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Nérée Beauchemin

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Poésies

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    Nérée Beauchemin

    @nereeBeauchemin

    Claire fontaine Claire fontaine où rossignole Un rossignol jamais lassé, N’es-tu pas le charmant symbole D’un cher passé ? Source de fraîche mélodie, Qui fait fleurir, sous nos frimas, Ce rosier blanc de Normandie, Qui ne meurt pas ! À ce bouton de rose blanche, L’hiver ne fut jamais fatal, Non plus qu’au chêne qui se penche Sur ton cristal. Oh ! c’est une peine immortelle Qui s’épanche, en larmes d’amour, Dans la naïve ritournelle De l’ancien jour. C’est un reflet des ciels de France, Ô fontaine, que tu fais voir, Dans la limpide transparence De ton miroir.

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    À celle que j'aime Dans ta mémoire immortelle, Comme dans le reposoir D'une divine chapelle, Pour celui qui t'est fidèle, Garde l'amour et l'espoir. Garde l'amour qui m'enivre, L'amour qui nous fait rêver ; Garde l'espoir qui fait vivre ; Garde la foi qui délivre, La foi qui nous doit sauver. L'espoir, c'est de la lumière, L'amour, c'est une liqueur, Et la foi, c'est la prière. Mets ces trésors, ma très chère, Au plus profond de ton coeur.

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    Chrysanthèmes Ils disent qu'au ciel on retrouve Ces chers petits morts tant pleurés. Ah ! savent-ils bien ce qu'éprouve Le cœur des parents éplorés. Ils sont étonnés qu'on se plaigne. Savent-ils bien notre douleur ? À nous dont le sein meurtri saigne, On parle d'un monde meilleur ! J'y crois à cette autre demeure, À cet immense azur béni ; Oui, j'y crois ! et, pourtant, je pleure : J'ai peur de ce vague infini. Lui, là-haut, si loin de sa mère ! Je ne puis croire qu'il n'ait pas Comme une nostalgie amère De ceux qu'il aimait ici-bas. Et, comme en un rêve, il me semble Voir errer dans ce ciel si grand Un bel ange qui lui ressemble, Qui nous tend les bras en pleurant. Il partit alors que les roses S'ouvrent dans l'air étincelant : De leurs premières fleurs écloses On couvrit le suaire blanc. Pour longtemps la chambre est fermée : Dans sa froide atmosphère en deuil Flotte encore l'âme embaumée Des chrysanthèmes du cercueil. En secret, la mère, hagarde, Toute pâle, tournant la clé De l'huis funèbre, se hasarde À franchir le seuil endeuillé. Dans la pièce où son œil pénètre Elle cherche et voudrait bien voir Les beaux yeux du cher petit être Qui manque aux caresses du soir. Une fièvre intense hallucine Et son oreille et son regard ; Ce nid plein d'ombre la fascine : Son trésor est là, quelque part. Ce demi-jour mélancolique Que reflète le ténébreux Cristal du grand miroir oblique. C'est le reflet des jours heureux. L'alcôve était claire et fleurie ; C'est là que l'enfant fut bercé. Ah ! l'alcôve est bien assombrie Depuis que la mort a passé. Où sont les fleurs, les fines gazes, Les merveilles du blanc trousseau ? Les fleurs ne sont plus dans les vases, Et l'enfant n'est plus au berceau. C'est pourquoi la mère affolée, En proie aux regrets superflus, Ne veut pas être consolée, Parce que son amour n'est plus.

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    Le laboureur Redonne tes bras à la Terre. Que, par l’apport de tes travaux, Elle accomplisse le mystère, Le prodige des blés nouveaux. Aux lointains conseils de l’Ancêtre, Aux ordres clairs de ton pays, Au commandement du grand Maître, En bon serviteur, obéis. Prépare la glèbe. Commence La grande oeuvre où l’on voit s’unir L’homme qui fournit la semence, Et Celui qui vient la bénir. Avant de pousser ta charrue, Et pour prouver ce que tu crois, Homme de Dieu, d’une main drue, Fais un large signe de croix. Et toi, grand Soleil des semailles, Soleil, dans ton ascension, Au rythme des bras qui travaillent, Répands ta bénédiction! La bénédiction sacrée De toute peine et tout amour; La bénédiction qui crée Le pain joyeux de chaque jour; La bénédiction profonde De ces miraculeux rayons Qui font pousser la moisson blonde, À pleins guérets, à pleins sillons. Afin que le champ de l’Ancêtre, Pour toute gloire et tout honneur, De Père en Fils, ne cesse d’être Le plus beau jardin du Seigneur.

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    Crépuscule rustique La profondeur du ciel occidental s’est teinte D’un jaune paille mûre et feuillage rouillé, Et, tant que la lueur claire n’est pas éteinte, Le regard qui se lève est tout émerveillé. Les nuances d’or clair semblent toutes nouvelles. Le champ céleste ondule et se creuse en sillons, Comme un chaume, où reluit le safran des javelles Qu’une brise éparpille, et roule en gerbillons. Chargé des meules d’ambre, où luit, par intervalle, Le reflet des rayons amortis du soleil, Le nuage, d’espace en espace, dévale, Traîne, s’enfonce, plonge à l’horizon vermeil. Mais l’ombre, lentement, traverse la campagne, Et glisse, à vol léger, au fond des plaines d’or. Septembre, glorieux, derrière la montagne, A roulé, pour la nuit, le char de Messidor.

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    Fleurs d'aurore Comme au printemps de l'autre année, Au mois des fleurs, après les froids, Par quelque belle matinée, Nous irons encore sous bois. Nous y verrons les mêmes choses, Le même glorieux réveil, Et les mêmes métamorphoses De tout ce qui vit au soleil. Nous y verrons les grands squelettes Des arbres gris, ressusciter, Et les yeux clos des violettes À la lumière palpiter. Sous le clair feuillage vert tendre, Les tourterelles des buissons, Ce jour-là, nous feront entendre Leurs lentes et molles chansons. Ensemble nous irons encore Cueillir dans les prés, au matin, De ces bouquets couleur d'aurore Qui fleurent la rose et le thym. Nous y boirons l'odeur subtile, Les capiteux aromes blonds Que, dans l'air tiède et pur, distille La flore chaude des vallons. Radieux, secouant le givre Et les frimas de l'an dernier, Nos chers espoirs pourront revivre Au bon vieux soleil printanier. En attendant que tout renaisse, Que tout aime et revive un jour, Laisse nos rêves, ô jeunesse, S'envoler vers tes bois d'amour ! Chère idylle, tes primevères Éclosent en toute saison ; Elles narguent les froids sévères Et percent la neige à foison. Éternel renouveau, tes sèves Montent même aux coeurs refroidis, Et tes capiteuses fleurs brèves Nous grisent comme au temps jadis. Oh ! oui, nous cueillerons encore, Aussi frais qu'à l'autre matin, Ces beaux bouquets couleur d'aurore Qui fleurent la rose et le thym.

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    Fleurs d'hiver Au poète qui m'applaudit. Ton applaudissement, divin poète, inspire L'humble songeur dont l'âme impétueuse aspire Au lyrisme infini des cieux. Il m'exalte déjà, ce bravo qui m'honore. Ma strophe bat de l'aile et s'élance, sonore ; Son vol est plus harmonieux. Avais-je quelque droit à ta brillante estime ? Que t'offrir, en retour de cet accueil intime, Rival des immortels chanteurs ? Des roses ? Les frimas les ont ensevelies ; Je chercherais en vain leurs corolles pâlies Et leurs embaumantes senteurs. Que dis-je ? j'oubliais que la neige étincelle, Et que ce ciel, taché de nuages, recèle La grêle et le givre argentin. Le ciel est gris, la terre est froide. Les rafales Pour longtemps ont éteint les flammes triomphales, Les pourpres clartés du matin. Plus de fleurs à cueillir dans l'herbe des prairies ! Plus de vers à glaner au jardin de féeries Où la rime éclôt à foison. Pareils à ces oiseaux frileux qu'octobre chasse, Nos rêves ont quitté ce triste azur de glace Pour le bleu d'un autre horizon. Grelottant, dans l'air gris, le soleil de décembre Se couche, et déjà vient la brune, et, dans ma chambre, Comme dans un bois, il fait noir. Salut, petit soleil des hâtives veillées, Qui brilles, vague, pâle, aux vitres étoilées, Poétique lampe du soir ! À petit bruit, la neige, au dehors, tombe lente, En légers flocons fins, sous la lune tremblante, Comme une poudre de cristal. Oh ! quelle floconneuse avalanche argentée ! Oh ! parmi ces blancheurs d'aube diamantée Comme il est beau, le toit natal ! Te redirai-je à toi le poète, l'artiste, L'exquise impression, à la fois douce et triste, Que nous donne le coin du feu ? Te dirai-je les doux pensers que nous suggère Le logis où les fleurs de la verte étagère Évoquent l'été frais et bleu ! Oh ! que la chambre est bonne, et qu'il est bon d'y vivre, Malgré le froid, malgré le vent, malgré le givre, Dans le calme et l'apaisement ! Le piano frémit : une voix veloutée S'élève et sa douceur, dans mon âme hantée, A réveillé l'amour dormant. Là-haut, dans la mansarde, on se meurt de misère ; Ici, dans les salons, comme dans une serre, Le bonheur embaume et fleurit. La volupté blasphème au fond du bouge infâme. Au foyer, Dieu descend : la mère en pleurs se pâme Aux lèvres de l'ange qui rit ; Le chapelet aux doigts, l'aïeule s'agenouille. Et moi, je joins les mains, et mon regard se mouille, Et je te bénis, ô Dieu bon ! Par ton charme, ô foyer natal, par ta magie, L'hiver est sans frissons, sans deuil, sans nostalgie. Douce maison, douce maison ! Poète, en attendant que le printemps renaisse, Et redonne aux forêts leur robe de jeunesse Et leur éclatant voile vert ; En attendant qu'Avril ensoleille et colore Ces chaudes floraisons qu'un souffle fait éclore, Reçois ces pâles fleurs d'hiver.

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    France Oui, mon pays est encor France : La fougue, la verve, l’accent, L’âme, l’esprit, le coeur, le sang, Tout nous en donne l’assurance : La France reste toujours France. Aujourd’hui, tout comme naguères, Ne sommes-nous pas, trait pour trait, Le vrai profil, le vif portrait Du Normand, père de nos pères ? Français, vous êtes nos grands frères. Il est toujours vert et vivace, Le rameau du vieil arbre franc ; De sève chaude exubérant, Superbe et fort comme la race, Il est toujours vert et vivace. Vienne la magnifique aurore Des fêtes d’hiver, Montréal, Narguant l’âpre vent boréal, Pour la danse revêt encore Son domino multicolore. Pittoresque palais féerique, Sur tes murs de glace et de feu, Le drapeau rouge, blanc et bleu Arbore au soleil d’Amérique La chaude gaîté d’Armorique. Avec la fusée écarlate, Qui crépite et crible d’éclairs Le cristal de tes dômes clairs, Dans l’air qu’elle échauffe et dilate L’allégresse de France éclate. Mais au lointain si notre oreille Entend le clairon du combat, C’est alors que le coeur nous bat, C’est alors que le sang s’éveille, Au son qui frappe notre oreille. Sonnez, chantez, clairons sonores ! Allons, étendards, en avant ! Dans le feu, l’éclair et le vent, Déployez vos plis tricolores ! Sonnez, chantez, clairons sonores ! L’envahissement est immense. – Pour chasser ces grands reîtres roux, Que ne sommes-nous avec vous, Jeunes soldats de la défense ! Oh ! notre douleur est immense. France, ô maternelle patrie, Nos coeurs, qui ne font qu’un pour toi, Encore palpitants d’émoi, Saignent des coups qui t’ont meurtrie, France, ô maternelle patrie ! Ici comme là-bas on pleure. Dévorant le sanglant affront, Baissant les yeux, courbant le front, Silencieux, on attend l’heure. Ici comme là-bas on pleure. Quand finira l’horrible transe ? Oh ! quand de Versaille à Strasbourg, Cloche, canon, clairon, tambour Proclameront la délivrance De la grande terre de France ?

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    Grand deuil Dans le clair-obscur de la pièce close, Où brûle une cire au reflet tremblant, Rigide, et grandi par la mort, repose Le corps d'un enfant habillé de blanc. Sous la mousseline, on voit les mains jointes, La mate blancheur des doigts ivoirins, Les cheveux pleins d'ombre et les tempes ointes Qu'auréole un flot de rayons sereins. Jamais des flancs purs du neigeux carrare, L'art n'a fait surgir un ange plus beau Que cet ariel, à la forme rare, Qui gît, radieux et calme, au tombeau. Sous l'eau sainte et sous l'huile du saint chrême Le front du martyr s'est rasséréné, La figure dit l'extase suprême, La douleur, la paix du prédestiné. La chambre de deuil est toute drapée De gaze. Nul bruit. Plus rien. Par moment, Une faible voix tendre, entrecoupée De soupirs, gémit désespérément. Ils sont là, tous deux, le père et la mère, Abattus, défaits, tristes à mourir : Nul mal n'est égal à leur peine amère. Rien ne les fit tant pleurer, tant souffrir. Après tant de coups, on croyait, quel rêve ! Bien s'être acquittés de souffrir. Il faut Pleurer et souffrir et pleurer sans trêve : C'est la volonté du Dieu de là-haut. Dix ans ! C'est le fils, l'aîné, l'espérance, La joie et l'amour de deux malheureux. Cher bonheur qu'il faut payer en souffrance ! Oh ! que le chemin du ciel est affreux ! Ils sont là, tous deux, esseulés, funèbres, Sans parler, cherchant, presque fous, à voir Dans ces yeux déjà voilés de ténèbres, La faible lueur d'un suprême espoir. Lourdes de sommeil, fixes, les paupières S'ouvrent à demi : dans les yeux hagards Flotte, encor mouillé des larmes dernières, L'adieu triste et doux des derniers regards. La Mort pâle a ceint de ses violettes Ce pur et beau front d'albâtre rosé ; Et la bouche fine, aux lèvres muettes, Sourit d'un divin sourire apaisé. Ils sont là, cloués au sol, sous l'empire De ce captivant sourire trompeur ; La mère, à genoux, sans prier, soupire, Le père, debout, est blanc de stupeur. La femme nerveuse et frêle se pâme, En larmes de sang son cœur coule à flots ; L'homme, fait aux deuils, aux douleurs de l'âme, Suffoque, étouffant soupirs et sanglots. Parfois, doucement, une main qui tremble De crainte et d'amour, soulève à demi Le suaire : on voit s'incliner ensemble Deux fronts au-dessus de l'ange endormi. Qu'il est beau ! la nuit d'outre-tombe voile À peine l'éclat de l'esprit éteint ; L'âme transparaît : telle une humble étoile Nous luit à travers l'ombre, au ciel lointain. Mystère cruel ! s'il dormait ? Quel doute ! La pensée, éther vif, rayon subtil, Au ciel, brusquement, s'en va-t-elle toute ? Un reste des sens en nous survit-il ? Vagues questions, sans suite, sans nombre, Que se fait tout bas le cœur criminel, Dédale infini de plus en plus sombre, Où vague et se perd l'amour maternel. Minuit sonne. Au pied du blême cadavre, Dans le vide noir du logis qui dort, Veillent seuls, en proie au deuil qui les navre, Les derniers amis du cher petit mort. Et l'horloge au lourd balancier lent, tinte, Lugubre, le glas de l'heure qui fuit, Et le grave son, que rythme la plainte Du vent, assombrit l'horreur de la nuit. Ô douleur ! ô nuit ! quand verrons-nous poindre Ces jours éternels, longtemps attendus ? Oh ! quand pourrons-nous à jamais rejoindre Tous ces morts aimés qu'on croyait perdus ?

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    L'Avril boréal Est-ce l'avril ? Sur la colline Rossignole une voix câline, De l'aube au soir. Est-ce le chant de la linotte ? Est-ce une flûte ? est-ce la note Du merle noir ? Malgré la bruine et la grêle, Le virtuose à la voix frêle Chante toujours ; Sur mille tons il recommence La mélancolique romance De ses amours.

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    La bonne France Doulce France, France jolie, France d’amour et d’idéal, Qui, dans ton épique folie, As fait tant de bien pour le mal. Tant de fois tu fus déchirée Par les crocs sanglants du vainqueur ; Mais ce qu’ils n’ont pas altéré, C’est la jeunesse de ton Cœur ; C’est l’éternelle joliesse De celle qu’un rien attendrit, Et qui, de peine ou de liesse, En larmes douces, pleure ou rit ; C’est, dans toute sombre ambiance, Quand l’horizon semble d’airain, Cette enfantine confiance, Dont l’azur est toujours serein. France dont le cœur surabonde De gentillesse et de pitié, Rien ne résiste, dans le monde, Au charme de ton amitié ! Il suffit qu’une voix te nomme Et s’élève pour t’acclamer, Pour que tout noble et fier cœur d’homme S’émeuve et se prenne à t’aimer. Oh ! c’est que ton front reste encore Toujours rayonnant, haut et clair, Comme le front d’or de l’aurore Dans le ciel limpide de l’air.

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    La branche d’alisier chantant Je l’ai tout à fait désapprise La berceuse au rythme flottant, Qu’effeuille, par les soirs de brise, La branche d’alisier chantant. Du rameau qu’un souffle balance, La miraculeuse chanson, Au souvenir de mon enfance, A communiqué son frisson. La musique de l’air, sans rime, Glisse en mon rêve, et, bien souvent, Je cherche à noter ce qu’exprime Le chant de la feuille et du vent. J’attends que la brise reprenne La note où tremble un doux passé, Pour que mon coeur, malgré sa peine, Un jour, une heure en soit bercé. Nul écho ne me la renvoie, La berceuse de l’autre jour, Ni les collines de la joie, Ni les collines de l’amour. La branche éolienne est morte ; Et les rythmes mystérieux Que le vent soupire à ma porte, Gonflent le coeur, mouillent les yeux. Le poète en mélancolie Pleure de n’être plus enfant, Pour ouïr ta chanson jolie, Ô branche d’alisier chantant !

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    La glaneuse Dans l’encadrement clair de la grand’porte ouverte, Que le géranium tout odorant fleurit De son aigrette rouge et de sa feuille verte, La glaneuse robuste apparaît, et sourit. Debout, le buste droit, la poitrine gonflée Du souffle que dilate et rythme le travail, Elle attend, tout de toile et de laine habillée, Le départ pour les champs des gens et du bétail. Et la cour de la ferme et la longue rangée Des bâtiments, fenils et granges, ont frémi, Aux rustiques rumeurs dont la brise est chargée, Par un matin joyeux d’avoir longtemps dormi. Bonjour à toi, bonjour, à la fois semblent dire Les blés dont la rosée achève le roui; Et les herbes des prés que le vent fait bruire Semblent balbutier un poème inouï. À toi, tout le cristal dont mon eau se fait gloire, Dit le puits. C’est pour toi, c’est pour ton riche amour, Ô reine des moissons, que j’offre et donne à boire, À ton homme, à ta fille, à tes fils, tout le jour. Mais voici que soudain, frappant toutes les choses Et les êtres qu’enchaîne encore le sommeil, Gloire à toi, dit l’Aurore : à toi, toutes mes roses! Femme, à toi, tout mon or, répond le grand Soleil.

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    La maison solitaire Seule, en un coin de terre où plane la tristesse Et le mélancolique et vague ennui des soirs, La vieille maison blanche, aux grands contrevents noirs, Pleure-t-elle ses gens, son hôte, son hôtesse ? Avec sa porte close et ses carreaux en deuil Qui ne semblent, au loin, qu'un vaporeux décalque, La maison blanche et noire a l'air d'un catafalque Érigé sur le vide et la nuit d'un cercueil. À la croix des pignons tachés d'ocre et de suie, Comme un crêpe fané, la mousse vole au vent, Et l'on dirait, parfois, qu'il tombe de l'auvent Une neige de cendre et des larmes de pluie. Trois générations ont peiné dans ce lieu : Trois générations de laboureurs de terre Ont vécu longuement le rêve solitaire, Qui commence à l'autel et finit devant Dieu. Tout semble mort... Soudain, la vitre qui brasille S'ouvre, et, tel qu'au matin, brille un coquelicot, Une face vermeille apparaît, et l'écho Éparpille un fredon d'enfant qui s'égosille. Rouge d'orgueil, le fier petit gars d'habitant, Que le ber ancestral a couvé dans la paille, Du jeu d'un gosier d'or, éblouit la marmaille Et fait taire le merle et le coq éclatant. Et la vieille maison, tant de fois attristée Par le glas et l'adieu des funèbres convois, Reprend jeunesse et vie au seul son de la voix Qui conjure l'ennui, dont son âme est hantée. Le vieil âge n'est plus. Voici le jeune temps : L'aurore entre malgré la fenêtre morose ; La chambre se plafonne et se meuble de rose ; La maison recommence à vivre ses vingt ans. Et le chef du travail, dehors à coeur d'année, Bénit l'horizon clair et le soleil levant, Le nuage et l'oiseau, la rosée et le vent, Qui lui promettent tous une belle journée.

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    La maison vide Petite maison basse, au grand chapeau pointu, Qui, d’hiver en hiver, semble s’être enfoncée Dans la terre sans fleurs, autour d’elle amassée. Petite maison grise, au grand chapeau pointu, Au lointain bleu, là-bas, dis-le-moi, que vois-tu ? Par les yeux clignotants de ta lucarne rousse, Pour voir plus clair, plus loin, tu sembles faire effort, Et froncer les sourcils sous ton chapeau de mousse. Vers ces couchants de rêve où le soleil s’endort, Pour voir plus clair, plus loin, tu sembles faire effort. Il est couché, là-bas, au fond du cimetière, Celui qui t’aime encore autant que tu l’aimais. Petite maison vieille, au chapeau de poussière, Celui qui t’aime encore autant que tu l’aimais, L’absent, tant regretté, ne reviendra jamais.

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    La mer Loin des grands rochers noirs que baise la marée, La mer calme, la mer au murmure endormeur, Au large, tout là-bas, lente s’est retirée, Et son sanglot d’amour dans l’air du soir se meurt. La mer fauve, la mer vierge, la mer sauvage, Au profond de son lit de nacre inviolé Redescend, pour dormir, loin, bien loin du rivage, Sous le seul regard pur du doux ciel étoilé. La mer aime le ciel : c’est pour mieux lui redire, À l’écart, en secret, son immense tourment, Que la fauve amoureuse, au large se retire, Dans son lit de corail, d’ambre et de diamant. Et la brise n’apporte à la terre jalouse, Qu’un souffle chuchoteur, vague, délicieux : L’âme des océans frémit comme une épouse Sous le chaste baiser des impassibles cieux.

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    La muse Bluet aux regards d’améthyste, Bluet aux yeux de ciel, dis-nous Ce qui te fait être si triste ? – J’ai vu ses yeux, j’en suis jaloux. Et toi, simple églantine rose, Payse aux lèvres de carmin, Pourquoi sembles-tu si morose ? – Je suis jalouse de son teint. Toi, beau lys, qu’en dis-tu ? – Que n’ai-je Le fin velouté, la blancheur, La fraîcheur d’aurore et de neige De sa diaphane blondeur ! Je comprends votre jalousie, Ô fleurs, c’est qu’hier, en ces lieux, Dans sa robe de fantaisie La Muse a passé sous vos yeux.

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    La petite Canadienne Elle est bonne, franche, et telle Que l’amoureux de chez nous Ne courtise et n’aime qu’elle. Et, de vrai, c’est la plus belle, Avec ses Jolis yeux doux. Beauté d’idylle naïve, Elle a l’air, le teint vermeil, De cette prime fleur vive, Qui, malgré le gel, hâtive, Fleurit sous un froid soleil. Hormis cette grâce fine, Charmes purs, charmes frais, Joliesse féminine Que la nature dessine, Je lui sais plus rares traits. Compatriote chérie, Où je te vois et t’entends, Où tu ris, c’est la patrie, Revivante, refleurie, Dans un rayon de printemps. Ton sourire nous enivre ; Ta vaillance est notre espoir ; Le divin bonheur de vivre, Nous le trouvons à te suivre Par le chemin du devoir. La Saint-Jean-Baptiste appelle La nationalité. Viens, ma chère, fais-toi belle ; Dans la fête solennelle, Viens marcher à mon côté. Viens !… et mets, pour qu’on le dise, Cocarde parlante, autour De ton chapeau de payse, La feuille qui symbolise Le patriotique amour ! Première entre les premières, Prends ta place dans nos rangs. Fière au-dessus des plus fières, Française, de nos bannières, Ferme et haut, tiens les rubans ! Salut, princesse lointaine, Seigneuresse des vieux lys ! Haute dame souveraine De cette claire fontaine Qu’ombragent les bois jolis ! Les fils n’aiment plus la terre ; Ô patronne, enseigne-leur Le patriotisme austère, Le bon travail salutaire, Qui rend solide et meilleur. Grande chrétienne, humble sainte, Qui, forte divinement, Monte au calvaire, et, sans plainte, Souffre et meurt, ivre d’absinthe, Sur ta croix du dévouement ! Oh ! quelle gloire est la tienne ! Tu représentes, pour moi, La pure race ancienne. Petite Canadienne, La France, en nos coeurs, c’est toi.

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    La rédemptrice Petite enfant, parmi nos larmes, Dis-moi, pourquoi viens-tu t’offrir? Parmi nos misères, tes charmes Vont-ils fleurir? Toi plus chère que tout chose, Rose qu’un souffle peut flétrir, Ton tendre coeur, ô tendre rose, Va-t-il s’ouvrir? Au ciel, d’où tu viens, monte vite. La terre ne peut te nourrir. Le lait d’amour, pauvre petite, Vient de tarir. Pour la marâtre adoratrice Qui devrait, en Dieu, te chérir, Que viens-tu faire, ô rédemptrice, Sinon souffrir? Toi, si frêle, toi qui te pâmes Et pleures à nous attendrir, Que viens-tu faire, pour nos âmes, Sinon mourir?

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    Le ber La campagne, comme autrefois, Avec le bahut, et le coffre, Et l’armoire à vitrail, nous offre Le ber à quenouilles de bois. Dans le coeur d’un merisier rouge, L’aïeul a taillé les morceaux ; Et la courbe des longs berceaux Illustre la naïve gouge. Que la mère y couche un garçon, Ou qu’une mioche y respire, L’orgueil n’y voit que le sourire Et la vigueur du nourrisson. Sur la paille de ce lit fruste, Les marmots auront un sommeil Qui, tels l’air pur et le soleil, Rend plus beau, plus frais, plus robuste. Aux angles du salon fermé, Le mobilier poudreux se fane, Mais dans l’alcôve paysanne, Le ber ancien n’a pas chômé. Ce qu’il berce avec tant de joie, Berce et berce, bon an, mal an, Dans son bâti tout brimbalant, C’est l’être que le ciel envoie. C’est l’enfant de l’humble maison, Nourri par la terre féconde Où toute bonne graine abonde, Et tout fructifie à foison. Près du lit funèbre où l’ancêtre, Le Christ aux doigts, fut exposé, Au coeur du dernier baptisé, Le vieux coeur français va renaître. Et le toit natal, chaque jour, Bénit la race triomphante Dont la suite immortelle enfante La vertu, la force, l’amour.

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    Le branle du sanctus Dans l’air religieux des dimanches, ondulent Ces accords, graves comme un angélus du soir, Que les cloches de bronze, au rythme d’encensoir, Au sanctus de la messe, en sourdine, modulent. Sanctus! Sanctus! Rosaire aux doigts, priant tout bas, Grand’mère, dans un rêve extatique plongée, D’un seuil à l’autre seuil, par la chambre imagée, Promène le marmot qui fait ses premiers pas. Le pied rose, à demi, sur le plancher se pose, Et le petit genou fléchit à tout moment. La pavanne pieuse est un encensement; Le couple oscille, à chaque escousse, à chaque pause. Sonnerie et lumière animent le tableau, Et, dans un harmonique unisson, font cortège Aux cheveux blancs qu’argente une mousse de neige, Aux blonds cheveux que berce un roulis de berceau. Ils vont, tant que le branle épand ses larges ondes, Très révérencieux, comme en procession. On croit ouïr des voix de bénédiction. Et l’humble vieille songe à des choses profondes. La cloche, semble-t-il, rythme l’envolement Du bonnet de baptême aux blancheurs irréelles, Et le balancement du clocher de dentelles Qui pointe, comme flèche, au chef de grand’maman. Sanctus! Dans l’or léger que la vitre tamise. Dans l’or que dissémine un soleil de juillet, Les deux fronts inégaux se nimbent d’un reflet, Et la chambre éblouit comme une nef d’église. Sanctus! Heureux l’enfant qui commence à marcher En ces murs imagés que le cierge illumine, Et qui, de Chandeleur en Chandeleur, chemine Dans l’orbe de musique et d’encens du clocher.

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    Le dernier gîte Je te reviens, ô paroisse natale. Patrie intime où mon coeur est resté ; Avant d’entrer dans la nuit glaciale, Je viens frapper à ton seuil enchanté. Pays d’amour, en vain j’ai fait la route Pour saluer encore ton ciel bleu, Mon oeil se mouille et ma chair tremble toute, Je viens te dire un éternel adieu. Oh ! couchez-moi dans la tombe bénite, Dans un recoin discret du vieil enclos. Ici, je viens chercher mon dernier gîte, Je viens ici chercher calme et repos. Ô terre sainte ! ouvre-moi ton asile, Près des miens, jusqu’au jour du grand réveil, Je dormirai comme en un lit tranquille, Mon dernier rêve et mon dernier sommeil.

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    Le rameau bénit Profonde poésie et symbole sublime De ces rameaux sacrés dont le vert éternel Évoque, en nos parvis, l’hosanna solennel, Le triomphe royal des palmes de Solyme ! Palmes qui couronnez l’hiver de nos climats, Et qui, par la verdeur et par l’efflorescence, S’apparentent, sans doute, à l’immortelle essence Des cèdres du Carmel et des pins de Damas ? En mouvante forêt, en larges théories, Pour marquer le respect, l’allégresse et l’amour, Palmes, agitez-vous, et saluez le jour Que ramène, après deux mille ans, Pâques fleuries ! Agitez-vous aux mains de ce peuple de Dieu, Qui vous vénère encore, et croit, d’une âme franche, Que, pourvu qu’on l’expose avec foi, l’humble branche Détourne le tonnerre, et la grêle, et le feu. Et vous, rameaux anciens dont la feuille se fane, Au cercueil, que l’ami vous dépose à genoux ; Entre les doigts des morts, que s’exhale pour nous Le baume amer et doux, qui de la sève émane !

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    Le vieux parler Si je le parle, à coeur de jour, Au pays, avec les miens, comme Au grand siècle tout gentilhomme Le parlait aux abbés de cour, C’est… Ains seulement par amour. Ce français vieillot qu’on dédaigne, Il est natif d’un haut Poitou Et d’un lointain Paris itou. Ces termes, que le chaume enseigne, Ce sont des termes de Montaigne. Le mot local, très clair, s’entend ; Du puriste il choque l’oreille ; Malgré tout, comme il s’appareille, Et comme il s’accorde pourtant Avec la parlure d’antan. L’habitant, dit-on, baragouine. L’habitant patoise ? C’est faux. Il remet au jour des joyaux Qu’incrustent souvent la patine Et l’illustre rouille latine. Oyez le parler du hameau : Il coule comme aux goutterelles Coulent les sèves naturelles ; Il coule aux lèvres comme l’eau Des érables au renouveau. Mais que l’émoi d’un coeur l’anime, Ce vieux français, c’est tout chez nous ; Sous ses aspects âpres et doux, Ce langage simple et sublime, C’est toute la patrie intime. Si le papier le souffre ici, Oh ! c’est rapport à la victoire Des patriotes de l’histoire ! Si je le parle encore ainsi, À Dieu, grand’grâce et grand merci ! Durant trois siècles d’affilée, La première langue du sol A lutté sans peur et sans dol. Malgré rafale et giboulée, L’honneur et le droit l’ont parlée. Le verbe du clocher natal A gardé toute sa puissance, Et le vieil esprit de la France Poursuit l’ancien chemin royal Vers les grands fonds de l’idéal.

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    Les corbeaux Les noirs corbeaux au noir plumage, Que chassa le vent automnal, Revenus de leur long voyage, Croassent dans le ciel vernal. Les taillis, les buissons moroses Attendent leurs joyeux oiseaux : Mais, au lieu des gais virtuoses, Arrivent premiers les corbeaux. Pour charmer le bois qui s’ennuie, Ces dilettantes sans rival, Ce soir, par la neige et la pluie, Donneront un grand festival. Les rêveurs, dont l’extase est brève, Attendent des vols d’oiseaux d’or ; Mais, au lieu des oiseaux du rêve, Arrive le sombre condor. Mars pleure avant de nous sourire. La grêle tombe en plein été. L’homme, né pour les deuils, soupire Et pleure avant d’avoir chanté.

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    Les lys La terre, qui les fait survivre, s’est fleurie De ces grands lys de neige, au cœur tout rutilant, Dont la fleur fait songer à la fleur d’armoirie, Qui fleurdelisait d’or l’azur du drapeau blanc. Les tiges en poussant semblent s’être tendues, Comme en un même jet de sève et de fierté, Et, vers le ciel, vers Dieu, montent à fleurs perdues, Et nulle floraison n’égale leur beauté. On les verra toujours monter en telle gloire, Comme pour protester et redire à jamais, Aux siècles du soleil, aux siècles de l’histoire, Que le sol qui les porte est encore français.

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    Lumière Perdu dans les brouillards du sophisme et du doute, Le monde, dans un noir tournoîment emporté, S’effarait, quand soudain retentit sur la route La voix de l’immanente infaillibilité. Et l’on vit, aveuglant les fils de Zoroastre, Perçant l’ombre où la haine occulte écume encor, Brillante des clartés que verse un lever d’astre, Resplendir la tiare aux trois couronnes d’or. Triple soleil d’espoir éclatant dans la brume Du sombre gouffre humain. Triple feu du flambeau Que Rome aux chandeliers à sept branches allume. Triple splendeur de Paul s’élançant du tombeau. Hosanna! Béni soit Léon, l’homme-lumière, L’être divinisé, l’être immatériel, L’âme, l’élu, le saint, l’ange intermédiaire Entre Job et Jésus, entre l’homme et le ciel. Il n’a plus qu’un lambeau de pourpre et de couronne, Mais cet humble martyr qui pleure et qui sourit, Ce divin qui bénit, ce clément qui pardonne, À jamais reste roi par le verbe et l’esprit. Ce souverain qui n’a que son titre de père; Qui, pour sceptre, n’a plus qu’un roseau de pasteur, Ce prince de douleur, d’angoisse et de misère, Apparaît à nos yeux comme un triomphateur. Au-dessus de ces fronts royaux que l’anarchie Menace, beau de calme et de sérénité, Il se dresse, et l’on voit sur sa tête blanchie Flotter comme une vague aube d’éternité. Il parle, et l’Occident se prosterne en prière; Il appelle, et, là-bas, l’Orient, solennel, Dans la chape d’argent de sa gloire première, Exulte au cri du pape et vibre à son appel. Les profondeurs de l’autre azur frémissent toutes, Et la Miséricorde en pleurs, sur l’univers Épandant les trésors des suprêmes absoutes, Rouvre les cieux fermés et ferme les enfers. De l’aurore au couchant, l’encyclique féconde, Dans le déclin du grand siècle qui va finir, Sous le souffle de Dieu, s’en va de par le monde Répandre amour et paix, consoler et bénir. Gloire au nouveau Jean! gloire à l’aigle des symboles! Gloire au révélateur des secrets de Sion! Au voyant dont le front constellé d’auréoles S’incline sous le vent de l’inspiration! Béni soit-il, celui dont le vaste génie, Sur l’abîme du dogme ancien toujours nouveau, Ouvrant une nouvelle échappée infinie, Voit plus large, descend plus profond, va plus haut. Gloire au Buonarotti de la foi catholique, Qui bâtit, sur le roc de Pierre, un monument Taillé dans le carrare et dans le pentélique, Éblouissant d’azur, d’or et de diamant.

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    L’Avril boréal Est-ce l’avril ? Sur la colline Rossignole une voix câline, De l’aube au soir. Est-ce le chant de la linotte ? Est-ce une flûte ? est-ce la note Du merle noir ? Malgré la bruine et la grêle, Le virtuose à la voix frêle Chante toujours ; Sur mille tons il recommence La mélancolique romance De ses amours. Le chanteur, retour des Florides, Du clair azur des ciels torrides Se souvenant, Dans les bras des hêtres en larmes Dis ses regrets et ses alarmes À tout venant. Surpris dans son vol par la neige, Il redoute encor le cortège Des noirs autans ; Et sa vocalise touchante Soupire et jase, pleure et chante En même temps. Fuyez, nuages, giboulées, Grêle, brouillards, âpres gelées, Vent boréal ! Fuyez ! La nature t’implore, Tardive et languissante aurore De floréal. Avec un ciel bleu d’améthyste, Avec le charme vague et triste Des bois déserts, Un rythme nouveau s’harmonise. Doux rossignol, ta plainte exquise Charme les airs ! Parfois, de sa voix la plus claire, L’oiseau, dont le chant s’accélère, Égrène un tril : Dans ce vif éclat d’allégresse, C’est vous qu’il rappelle et qu’il presse, Beaux jours d’avril. Déjà collines et vallées Ont vu se fondre aux soleillées Neige et glaçons ; Et, quand midi flambe, il s’élève Des senteurs de gomme et de sève Dans les buissons. Quel souffle a mis ces teintes douces Aux pointes des frileuses pousses ? Quel sylphe peint De ce charmant vert véronèse Les jeunes bourgeons du mélèze Et du sapin ? Sous les haleines réchauffées Qui nous apportent ces bouffées D’air moite et doux, Il nous semble que tout renaisse. On sent comme un flot de jeunesse Couler en nous. Tout était mort dans les futaies ; Voici, tout à coup, plein les haies, Plein les sillons, Du soleil, des oiseaux, des brises, Plein le ciel, plein les forêts grises, Plein les vallons. Ce n’est plus une voix timide Qui prélude dans l’air humide, Sous les taillis ; C’est une aubade universelle ; On dirait que l’azur ruisselle De gazouillis. Devant ce renouveau des choses, Je rêve des idylles roses ; Je vous revois, Prime saison, belles années, De fleurs de rêve couronnées, Comme autrefois. Et, tandis que dans les clairières Chuchotent les voix printanières, Et moi j’entends Rossignoler l’âme meurtrie, La tant douce voix attendrie De mes printemps.

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    L’hiver du rossignol Sur les toits la grêle crépite. Il neige, il pleut, en même temps : Premières larmes du printemps, Derniers pleurs de l’hiver en fuite. Parmi les longs cris qu’en son vol La première corneille jette, J’entends une note inquiète ; Est-ce la voix du rossignol ? D’où vient cette roulade ailée Dont la bise coupe le fil Ce doux chanteur, pourquoi vient-il Affronter cette giboulée ? Est-ce le trémulant sifflet, Le fifre aigu de la linote ? Est-ce la double ou triple note Du bouvreuil ou du roitelet ? Il neige, il pleut, il grêle, il vente. Mais, soudain, voici le soleil, Le soleil d’un temps sans pareil. Chante, oh ! chante, rossignol, chante ! Il neige, il vente, il grêle, il pleut. Chante ! C’est l’air que rossignole Ton cœur, ton joli cœur qui vole, Qui d’un ciel gris, fait un ciel bleu. Que ta musique, en fines perles, Change ce brouillard éclatant. Ah ! pourrait-il en faire autant Le trille aigu de tous les merles ? Il pleut, il neige, c’est en vain Que le merle siffle à tue-tête. Pour que tout l’azur soit en fête, Chante, chante, chanteur divin ! Chante sur la plus haute branche, Comme l’oiseau de la chanson. Chante sous le dernier frisson De la dernière neige blanche. À pleine gorge, fais vibrer, Rossignoler ta fine lyre, Ô toi dont le cœur est à rire, Pour les cœurs qui sont à pleurer

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    L’idylle dorée Au vent joyeux de la bonne nouvelle L’étable s’ouvre; et sa merveille est telle Que les naïfs bergers en sont troublés. Illuminant la crèche sombre encore, L’Enfant paraît en un orbe d’aurore, Plus blond que l’or des méteils et des blés. Tout reluit sous l’humble chaume en ruine; Tout y rutile. Ô nuits de Palestine, De vos ciels d’aube pâle, est-ce un reflet? Lune magique, est-ce ton sortilège? Est-ce l’éclat de ta blancheur de neige? Est-ce ton charme, ô bel enfantelet? Un homme est là, grave comme en un temple; Hiératique, il admire, il contemple, Ne sachant plus que bénir à genoux. Dans son long voile et dans sa blanche robe, Pudique et belle, aux regards se dérobe Une humble femme au profil triste et doux. Couple candide, ils restent sans parole, Le front ceint d’une opaline auréole, Navrés d’amour et de ravissement. Le père exulte, et la mère soupire; Tendre, elle fait effort pour lui sourire, Mais son sourire expire tristement. Elle, la Sainte, elle, l’Immaculée, Oh! comme elle est confuse, émerveillée, Toute à son rêve et toute à son affront. Elle se voit dans une bergerie, Et, pour son Christ, non pour elle, Marie Pleure, le glaive au coeur, l’épine au front. Le nouveau-né, demi-nu, que l’haleine Du boeuf et de l’âne réchauffe à peine, Tout frêle et tout mignon, tremble et vagit. La plus modeste entre toutes les mères Se meurt de honte, et le sang de ses pères Comme une pourpre à sa tempe rougit. Dans ce réduit de misère, les anges, Venus du ciel, modulent les louanges Du gracieux petit roi de Sion. L’oreille entend la harpe qui console, La tendre lyre et la tendre viole, Et le théorbe et le psaltérion; Mais ni le luth qui berce et qui caresse, Ni la viole exquise de tendresse, Rien n’a charmé le souci maternel. Pensive, au bord de la crèche accoudée, Elle pressent, crucifiante idée, Quelque chagrin qui lui semble éternel. Les séraphins suspendent leur cantique : Et l’âpre son du hautbois bucolique Se mêle au frais gazouillis des pipeaux. La corne a pris sa voix la plus câline, Et le roseau langoureux, en sourdine, Chante à ravir l’âme des bleus oiseaux. On croit ouïr les endormeuses plaintes De l’air parmi les légers térébinthes, Du soir parmi les pâles oliviers. En la blancheur de la lumière astrale Monte et descend la fraîche pastorale Que dit le choeur rustique des bouviers. Cette musique élyséenne coule Et, vrai miracle, ondule et se déroule, S’achève et file en sanglots inouïs. Des femmes vont à l’adorable Juive Offrir, avec la myrtille et l’olive, Roses et lis tout frais épanouis. Silencieux, dévalant les collines, Orientés par les clartés divines, Déjà, voici les chameliers du Nil. Ils ont offert l’ambre et le cinnamome Et ces lotus d’oasis dont l’arome Calme et guérit le mal le plus subtil. Ni les soupirs des pipeaux et des flûtes, Ni le noël des chevriers hirsutes, Rien n’a charmé le maternel souci; Ni les lotus, ni les lis de Judée, Ni l’oliban des rois de la Chaldée, Rien ne l’allège et rien ne l’adoucit. Dans son berceau, que la mousse encourtine, L’enfant s’éveille, et sa lèvre enfantine S’ouvre et sourit d’un sourire de ciel. Sur cette bouche idéalement rose, La Mère, moins songeuse, moins morose, Pose un baiser mouillé de pleurs de miel. Ô tendres pleurs, délicieuses larmes, Est-il quelqu’un qui résiste à vos charmes? Femme, tes pleurs font pleurer tous les yeux! Dès son réveil, calme, à celle dont l’âme D’inquiétude et d’angoisse se pâme, Le Fils envoie un regard radieux. Nul pavillon d’impérator n’égale Ce gîte où luit la gloire filiale, Ce lit de paille aux rideaux de soleil. Le pâtre adore et Joseph s’extasie : Certes, jamais les huchiers de l’Asie Ni les bouviers n’ont vu tableau pareil. Vision rose, exquise épiphanie, Divine idylle à jamais non finie, Charmante encore après dix-huit cents ans! Aux Bethléem mystiques, des deux Mondes Peuples et rois, caravanes profondes, À pleines nefs apportent des présents. Bercail d’azur, asile de mystère, Où le noël amoureux de la terre Alterne avec le cantique des cieux! Crèche où naquit l’agneau des paraboles, Agreste autel des célestes symboles, Je vois s’ouvrir ton chaume harmonieux. Tout ébloui, sur le seuil je m’arrête, Je me prosterne et je courbe la tête, Dans la pénombre, en silence, à l’écart. Pour te louer, divin berceau, j’aspire L’harmonieux lyrisme qu’on respire Dans les motifs des aèdes de l’art. Ô Mère pure, ô Vierge maternelle, Vase de nard qui déborde et ruisselle, Inonde-moi des flots de ton amour! Je veux bercer ta peine et ta hantise, Adoucir le mal qui te martyrise, Je veux aimer ton Jésus sans retour. Suivant les pas des bergers et des Mages, Je viens offrir l’encens de mes hommages. Que n’ai-je l’or des antiques Crésus! Oh! laisse-moi, Vierge, Mère divine, Prendre en mes bras, presser sur ma poitrine, Ton bien-aimé, ton trésor, ton Jésus! Je veux que ma lèvre à sa lèvre touche. Combien heureux je serais, si ma bouche Pouvait chanter un chant digne de toi! Mais c’est en vain que mon hymne s’élance. Suspends ton rythme, ô mon coeur, le silence Exprime seul mon extatique émoi.

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