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Carpe Diem

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Carpe Diem

Poésies de la collection carpe diem

    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A Madame G (1) Dans dix ans d’ici seulement, Vous serez un peu moins cruelle. C’est long, à parler franchement. L’amour viendra probablement Donner à l’horloge un coup d’aile. Votre beauté nous ensorcelle, Prenez-y garde cependant : On apprend plus d’une nouvelle En dix ans. Quand ce temps viendra, d’un amant Je serai le parfait modèle, Trop bête pour être inconstant, Et trop laid pour être infidèle. Mais vous serez encor trop belle

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    A une fleur Que me veux-tu, chère fleurette, Aimable et charmant souvenir ? Demi-morte et demi-coquette, Jusqu’à moi qui te fait venir ? Sous ce cachet enveloppée, Tu viens de faire un long chemin. Qu’as-tu vu ? que t’a dit la main Qui sur le buisson t’a coupée ? N’es-tu qu’une herbe desséchée Qui vient achever de mourir ? Ou ton sein, prêt à refleurir, Renferme-t-il une pensée ? Ta fleur, hélas ! a la blancheur De la désolante innocence ; Mais de la craintive espérance Ta feuille porte la couleur. As-tu pour moi quelque message ? Tu peux parler, je suis discret. Ta verdure est-elle un secret ? Ton parfum est-il un langage ? S’il en est ainsi, parle bas, Mystérieuse messagère ; S’il n’en est rien, ne réponds pas ; Dors sur mon coeur, fraîche et légère. Je connais trop bien cette main, Pleine de grâce et de caprice, Qui d’un brin de fil souple et fin A noué ton pâle calice. Cette main-là, petite fleur, Ni Phidias ni Praxitèle N’en auraient pu trouver la soeur Qu’en prenant Vénus pour modèle. Elle est blanche, elle est douce et belle, Franche, dit-on, et plus encor ; A qui saurait s’emparer d’elle Elle peut ouvrir un trésor. Mais elle est sage, elle est sévère ; Quelque mal pourrait m’arriver. Fleurette, craignons sa colère. Ne dis rien, laisse-moi rêver.

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    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Est-elle almée ? Est-elle almée ?... aux premières heures bleues Se détruira-t-elle comme les fleurs feues... Devant la splendide étendue où l'on sente Souffler la ville énormément florissante ! C'est trop beau ! c'est trop beau ! mais c'est nécessaire - Pour la Pêcheuse et la chanson du Corsaire, Et aussi puisque les derniers masques crurent Encore aux fêtes de nuit sur la mer pure !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Une charogne Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme, Ce beau matin d'été si doux : Au détour d'un sentier une charogne infâme Sur un lit semé de cailloux, Les jambes en l'air, comme une femme lubrique, Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique Son ventre plein d'exhalaisons. Le soleil rayonnait sur cette pourriture, Comme afin de la cuire à point, Et de rendre au centuple à la grande Nature Tout ce qu'ensemble elle avait joint ; Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s'épanouir. La puanteur était si forte, que sur l'herbe Vous crûtes vous évanouir.

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    C

    Charles-Nérée Beauchemin

    @charlesNereeBeauchemin

    Rayons d’Octobre (I) Octobre glorieux sourit à la nature. On dirait que l’été ranime les buissons. Un vent frais, que l’odeur des bois fanés sature, Sur l’herbe et sur les eaux fait courir ses frissons. Le nuage a semé les horizons moroses, De ses flocons d’argent. Sur la marge des prés, Les derniers fruits d’automne, aux reflets verts et roses, Reluisent à travers les rameaux diaprés. Forêt verte qui passe aux tons chauds de l’orange ; Ruisseaux où tremble un ciel pareil au ciel vernal ; Monts aux gradins baignés d’une lumière étrange. Quel tableau ! quel brillant paysage automnal ! À mi-côte, là-bas, la ferme ensoleillée, Avec son toit pointu festonné de houblons, Paraît toute rieuse et comme émerveillée De ses éteules roux et de ses chaumes blonds. Aux rayons dont sa vue oblique est éblouie, L’aïeul sur le perron familier vient s’asseoir : D’un regain de chaleur sa chair est réjouie, Dans l’hiver du vieillard, il fait moins froid, moins noir. Calme et doux, soupirant vers un lointain automne, Il boit la vie avec l’air des champs et des bois, Et cet étincelant renouveau qui l’étonne Lui souffle au coeur l’amour des tendres autrefois. De ses pieds délicats pressant l’escarpolette, Un jeune enfant s’enivre au bercement rythmé, Semblable en gentillesse à la fleur violette Que l’arbuste balance au tiède vent de mai. Près d’un vieux pont de bois écroulé sur la berge, Une troupe enfantine au rire pur et clair, Guette, sur les galets qu’un flot dormant submerge, La sarcelle stridente et preste qui fend l’air. Vers les puits dont la mousse a verdi la margelle, Les lavandières vont avec les moissonneurs ; Sous ce firmament pâle éclate de plus belle Le charme printanier des couples ricaneurs. Et tandis que bruit leur babillage tendre, On les voit déroulant la chaîne de métal Des treuils mouillés, descendre et monter et descendre La seille d’où ruisselle une onde de cristal.

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    C

    Cécile Sauvage

    @cecileSauvage

    Voeux simples Vivre du vert des prés et du bleu des collines, Des arbres racineux qui grimpent aux ravines, Des ruisseaux éblouis de l’argent des poissons ; Vivre du cliquetis allègre des moissons, Du clair halètement des sources remuées, Des matins de printemps qui soufflent leurs buées, Des octobres semeurs de feuilles et de fruits Et de l’enchantement lunaire au long des nuits Que disent les crapauds sonores dans les trèfles. Vivre naïvement de sorbes et de nèfles, Gratter de la spatule une écuelle en bois, Avoir les doigts amers ayant gaulé des noix Et voir, ronds et crémeux, sur l’émail des assiettes, Des fromages caillés couverts de sarriettes. Ne rien savoir du monde où l’amour est cruel, Prodiguer des baisers sagement sensuels Ayant le goût du miel et des roses ouvertes Ou d’une aigre douceur comme les prunes vertes À l’ami que bien seule on possède en secret. Ensemble recueillir le nombre des forêts, Caresser dans son or brumeux l’horizon courbe, Courir dans l’infini sans entendre la tourbe Bruire étrangement sous la vie et la mort, Ignorer le désir qui ronge en vain son mors, La stérile pudeur et le tourment des gloses ; Se tenir embrassés sur le néant des choses Sans souci d’être grands ni de se définir, Ne prendre de soleil que ce qu’on peut tenir Et toujours conservant le rythme et la mesure Vers l’accomplissement marcher d’une âme sûre. Voir sans l’interroger s’écouler son destin, Accepter les chardons s’il en pousse en chemin, Croire que le fatal a décidé la pente Et faire simplement son devoir d’eau courante. Ah ! vivre ainsi, donner seulement ce qu’on a, Repousser le rayon que l’orgueil butina, N’avoir que robe en lin et chapelet de feuilles, Mais jouir en son plein de la figue qu’on cueille, Avoir comme une nonne un sentiment d’oiseau, Croire que tout est bon parce que tout est beau, Semer l’hysope franche et n’aimer que sa joie Parmi l’agneau de laine et la chèvre de soie.

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    E

    Esther Granek

    @estherGranek

    Jeunesse Défais tes doigts nouant tes mains. Défais ton air un peu chagrin. Défais ce front buté, têtu. Défais tes réflexions pointues. Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Te torturant d’ombres subtiles qu’en toi tu multiplies par mille, tu es ton centre, ton débat, mal dans ta peau. Ah ! pauvre état ! Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Car au supplice en toi tout vire. Tu n’es zéro !… Ni point de mire !… Et pourtant, t’inventant ces pôles, tu te détestes en chaque rôle. Vingt ans c’est bien dur à porter ! Défais, défais. Sois la rosée. Sois gai matin au ciel de mai ! Défais… Qu’au fond de toi rien ne se brise ! Tes heures claires sont pages grises. Printemps morts ne renaissent pas. Défais ta barrière à la joie. Vingt ans c’est bien dur à porter… Défais… Défais… Sois la rosée…

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    E

    Esther Granek

    @estherGranek

    Regrets Tu vois, Un jour est passé. Quel beau jour c’était ! Mais tu l’ignorais. Tu vois, Bien qu’à ta portée, Tu l’as laissé là Car tu ne savais. Tu vois, Ce jour-là s’offrait. Fallait lui parler. Et qu’en as-tu fait ? Tu vois, Il resta muet et terne d’aspect comme tant de journées. Tu vois, Fallait l’inviter. Fallait le bercer Et t’y réchauffer. Tu vois, Fallait t’y lover Et t’en imprégner. Il t’appartenait. Tu vois, Il s’en est allé Et trop tard tu sais Qu’il ensoleillait. Tu vois, Un jour est passé. Et tu regrettas. Quel beau jour c’était !…

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    E

    Esther Granek

    @estherGranek

    Saisir l’instant Saisir l’instant tel une fleur Qu’on insère entre deux feuillets Et rien n’existe avant après Dans la suite infinie des heures. Saisir l’instant. Saisir l’instant. S’y réfugier. Et s’en repaître. En rêver. À cette épave s’accrocher. Le mettre à l’éternel présent. Saisir l’instant. Saisir l’instant. Construire un monde. Se répéter que lui seul compte Et que le reste est complément. S’en nourrir inlassablement. Saisir l’instant. Saisir l’instant tel un bouquet Et de sa fraîcheur s’imprégner. Et de ses couleurs se gaver. Ah ! combien riche alors j’étais ! Saisir l’instant. Saisir l’instant à peine né Et le bercer comme un enfant. A quel moment ai-je cessé ? Pourquoi ne puis-je… ?

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    François-René de Chateaubriand

    François-René de Chateaubriand

    @francoisReneDeChateaubriand

    Nous verrons Le passé n’est rien dans la vie, Et le présent est moins encor : C’est à l’avenir qu’on se fie Pour nous donner joie et trésor. Tout mortel dans ses voeux devance Cet avenir où nous courons ; Le bonheur est en espérance, On vit, en disant : Nous verrons. Mais cet avenir plein de charmes, Qu’est-il lorsqu’il est arrivé ? C’est le présent qui de nos larmes Matin et soir est abreuvé ! Aussitôt que s’ouvre la scène Qu’avec ardeur nous désirons, On bâille, on la regarde à peine ; On voit, en disant : Nous verrons. Ce vieillard penche vers la terre ; Il touche à ses derniers instants : Y pense-t-il ? Non ; il espère Vivre encor soixante et dix ans. Un docteur, fort d’expérience, Veut lui prouver que nous mourons : Le vieillard rit de la sentence, Et meurt en disant : Nous verrons. Valère et Damis n’ont qu’une âme ; C’est le modèle des amis. Valère en un malheur réclame La bourse et les soins de Damis :  » Je viens à vous, ami sincère, Ou ce soir au fond des prisons… – Quoi ! ce soir même ? – Oui ! – Cher Valère, Revenez demain : Nous verrons. «  Gare ! faites place aux carrosses Où s’enfle l’orgueilleux manant Qui jadis conduisait deux rosses A trente sous, pour le passant. Le peuple écrasé par la roue Maudit l’enfant des Porcherons ; Moi, du prince évitant la boue, Je me range, et dis : Nous verrons. Nous verrons est un mot magique Qui sert dans tous les cas fâcheux : Nous verrons, dit le politique ; Nous verrons, dit le malheureux. Les grands hommes de nos gazettes, Les rois du jour, les fanfarons, Les faux amis et les coquettes, Tout cela vous dit : Nous verrons.

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Lorsque deux nobles cœurs Lorsque deux nobles cœurs se sont vraiment aimés Leur amour est plus fort que la mort elle-même Cueillons les souvenirs que nous avons semés Et l’absence après tout n’est rien lorsque l’on s’aime Secteur des Hurlus, septembre 1915

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Le ballet des heures Les heures sont des fleurs l’une après l’autre écloses Dans l’éternel hymen de la nuit et du jour ; Il faut donc les cueillir comme on cueille les roses Et ne les donner qu’à l’amour. Ainsi que de l’éclair, rien ne reste de l’heure, Qu’au néant destructeur le temps vient de donner ; Dans son rapide vol embrassez la meilleure, Toujours celle qui va sonner. Et retenez-la bien au gré de votre envie, Comme le seul instant que votre âme rêva ; Comme si le bonheur de la plus longue vie Était dans l’heure qui s’en va. Vous trouverez toujours, depuis l’heure première Jusqu’à l’heure de nuit qui parle douze fois, Les vignes, sur les monts, inondés de lumière, Les myrtes à l’ombre des bois. Aimez, buvez, le reste est plein de choses vaines ; Le vin, ce sang nouveau, sur la lèvre versé, Rajeunit l’autre sang qui vieillit dans vos veines Et donne l’oubli du passé. Que l’heure de l’amour d’une autre soit suivie, Savourez le regard qui vient de la beauté ; Être seul, c’est la mort ! Être deux, c’est la vie ! L’amour c’est l’immortalité !

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    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Atemporel Les bras emplis de présent il avait lancé un défi au temps Le fleuve immobile n’était plus l’emblème de ce qui meurt L’on fêtait le commencement de ce qui n’a pas de fin la joie inépuisable d’être un hymne permanent à la vie Les bras emplis de présent il avait trouvé une nouvelle patrie

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    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Osmose L’eau m’a prêté sa transparence et le ciel son illusion bleue Les arbres m’ont appris le silence la pluie le vert des prairies le soleil la tyrannie du feu Les bêtes sages d’inconscience dévisagent l’homme monstre de science Je suis l’une d’elle Au printemps l’herbe grasse de la vie a un goût d’éternité pour le ruminant d’un présent perpétuel

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    Langston Hughes

    Langston Hughes

    @langstonHughes

    La Mère à son Fils Eh bien mon fils, je vais te dire quelque chose : La vie ça n’a pas été pour moi un escalier de verre. Il y a eu des clous, Des échardes, Et des planches défoncées, Et des endroits sans moquettes, A nu. Mais quand même, Je grimpais toujours, Je passais les paliers, Je prenais les tournants, Et quelquefois j’allais dans le noir Quand y avait pas de lumière. Alors mon garçon faut pas retourner en arrière. Faut pas t’asseoir sur les marches Parce que tu trouves que c’est un peu dur. Et ne va pas tomber maintenant… Parce que, mon fils, moi je vais toujours, Je grimpe toujours, Et la vie ça n’a pas été pour moi un escalier de verre.

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    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Non, ton éternité Non, ton éternité d’inconscience obscure, D’aveugle impulsion, de mouvement forcé, Tout l’infini du temps ne vaut pas, ô Nature ! La minute où j’aurai pensé.

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    Paul Éluard

    Paul Éluard

    @paulEluard

    Mascha riait aux anges L’heure qui tremble au front du temps tout embrouillé Un bel oiseau léger plus vif qu’une poussière Traîne sur un miroir un cadavre sans tête Des boules de soleil adoucissent ses ailes Et le vent de son vol affole la lumière Le meilleur a été découvert loin d’ici.

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    Paul Éluard

    Paul Éluard

    @paulEluard

    Porte ouverte La vie est bien aimable Venez à moi, si je vais à vous c’est un jeu, Les anges des bouquets dont les fleurs changent de couleur.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Amourette Or que l'hiver roidit la glace épaisse, Réchauffons-nous, ma gentille maîtresse, Non accroupis près le foyer cendreux, Mais aux plaisirs des combats amoureux. Asseyons-nous sur cette molle couche. Sus ! baisez-moi, tendez-moi votre bouche, Pressez mon col de vos bras dépliés, Et maintenant votre mère oubliez. Que de la dent votre tétin je morde, Que vos cheveux fil à fil je détorde. Il ne faut point, en si folâtres jeux, Comme au dimanche arranger ses cheveux. Approchez donc, tournez-moi votre joue. Vous rougissez ? il faut que je me joue. Vous souriez : avez-vous point ouï Quelque doux mot qui vous ait réjoui ? Je vous disais que la main j'allais mettre Sur votre sein : le voulez-vous permettre ? Ne fuyez pas sans parler : je vois bien À vos regards que vous le voulez bien. Je vous connais en voyant votre mine. Je jure Amour que vous êtes si fine, Que pour mourir, de bouche ne diriez Qu'on vous baisât, bien que le désiriez ; Car toute fille, encore qu'elle ait envie Du jeu d'aimer, désire être ravie. Témoin en est Hélène, qui suivit D'un franc vouloir Pâris, qui la ravit. Je veux user d'une douce main forte. Ah ! vous tombez, vous faites déjà la morte. Ah ! quel plaisir dans le coeur je reçois ! Sans vous baiser, vous moqueriez de moi En votre lit, quand vous seriez seulette. Or sus ! c'est fait, ma gentille brunette. Recommençons afin que nos beaux ans Soient réchauffés de combats si plaisants.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    À Madame Marguerite Il faut que j’aille tanter L’oreille de MARGUERITE, Et dans son palais chanter Quel honneur elle merite : Debout Muses, qu’on m’atelle Vostre charette immortelle, Affin qu’errer je la face Par une nouvelle trace, Chantant la vierge autrement Que nos poëtes barbares, Qui ses saintes vertus rares Ont souillé premierement. J’ai sous l’esselle un carquois Gros de fleches nompareilles, Qui ne font bruire leurs vois Que pour les doctes oreilles : Leur roideur n’est apparante, A telle bande ignorante, Quand l’une d’elles annonce L’honneur que mon arc enfonce : Entre toutes j’elirai La mieus sonnante, & de celle Par la terre universelle Ses vertus je publirai. Sus mon Ame, ouvre la porte A tes vers plus dous que miel, Affin qu’une fureur sorte Pour la ravir jusque au ciel : Du croc arrache la Lire Qui tant de gloire t’aquit, Et vien sus ses cordes dire Comme la Nimphe náquit. Par un miracle nouveau Pallas du bout de sa lance Ouvrit un peu le cerveau De François seigneur de France. Adonques Vierge nouvelle Tu sortis de sa cervelle, Et les Muses qui te prindrent En leurs sçiences t’apprindrent : Mais quand le tens eut parfait L’acroissance de ton age, Tu pensas en ton courage, De mettre à chef un grand fait. Tes mains s’armerent alors De l’horreur de deus grands haches : Tes braz, tes flancs, & ton cors, Sous un double fer tu caches : Une menassante creste Branloit au hault de ta teste Joant sur la face horrible D’une Meduse terrible : Ainsi tu alas trouver Le vilain monstre Ignorance, Qui souloit toute la France Desous son ventre couver. L’ire qui la Beste offense En vain irrita son cueur, Pour la pousser en defense S’opposant au bras vainqueur : Car le fer pront à la batre Ja dans son ventre est caché, Et ja trois fois voire quatre, Le cueur lui a recherché. Le Monstre gist etandu, De son sang l’herbe se mouille : Aus Muses tu as pandu Pour Trophée sa depouille : Puis versant de ta poitrine Mainte source de doctrine, Au vrai tu nous fais connoistre Le miracle de ton estre. Pour cela je chanterai Ce bel hinne de victoire, Et de France à la Gent noire L’enseigne j’en planterai. Mais moi qui suis le témoin De ton los qui le monde orne, Il ne faut ruer si loin Que mon trait passe la borne : Frape à ce coup MARGUERITE, Et te fiche en son merite, Qui luit comme une planette Ardante la nuit brunette. Repandon devant ses ieus Ma musique toute neuve Et ma douceur qui abreuve L’honneur alteré des cieus. Affin que la Nimphe voie Que mon luc premierement Aus François montra la voie De sonner si proprement : Et comme imprimant ma trace Au champ Attiq’ & Romain, Callimaq’, Pindare, Horace, Je deterrai de ma main.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Comme on voit sur la branche Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose, En sa belle jeunesse, en sa première fleur, Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur, Quand l’Aube de ses pleurs au point du jour l’arrose; La grâce dans sa feuille, et l’amour se repose, Embaumant les jardins et les arbres d’odeur; Mais battue, ou de pluie, ou d’excessive ardeur, Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose. Ainsi en ta première et jeune nouveauté, Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté, La Parque t’a tuée, et cendres tu reposes. Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs, Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs, Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Cueillez dés aujourd’huy les roses de la vie Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle, Assise aupres du feu, dévidant & filant, Direz, chantant mes vers, en vous esmerveillant, Ronsard me celebroit du temps que j’estois belle. Lors vous n’aurez servante oyant telle nouvelle, Desja sous le labeur à demy sommeillant, Qui au bruit de mon nom ne s’aille resveillant, Bénissant vostre nom de louange immortelle. Je seray sous la terre: & fantôme sans os Par les ombres myrteux je prendray mon repos ; Vous serez au fouyer une vieille accroupie Regrettant mon amour & vostre fier desdain. Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain : Cueillez dés aujourd’huy les roses de la vie.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    J’ai l’esprit tout ennuyé J’ai l’esprit tout ennuyé D’avoir trop estudié Les Phenomenes d’Arate : II est temps que je m’esbate Et que j’aille aux champs jouer. Bon dieux ! qui voudroit louer Ceux qui, collez sur un livre, N’ont jamais soucy de vivre ? Que nous sert I’estudier, Sinon de nous ennuyer Et soing dessus soing accrestre, À qui nous serons peut-estre, Ou ce matin, ou ce soir, Victime de l’Orque noir, De l’Orque qui ne pardonne, Tant il est fier, à personne ? Corydon, marche devant ; Sçache où le bon vin se vend. Fais après à ma bouteille, Des feuilles de quelque treille, Un tapon pour la boucher. Ne m’achete point de chair, Car, tant soit-elle friande, L’esté je hay la viande. Achete des abricos, Des pompons, des artichôs, Des fraises et de la crême : C’est en esté ce que j’aime, Quand, sur le bord d’un ruisseau, Je les mange au bord de I’eau, Estendu sur le rivage Ou dans un antre sauvage. Ores que je suis dispos, Je veux rire sans repos, De peur que la maladie Un de ces jours ne me die, Me happant à l’impourveu : « Meurs, gallant : c’est assez beu. »

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Le ciel ne veut dame que je jouisse Le Ciel ne veut, Dame, que je jouisse De ce doux bien que dessert mon devoir ; Aussi ne veux-je, et ne me plaît d’avoir Sinon du mal en vous faisant service. Puisqu’il vous plaît, que pour vous je languisse, Je suis heureux, et ne puis recevoir Plus grand honneur, qu’en mourant, de me voir Faire à vos yeux de mon coeur sacrifice. Donc si ma main, malgré moi, quelquefois De l’amour chaste outrepasse les lois, Dans votre sein cherchant ce qui m’embraise, Punissez-la du foudre de vos yeux, Et la brûlez : car j’aime beaucoup mieux Vivre sans main, que ma main vous déplaise.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Marie, levez-vous, ma jeune paresseuse Marie, levez-vous, ma jeune paresseuse : Jà la gaie alouette au ciel a fredonné, Et jà le rossignol doucement jargonné, Dessus l’épine assis, sa complainte amoureuse. Sus ! debout ! allons voir l’herbelette perleuse, Et votre beau rosier de boutons couronné, Et vos œillets mignons auxquels aviez donné, Hier au soir de l’eau, d’une main si soigneuse. Harsoir en vous couchant vous jurâtes vos yeux D’être plus tôt que moi ce matin éveillée : Mais le dormir de l’Aube, aux filles gracieux, Vous tient d’un doux sommeil encor les yeux sillée. Çà ! çà ! que je les baise et votre beau tétin, Cent fois, pour vous apprendre à vous lever matin.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Mignonne, allons voir si la rose A Cassandre Mignonne, allons voir si la rose Qui ce matin avoit desclose Sa robe de pourpre au Soleil, A point perdu ceste vesprée Les plis de sa robe pourprée, Et son teint au vostre pareil. Las ! voyez comme en peu d’espace, Mignonne, elle a dessus la place Las ! las ses beautez laissé cheoir ! Ô vrayment marastre Nature, Puis qu’une telle fleur ne dure Que du matin jusques au soir ! Donc, si vous me croyez, mignonne, Tandis que vostre âge fleuronne En sa plus verte nouveauté, Cueillez, cueillez vostre jeunesse : Comme à ceste fleur la vieillesse Fera ternir vostre beauté.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Sonnet à Marie Je vous envoie un bouquet que ma main Vient de trier de ces fleurs épanouies ; Qui ne les eût à ces vêpres cueillies, Tombées à terre elles fussent demain.

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    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    Mars En mars, quand s’achève l’hiver, Que la campagne renaissante Ressemble à la convalescente Dont le premier sourire est cher ; Quand l’azur, tout frileux encore, Est de neige éparse mêlé, Et que midi, frais et voilé, Revêt une blancheur d’aurore ; Quand l’air doux dissout la torpeur Des eaux qui se changeaient en marbres ; Quand la feuille aux pointes des arbres Suspend une verte vapeur ; Et quand la femme est deux fois belle, Belle de la candeur du jour, Et du réveil de notre amour Où sa pudeur se renouvelle, Oh ! Ne devrais-je pas saisir Dans leur vol ces rares journées Qui sont les matins des années Et la jeunesse du désir ? Mais je les goûte avec tristesse ; Tel un hibou, quand l’aube luit, Roulant ses grands yeux pleins de nuit, Craint la lumière qui les blesse, Tel, sortant du deuil hivernal, J’ouvre de grands yeux encore ivres Du songe obscur et vain des livres, Et la nature me fait mal.

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    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    Un rendez-vous Dans ce nid furtif où nous sommes, Ô ma chère âme, seuls tous deux, Qu'il est bon d'oublier les hommes, Si près d'eux ! Pour ralentir l'heure fuyante, Pour la goûter, il ne faut pas Une félicité bruyante ; Parlons bas. Craignons de la hâter d'un geste, D'un mot, d'un souffle seulement, D'en perdre, tant elle est céleste, Un moment. Afin de la sentir bien nôtre, Afin de la bien ménager, Serrons-nous tout près l'un de l'autre Sans bouger ; Sans même lever la paupière : Imitons le chaste repos De ces vieux châtelains de pierre Aux yeux clos, Dont les corps sur les mausolées, Immobiles et tout vêtus, Loin de leurs âmes envolées Se sont tus ; Dans une alliance plus haute Que les terrestres unions, Gravement comme eux côte à côte, Sommeillons. Car nous n'en sommes plus aux fièvres D'un jeune amour qui peut finir ; Nos cœurs n'ont plus besoin des lèvres Pour s'unir, Ni des paroles solennelles Pour changer leur culte en devoir, Ni du mirage des prunelles Pour se voir. Ne me fais plus jurer que j'aime, Ne me fais plus dire comment ; Goûtons la félicité même Sans serment. Savourons, dans ce que nous disent Silencieusement nos pleurs, Les tendresses qui divinisent Les douleurs ! Chère, en cette ineffable trêve Le désir enchanté s'endort ; On rêve à l'amour comme on rêve À la mort. On croit sentir la fin du monde ; L'univers semble chavirer D'une chute douce et profonde, Et sombrer... L'âme de ses fardeaux s'allège Par la fuite immense de tout ; La mémoire comme une neige Se dissout. Toute la vie ardente et triste Semble anéantie à l'entour, Plus rien pour nous, plus rien n'existe Que l'amour. Aimons en paix : il fait nuit noire, La lueur blême du flambeau Expire... nous pouvons nous croire Au tombeau. Laissons-nous dans les mers funèbres, Comme après le dernier soupir, Abîmer, et par leurs ténèbres Assoupir... Nous sommes sous la terre ensemble Depuis très longtemps, n'est-ce pas ? Écoute en haut le sol qui tremble Sous les pas. Regarde au loin comme un vol sombre De corbeaux, vers le nord chassé, Disparaître les nuits sans nombre Du passé, Et comme une immense nuée De cigognes (mais sans retours !) Fuir la blancheur diminuée Des vieux jours... Hors de la sphère ensoleillée Dont nous subîmes les rigueurs, Quelle étrange et douce veillée Font nos cœurs ? Je ne sais plus quelle aventure Nous a jadis éteint les yeux, Depuis quand notre extase dure, En quels cieux. Les choses de la vie ancienne Ont fui ma mémoire à jamais, Mais du plus loin qu'il me souvienne Je t'aimais... Par quel bienfaiteur fut dressée Cette couche ? Et par quel hymen Fut pour toujours ta main laissée Dans ma main ? Mais qu'importe ! ô mon amoureuse, Dormons dans nos légers linceuls, Pour l'éternité bienheureuse Enfin seuls !

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    Sabine Sicaud

    @sabineSicaud

    Demain Tout voir – je vous ai dit que je voulais tout voir, Tout voir et tout connaître ! Ah! ne pas seulement le rêver… le pouvoir ! Ne pas se contenter d’une seule fenêtre Sur un même horizon, Mais dans chaque pays avoir une maison Et flâner à son gré de l’une à l’autre – ou mieux, Avoir cette maison roulante, Cette maison volante, d’où les yeux Peuvent aller plus loin, plus loin toujours ! Attente D’on ne sait quoi… je veux savoir ce qu’on attend. Tout savoir… Tout savoir de l’univers profond, Des êtres et des choses, De la terre et des astres, jusqu’au fond. Savoir la cause De cet amour qu’on a pour des noms de pays, Des noms qui chantent à l’oreille avec instance Comme s’ils appelaient depuis longtemps, Depuis toujours – des noms immenses Dont on est envahi, Ou des noms tout petits, presque ignorés. Longs pays blancs du Nord, pays dorés Du Sud ou du Levant plein de mystère… Et les jeunes, aux villes claires : New-York, San Francisco, Miami, des lumières, Du bruit, de la vitesse, de l’espace… Ah ! tout voir, tout savoir des minutes qui passent, De celles qui viendront… Demain, comme je t’aime ! Je ne fais qu’entrouvrir les yeux, lever le front, Commencer de comprendre. Hier, savais-je même Ce que c’était que respirer dans le jour tendre ? Bonheur de voir, d’entendre, Qui vient à vous dans un frisson ; Tant de beauté, tant de couleurs, de sons… Royaume de la vie ! Les images m’entourent de leur ronde, La musique est en moi comme une ivresse. Ne suis-je pas cette jeune princesse Qui s’en allait, suivie De tous ses petits pages ? Rien au monde Peut-il me cacher ton visage, cher Passant ? Te voilà… D’où viens-tu ? Quelle est ton âme ? Es-tu prince ou poète ? Je pressens Tout ce que tu diras si tu viens de là-bas Où, pour toi, quelque vieille femme, en son isba, Implore Notre-Dame. « Notre-Dame de Potchaïeff, guidez ses pas ! » Tu te nommes Boris ou Michel, n’est-ce pas ? Non ? C’est Tommy ? Pardon. Tu viens du golf et je te sais vainqueur. Serrons-nous les deux mains, en camarades. Beppo ? Tu dis Beppo ? C’est donc La voix de Roméo qui nous parle et son cœur Que tu m’apportes ? Soit. Je suis en promenade Et nous pouvons causer. De qui ? De Juliette ? Ou de vous, les Tristan, les Siegfried, les Vincent, Les Cyrano, les Poliche peut-être… Oui, ton âme, Poliche, la connaître. Moi je te comprendrai. Va, si la vie est faite De telles cruautés, c’est qu’on n’a pas compris. Tu dis : « On peut comprendre et rester impuissant. » Qui sait ? Qui sait, Poliche. Je pense que surtout l’on peut s’être mépris Et nous ne savons pas de quoi nous sommes riches. Tous les bonheurs, sait-on jamais leur prix ? …Sait-on si l’important n’est pas d’aimer quand même, Fût-ce un rêve toujours fuyant, pourvu qu’on aime…

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