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Haine

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Haine

Poésies de la collection haine

    A

    Abderrahmane Amalou

    @abderrahmaneAmalou

    Effrayé par tant de tourage Souvent les pièges anciens Se tendent près des buissons, Avec la lyre et l'épée: Ils attendent d'un air serein Que le naif fasse le bond Pour obtenir la bonne clé! Quand les fossés sont comblés Et les sentiers empruntés Que certains,sans dire,convoitent: Alors suivre l'aigle à la hâte, Accepter les traces de griffe Mais en refusant la gifle! Effrayé par ce courage Que tant de pics ont fauché, Dans le fond trop remué Juste pour le mettre en cage Où celui des "Autres" est passé Bien qu'il soit âgé et futé!

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    Alphonse Daudet

    Alphonse Daudet

    @alphonseDaudet

    À Célimène Je ne vous aime pas, ô blonde Célimène, Et si vous l’avez cru quelque temps, apprenez Que nous ne sommes point de ces gens que l’on mène Avec une lisière et par le bout du nez ; Je ne vous aime pas… depuis une semaine, Et je ne sais pourquoi vous vous en étonnez. Je ne vous aime pas ; vous êtes trop coquette, Et vos moindres faveurs sont de mauvais aloi ; Par le droit des yeux noirs, par le droit de conquête, Il vous faut des amants. (On ne sait trop pourquoi.) Vous jouez du regard comme d’une raquette ; Vous en jouez, méchante… et jamais avec moi. Je ne vous aime pas, et vous aurez beau faire, Non, madame, jamais je ne vous aimerai. Vous me plaisez beaucoup ; certes, je vous préfère À Dorine, à Clarisse, à Lisette, c’est vrai. Pourtant l’amour n’a rien à voir dans cette affaire, Et quand il vous plaira, je vous le prouverai. J’aurais pu vous aimer ; mais, ne vous en déplaise, Chez moi le sentiment ne tient que par un fil… Avouons-le, pourtant, quelque chose me pèse : En ne vous aimant pas, comment donc se fait-il Que je sois aussi gauche, aussi mal à mon aise Quand vous me regardez de face ou de profil ? Je ne vous aime pas, je n’aime rien au monde ; Je suis de fer, je suis de roc, je suis d’airain. Shakespeare a dit de vous : « Perfide comme l’onde » ; Mais moi je n’ai pas peur, car j’ai le pied marin. Pourtant quand vous parlez, ô ma sirène blonde, Quand vous parlez, mon cœur bat comme un tambourin. Je ne vous aime pas, c’est dit, je vous déteste, Je vous crains comme on craint l’enfer, de peur du feu ; Comme on craint le typhus, le choléra, la peste, Je vous hais à la mort, madame ; mais, mon Dieu ! Expliquez-moi pourquoi je pleure, quand je reste Deux jours sans vous parler et sans vous voir un peu.

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    Je ne t'aime pas Je ne t'aime pas pour que ton esprit Puisse être autrement que tu ne peux être Ton songe distrait jamais ne pénètre Mon cœur anxieux, dolent et surpris. Ne t'inquiète pas de mon hébétude, De ces chocs profonds, de ma demi-mort ; J'ai nourri mes yeux de tes attitudes, Mon œil a si bien mesuré ton corps, Que s'il me fallait mourir de toi-même, Défaillir un jour par excès de toi, Je croirais dormir du sommeil suprême Dans ton bras, fermé sur mon être étroit...

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    S

    Sadek Belhamissi

    @sadekBelhamissi

    Tous nés pleurant Ils sont tous nés en pleurant Rouge, jaune, noir ou blanc Tous fragiles et innocents, Faisant la joie de leurs parents. Quand le soleil était absent Rouge, jaune, noir ou blanc Leur sourire d’ange le remplaçant Les rendait tous très charmants. Rouge, jaune, noir ou blanc Ils n’étaient pas différents. A la récré, au jardin jouant Plus tard ensemble plaisantant. Ils étaient encore amis adolescents Rouge, jaune, noir ou blanc, Les jolies filles ensemble courant, Les jeux, autres farces c’était marrant. Hélas ! Devenus majeurs et grands Politique et société s'en mêlant. Rouge, jaune, noir et blanc, Une bêtise de plus en vous séparant. Un jour s’achèvera la vie pourtant fini les supérieurs ! Tous impuissants, Rouge, jaune, noir ou blanc Sans distinction balayés par le temps. Belhamissi Sadek le 27.07.2017 .

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    À celle qui est trop gaie Ta tête, ton geste, ton air Sont beaux comme un beau paysage ; Le rire joue en ton visage Comme un vent frais dans un ciel clair. Le passant chagrin que tu frôles Est ébloui par la santé Qui jaillit comme une clarté De tes bras et de tes épaules. Les retentissantes couleurs Dont tu parsèmes tes toilettes Jettent dans l'esprit des poètes L'image d'un ballet de fleurs. Ces robes folles sont l'emblème De ton esprit bariolé ; Folle dont je suis affolé, Je te hais autant que je t'aime ! Quelquefois dans un beau jardin Où je traînais mon atonie, J'ai senti, comme une ironie, Le soleil déchirer mon sein ; Et le printemps et la verdure Ont tant humilié mon coeur, Que j'ai puni sur une fleur L'insolence de la Nature. Ainsi je voudrais, une nuit, Quand l'heure des voluptés sonne, Vers les trésors de ta personne, Comme un lâche, ramper sans bruit, Pour châtier ta chair joyeuse, Pour meurtrir ton sein pardonné, Et faire à ton flanc étonné Une blessure large et creuse, Et, vertigineuse douceur ! A travers ces lèvres nouvelles, Plus éclatantes et plus belles, T'infuser mon venin, ma soeur !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Le tonneau de la haine La Haine est le tonneau des pâles Danaïdes ; La Vengeance éperdue aux bras rouges et forts A beau précipiter dans ses ténèbres vides De grands seaux pleins du sang et des larmes des morts, Le Démon fait des trous secrets à ces abîmes, Par où fuiraient mille ans de sueurs et d'efforts, Quand même elle saurait ranimer ses victimes, Et pour les pressurer ressusciter leurs corps. La Haine est un ivrogne au fond d'une taverne, Qui sent toujours la soif naître de la liqueur Et se multiplier comme l'hydre de Lerne. - Mais les buveurs heureux connaissent leur vainqueur, Et la Haine est vouée à ce sort lamentable De ne pouvoir jamais s'endormir sous la table.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Obsession Grands bois, vous m'effrayez comme des cathédrales ; Vous hurlez comme l'orgue ; et dans nos coeurs maudits, Chambres d'éternel deuil où vibrent de vieux râles, Répondent les échos de vos De profundis. Je te hais, Océan ! tes bonds et tes tumultes, Mon esprit les retrouve en lui ; ce rire amer De l'homme vaincu, plein de sanglots et d'insultes, Je l'entends dans le rire énorme de la mer. Comme tu me plairais, ô nuit ! sans ces étoiles Dont la lumière parle un langage connu ! Car je cherche le vide, et le noir et le nu ! Mais les ténèbres sont elles-mêmes des toiles Où vivent, jaillissant de mon oeil par milliers, Des êtres disparus aux regards familiers.

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    Charles Cros

    Charles Cros

    @charlesCros

    Bonne fortune À Théodore de Banville. Tête penchée, Œil battu, Ainsi couchée Qu'attends-tu ? Sein qui tressaille, Pleurs nerveux, Fauve broussaille De cheveux, Frissons de cygnes Sur tes flancs, Voilà des signes Trop parlants. Tu n'es que folle De ton corps. Ton âme vole Au dehors. Qu'un autre vienne, Tu feras La même chaîne De tes bras. Je hais le doute, Et, plus fier, Je te veux toute, Âme et chair. C'est moi (pas l'autre !) Qui t'étreins Et qui me vautre Sur tes seins. Connais, panthère, Ton vainqueur Ou je fais taire Ta langueur. Attache et sangle Ton esprit, Ou je t'étrangle Dans ton lit.

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    Charles Cros

    Charles Cros

    @charlesCros

    Révolte Absurde et ridicule à force d’être rose, À force d’être blanche, à force de cheveux Blonds, ondés, crêpelés, à force d’avoir bleus Les yeux, saphirs trop vains de leur métempsycose. Absurde, puisqu’on n’en peut pas parler en prose, Ridicule, puisqu’on n’en a jamais vu deux, Sauf, peut-être, dans des keepsakes nuageux… Dépasser le réel ainsi, c’est de la pose. C’en est même obsédant, puisque le vert des bois Prend un ton d’émeraude impossible en peinture S’il sert de fond à ces cheveux contre nature. Et ces blancheurs de peau sont cause quelquefois Qu’on perdrait tout respect des blancheurs que le rite Classique admet : les lys, la neige. Ça m’irrite !

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    E

    Emile Nelligan

    @emileNelligan

    Le vaisseau d’or Ce fut un grand Vaisseau taillé dans l’or massif: Ses mâts touchaient l’azur, sur des mers inconnues; La Cyprine d’amour, cheveux épars, chairs nues S’étalait à sa proue, au soleil excessif. Mais il vint une nuit frapper le grand écueil Dans l’Océan trompeur où chantait la Sirène, Et le naufrage horrible inclina sa carène Aux profondeurs du Gouffre, immuable cercueil. Ce fut un Vaisseau d’Or, dont les flancs diaphanes Révélaient des trésors que les marins profanes, Dégoût, Haine et Névrose, entre eux ont disputés. Que reste-t-il de lui dans la tempête brève ? Qu’est devenu mon coeur, navire déserté ? Hélas! Il a sombré dans l’abîme du Rêve !

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Une statue (bourgeois) Un bloc de bronze où son nom luit sur une plaque. Ventre riche, mâchoire ardente et menton gourd ; Haine et terreur murant son gros front lourd Et poing taillé à fendre en deux toutes attaques. Le carrefour, solennisé de palais froids, D’où ses regards têtus et violents encore Scrutent quels feux d’éveil bougent dans telle aurore, Comme sa volonté, se carre en angles droits. Il fut celui de l’heure et des hasards bizarres, Mais textuel, sitôt qu’il tint la force en main Et qu’il put étouffer dans hier le lendemain Déjà sonore et plein de cassantes fanfares. Sa colère fit loi durant ces jours bâtés, Où toutes voix montaient vers ses panégyriques, Où son rêve d’état strict et géométrique Tranquillisait l’aboi plaintif des lâchetés. Il se sentait la force étroite et qui déprime, Tantôt sournois, tantôt cruel et contempteur, Et quand il se dressait de toute sa hauteur Il n’arrivait jamais qu’à la hauteur d’un crime. Massif devant la vie, il l’obstrua, depuis Qu’il s’imposa sauveur des rois et de lui-même Et qu’il utilisa la peur et l’affre blême En des complots fictifs qu’il étranglait, la nuit. Si bien qu’il apparaît sur la place publique Féroce et rancunier, autoritaire et fort, Et défendant encor, d’un geste hyperbolique, Son piédestal bâti comme son coffre-fort.

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    A

    Alexis-Félix Arvers

    @alexisFelixArvers

    Pourtant, si tu m'aimais Pourtant, si tu m'aimais ! si cette raillerie Avait jeté racine et germé sourdement ; Si, moi qui me jouais, si tu m'avais, Marie, De la bouche et du cœur appelé ton amant ! Si je t'avais trompée, et si j'avais su rendre Si puissant et si doux mon sourire moqueur. Que ton âme crédule ait pu se laisser prendre Aux semblants d'un amour qui n'est point dans mon cœur, Malheur à tous les deux ! Tôt ou tard l'imposture Rapportera ses fruits d'angoisse et de douleur ; Et toi, qui n'a rien fait, toi, pauvre créature, Tu prendras comme moi ta moitié du malheur. Et si j'avais dit vrai ; cependant, quand j'y songe... Ô femme ! vois un peu ce que c'est que de nous ! Pour peu que cette voix, qui riait du mensonge. Eût de torrents d'amour inondé tes genoux ! Comme un berceau d'enfant à la branche fleurie, Si j'avais suspendu mon bonheur à tes pas, Malheur, encor malheur ! car cette fois, Marie, Hélas ! ce serait toi qui ne m'aimerais pas ! Était-ce donc ta loi, pitoyable nature. De reculer toujours le but que j'entrevois, Et de ne mettre au cœur de chaque créature Qu'un désir sans espoir, et qu'un écho sans voix. Ô malédiction ! était-ce ton envie De n'accomplir jamais qu'une part du souhait, Et le seul avenir est-il pour cette vie, De haïr qui nous aime, ou d'aimer qui nous hait.

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Un soir d’été Le Rhin Qui coule Un train Qui roule Des nixes blanches Sont en prière Dans la bruyère Toutes les filles À la fontaine J’ai tant de peine J’ai tant d’amour Dit la plus belle Qu’il soit fidèle Et moi je l’aime Dit sa marraine J’ai la migraine À la fontaine J’ai tant de haine

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    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    Les deux coqs Deux coqs vivaient en paix: une poule survint, Et voilà la guerre allumée. Amour, tu perdis Troie ; et c’est de toi que vint Cette querelle envenimée Où du sang des Dieux même on vit le Xanthe teint. Longtemps entre nos coqs le combat se maintint. Le bruit s’en répandit par tout le voisinage, La gent qui porte crête au spectacle accourut. Plus d’une Hélène au beau plumage Fut le prix du vainqueur. Le vaincu disparut: Il alla se cacher au fond de sa retraite, Pleura sa gloire et ses amours, Ses amours qu’un rival, tout fier de sa défaite Possédait à ses yeux. Il voyait tous les jours Cet objet rallumer sa haine et son courage; Il aiguisait son bec, battait l’air et ses flancs, Et, s’exerçant contre les vents, S’armait d’une jalouse rage. Il n’en eut pas besoin. Son vainqueur sur les toits S’alla percher, et chanter sa victoire. Un vautour entendit sa voix : Adieu les amours et la gloire; Tout cet orgueil périt sous l’ongle du vautour Enfin, par un fatal retour Son rival autour de la poule S’en revint faire le coquet : Je laisse à penser quel caquet; Car il eut des femmes en foule. La fortune se plaît à faire de ces coups; Tout vainqueur insolent à sa perte travaille. Défions-nous du Sort, et prenons garde à nous Après le gain d’une bataille.

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    Jean de La Fontaine

    Jean de La Fontaine

    @jeanDeLaFontaine

    L’aigle et l’escarbot L’aigle donnait la chasse à maître Jean Lapin, Qui droit à son terrier s’enfuyait au plus vite. Le trou de l’escarbot se rencontre en chemin. Je laisse à penser si ce gîte Etait sûr ; mais où mieux ? Jean Lapin s’y blottit. L’aigle fondant sur lui nonobstant cet asile, L’escarbot intercède et dit : « Princesse des oiseaux, il vous est fort facile D’enlever malgré moi ce pauvre malheureux ; Mais ne me faites pas cet affront, je vous prie ; Et puisque Jean Lapin vous demande la vie, Donnez-la-lui, de grâce, ou l’ôtez à tous deux : C’est mon voisin, c’est mon compère. » L’oiseau de Jupiter, sans répondre un seul mot, Choque de l’aile l’escarbot, L’étourdit, l’oblige à se taire, Enlève Jean Lapin. L’escarbot indigné Vole au nid de l’oiseau, fracasse en son absence, Ses oeufs, ses tendres oeufs, sa plus douce espérance: Pas un seul ne fut épargné. L’aigle étant de retour et voyant ce ménage, Remplit le ciel de cris, et, pour comble de rage, Ne sait sur qui venger le tort qu’elle a souffert. Elle gémit en vain, sa plainte au vent se perd. Il fallut pour cet an vivre en mère affligée. L’an suivant, elle mit son nid en lieu plus haut. L’escarbot prend son temps, fait faire aux oeufs le saut. La mort de Jean lapin derechef est vengée. Ce second deuil fut tel, que l’écho de ces bois N’en dormit de plus de six mois. L’oiseau qui porte Ganymède Du monarque des dieux enfin implore l’aide, Dépose en son giron ses oeufs, et croit qu’en paix Ils seront dans ce lieu, que pour ses intérêts Jupiter se verra contraint de les défendre : Hardi qui les irait là prendre. Aussi ne les y prit-on pas. Leur ennemi changea de note, Sa la robe du dieu fit tomber une crotte ; Le dieu la secouant jeta les oeufs à bas. Quand l’aigle sut l’inadvertance, Elle menaça Jupiter D’abandonner sa cour, d’aller vivre au désert, De quitter toute dépendance, Avec mainte autre extravagance. Le pauvre Jupiter se tut: Devant son tribunal l’escarbot comparut, Fit sa plainte, et conta l’affaire. On fit entendre à l’aigle enfin qu’elle avait tort. Mais les deux ennemis ne voulant point d’accord, Le monarque des dieux s’avisa, pour bien faire, De transporter le temps où l’aigle fait l’amour En une autre saison, quand la race escarbote Est en quartier d’hiver, et comme la marmotte, Se cache et ne voit point le jour.

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    J

    Jerome Jolly

    @jeromeJolly

    Je vous hais ! Je vous hais, je vous déteste, hautains et inutiles, Êtres de bien peu de choses, Car oui, c’est bien de vous que je parle, Ô Hommes futiles ! Que raille celui qui ose, Moquez-vous, gorgez-vous, répandez-vous, ignorez-vous, Votre temps est dérisoire, Habillez-vous d’importance, hâblé, Ô esprit fou, Âmes faibles et illusoires, Qu’un détail vous grandisse à peine, aux yeux de ces haillons, Et pour Dieu vous pensez-vous, Que le différent assaille votre éducation, Alors c’est la guerre au bout, De vos becs fétides, s’entend amour, religion, Mais parlez-vous seulement, Vos âmes pourtant ne sont que haine, irréligion, Comprenez-vous seulement, Oui souillez ! Détruisez ! Envahissez ! Semez l’enfer ! Oui ! Prenez-vous pour Antée, Voyons vos fronts pleins d’effroi à la descente en terre, Que le tombeau vous sied, Surviens un aquilon seul, une drache suffisante, Que déjà vous n’êtes plus, Et d’une larme, d’une prière désespérante, Vous pleurez des dieux vaincus, Heureux qui comme le poète, fermera vos pierres, Car c’est bien lui le dernier, Qui aime, chérit, et ne dérange point de ces vers, Ce que Dieu a créé.

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    Jules Barbey d'Aurevilly

    Jules Barbey d'Aurevilly

    @julesBarbeyDaurevilly

    La haine du soleil A Mademoiselle Louise Read. Un soir, j'étais debout, auprès d'une fenêtre... Contre la vitre en feu j'avais mon front songeur, Et je voyais, là-bas, lentement disparaître Un soleil embrumé qui mourait sans splendeur ! C'était un vieux soleil des derniers soirs d'automne, Globe d'un rouge épais, de chaleur épuisé, Qui ne faisait baisser le regard à personne, Et qu'un aigle aurait méprisé ! Alors, je me disais, en une joie amère : " Et toi, Soleil, aussi, j'aime à te voir sombrer ! Astre découronné comme un roi de la terre, Tête de roi tondu que la nuit va cloîtrer ! " Demain, je le sais bien, tu sortiras des ombres ! Tes cheveux d'or auront tout à coup repoussé ! Qu'importe ! j'aurai cru que tu meurs quand tu sombres ! Un moment je l'aurai pensé ! Un moment j'aurai dit : " C'en est fait, il succombe, Le monstre lumineux qu'ils disaient éternel ! Il pâlit comme nous, il se meurt, et sa tombe N'est qu'un brouillard sanglant dans quelque coin du ciel ! " Grimace de mourir ! grimace funéraire ! Qu'en un ciel ennuité chaque jour il fait voir... Eh bien, cela m'est doux de la sentir vulgaire, Sa façon de mourir ce soir ! Car je te hais, Soleil, oh ! oui, je te hais comme L'impassible témoin des douleurs d'ici-bas... Chose de feu, sans coeur, je te hais comme un homme ! L'être que nous aimons passe et tu ne meurs pas ! L'oeil bleu, le vrai soleil qui nous verse la vie, Un jour perdra son feu, son azur, sa beauté, Et tu l'éclaireras de ta lumière impie, Insultant d'immortalité. Et voilà, vieux Soleil, pourquoi mon coeur t'abhorre ! Voilà pourquoi je t'ai toujours haï, Soleil ! Pourquoi je dis, le soir, quand le jour s'évapore : " Ah ! si c'était sa mort et non plus son sommeil ! " Voilà pourquoi je dis, quand tu sors d'un ciel sombre : " Bravo ! ses six mille ans l'ont enfin achevé ! L'oeil du cyclope a donc enfin trouvé dans l'ombre La poutre qui l'aura crevé ! " Et que le sang en pleuve et sur nos fronts ruisselle, A la place où tombaient tes insolents rayons ! Et que la plaie aussi nous paraisse éternelle Et mette six mille ans à saigner sur nos fronts ! Nous n'aurons plus alors que la nuit et ses voiles, Plus de jour lumineux dans un ciel de saphir ! Mais n'est-ce pas assez que le feu des étoiles Pour voir ce qu'on aime mourir ? Pour voir la bouche en feu par nos lèvres usée Nous dire froidement : " C'est fini, laisse-moi ! " Et s'éteindre l'amour qui, dans notre pensée, Allumait un soleil plus éclatant que toi ! Pour voir errer parmi les spectres de la terre Le spectre aimé qui semble et vivant et joyeux, La nuit, la sombre nuit est encore trop claire... Et je l'arracherais des cieux !

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    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Folie Désir forcené de pureté haine du mélange en vous qui n’êtes pas des anges Pourquoi tant de dureté ? Méprisant les couleurs qui dérangent vous oubliez que vos corps de fange ne sont pas incorruptibles Le noir, le jaune, le rouge, le métis, le mulâtre sont vos cibles VOUS, si irascibles qui aimez les battre comme plâtre puis prendre un verre, près de l’âtre tels ces Nazis des camps qui écoutaient du Wagner pour se détendre après avoir réduit en cendres leurs frères humains Tout le monde connaît le chemin du coeur auquel vous préférez l’horreur de cette négation du genre humain

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    K

    Kamel Zebdi

    @kamelZebdi

    Haine blanche Tu avais faim J'étais malade et tu me visitais Auprès de mon lit d'hôpital Tu t'es assis Sur la table Mon verre de lait tu bus mon verre de lait Tu avais faim depuis des siècles et ce, peut-être à cause des miens Qui longtemps Ont régné sur le pays J'ai beaucoup d'amitié Pour toi Je ne puis cependant condamner les miens Reviens demain Je te redonnerai Mon verre de lait Ta haine bleue et noire N'en sera que plus blanche je ne puis quant à moi pour les miens que mourir Délibérément De soif Viens t'assouvir Malheureux Dans le verre de ma vie Viens étancher ta soif

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    L

    Louis Calaferte

    @louisCalaferte

    Haïssez celui qui n’est pas de votre race Haïssez celui qui n’est pas de votre race. Haïssez celui qui n’a pas votre foi. Haïssez celui qui n’est pas de votre rang social. Haïssez, haïssez, vous serez haï. De la haine, on passera à la croisade, Vous tuerez ou vous serez tué. Quoi qu’il en soit, vous serez les victimes de votre haine. La loi est ainsi : Vous ne pouvez être heureux seul. Si l’autre n’est pas heureux, vous ne le serez pas non plus, Si l’autre n’a pas d’avenir, vous n’en aurez pas non plus, Si l’autre vit d’amertume, vous en vivrez aussi, Si l’autre est sans amour, vous le serez aussi. Le monde est nous tous, ou rien. L’abri de votre égoïsme est sans effet dans l’éternité. Si l’autre n’existe pas, vous n’existez pas non plus.

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    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Prométhée À Daniel Stern. Frappe encor, Jupiter, accable-moi, mutile L’ennemi terrassé que tu sais impuissant ! Écraser n’est pas vaincre, et ta foudre inutile S’éteindra dans mon sang, Avant d’avoir dompté l’héroïque pensée Qui fait du vieux Titan un révolté divin ; C’est elle qui te brave, et ta rage insensée N’a cloué sur ces monts qu’un simulacre vain. Tes coups n’auront porté que sur un peu d’argile ; Libre dans les liens de cette chair fragile, L’âme de Prométhée échappe à ta fureur. Sous l’ongle du vautour qui sans fin me dévore, Un invisible amour fait palpiter encore Les lambeaux de mon coeur. Si ces pics désolés que la tempête assiège Ont vu couler parfois sur leur manteau de neige Des larmes que mes yeux ne pouvaient retenir, Vous le savez, rochers, immuables murailles Que d’horreur cependant je sentais tressaillir, La source de mes pleurs était dans mes entrailles ; C’est la compassion qui les a fait jaillir. Ce n’était point assez de mon propre martyre ; Ces flancs ouverts, ce sein qu’un bras divin déchire Est rempli de pitié pour d’autres malheureux. Je les vois engager une lutte éternelle ; L’image horrible est là ; j’ai devant la prunelle La vision des maux qui vont fondre sur eux. Ce spectacle navrant m’obsède et m’exaspère. Supplice intolérable et toujours renaissant, Mon vrai, mon seul vautour, c’est la pensée amère Que rien n’arrachera ces germes de misére Que ta haine a semés dans leur chair et leur sang. Pourtant, ô Jupiter, l’homme est ta créature ; C’est toi qui l’as conçu, c’est toi qui l’as formé, Cet être déplorable, infirme, désarmé, Pour qui tout est danger, épouvante, torture, Qui, dans le cercle étroit de ses jours enfermé, Étouffe et se débat, se blesse et se lamente. Ah ! quand tu le jetas sur la terre inclémente, Tu savais quels fléaux l’y devaient assaillir, Qu’on lui disputerait sa place et sa pâture, Qu’un souffle l’abattrait, que l’aveugle Nature Dans son indifférence allait l’ensevelir. Je l’ai trouvé blotti sous quelque roche humide, Ou rampant dans les bois, spectre hâve et timide Qui n’entendait partout que gronder et rugir, Seul affamé, seul triste au grand banquet des êtres, Du fond des eaux, du sein des profondeurs champêtres Tremblant toujours de voir un ennemi surgir. Mais quoi ! sur cet objet de ta haine immortelle, Imprudent que j’étais, je me suis attendri ; J’allumai la pensée et jetai l’étincelle Dans cet obscur limon dont tu l’avais pétri. Il n’était qu’ébauché, j’achevai ton ouvrage. Plein d’espoir et d’audace, en mes vastes desseins J’aurais sans hésiter mis les cieux au pillage, Pour le doter après du fruit de mes larcins. Je t’ai ravi le feu ; de conquête en conquête J’arrachais de tes mains ton sceptre révéré. Grand Dieu ! ta foudre à temps éclata sur ma tête ; Encore un attentat, l’homme était délivré ! La voici donc ma faute, exécrable et sublime. Compatir, quel forfait ! Se dévouer, quel crime ! Quoi ! j’aurais, impuni, défiant tes rigueurs, Ouvert aux opprimés mes bras libérateurs ? Insensé ! m’être ému quand la pitié s’expie ! Pourtant c’est Prométhée, oui, c’est ce même impie Qui naguère t’aidait à vaincre les Titans. J’étais à tes côtés dans l’ardente mêlée ; Tandis que mes conseils guidaient les combattants, Mes coups faisaient trembler la demeure étoilée. Il s’agissait pour moi du sort de l’univers : Je voulais en finir avec les dieux pervers. Ton règne allait m’ouvrir cette ère pacifique Que mon coeur transporté saluait de ses voeux. En son cours éthéré le soleil magnifique N’aurait plus éclairé que des êtres heureux. La Terreur s’enfuyait en écartant les ombres Qui voilaient ton sourire ineffable et clément, Et le réseau d’airain des Nécessités sombres Se brisait de lui-même aux pieds d’un maître aimant. Tout était joie, amour, essor, efflorescence ; Lui-même Dieu n’était que le rayonnement De la toute-bonté dans la toute-puissance. O mes désirs trompés ! O songe évanoui ! Des splendeurs d’un tel rêve, encor l’oeil ébloui, Me retrouver devant l’iniquité céleste. Devant un Dieu jaloux qui frappe et qui déteste, Et dans mon désespoir me dire avec horreur : « Celui qui pouvait tout a voulu la douleur ! » Mais ne t’abuse point ! Sur ce roc solitaire Tu ne me verras pas succomber en entier. Un esprit de révolte a transformé la terre, Et j’ai dès aujourd’hui choisi mon héritier. Il poursuivra mon oeuvre en marchant sur ma trace, Né qu’il est comme moi pour tenter et souffrir. Aux humains affranchis je lègue mon audace, Héritage sacré qui ne peut plus périr. La raison s’affermit, le doute est prêt à naître. Enhardis à ce point d’interroger leur maître, Des mortels devant eux oseront te citer : Pourquoi leurs maux ? Pourquoi ton caprice et ta haine ? Oui, ton juge t’attend, – la conscience humaine ; Elle ne peut t’absoudre et va te rejeter. Le voilà, ce vengeur promis à ma détresse ! Ah ! quel souffle épuré d’amour et d’allégresse En traversant le monde enivrera mon coeur Le jour où, moins hardie encor que magnanime, Au lieu de l’accuser, ton auguste victime Niera son oppresseur ! Délivré de la Foi comme d’un mauvais rêve, L’homme répudiera les tyrans immortels, Et n’ira plus, en proie à des terreurs sans trêve, Se courber lâchement au pied de tes autels. Las de le trouver sourd, il croira le ciel vide. Jetant sur toi son voile éternel et splendide, La Nature déjà te cache à son regard ; Il ne découvrira dans l’univers sans borne, Pour tout Dieu désormais, qu’un couple aveugle et morne, La Force et le Hasard. Montre-toi, Jupiter, éclate alors, fulmine, Contre ce fugitif à ton joug échappé ! Refusant dans ses maux de voir ta main divine, Par un pouvoir fatal il se dira frappé. Il tombera sans peur, sans plainte, sans prière ; Et quand tu donnerais ton aigle et ton tonnerre Pour l’entendre pousser, au fort de son tourment, Un seul cri qui t’atteste, une injure, un blasphème, Il restera muet : ce silence suprême Sera ton châtiment. Tu n’auras plus que moi dans ton immense empire Pour croire encore en toi, funeste Déité. Plutôt nier le jour ou l’air que je respire Que ta puissance inique et que ta cruauté. Perdu dans cet azur, sur ces hauteurs sublimes, Ah ! j’ai vu de trop près tes fureurs et tes crimes ; J’ai sous tes coups déjà trop souffert, trop saigné ; Le doute est impossible à mon coeur indigné. Oui ! tandis que du Mal, oeuvre de ta colère, Renonçant désormais à sonder le mystère, L’esprit humain ailleurs portera son flambeau, Seul je saurai le mot de cette énigme obscure, Et j’aurai reconnu, pour comble de torture, Un Dieu dans mon bourreau. Nice, 30 novembre 1865

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    L

    Louise Ackermann

    @louiseAckermann

    Satan Nous voilà donc encore une fois en présence, Lui le tyran divin, moi le vieux révolté. Or je suis la Justice, il n’est que la Puissance ; A qui va, de nous deux, rester l’Humanité ? Ah ! tu comptais sans moi, Divinité funeste, Lorsque tu façonnais le premier couple humain, Et que dans ton Éden, sous ton regard céleste, Tu l’enfermas jadis au sortir de ta main. Je n’eus qu’à le voir là, languissant et stupide, Comme un simple animal errer et végéter, Pour concevoir soudain dans mon âme intrépide L’audacieux dessein de te le disputer. Quoi ! je l’aurais laissée, au sein de la nature, Sans espoir à jamais s’engourdir en ce lieu ? Je l’aimais trop déjà, la faible créature, Et je ne pouvais pas l’abandonner à Dieu. Contre ta volonté, c’est moi qui l’ai fait naître, Le désir de savoir en cet être ébauché ; Puisque pour s’achever, pour penser, pour connaître, Il fallait qu’il péchât, eh bien ! il a péché. Il le prit de ma main, ce fruit de délivrance, Qu’il n’eût osé tout seul ni cueillir ni goûter : Sortir du fond obscur d’une éroite ignorance, Ce n’était point déchoir, non, non ! c’était monter. Le premier pas est fait, l’ascension commence ; Ton Paradis, tu peux le fermer à ton gré ; Quand tu l’eusses rouvert en un jour de clémence, Le noble fugitif n’y fût jamais rentré. Ah ! plutôt le désert, plutôt la roche humide, Que ce jardin de fleurs et d’azur couronné ! C’en est fait pour toujours du pauvre Adam timide ; Voici qu’un nouvel être a surgi : l’Homme est né ! L’Homme, mon œuvre, à moi, car j’y mis tout moi-même : Il ne saurait tromper mes vœux ni mon dessein. Défiant ton courroux, par un effort suprême J’éveillai la raison qui dormait en son sein. Cet éclair faible encor, cette lueur première Que deviendra le jour, c’est de moi qu’il ta tient. Nous avons tous les deux créé notre lumière, Oui, mais mon Fiat lux l’emporte sur le tien ! Il a du premier coup levé bien d’autres voiles Que ceux du vieux chaos où se jouait ta main. Toi, tu n’as que ton ciel pour semer tes étoiles ; Pour lancer mon soleil, moi, j’ai l’esprit humain ! (fragment)

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    Marceline Desbordes-Valmore

    Marceline Desbordes-Valmore

    @marcelineDesbordesValmore

    À l'amour Reprends de ce bouquet les trompeuses couleurs, Ces lettres qui font mon supplice, Ce portrait qui fut ton complice ; Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs. Je te rends ce trésor funeste, Ce froid témoin de mon affreux ennui. Ton souvenir brûlant, que je déteste, Sera bientôt froid comme lui. Oh ! Reprends tout. Si ma main tremble encore, C'est que j'ai cru te voir sous ces traits que j'abhorre. Oui, j'ai cru rencontrer le regard d'un trompeur ; Ce fantôme a troublé mon courage timide. Ciel ! On peut donc mourir à l'aspect d'un perfide, Si son ombre fait tant de peur ! Comme ces feux errants dont le reflet égare, La flamme de ses yeux a passé devant moi ; Je rougis d'oublier qu'enfin tout nous sépare ; Mais je n'en rougis que pour toi. Que mes froids sentiments s'expriment avec peine ! Amour... que je te hais de m'apprendre la haine ! Eloigne-toi, reprends ces trompeuses couleurs, Ces lettres, qui font mon supplice, Ce portrait, qui fut ton complice ; Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs ! Cache au moins ma colère au cruel qui t'envoie, Dis que j'ai tout brisé, sans larmes, sans efforts ; En lui peignant mes douloureux transports, Tu lui donnerais trop de joie. Reprends aussi, reprends les écrits dangereux, Où, cachant sous des fleurs son premier artifice, Il voulut essayer sa cruauté novice Sur un coeur simple et malheureux. Quand tu voudras encore égarer l'innocence, Quand tu voudras voir brûler et languir, Quand tu voudras faire aimer et mourir, N'emprunte pas d'autre éloquence. L'art de séduire est là, comme il est dans son coeur ! Va ! Tu n'as plus besoin d'étude. Sois léger par penchant, ingrat par habitude, Donne la fièvre, amour, et garde ta froideur. Ne change rien aux aveux pleins de charmes Dont la magie entraîne au désespoir : Tu peux de chaque mot calculer le pouvoir, Et choisir ceux encore imprégnés de mes larmes... Il n'ose me répondre, il s'envole... il est loin. Puisse-t-il d'un ingrat éterniser l'absence ! Il faudrait par fierté sourire en sa présence : J'aime mieux souffrir sans témoin. Il ne reviendra plus, il sait que je l'abhorre ; Je l'ai dit à l'amour, qui déjà s'est enfui. S'il osait revenir, je le dirais encore : Mais on approche, on parle... hélas ! Ce n'est pas lui !

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    M

    Maurice Rollinat

    @mauriceRollinat

    Le vieux haineux Ce mort qui vient là-bas fut un propriétaire Qui lui fit dans sa vie autant de mal qu'il put. Donc, le voilà debout, travail interrompu, Pour voir son ennemi qu'enfin on porte en terre. Regardant s'avancer la bière, il rit, se moque, Et, tous ses vieux griefs fermentés en longueur Que son clair souvenir haineusement évoque, Un à un, triomphants, se lèvent dans son cœur. Mais, pendant qu'il ricane au défunt détesté, La terre, l'eau, l'azur, les airs et la clarté, Tout est amour, tendresse, oubli, calme ! Il commence À subir peu à peu cet entour de clémence ; Toujours plus la Nature, en son large abandon, Lui prêche le respect du mort et le pardon, À la miséricorde enfin son âme s'ouvre, Et, lorsque le cercueil passe en face de lui, Il montre en son œil terne une larme qui luit, Et, coudant le genou, s'incline et se découvre.

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    Adieu Hélas ! je n'étais pas fait pour cette haine Et pour ce mépris plus forts que moi que j'ai. Mais pourquoi m'avoir fait cet agneau sans laine Et pourquoi m'avoir fait ce coeur outragé ? J'étais né pour plaire à toute âme un peu fière, Sorte d'homme en rêve et capable du mieux, Parfois tout sourire et parfois tout prière, Et toujours des cieux attendris dans les yeux ; Toujours la bonté des caresses sincères, En dépit de tout et quoi qu'il y parût, Toujours la pudeur des hontes nécessaires Dans l'argent brutal et les stupeurs du rut ; Toujours le pardon, toujours le sacrifice ! J'eus plus d'un des torts, mais j'avais tous les soins. Votre mère était tendrement ma complice, Qui voyait mes torts et mes soins, elle, au moins. Elle n'aimait pas que par vous je souffrisse. Elle est morte et j'ai prié sur son tombeau ; Mais je doute fort qu'elle approuve et bénisse La chose actuelle et trouve cela beau. Et j'ai peur aussi, nous en terre, de croire Que le pauvre enfant, votre fils et le mien, Ne vénérera pas trop votre mémoire, Ô vous sans égard pour le mien et le tien. Je n'étais pas fait pour dire de ces choses, Moi dont la parole exhalait autrefois Un épithalame en des apothéoses, Ce chant du matin où mentait votre voix. J'étais, je suis né pour plaire aux nobles âmes, Pour les consoler un peu d'un monde impur, Cimier d'or chanteur et tunique de flammes, Moi le Chevalier qui saigne sur azur, Moi qui dois mourir d'une mort douce et chaste Dont le cygne et l'aigle encor seront jaloux, Dans l'honneur vainqueur malgré ce vous néfaste, Dans la gloire aussi des Illustres Époux !

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    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    Child wife Vous n’avez rien compris à ma simplicité, Rien, ô ma pauvre enfant ! Et c’est avec un front éventé, dépité Que vous fuyez devant. Vos yeux qui ne devaient refléter que douceur, Pauvre cher bleu miroir Ont pris un ton de fiel, ô lamentable sœur, Qui nous font mal à voir. Et vous gesticulez avec vos petits bras Comme un héros méchant, En poussant d’aigres cris poitrinaires, hélas ! Vous qui n’étiez que chant ! Car vous avez eu peur de l’orage et du cœur Qui grondait et sifflait, Et vous bêlâtes vers votre mère – ô douleur ! – Comme un triste agnelet. Et vous n’aurez pas su la lumière et l’honneur D’un amour brave et fort, Joyeux dans le malheur, grave dans le bonheur, Jeune jusqu’à la mort ! Londres, 2 avril 1873

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Contre Denise Sorcière L’inimitié que je te porte. Passe celle, tant elle est forte, Des aigneaux et des loups, Vieille sorcière deshontée, Que les bourreaux ont fouettée Te honnissant de coups. Tirant après toy une presse D’hommes et de femmes espesse, Tu monstrois nud le flanc. Et monstrois nud parmy la rue L’estomac, et l’espaule nue Rougissante de sang. Mais la peine fut bien petite. Si lon balance ton mérite : Le Ciel ne devoit pas Pardonner à si lasche teste, Ains il devoit de sa tempeste L’acravanter à bas. La Terre mère encor pleurante Des Geans la mort violante Bruslez du feu des cieux, (Te laschant de son ventre à peine) T’engendra, vieille, pour la haine Qu’elle portait aux Dieux. Tu sçais que vaut mixtionnée La drogue qui nous est donnée Des pays chaleureux. Et en quel mois, en quelles heures Les fleurs des femmes sont meilleures Au breuvage amoureux. Nulle herbe, soit elle aux montagnes. Ou soit venimeuse aux campagnes, Tes yeux sorciers ne fuit. Que tu as mille fois coupée D’une serpe d’airain courbée, Béant contre la nuit. Le soir, quand la Lune fouette Ses chevaux par la nuict muette, Pleine de rage, alors Voilant ta furieuse teste De la peau d’une estrange beste Tu t’eslances dehors. Au seul soufler de son haleine Les chiens effroyez par la plaine Aguisent leurs abois : Les fleuves contremont reculent. Les loups effroyablement hurlent Apres toy par les bois. Adonc par les lieux solitaires. Et par l’horreur des cimetaires Où tu hantes le plus, Au son des vers que tu murmures Les corps des morts tu des-emmures De leurs tombeaux reclus. Vestant de l’un l’image vaine Tu viens effroyer d’une peine (Rebarbotant un sort) Quelque veufve qui se tourmente, Ou quelque mère qui lamente Son seul héritier mort. Tu fais que la Lune enchantée Marche par l’air toute argentée, Luy dardant d’icy bas Telle couleur aux joues pâlies. Que le son de mille cymbales Ne divertiroit pas. Tu es la frayeur du village : Chacun craignant ton sorcelage Te ferme sa maison. Tremblant de peur que tu ne taches Ses bœufs, ses moutons et ses vaches Du just de ta poison. J ’ay veu souvent ton œil senestre. Trois fois regardant de loin paistre La guide du troupeau. L’ensorceler de telle sorte. Que tost après je la vy morte Et les vers sur la peau. Comme toy, Medée exécrable Fut bien quelquefois profitable : Ses venins ont servy, Reverdissant d’Eson l’escorce : Au contraire, tu m’as par force Mon beau printemps ravy. Dieux ! si là haut pitié demeure, Pour recompense qu’elle meure, Et ses os diffamez Privez d’honneur de sépulture, Soient des oiseaux goulus pasture, Et des chiens affamez.

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    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Ha ! que je porte et de haine et d'envie Ha ! que je porte et de haine et d'envie Au médecin qui vient soir et matin Sans nul propos tâtonner le tétin, Le sein, le ventre et les flancs de m'amie ! Las ! il n'est pas si soigneux de sa vie Comme elle pense, il est méchant et fin : Cent fois le jour ne la vient voir, qu'à fin De voir son sein qui d'aimer le convie. Vous qui avez de sa fièvre le soin, Je vous supplie de me chasser bien loin Ce médecin, amoureux de m'amie, Qui fait semblant de la venir panser : Que plût à Dieu, pour l'en récompenser, Qu'il eût mon mal, et qu'elle fût guérie !

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    R

    Renee Vivien

    @reneeVivien

    Amour, toi le larron Amour, toi, le larron éternel, qui dérobes Les lourds trésors des cœurs et le secret des robes ! Tu te glisses et te dissimules la nuit, Et ton pas est le pas du traître qui s’enfuit… Ton pas est plus léger que le doux pas du Songe ! Et l’on n’entend jamais ce bruit sournois qui ronge. N’as-tu point d’amitié ? N’as-tu point de raison ? Voici que s’insinue en mon cœur ton poison. Épargne-moi ! Vois mon visage et mon front blême… Mon ennemi, l’Amour, je te hais et je t’aime.

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    R

    Renee Vivien

    @reneeVivien

    À l’ennemie aimée Tes mains ont saccagé mes trésors les plus rares, Et mon cœur est captif entre tes mains barbares. Tu secouas au vent du nord tes longs cheveux Et j’ai dit aussitôt : Je veux ce que tu veux. Mais je te hais pourtant d’être ainsi ton domaine, Ta serve… Mais je sens que ma révolte est vaine. Je te hais cependant d’avoir subi tes lois, D’avoir senti mon cœur près de ton cœur sournois… Et parfois je regrette, en cette splendeur rare Qu’est pour moi ton amour, la liberté barbare…

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