre, Ô mon cher Genonville, avec plaisir reçois Ces vers et ces soupirs que je donne à ta cendre, Monument d’un amour immortel comme toi. Il te souvient du temps où l’aimable Egérie, Dans les beaux jours de notre vie, Ecoutait nos chansons, partageait nos ardeurs. Nous nous aimions tous trois ; la raison, la folie, L’amour, l’enchantement des plus tendres erreurs, Tout réunissait nos trois cœurs. Que nous étions heureux ! même cette indigence, Triste compagne des beaux jours, Ne put de notre joie empoisonner le cours. Jeunes, gais, satisfaits, sans soins, sans prévoyance, Aux douceurs du présent bornant tous nos désirs, Quel besoin avions-nous d’une vaine abondance ? Ces plaisirs, ces beaux jours coulés dans la mollesse, Ces ris, enfants de l’allégresse, Sont passés avec toi dans la nuit du trépas. Le ciel, en récompense, accorde à ta maîtresse Des grandeurs et de la richesse, Appuis de l’âge mûr, éclatant embarras Faible soulagement quand on perd sa jeunesse. La fortune est chez elle où fût jadis l’amour. Les plaisirs ont leur temps ; la sagesse a son tour. L’amour s’est envolé sur l’aile du bel âge ; Mais jamais l’amitié ne fuit du cœur du sage. Nous chantons quelquefois et tes vers et les miens ; De ton aimable esprit nous célébrons les charmes ; Ton nom se mêle encore à tous nos entretiens ; Nous lisons tes écrits, nous les baignons de larmes : Loin de nous à jamais ces mortels endurcis, Indignes du beau nom, du nom sacré d’amis, Ou toujours remplis d’eux, ou toujours hors d’eux même, Au monde, à l’inconstance ardents à se livrer, Malheureux, dont le cœur ne sait pas comme on aime, Et qui n’ont point connu la douceur de pleurer !

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    Evariste de Parny

    Evariste de Parny

    @evaristeDeParny

    À mes amis Rions, chantons, ô mes amis, Occupons-nous à ne rien faire, Laissons murmurer le vulgaire, Le plaisir est toujours permis. Que notre existence légère S'évanouisse dans les jeux. Vivons pour nous, soyons heureux, N'importe de quelle manière. Un jour il faudra nous courber Sous la main du temps qui nous presse ; Mais jouissons dans la jeunesse, Et dérobons à la vieillesse Tout ce qu'on peut lui dérober.

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    Evariste de Parny

    Evariste de Parny

    @evaristeDeParny

    À un ami trahi par sa maîtresse Quoi ! tu gémis d'une inconstance ? Tu pleures, nouveau Céladon ? Ah ! le trouble de ta raison Fait honte à ton expérience. Es-tu donc assez imprudent Pour vouloir fixer une femme ? Trop simple et trop crédule amant, Quelle erreur aveugle ton âme ! Plus aisément tu fixerais Des arbres le tremblant feuillage, Les flots agités par l'orage, Et l'or ondoyant des guérets Que balance un zéphyr volage. Elle t'aimait de bonne foi ; Mais pouvait-elle aimer sans cesse ? Un rival obtient sa tendresse ; Un autre l'avait avant toi ; Et dès demain, je le parie, Un troisième, plus insensé, Remplacera dans sa folie L'imprudent qui t'a remplacé. Il faut au pays de Cythère À fripon fripon et demi. Trahis, pour n'être point trahi ; Préviens même la plus légère ; Que ta tendresse passagère S'arrête où commence l'ennui. Mais que fais-je ? et dans ta faiblesse Devrais-je ainsi te secourir ? Ami, garde-toi d'en guérir : L'erreur sied bien à la jeunesse. Va, l'on se console aisément De ses disgrâces amoureuses. Les amours sont un jeu d'enfant ; Et, crois-moi, dans ce jeu charmant, Les dupes mêmes sont heureuses.

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