splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi
@arthurRimbaud profile image

Arthur Rimbaud

Auteurplume

Arthur Rimbaud est un poète français, né le 20 octobre 1854 à Charleville et mort le 10 novembre 1891 à Marseille. Bien que brève, son œuvre poétique est caractérisée par une prodigieuse densité thématique et stylistique, faisant de lui une des figures majeures de la littérature française. Arthur Rimbaud écrit ses premiers poèmes à 15 ans. Après une brève phase d'initiation, par assimilation du style des grands poètes contemporains (Charles Baudelaire, Victor Hugo, Théodore de Banville...), développant déjà une franche originalité dans l'approche de thèmes classiques (« Le Dormeur du val », « Vénus Anadyomène »), il cherche à dépasser ces influences en développant ses propres conceptions théoriques, déclarant que le poète doit se faire « voyant », c'est-à-dire chercher et décrire l'inconnu par delà les perceptions humaines usuelles, quitte à y sacrifier sa propre intégrité mentale ou physique. Dès lors, il se met à innover radicalement en matière d'audace formelle, jusqu'à aborder le genre du poème en prose, alors à ses balbutiements (parsemant ses œuvres d'apophtegmes énigmatiques, comme « changer la vie », « posséder la vérité dans une âme et un corps » ou « il faut être absolument moderne », qui seront repris comme des slogans par les poètes du XXe siècle, en particulier le mouvement surréaliste). Il entretient parallèlement une aventure amoureuse tumultueuse avec le poète Paul Verlaine, qui influence profondément son œuvre. Vers l'âge de 20 ans, il renonce subitement à la littérature, n'ayant alors publié qu'un seul ouvrage à compte d'auteur — Une saison en enfer — et quelques poèmes épars dans des revues confidentielles, ce qui contribue encore à son mythe. Il se consacre alors dans un premier temps à l'apprentissage de plusieurs langues, puis, mû par ses idées marginales, anti-bourgeoises et libertaires, choisit une vie aventureuse, dont les pérégrinations l'amènent jusqu'en Abyssinie, où il devient négociant (quincaillerie, bazar, vêtements, café, etc.) et explorateur. Sa tentative d'armer Ménélik avec l'aval du Consul de France s'avère désastreuse pour lui ; son unique « trafic d'armes » n'a véritablement qu'une incidence politique symbolique, mais contribue à sa légende. De cette seconde vie, exotique, les seuls écrits connus consistent en près de 180 lettres (correspondance familiale et professionnelle) et quelques descriptions géographiques. Des poèmes comme Le Bateau ivre, Le Dormeur du val ou Voyelles comptent parmi les plus célèbres de la poésie française. La précocité de son génie, sa carrière littéraire fulgurante, sa vie brève et aventureuse contribuent à forger sa légende et faire de lui l'un des géants de la littérature mondiale.

...plus

Compte non officiel

Poésies

85

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Chanson de la plus haute tour Oisive jeunesse À tout asservie, Par délicatesse J'ai perdu ma vie. Ah! que le temps vienne Où les cœurs s'éprennent. Je me suis dit : laisse, Et qu'on ne te voie : Et sans la promesse De plus hautes joies. Que rien ne t'arrête Auguste retraite.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Fête d'hiver La cascade sonne derrière les huttes d'opéra-comique. Des girandoles prolongent, dans les vergers et les allées voisins du Méandre, — les verts et les rouges du couchant. Nymphes d'Horace coiffées au Premier Empire, — Rondes Sibériennes, Chinoises de Boucher.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Fête galante Rêveur, Scapin Gratte un lapin Sous sa capote. Colombina, -Que l'on pina! - - Do, mi, - tapote L'œil du lapin Qui tôt, tapin, Est en ribote...

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Bruxelles Plates-bandes d’amarantes jusqu’à L’agréable palais de Jupiter. – Je sais que c’est Toi qui, dans ces lieux, Mêles ton bleu presque de Sahara ! Puis, comme rose et sapin du soleil Et liane ont ici leurs jeux enclos, Cage de la petite veuve !… Quelles Troupes d’oiseaux, ô ia io, ia io !… – Calmes maisons, anciennes passions ! Kiosque de la Folle par affection. Après les fesses des rosiers, balcon Ombreux et très bas de la Juliette. – La Juliette, ça rappelle l’Henriette, Charmante station du chemin de fer, Au coeur d’un mont, comme au fond d’un verger Où mille diables bleus dansent dans l’air ! Banc vert où chante au paradis d’orage, Sur la guitare, la blanche Irlandaise. Puis, de la salle à manger guyanaise, Bavardage des enfants et des cages. Fenêtre du duc qui fais que je pense Au poison des escargots et du buis Qui dort ici-bas au soleil. Et puis C’est trop beau ! trop ! Gardons notre silence. – Boulevard sans mouvement ni commerce, Muet, tout drame et toute comédie, Réunion des scènes infinie Je te connais et t’admire en silence.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Ce qu'on dit au poète à propos de fleurs À Monsieur Théodore de Banville Ainsi, toujours, vers l'azur noir Où tremble la mer des topazes, Fonctionneront dans ton soir Les Lys, ces clystères d'extases ! À notre époque de sagous, Quand les Plantes sont travailleuses, Le Lys boira les bleus dégoûts Dans tes Proses religieuses ! - Le lys de monsieur de Kerdrel, Le Sonnet de mil huit cent trente, Le Lys qu'on donne au Ménestrel Avec l'oeillet et l'amarante ! Des lys ! Des lys ! On n'en voit pas ! Et dans ton Vers, tel que les manches Des Pécheresses aux doux pas, Toujours frissonnent ces fleurs blanches ! Toujours, Cher, quand tu prends un bain, Ta chemise aux aisselles blondes Se gonfle aux brises du matin Sur les myosotis immondes ! L'amour ne passe à tes octrois Que les Lilas, - ô balançoires ! Et les Violettes du Bois, Crachats sucrés des Nymphes noires !... II Ô Poètes, quand vous auriez Les Roses, les Roses soufflées, Rouges sur tiges de lauriers, Et de mille octaves enflées ! Quand Banville en ferait neiger, Sanguinolentes, tournoyantes, Pochant l'oeil fou de l'étranger Aux lectures mal bienveillantes ! De vos forêts et de vos prés, Ô très paisibles photographes ! La Flore est diverse à peu près Comme des bouchons de carafes ! Toujours les végétaux Français, Hargneux, phtisiques, ridicules, Où le ventre des chiens bassets Navigue en paix, aux crépuscules ; Toujours, après d'affreux dessins De Lotos bleus ou d'Hélianthes, Estampes roses, sujets saints Pour de jeunes communiantes ! L'Ode Açoka cadre avec la Strophe en fenêtre de lorette ; Et de lourds papillons d'éclat Fientent sur la Pâquerette. Vieilles verdures, vieux galons ! Ô croquignoles végétales ! Fleurs fantasques des vieux Salons ! - Aux hannetons, pas aux crotales, Ces poupards végétaux en pleurs Que Grandville eût mis aux lisières, Et qu'allaitèrent de couleurs De méchants astres à visières ! Oui, vos bavures de pipeaux Font de précieuses glucoses ! - Tas d'oeufs frits dans de vieux chapeaux, Lys, Açokas, Lilas et Roses !... III Ô blanc Chasseur, qui cours sans bas À travers le Pâtis panique, Ne peux-tu pas, ne dois-tu pas Connaître un peu ta botanique ? Tu ferais succéder, je crains, Aux Grillons roux les Cantharides, L'or des Rios au bleu des Rhins, - Bref, aux Norwèges les Florides : Mais, Cher, l'Art n'est plus, maintenant, - C'est la vérité, - de permettre À l'Eucalyptus étonnant Des constrictors d'un hexamètre ; Là !... Comme si les Acajous Ne servaient, même en nos Guyanes, Qu'aux cascades des sapajous, Au lourd délire des lianes ! - En somme, une Fleur, Romarin Ou Lys, vive ou morte, vaut-elle Un excrément d'oiseau marin ? Vaut-elle un seul pleur de chandelle ? - Et j'ai dit ce que je voulais ! Toi, même assis là-bas, dans une Cabane de bambous, - volets Clos, tentures de perse brune, - Tu torcherais des floraisons Dignes d'Oises extravagantes !... - Poète ! ce sont des raisons Non moins risibles qu'arrogantes !... IV Dis, non les pampas printaniers Noirs d'épouvantables révoltes, Mais les tabacs, les cotonniers ! Dis les exotiques récoltes ! Dis, front blanc que Phébus tanna, De combien de dollars se rente Pedro Velasquez, Habana ; Incague la mer de Sorrente Où vont les Cygnes par milliers ; Que tes strophes soient des réclames Pour l'abatis des mangliers Fouillés des Hydres et des lames ! Ton quatrain plonge aux bois sanglants Et revient proposer aux Hommes Divers sujets de sucres blancs, De pectoraires et de gommes ! Sachons parToi si les blondeurs Des Pics neigeux, vers les Tropiques, Sont ou des insectes pondeurs Ou des lichens microscopiques ! Trouve, ô Chasseur, nous le voulons, Quelques garances parfumées Que la Nature en pantalons Fasse éclore ! - pour nos Armées ! Trouve, aux abords du Bois qui dort, Les fleurs, pareilles à des mufles, D'où bavent des pommades d'or Sur les cheveux sombres des Buffles ! Trouve, aux prés fous, où sur le Bleu Tremble l'argent des pubescences, Des calices pleins d'Oeufs de feu Qui cuisent parmi les essences ! Trouve des Chardons cotonneux Dont dix ânes aux yeux de braises Travaillent à filer les noeuds ! Trouve des Fleurs qui soient des chaises ! Oui, trouve au coeur des noirs filons Des fleurs presque pierres, - fameuses ! - Qui vers leurs durs ovaires blonds Aient des amygdales gemmeuses ! Sers-nous, ô Farceur, tu le peux, Sur un plat de vermeil splendide Des ragoûts de Lys sirupeux Mordant nos cuillers Alfénide ! V Quelqu'un dira le grand Amour, Voleur des sombres Indulgences : Mais ni Renan, ni le chat Murr N'ont vu les Bleus Thyrses immenses ! Toi, fais jouer dans nos torpeurs, Par les parfums les hystéries ; Exalte-nous vers les candeurs Plus candides que les Maries... Commerçant ! colon ! médium ! Ta Rime sourdra, rose ou blanche, Comme un rayon de sodium, Comme un caoutchouc qui s'épanche ! De tes noirs Poèmes, - Jongleur ! Blancs, verts, et rouges dioptriques, Que s'évadent d'étranges fleurs Et des papillons électriques ! Voilà ! c'est le Siècle d'enfer ! Et les poteaux télégraphiques Vont orner, - lyre aux chants de fer, Tes omoplates magnifiques ! Surtout, rime une version Sur le mal des pommes de terre ! - Et, pour la composition De poèmes pleins de mystère Qu'on doive lire de Tréguier À Paramaribo, rachète Des Tomes de Monsieur Figuier, - Illustrés ! - chez Monsieur Hachette !

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    A Isabelle Rimbaud Marseille, 23 juin 1891. Ma chère sœur, Tu ne m'as pas écrit ; que s'est-il passé ? Ta lettre m'avait fait peur, j'aimerais avoir de tes nouvelles. Pourvu qu'il ne s'agisse pas de nouveaux ennuis, car, hélas, nous sommes trop éprouvés à la fois ! Pour moi, je ne fais que pleurer jour et nuit, je suis un homme mort, je suis estropié pour toute ma vie. Dans la quinzaine, je serai guéri, je pense ; mais je ne pourrai marcher qu'avec des béquilles. Quant à une jambe artificielle, le médecin dit qu'il faudra attendre très longtemps, au moins six mois ! Pendant ce temps que ferai-je, où resterai-je ? Si j'allais chez vous, le froid me chasserait dans trois mois, et même en moins de temps ; car, d'ici, je ne serai capable de me mouvoir que dans six semaines, le temps de m'exercer à béquiller ! Je ne serais donc chez vous que fin juillet. Et il me faudrait repartir fin septembre. Je ne sais pas du tout quoi faire. Tous ces soucis me rendent fou : je ne dors jamais une minute. Enfin, notre vie est une misère, une misère sans fin ! Pourquoi donc existons-nous ? Envoyez-moi de vos nouvelles. Mes meilleurs souhaits. RIMBAUD Hôpital de la Conception, Marseille.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Accroupissements Bien tard, quand il se sent l’estomac écœuré, Le frère Milotus un œil à la lucarne D’où le soleil, clair comme un chaudron récuré, Lui darde une migraine et fait son regard darne, Déplace dans les draps son ventre de curé. Il se démène sous sa couverture grise Et descend ses genoux à son ventre tremblant, Effaré comme un vieux qui mangerait sa prise, Car il lui faut, le poing à l’anse d’un pot blanc, À ses reins largement retrousser sa chemise ! Or, il s’est accroupi frileux, les doigts de pied Repliés grelottant au clair soleil qui plaque Des jaunes de brioches aux vitres de papiers, Et le nez du bonhomme où s’allume la laque Renifle aux rayons, tel qu’un charnel polypier. · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Le bonhomme mijote au feu, bras tordus, lippe Au ventre : il sent glisser ses cuisses dans le feu Et ses chausses roussir et s’éteindre sa pipe ; Quelque chose comme un oiseau remue un peu À son ventre serein comme un monceau de tripe ! Autour, dort un fouillis de meubles abrutis Dans des haillons de crasse et sur de sales ventres, Des escabeaux, crapauds étranges, sont blottis Aux coins noirs : des buffets ont des gueules de chantres Qu’entr’ouvre un sommeil plein d’horribles appétits. L’écœurante chaleur gorge la chambre étroite, Le cerveau du bonhomme est bourré de chiffons, Il écoute les poils pousser dans sa peau moite Et parfois en hoquets fort gravement bouffons S’échappe, secouant son escabeau qui boite… · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Et le soir, aux rayons de lune qui lui font Aux contours du cul des bavures de lumière, Une ombre avec détails s’accroupit sur un fond De neige rose ainsi qu’une rose trémière… Fantasque, un nez poursuit Vénus au ciel profond.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Angoisse Se peut-il qu'Elle me fasse pardonner les ambitions continuellement écrasées, — qu'une fin aisée répare les âges d'indigence, — qu'un jour de succès nous endorme sur la honte de notre inhabileté fatale ? (Ô palmes ! diamant ! — Amour, force ! — plus haut que toutes joies et gloires ! — de toutes façons, partout, — démon, dieu, — Jeunesse de cet être-ci ; moi !) Que des accidents de féerie scientifique et des mouvements de fraternité sociale soient chéris comme restitution progressive de la franchise première ?... Mais la Vampire qui nous rend gentils commande que nous nous amusions avec ce qu'elle nous laisse, ou qu'autrement nous soyons plus drôles. Rouler aux blessures, par l'air lassant et la mer ; aux supplices, par le silence des eaux et de l'air meurtriers ; aux toriures qui rient, dans leur silence atrocement houleux.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Antique Gracieux fils de Pan ! Autour de ton front couronné de fleurettes et de baies tes yeux, des boules précieuses, remuent. Tachées de lies brunes, tes joues se creusent. Tes crocs luisent. Ta poitrine ressemble à une cithare, des tintements circulent dans tes bras blonds. Ton cœur bat dans ce ventre où dort le double sexe. Promène-toi, la nuit, en mouvant doucement cette cuisse, cette seconde cuisse et cette jambe de gauche.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Au Cabaret Vert, cinq heures du soir Depuis huit jours, j’avais déchiré mes bottines Aux cailloux des chemins. J’entrais à Charleroi. – Au Cabaret-Vert : je demandai des tartines De beurre et du jambon qui fût à moitié froid. Bienheureux, j’allongeai les jambes sous la table Verte : je contemplai les sujets très naïfs De la tapisserie. – Et ce fut adorable, Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs, – Celle-là, ce n’est pas un baiser qui l’épeure ! – Rieuse, m’apporta des tartines de beurre, Du jambon tiède, dans un plat colorié, Du jambon rose et blanc parfumé d’une gousse D’ail, – et m’emplit la chope immense, avec sa mousse Que dorait un rayon de soleil arriéré.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Aube J’ai embrassé l’aube d’été. Rien ne bougeait encore au front des palais. L’eau était morte. Les camps d’ombres ne quittaient pas la route du bois. J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit. La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom. Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse. Alors je levai un à un les voiles. Dans l’allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l’ai dénoncée au coq. A la grand’ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre, je la chassais. En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu son immense corps. L’aube et l’enfant tombèrent au bas du bois. Au réveil il était midi.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Aux livres de chevet… Aux livres de chevet, livres de l’art serein, Obermann et Genlis, Ver-vert et le Lutrin, Blasé de nouveauté grisâtre et saugrenue, J’espère, la vieillesse étant enfin venue, Ajouter le Traité du Docteur Venetti. Je saurai, revenu du public abêti, Goûter le charme ancien des dessins nécessaires. Écrivain et graveur ont doré les misères Sexuelles : et c’est, n’est-ce pas, cordial : Dr Venetti, Traité de l’Amour conjugal. F. Coppée. A.R

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    A la musique Place de la Gare, à Charleville. Sur la place taillée en mesquines pelouses, Square où tout est correct, les arbres et les fleurs, Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses. – L’orchestre militaire, au milieu du jardin, Balance ses schakos dans la Valse des fifres : Autour, aux premiers rangs, parade le gandin ; Le notaire pend à ses breloques à chiffres. Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs : Les gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames Auprès desquelles vont, officieux cornacs, Celles dont les volants ont des airs de réclames ; Sur les bancs verts, des clubs d’épiciers retraités Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme, Fort sérieusement discutent les traités, Puis prisent en argent, et reprennent :  » En somme !…  » Épatant sur son banc les rondeurs de ses reins, Un bourgeois à boutons clairs, bedaine flamande, Savoure son onnaing d’où le tabac par brins Déborde – vous savez, c’est de la contrebande ; – Le long des gazons verts ricanent les voyous ; Et, rendus amoureux par le chant des trombones, Très naïfs, et fumant des roses, les pioupious Caressent les bébés pour enjôler les bonnes… – Moi, je suis, débraillé comme un étudiant, Sous les marronniers verts les alertes fillettes : Elles le savent bien ; et tournent en riant, Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes. Je ne dis pas un mot : je regarde toujours La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles : Je suis, sous le corsage et les frêles atours, Le dos divin après la courbe des épaules. J’ai bientôt déniché la bottine, le bas… – Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres. Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas… – Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres…

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    À Theodore de Banville À Monsieur Théodore de Banville. Cher Maître, Charleville (Ardennes), le 24 mai 1870. À Monsieur Théodore de Banville. Cher Maître, Nous sommes aux mois d'amour ; j'ai dix-sept ans. L'âge des espérances et des chimères, comme on dit, — et voici que je me suis mis, enfant touché par le doigt de la Muse —, pardon si c'est banal, — à dire mes bonnes croyances, mes espérances, mes sensations, toutes ces choses des poètes, — moi j'appelle cela du printemps. Que si je vous envoie quelques-uns de ces vers, — et cela en passant par Alph. Lemerre, le bon éditeur, — c'est que j'aime tous les poètes, tous les bons Parnassiens, — puisque le poète est un Parnassien, — épris de la beauté idéale ; c'est que j'aime en vous, bien naïvement, un descendant de Ronsard, un frère de nos maîtres de 1830, un vrai romantique, un vrai poète. Voilà pourquoi. — C'est bête, n'est-ce pas, mais enfin ?... Dans deux ans, dans un an peut-être, je serai à Paris. — Anch'io, messieurs du journal, je serai Parnassien ! — Je ne sais ce que j'ai là... qui veut monter... — Je jure, cher maître, d'adorer toujours les deux déesses, Muse et Liberté. Ne faites pas trop la moue en lisant ces vers... Vous me rendriez fou de joie et d'espérance, si vous vouliez, cher Maître, faire faire à la pièce Credo in unam une petite place entre les Parnassiens... Je viendrais à la dernière série du Parnasse : cela ferait le Credo des poètes !... — Ambition ! ô Folle ! ARTHUR RIMBAUD Par les beaux soirs d'été, j'irai dans les sentiers, Picoté par les blés, fouler l'herbe menue : Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds. Je laisserai ie vent baigner ma tête nue. Je ne parlerai pas, je ne penserai rien : Mais un amour immense entrera dans mon âme, Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien, Par la Nature, — heureux comme avec une femme. 20 avril 1870 A.R. OPHÉLIE Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles La blanche Ophélia flotte comme un grand lys, 15 mai 1870 ARTHUR RIMBAUD.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Âge d'or Quelqu'une des voix Toujours angélique - Il s'agit de moi, - Vertement s'explique : Ces mille questions Qui se ramifient N'amènent, au fond, Qu'ivresse et folie ; Reconnais ce tour Si gai, si facile : Ce n'est qu'onde, flore, Et c'est ta famille ! Puis elle chante. Ô Si gai, si facile, Et visible à l'oeil nu... - Je chante avec elle, - Reconnais ce tour Si gai, si facile, Ce n'est qu'onde, flore, Et c'est ta famille !... etc... Et puis une voix - Est-elle angélique ! - Il s'agit de moi, Vertement s'explique ; Et chante à l'instant En soeur des haleines : D'un ton Allemand, Mais ardente et pleine : Le monde est vicieux ; Si cela t'étonne ! Vis et laisse au feu L'obscure infortune. Ô ! joli château ! Que ta vie est claire ! De quel Age es-tu, Nature princière De notre grand frère ! etc... Je chante aussi, moi : Multiples soeurs ! voix Pas du tout publiques ! Environnez-moi De gloire pudique... etc...

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Bal des pendus Au gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins, Les maigres paladins du diable, Les squelettes de Saladins. Messire Belzébuth tire par la cravate Ses petits pantins noirs grimaçant sur le ciel, Et, leur claquant au front un revers de savate, Les fait danser, danser aux sons d’un vieux Noël ! Et les pantins choqués enlacent leurs bras grêles Comme des orgues noirs, les poitrines à jour Que serraient autrefois les gentes damoiselles Se heurtent longuement dans un hideux amour. Hurrah ! les gais danseurs, qui n’avez plus de panse ! On peut cabrioler, les tréteaux sont si longs ! Hop ! qu’on ne sache plus si c’est bataille ou danse ! Belzébuth enragé racle ses violons ! Ô durs talons, jamais on n’use sa sandale ! Presque tous ont quitté la chemise de peau ; Le reste est peu gênant et se voit sans scandale. Sur les crânes, la neige applique un blanc chapeau : Le corbeau fait panache à ces têtes fêlées, Un morceau de chair tremble à leur maigre menton : On dirait, tournoyant dans les sombres mêlées, Des preux, raides, heurtant armures de carton. Hurrah ! la bise siffle au grand bal des squelettes ! Le gibet noir mugit comme un orgue de fer ! Les loups vont répondant des forêts violettes : A l’horizon, le ciel est d’un rouge d’enfer… Holà, secouez-moi ces capitans funèbres Qui défilent, sournois, de leurs gros doigts cassés Un chapelet d’amour sur leurs pâles vertèbres : Ce n’est pas un moustier ici, les trépassés ! Oh ! voilà qu’au milieu de la danse macabre Bondit dans le ciel rouge un grand squelette fou Emporté par l’élan, comme un cheval se cabre : Et, se sentant encor la corde raide au cou, Crispe ses petits doigts sur son fémur qui craque Avec des cris pareils à des ricanements, Et, comme un baladin rentre dans la baraque, Rebondit dans le bal au chant des ossements. Au gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins, Les maigres paladins du diable, Les squelettes de Saladins.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Bannières de mai Aux branches claires des tilleuls Meurt un maladif hallali. Mais des chansons spirituelles Voltigent parmi les groseilles. Que notre sang rie en nos veines, Voici s’enchevêtrer les vignes. Le ciel est joli comme un ange. L’azur et l’onde communient. Je sors. Si un rayon me blesse Je succomberai sur la mousse. Qu’on patiente et qu’on s’ennuie C’est trop simple. Fi de mes peines. je veux que l’été dramatique Me lie à son char de fortunes Que par toi beaucoup, ô Nature, – Ah moins seul et moins nul ! – je meure. Au lieu que les Bergers, c’est drôle, Meurent à peu près par le monde. Je veux bien que les saisons m’usent. A toi, Nature, je me rends ; Et ma faim et toute ma soif. Et, s’il te plaît, nourris, abreuve. Rien de rien ne m’illusionne ; C’est rire aux parents, qu’au soleil, Mais moi je ne veux rire à rien ; Et libre soit cette infortune.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Being Beauteous Devant une neige un Être de Beauté de haute taille. Des sifflements de mort et des cercles de musique sourde font monter, s'élargir et trembler comme un spectre ce corps adoré ; des blessures écarlates et noires éclatent dans les chairs superbes. Les couleurs propres de la vie se foncent, dansent, et se dégagent autour de la Vision, sur le chantier. Et les frissons s'élèvent et grondent et la saveur forcenée de ces effets se chargeant avec les sifflements mortels et les rauques musiques que le monde, loin derrière nous, lance sur notre mère de beauté, — elle recule, elle se dresse. Oh ! nos os sont revêtus d'un nouveau corps amoureux.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Bonne pensée du matin A quatre heures du matin, l’été, Le sommeil d’amour dure encore. Sous les bosquets l’aube évapore L’odeur du soir fêté. Mais là-bas dans l’immense chantier Vers le soleil des Hespérides, En bras de chemise, les charpentiers Déjà s’agitent. Dans leur désert de mousse, tranquilles, Ils préparent les lambris précieux Où la richesse de la ville Rira sous de faux cieux. Ah ! pour ces Ouvriers charmants Sujets d’un roi de Babylone, Vénus ! laisse un peu les Amants, Dont l’âme est en couronne. Ô Reine des Bergers ! Porte aux travailleurs l’eau-de-vie, Pour que leurs forces soient en paix En attendant le bain dans la mer, à midi.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Chant de guerre Parisien Le Printemps est évident, car Du coeur des Propriétés vertes, Le vol de Thiers et de Picard Tient ses splendeurs grandes ouvertes ! Ô Mai ! quels délirants culs-nus ! Sèvres, Meudon, Bagneux, Asnières, Ecoutez donc les bienvenus Semer les choses printanières ! Ils ont shako, sabre et tam-tam, Non la vieille boîte à bougies, Et des yoles qui n'ont jam, jam... Fendent le lac aux eaux rougies ! Plus que jamais nous bambochons Quand arrivent sur nos tanières Crouler les jaunes cabochons Dans des aubes particulières ! Thiers et Picard sont des Eros, Des enleveurs d'héliotropes ; Au pétrole ils font des Corots : Voici hannetonner leurs tropes... Ils sont familiers du Grand Truc !... Et couché dans les glaïeuls, Favre Fait son cillement aqueduc, Et ses reniflements à poivre ! La grand ville a le pavé chaud Malgré vos douches de pétrole, Et décidément, il nous faut Vous secouer dans votre rôle... Et les Ruraux qui se prélassent Dans de longs accroupissements, Entendront des rameaux qui cassent Parmi les rouges froissements !

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Comédie de la soif 1. Les parents Nous sommes tes Grands-Parents Les Grands ! Couverts des froides sueurs De la lune et des verdures. Nos vins secs avaient du cœur ! Au Soleil sans imposture Que faut-il à l’homme ? boire. MOI – Mourir aux fleuves barbares. Nous sommes tes Grands-Parents Des champs. L’eau est au fond des osiers : Vois le courant du fossé Autour du Château mouillé. Descendons en nos celliers ; Après, le cidre et le lait. MOI – Aller où boivent les vaches. Nous sommes tes Grands-Parents ; Tiens, prends Les liqueurs dans nos armoires Le Thé, le Café, si rares, Frémissent dans les boulloires. – Vois les images, les fleurs. Nous rentrons du cimetière. MOI – Ah ! tarir toutes les urnes ! 2. L’esprit Éternelles Ondines, Divisez l’eau fine. Vénus, sœur de l’azur, Emeus le flot pur. Juifs errants de Norwège Dites-moi la neige. Anciens exilés chers Dites-moi la mer. MOI – Non, plus ces boissons pures, Ces fleurs d’eau pour verres ; Légendes ni figures Ne me désaltèrent ; Chansonnier, ta filleule C’est ma soif si folle, Hydre intime sans gueules Qui mine et désole. 3. Les amis Viens, les Vins vont aux plages, Et les flots par millions ! Vois le Bitter sauvage Rouler du haut des monts ! Gagnons, pèlerins sages L’Absinthe aux verts piliers… MOI – Plus ces paysages. Qu’est l’ivresse, Amis ? J’aime autant, mieux, même, Pourrir dans l’étang, Sous l’affreuse crème, Près des bois flottants. 4. Le pauvre songe Peut-être un Soir m’attend Où je boirai tranquille En quelque vieille Ville, Et mourrai plus content : Puisque je suis patient ! Si mon mal se résigne Si j’ai jamais quelque or, Choisirai-je le Nord Ou le Pays des Vignes ?… – Ah songer est indigne Puisque c’est pure perte ! Et si je redeviens Le voyageur ancien, Jamais l’auberge verte Ne peut bien m’être ouverte. 5 – Conclusion Les pigeons qui tremblent dans la prairie, Le gibier, qui court et qui voit la nuit, Les bêtes des eaux, la bête asservie, Les derniers papillons !… ont soif aussi. Mais fondre où fond ce nuage sans guide, – Oh ! favorisé de ce qui est frais ! Expirer en ces violettes humides Dont les aurores chargent ces forêts ? Mai 1872

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Comédie en trois baisers Elle était fort déshabillée, Et de grands arbres indiscrets Aux vitres penchaient leur feuillée Malinement, tout près, tout près. Assise sur ma grande chaise, Mi-nue, elle joignait les mains. Sur le plancher frissonnaient d’aise Ses petits pieds si fins, si fins. — Je regardai, couleur de cire Un petit rayon buissonnier Papillonner, comme un sourire Sur son beau sein, mouche au rosier. — Je baisai ses fines chevilles. Elle eut un long rire tris-mal Qui s’égrenait en claires trilles, Une risure de cristal… Les petits pieds sous la chemise Se sauvèrent : « Veux-tu finir ! » — La première audace permise, Le rire feignait de punir ! — Pauvrets palpitants sous ma lèvre, Je baisai doucement ses yeux : — Elle jeta sa tête mièvre En arrière : « Oh c’est encor mieux !… » « Monsieur, j’ai deux mots à te dire… » — Je lui jetai le reste au sein Dans un baiser, qui la fit rire D’un bon rire qui voulait bien… — Elle était fort déshabillée Et de grands arbres indiscrets Aux vitres penchaient leur feuillée Malinement, tout près, tout près.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Entends comme brame Entends comme brame près des acacias en avril la rame viride du pois ! Dans sa vapeur nette, vers Phoebé ! tu vois s’agiter la tête de saints d’autrefois… Loin des claires meules des caps, des beaux toits, ces chers Anciens veulent ce philtre sournois… Or ni fériale ni astrale ! n’est la brume qu’exhale ce nocturne effet. Néanmoins ils restent, – Sicile, Allemagne, dans ce brouillard triste et blêmi, justement !

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Est-elle almée ? Est-elle almée ?... aux premières heures bleues Se détruira-t-elle comme les fleurs feues... Devant la splendide étendue où l'on sente Souffler la ville énormément florissante ! C'est trop beau ! c'est trop beau ! mais c'est nécessaire - Pour la Pêcheuse et la chanson du Corsaire, Et aussi puisque les derniers masques crurent Encore aux fêtes de nuit sur la mer pure !

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Exil Que l'on s'intéressa souvent, mon cher Conneau!... Plus qu'à l'Oncle Vainqueur, au Petit Ramponneau!... Que tout honnête insti net sort du Peuple débile !... Hélas ! ! Et qui a fait tourner mal notre bile!... Et qu'il nous sied déjà de pousser le verrou Au Vent que les enfants nomment Bari-barou!...

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Faim Si j’ai du goût, ce n’est guère Que pour la terre et les pierres. Je déjeune toujours d’air, De roc, de charbons, de fer. Mes faims, tournez. Paissez, faims, Le pré des sons. Attirez le gai venin Des liserons. Mangez les cailloux qu’on brise, Les vieilles pierres d’églises ; Les galets des vieux déluges, Pains semés dans les vallées grises. *** Le loup criait sous les feuilles En crachant les belles plumes De son repas de volailles : Comme lui je me consume. Les salades, les fruits N’attendent que la cueillette ; Mais l’araignée de la haie Ne mange que des violettes. Que je dorme ! que je bouille Aux autels de Salomon. Le bouillon court sur la rouille, Et se mêle au Cédron.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Fêtes de la faim Ma faim, Anne, Anne, Fuis sur ton âne. Si j’ai du goût, ce n’est guère Que pour la terre et les pierres. Dinn ! dinn ! dinn ! dinn ! je pais l’air, Le roc, les Terres, le fer. Tournez, les faims ! paissez, faims, Le pré des sons ! Puis l’humble et vibrant venin Des liserons ; Les cailloux qu’un pauvre brise, Les vieilles pierres d’églises, Les galets, fils des déluges, Pains couchés aux vallées grises ! Mes faims, c’est les bouts d’air noir ; L’azur sonneur ; – C’est l’estomac qui me tire, C’est le malheur. Sur terre ont paru les feuilles : Je vais aux chairs de fruit blettes. Au sein du sillon je cueille La doucette et la violette. Ma faim, Anne, Anne ! Fuis sur ton âne. (Deuxième version) Ma faim, Anne, Anne, Fuis sur ton âne. Si j’ai du goût, ce n’est guère Que pour la terre et les pierres. Dinn! dinn! dinn! dinn ! Mangeons l’air, Le roc, les charbons, le fer. Mes faims, tournez. Paissez, faims, Le pré des sons ! Attirez le gai venin Des liserons ; Mangez Les cailloux qu’un pauvre brise, Les vieilles pierres d’église, Les galets, fils des déluges, Pains couchés aux vallées grises ! Mes faims, c’est les bouts d’air noir; L’azur sonneur; – C’est l’estomac qui me tire. C’est le malheur. Sur terre ont paru les feuilles ! Je vais aux chairs de fruit blettes. Au sein du sillon je cueille La doucette et la violette. Ma faim, Anne, Anne ! Fuis sur ton âne. Août 1872.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Guerre Enfant, certains ciels ont affiné mon optique : tous les caractères nuancèrent ma physionomie. Les Phénomènes s'émurent. — À présent, l'inflexion éternelle des moments et l'infini des mathématiques me chassent par ce monde où je subis tous les succès civils, respecté de l'enfance étrange et des affections énormes. — Je songe à une Guerre, de droit ou de force, de logique bien imprévue. C'est aussi simple qu'une phrase musicale.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Jadis, si je me souviens bien «Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient. Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. — Et je l'ai trouvée amère. — Et je l'ai injuriée. Je me suis armé contre la justice. Je me suis enfui. O sorcières, ô misère, ô haine, c'est à vous que mon trésor a été confié ! Je parvins à faire s'évanouir dans mon esprit toute l'espérance humaine. Sur toute joie pour l'étrangler j'ai fait le bond sourd de la bête féroce. J'ai appelé les bourreaux pour, en périssant, mordre la crosse de leurs fusils. J'ai appelé les fléaux, pour m'étouffer avec le sable, le sang. Le malheur a été mon dieu. Je me suis allongé dans la boue. Je me suis séché à l'air du crime. Et j'ai joué de bons tours à la folie. Et le printemps m'a apporté l'affreux rire de l'idiot. Or, tout dernièrement m'étant trouvé sur le point de faire le dernier couac! j'ai songé à rechercher la clef du festin ancien, où je reprendrais peut-être appétit. La charité est cette clef. — Cette inspiration prouve que j'ai rêvé ! «Tu resteras hyène, etc.», se récrie le démon qui me couronna de si aimables pavots. «Gagne la mort avec tous tes appétits, et ton égoïsme et tous les péchés capitaux. » Ah! j'en ai trop pris: — Mais, cher Satan, je vous en conjure, une prunelle moins irritée ! et en attendant les quelques petites lâchetés en retard, vous qui aimez dans l'écrivain l'absence des facultés descriptives ou instructives, je vous détache ces quelques hideux feuillets de mon carnet de damné.

    en cours de vérification

    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Je préfère sans doute… Je préfère sans doute, au printemps, la guinguette Où des marronniers nains bourgeonne la baguette, Vers la prairie étroite et communale, au mois De mai. Des jeunes chiens rabroués bien des fois Viennent près des Buveurs triturer des jacinthes De plate-bande. Et c’est, jusqu’aux soirs d’hyacinthe, Sur la table d’ardoise où, l’an dix-sept cent vingt Un diacre grava son sobriquet latin Maigre comme une prose à des vitraux d’église La toux des flacons noirs qui jamais ne les grise. François Coppée. A.R. * L’Humanité chaussait le vaste enfant Progrès. Louis-Xavier de Ricard. A. Rimbaud.

    en cours de vérification