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Renee Vivien

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Poésies

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    Renee Vivien

    @reneeVivien

    Lassitude Je dormirai ce soir d’un large et doux sommeil… Fermez bien les rideaux, tenez les portes closes. Surtout, ne laissez pas pénétrer le soleil. Mettez autour de moi le soir trempé de roses. Posez, sur la blancheur d’un oreiller profond, De ces fleurs sans éclat et dont l’odeur obsède. Posez-les dans mes mains, sur mon cœur, sur mon front, Les fleurs pâles au souffle amoureusement tiède. Et je dirai très bas : « Rien de moi n’est resté… Mon âme enfin repose… ayez donc pitié d’elle. Qu’elle puisse dormir toute une éternité. » Je dormirai, ce soir, de la mort la plus belle. Que s’effeuillent les fleurs, tubéreuses et lys, Et que meure et s’éteigne, au seuil des portes closes, L’écho triste et lointain des sanglots de jadis. Ah ! le soir infini ! le soir trempé de roses !

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    Le couchant adoucit Le couchant adoucit le sourire du ciel. La nuit vient gravement, ainsi qu’une prêtresse. La brise a dérouté, d’un geste de caresse, Tes cheveux aux blondeurs de maïs et de miel. Tes lèvres ont gardé le pli de la parole Dont mon rêve attentif s’est longtemps enchanté. Une voix de souffrance et d’extase a chanté Dans l’ombre d’où l’encens des fleurs blanches s’envole. Ta robe a des frissons de festins somptueux, Et, sous la majesté de la noble parure, Fleurit, enveloppé d’haleines de luxure, Lys profane, ton corps pâle et voluptueux. Ta prunelle aux bleus frais s’alanguit et se pâme. Je vois, dans tes regards pareils aux tristes cieux, Dans cette pureté dernière de tes yeux, La forme endolorie et lasse de ton âme. Là-bas s’apaise enfin l’essaim d’or des guêpiers. Parmi tes rythmes morts et tes splendeurs éteintes, Tu frôles sans tes voir les frêles hyacinthes Qui se meurent d’amour, ayant touché tes pieds

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    Lucidité L’art délicat du vice occupe tes loisirs, Et tu sais réveiller la chaleur des désirs, Auxquels ton corps perfide et souple se dérobe. L’odeur du lit se mêle aux parfums de ta robe. Ton charme blond ressemble à la fadeur du miel. Tu n’aimes que le faux et l’artificiel, La musique des mots et des murmures mièvres. Ton baiser se détourne et glisse sur les lèvres. Tes yeux sont des hivers pâlement étoilés. Les deuils suivent tes pas en mornes défilés. Ton geste est un reflet, ta parole est une ombre. Ton corps s’est amolli sous des baisers sans nombre, Et ton âme est flétrie et ton corps est usé. Languissant et lascif, ton frôlement rusé Ignore la beauté loyale de l’étreinte. Tu mens comme l’on aime, et, sous ta douceur feinte, On sent le rampement du reptile attentif. Nul amour n’a frémi dans ton être chétif. Les tombeaux sont encor moins impurs que ta couche, Ô Femme ! je le sais, mais j’ai soif de ta bouche !

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    Le labyrinthe J’erre au fond d’un savant et cruel labyrinthe… Je n’ai pour mon salut qu’un douloureux orgueil. Voici que vient la Nuit aux cheveux d’hyacinthe, Et je m’égare au fond du cruel labyrinthe, Ô Maîtresse qui fus ma ruine et mon deuil. Mon amour hypocrite et ma haine cynique Sont deux spectres qui vont, ivres de désespoir ; Leurs lèvres ont ce pli que le rictus complique : Mon amour hypocrite et ma haine cynique Sont deux spectres damnés qui rôdent dans le soir. J’erre au fond d’un savant et cruel labyrinthe, Et mes pieds, las d’errer, s’éloignent de ton seuil. Sur mon front brûle encor la fièvre mal éteinte… Dans l’ambiguïté grise du Labyrinthe, J’emporte mon remords, ma ruine et mon deuil…

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    Le soir verse les demi-teintes Le soir verse les demi-teintes Et favorise les hymens Des véroniques, des jacinthes, Des iris et des cyclamens. Charmant mes gravités meurtries De tes baisers légers et froids, Tu mêles à mes rêveries L’effleurement blanc de tes doigts.

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    Les chardons Tu ne seras jamais la fiévreuse captive Qu’enchaîne, qu’emprisonne le lit, Tu ne seras jamais la compagne lascive Dont la chair se consume et dont le front pâlit. Garde ton blanc parfum qui dédaigne le faste. Tu ne connaîtras point les lâches abandons, Les sanglots partagés qui font l’âme plus vaste, Le doute et la faiblesse ardente des pardons Et, puisque c’est ainsi que je t’aime, ô très chaste ! Nous cueillerons ce soir les mystiques chardons.

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    Les Sept Lys de Marie Le Sept Lys ont fleuri devant l’antique porche. Chacun d’eux est plus long et plus droit qu’une torche, Leurs pistils sont pareils à des flammes de torche. Les Sept Lys ont fleuri miraculeusement Dans le silence auguste et dans l’ombre, au moment Où s’élève le Christ, miraculeusement… Sous l’imposition des mains saintes du prêtre Dans l’ombre et dans l’encens on les vit apparaître… Le peuple vit alors sourire le vieux prêtre… Et tous les contemplaient avec des yeux d’amour. Le prêtre dit, portant ses regards à l’entour : « Mes frères, contemplons les fleurs du Saint-Amour ! » Leur parfum s’exhalait vers la Divine Image. Tous ont compris le sens du glorieux Message Sur l’autel où Marie écoute le Message Et les Lys répandaient une paix autour d’eux Et l’Hostie avait moins de rayonnement qu’eux, La transparente Hostie était moins blanche qu’eux… Apparaissez encore, ô Sept Lys de Marie, Au moment où la foule à genoux pleure et prie ! Apparaissez encore en l’honneur de Marie !

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    Les yeux gris Le charme de tes yeux sans couleur ni lumière Me prend étrangement : il se fait triste et tard, Et, perdu sous le pli de ta pâle paupière, Dans l’ombre de tes cils sommeille ton regard. J’interroge longtemps tes stagnantes prunelles. Elles ont le néant du soir et de l’hiver Et des tombeaux : j’y vois les limbes éternelles, L’infini lamentable et terne de la mer. Rien ne survit en toi, pas même un rêve tendre. Tout s’éteint dans tes yeux sans âme et sans reflet, Comme un foyer rempli de silence et de cendre. Le jour râle là-bas dans le ciel violet. Dans cet accablement du morne paysage, Ton froid mépris me prend des vivants et des forts. J’ai trouvé dans tes yeux la paix sinistre et sage, Et la mort qu’on respire à rêver près des morts.

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    Let the dead bury their dead Voici la nuit : je vais ensevelir mes morts, Mes songes, mes désirs, mes douleurs, mes remords, Tout le passé… je vais ensevelir mes morts. J’ensevelis, parmi les sombres violettes, Tes yeux, tes mains, ton front et tes lèvres muettes, Ô toi qui dors parmi les sombres violettes ! J’emporte cet éclair dernier de ton regard… Dans le choc de la vie et le heurt du hasard, J’emporte ainsi la paix de ton dernier regard. Je couvrirai d’encens, de roses et de roses, La pâle chevelure et les paupières closes D’un amour dont l’ardeur mourut parmi les roses. Que s’élève vers moi l’âme froide des morts, Abolissant en moi les craintes, les remords, Et m’apportant la paix souriante des morts ! Que j’obtienne, dans un grand lit de violettes, Cette immuable paix d’éternités muettes Où meurt jusqu’à l’odeur des douces violettes ! Que se reflète, au fond de mon calme regard, Un vaste crépuscule immobile et blafard ! Que diminue enfin l’ardeur de mon regard ! Mais que j’emporte aussi le souvenir des roses, Lorsqu’on viendra poser sur mes paupières closes Les lotus et les lys, les roses et les roses !

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    L’automne L’Automne s’exaspère ainsi qu’une Bacchante, Folle du sang des fruits et du sang des baisers Et dont on voit frémir les seins inapaisés… L’Automne s’assombrit ainsi qu’une Bacchante Au sortir des festins empourprés. Elle chante La moite lassitude et l’oubli des baisers. Les yeux à demi-morts, l’Automne se réveille Dans le défaillement des clartés et des fleurs, Et le soir appauvrit le faste des couleurs. Les yeux à demi-morts, l’Automne se réveille : Ses membres sont meurtris et son âme est pareille Aux coupes sans ivresse où s’effeuillent les fleurs. Ayant bu l’amertume et la haine de vivre Dans le flot triomphal des vignes de l’été, Elle a connu le goût de la satiété. L’éternelle amertume et la haine de vivre Corrompent le festin où le monde s’enivre, Étendu sur le lit de roses de l’été. L’Automne, ouvrant ses mains d’appel et de faiblesse, Se meurt du souvenir accablant de l’amour, Et n’ose en espérer l’impossible retour. Sa chair de volupté, de langueur, de faiblesse. Implore le venin de la bouche qui blesse Et qui sait recueillir les sanglots de l’amour. Le cœur à demi-mort, l’Automne se réveille Et contemple l’amour à travers le passé. Le feu vacille au fond de son regard lassé. Le cœur à demi-mort, l’Automne se réveille : La vigne se dessèche et périt sur la treille… Dans le lointain pâlit la rive du passé.

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    L’odeur des vignes L’odeur des vignes monte en un souffle d’ivresse : La pesante douceur des vendanges oppresse Parmi la longue paix des automnes sereins. Voici le champ, meurtri par les longues cultures, L’enclos tiède, où le fruit livre ses grappes mûres, Comme une femme offrant l’opulence des seins. Un spectre de Bacchante erre parmi les treilles, Sa rouge chevelure et ses lèvres vermeilles, Ses paupières de pourpre aux replis somptueux, Brûlent du flamboiement des anciennes luxures, Et, dévoilant sa chair aux sanglantes morsures, Elle chante à grands cris le vin voluptueux. Les baisers sans amour sur les lèvres stupides, Les regards vacillants dans le fond des yeux vides Sortiront, enfiévrés, de l’effort du pressoir. L’air se peuple déjà de visions profanes, De festins où fleurit le front des courtisanes… Les effluves du vin futur troublent le soir… L’odeur des vignes monte en un souffle d’ivresse : La pesante douceur des vendanges oppresse Parmi la longue paix des automnes sereins. Voici le champ, meurtri par les longues cultures, L’enclos tiède, où le fruit livre ses grappes mûres, Comme une femme offrant l’opulence des seins.

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    L’ombre assourdit le flux et le reflux des choses L’ombre assourdit le flux et le reflux des choses. Parmi l’accablement des parfums et des fleurs, Tes lèvres ont pleuré leurs rythmiques douleurs Dans un refrain mêlé de sanglots et de pauses. Et la langueur des lits, la paix des portes closes, Entourent nos désirs et nos âpres pâleurs… Dédaignant la lumière et le fard des couleurs, Nous mêlons aux baisers le soir trempé de roses. Tes yeux aux bleus aigus d’acier et de cristal S’entr’ouvrent froidement, ternis comme un métal ; Le ciel s’est recouvert d’une brume blafarde. Effleurant ton sommeil opprimé sous le faix Des ivresses, la lune aux longs reflets s’attarde Sur la ruine d’or de tes cheveux défaits.

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    L’orgueil des lourds anneaux, la pompe des parures L’orgueil des lourds anneaux, la pompe des parures, Mêlent l’éclat de l’art à ton charme pervers, Et les gardénias langoureux des hivers Se meurent dans tes mains aux caresses impures. Ta bouche délicate aux fines ciselures Excelle à moduler l’artifice des vers : Sous les flots de satin savamment entr’ouverts, Ton sein s’épanouit en de blanches luxures. Le reflet des saphirs assombrit tes yeux bleus. Le rythmique remous de ton corps onduleux Fait un sillage d’or au milieu des lumières. Quand tu passes, gardant un sourire ténu, Blond pastel surchargé de parfums et de pierres, Je songe à la splendeur de ton corps libre et nu.

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    L’éternelle vengeance Dalila, courtisane au front mystérieux, Aux mains de sortilège et de ruse, aux longs yeux Où luttaient le soleil, l’orage et la nuée, Rêvait : « Je suis l’esclave et la prostituée, La fleur que l’on effeuille au festin du désir, La musique d’une heure et le chant d’un loisir, Ce qui charme, ce qu’on enlace et qu’on oublie. Mon corps sans volupté se pâme et ploie et plie Au signe impérieux des passagers amants. Parmi ces inconnus qui, repus et dormants, Après la laide nuit dont l’ombre pleure encore, De leur souffle lascif souillent l’air de l’aurore, C’est toi le plus haï, Samson, fils d’Israël ! Mon sourire passif répond à ton appel, Mon corps, divin éclair et baiser sans empreinte, A rempli de parfums ta détestable étreinte : Mais, malgré les aveux et les sanglots surpris, Ne crois pas que ma haine ait moins d’âpres mépris, Car, dans le lit léger des feintes allégresses, Dans l’amère moiteur des cruelles caresses, J’ai préparé le piège où tu succomberas, Moi, le contentement bestial de tes bras ! » Elle le supplia sur la couche d’ivoire « Astre sanglant, dis-moi le secret de ta gloire. Mais l’amant de ses nuits sans amour lui mentit. Et la soif des vaincus la brûla sans répit. Elle fut le regard et l’ouïe et l’attente, La chaude obsession qui ravit et tourmente, Et, patient péril aux froids destins pareil, Sa vengeance épia le souffle du sommeil. Un soir que la Beauté brillait plus claire en elle, Par l’enveloppement de l’humide prunelle, Par le geste des bras défaillant et livré Torturé tendrement, — savamment enivré De souples seins, de flancs fiévreux, de lèvres lasses, De murmures mourants et de musiques basses, Sous les yeux de la femme, implacablement doux, Dans l’ombre et dans l’odeur de ses ardents genoux, Sans souvenir, cédant à l’éternelle amorce, L’homme lui soupira le secret de sa force.

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    Mains sur un front C’est l’imposition fraîche et lente des mains Sur mon front que remplit l’horreur des lendemains, Ô bénédiction suave de Ses mains ! Les douces mains de femme ont des gestes de prêtre Et répandent en vous la paix et le bien-être, La consolation que vient donner le prêtre ! Elles n’apprennent point le geste qui guérit, Elles l’ont toujours su… Dans l’horreur de la nuit Cette imposition très calme nous guérit… Apaise mon grand mal, de tes mains secourables, Tandis que l’heure glisse aux sabliers des sables, Car le bienfait me vient de tes mains secourables ! Donne-moi ta fraîcheur et donne-moi ta paix ! Et calme le démon qui sur moi se repaît, En signant sur mon front le geste de la paix !

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    Naïade moderne Les remous de la mer miroitaient dans ta robe. Ton corps semblait le flot traître qui se dérobe. Tu m’attirais vers toi comme l’abîme et l’eau ; Tes souples mains avaient le charme du réseau, Et tes vagues cheveux flottaient sur ta poitrine, Fluides et subtils comme l’algue marine. Cet attrait décevant qui pare le danger Rendait encor plus doux ton sourire léger ; Ton front me rappelait les profondeurs sereines, Et tes yeux me chantaient la chanson des sirènes.

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    Nocturne J’adore la langueur de ta lèvre charnelle Où persiste le pli des baisers d’autrefois. Ta démarche ensorcelle, Et ton impitoyable et perverse prunelle À pris au ciel du nord ses bleus traîtres et froids. Tes cheveux, répandus ainsi qu’une fumée, Légers et vaporeux, presque immatériel, Semblent, ô Bien-Aimée, Recéler les rayons d’une lune embrumée, D’une lune d’hiver dans le cristal des ciels. Le soir voluptueux a des moiteurs d’alcôve : Les astres sont pareils aux regards sensuels Dans l’éther d’un gris mauve, Et je vois s’allonger, inquiétant et fauve, Le lumineux reflet de tes ongles cruels. Sous ta robe, qui glisse en un frôlement d’aile, Je devine ton corps, — les lys ardents des seins, L’or blême de l’aisselle, Les flancs doux et fleuris, les jambes d’immortelle, Le velouté du ventre et la rondeur des reins. La terre s’alanguit, énervée, et la brise, Chaude encore des lits lointains, vient assouplir La mer lasse et soumise… Voici la nuit d’amour depuis longtemps promise… Dans l’ombre je te vois divinement pâlir.

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    Nudité L’ombre jetait vers toi des effluves d’angoisse : Le silence devint amoureux et troublant. J’entendis un soupir de pétales qu’on froisse, Puis, lys entre les lys, m’apparut ton corps blanc. J’eus soudain le mépris de ma lèvre grossière… Mon âme fit ce rêve attendri de poser Sur ta grâce ou longtemps s’attardait la lumière Le souffle frissonnant d’un mystique baiser. Dédaignant l’univers que le désir enchaîne, Tu gardas froidement ton sourire immortel, Car la Beauté demeure étrange et surhumaine Et veut l’éloignement splendide de l’autel. Éparse autour de toi pleurait la tubéreuse, Et tes seins se dressaient dans leur virginité… Dans mes regards brûlait l’extase douloureuse Qui nous étreint au seuil de la divinité.

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    O forme que les mains ne sauraient retenir ! Ô forme que les mains ne sauraient retenir ! Comme au ciel l’élusif arc-en-ciel s’évapore, Ton sourire, en fuyant, laisse plus vide encore Le cœur endolori d’un trop doux souvenir. Ton caprice lassé, comment le rajeunir, Afin qu’il refleurisse aux fraîcheurs d’une aurore ? Quels mots te murmurer, quelles fleurs faire éclore Pour enchanter l’ennui de l’éternel loisir ? De quels baisers charmer la langueur de ton âme, Afin qu’exaspéré d’extase, pleure et pâme Ton être suppliant, avide et contenté ? De quels rythmes d’amour, de quel fervent poème Honorer dignement Celle dont la beauté Porte au front le Désir ainsi qu’un diadème ?

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    Ondine Ton rire est clair, ta caresse est profonde, Tes froids baisers aiment le mal qu’ils font ; Tes yeux sont bleus comme un lotus sur l’onde, Et les lys d’eau sont moins purs que ton front. Ta forme fuit, ta démarche est fluide, Et tes cheveux sont de légers réseaux ; Ta voix ruisselle ainsi qu’un flot perfide ; Tes souples bras sont pareils aux roseaux, Aux longs roseaux des fleuves, dont l’étreinte Enlace, étouffe, étrangle savamment, Au fond des flots, une agonie éteinte Dans un nocturne évanouissement.

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    Petit poème érotique Et je regrette et je cherche ton doux baiser. Quelle femme saurait me plaire et m’apaiser ? Laquelle apporterait les voluptés anciennes Sur des lèvres sans fard et pareilles aux tiennes ? Je le sais, tu mentais, ton rire sonnait creux Mais ton baiser fut lent, étroit et savoureux, Il s’attardait, et ce baiser atteignait l’âme, Car tu fus à la fois le serpent et la femme. Mais souviens-toi de la façon dont je t’aimais... Moi, ne suis-je rien dans ta chair ? Si jamais Tu sanglotas mon nom dans l’instant sans défense, Souviens-toi de ce cri suivi d’un grand silence. Je ne sais plus aimer les beaux chants ni les lys Et ma maison ressemble aux grands nécropolis. Moi qui voudrais chanter, je demeure muette. Je désire et je cherche et surtout je regrette...

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    Prière aux violettes Sous la protection humble des violettes Je remets les soupirs et les douleurs muettes Qui viennent m’assiéger ce soir… Ce trop beau soir !… Dans cet effondrement du final désespoir Leur parfum est semblable aux prières des Saintes… Ô fleur entre les fleurs ! Ô violettes saintes ! Lorsqu’enfin, en un temps, s’arrêtera mon cœur Las de larmes, et tout enivré de rancœur, Qu’une pieuse main les pose sur mon cœur ! Vous me ferez alors oublier, Violettes ! Le long mal qui sévit dans le cœur des poètes… Je dormirai dans la douceur des violettes !

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    Sommeil Ton sommeil m’épouvante, il est froid et profond Ainsi que le Sommeil aux langueurs éternelles. J’ai peur de tes yeux clos, du calme de ton front, Je guette, et le silence inquiet me confond, Un mouvement des cils sur la nuit des prunelles. Je ne sais, présageant les mortelles douleurs, Si, dans la nuit lointaine où l’aurore succombe, Ton souffle n’a pas fui comme un souffle de fleurs, Sans effort d’agonie et sans râle et sans pleurs, Et si ton lit d’amour n’est pas déjà la tombe.

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    Les algues Les algues entr’ouvraient leurs âpres cassolettes D’où montait une odeur de phosphore et de sel, Et, jetant leurs reflets empourprés vers le ciel, Semblaient, au fond des eaux, des lits de violettes. La blancheur d’un essor palpitant de mouettes Mêlait au frais nuage un frisson fraternel ; Les vagues prolongeaient leur rêve et leur appel Vers la tiédeur de l’air aux caresses muettes. Les flots très purs brillaient d’un reflet de miroir… La Sirène aux cheveux rouges comme le soir Chantait la volupté d’une mort amoureuse. Dans la nuit, sanglotait et s’agitait encor Un soupir de la vie inquiète et fiévreuse… Les étoiles pleuraient de longues larmes d’or.

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    Sonnet à une enfant Tes yeux verts comme l’aube et bleus comme la brume Ne rencontreront pas mes yeux noirs de tourment, Puisque ma douleur t’aime harmonieusement, O lys vierge, ô blancheur de nuage et d’écume ! Tu ne connaîtras point l’effroi qui me consume, Car je sais épargner au corps frêle et dormant La curiosité de mes lèvres d’amant, Mes lèvres que l’Hier imprégna d’amertume. Seule, lorsque l’azur de l’heure coule et fuit, Je te respirerai dans l’odeur de la nuit Et je te reverrai sous mes paupières closes. Portant, comme un remords, mon orgueil étouffant, J’irai vers le Martyre ensanglanté de roses, Car mon cœur est trop lourd pour une main d’enfant.

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    Ta forme est un éclair Ta forme est un éclair qui laisse les bras vides, Ton sourire est l’instant que l’on ne peut saisir… Tu fuis, lorsque l’appel de mes lèvres avides T’implore, ô mon Désir ! Froide comme l’Espoir, ta caresse cruelle Meurtrit sans assouvir ; il n’en reste en effet Que l’éternelle faim et la soif éternelle Et l’éternel regret. Tu frôles sans étreindre, ainsi que la Chimère Vers qui tendent toujours tes vœux inapaisés… Rien ne vaut ce tourment ni cette extase amère De tes rares baisers !

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    Terreur du mensonge Oui, j’endure aujourd’hui le pire des tourments, Tu m’as menti… Tu m’as trompé… Et tu me mens !… Mensonge caressant qui glisse de ta bouche ! Ô serment que l’on croit, ô parole qui touche ! Ô multiples douleurs qui s’abattent sur vous Ainsi qu’un petit vent pluvieusement doux !… Comme un lilas ne peut devenir asphodèle, Jamais tu ne seras ni franche ni fidèle. Tu seras celle-là qui se dérobe et fuit Plus sinueusement qu’un démon dans la nuit. Ô toi que j’aime encor ! L’horreur de ton mensonge Est dans mon cœur amer… Il me mord, il me ronge… Je suis lasse d’avoir suivi les noirs chemins… Col frêle qu’on voudrait prendre entre ses deux mains !

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    Tes cheveux irréels, aux reflets clairs et froids Tes cheveux irréels, aux reflets clairs et froids, Ont des lueurs de lune et des lumières blondes ; Tes regards ont l’azur des éthers et des ondes ; Ta robe a le frisson des brises et des bois. Je brûle de baisers la blancheur de tes doigts. L’air nocturne répand la poussière des mondes. Pourtant je ne sais plus, au sein des nuits profondes, Te contempler avec l’extase d’autrefois. Car l’Astre t’effleura d’une lueur oblique, Et ce fut un éclair lugubre et prophétique Révélant la hideur au fond de ta beauté. Je vis, — oh la terreur de ce rêve profane ! — Sur ta lèvre, pareille aux aurores d’été, Un sourire fané de vieille courtisane.

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    Vers d’amour Tu gardes dans tes yeux la volupté des nuits, O Joie inespérée au fond des solitudes ! Ton baiser est pareil à la saveur des fruits Et ta voix fait songer aux merveilleux préludes Murmurés par la mer à la beauté des nuits. Tu portes sur ton front la langueur et l’ivresse, Les serments éternels et les aveux d’amour, Tu sembles évoquer la craintive caresse Dont l’ardeur se dérobe à la clarté du jour Et qui te laisse au front la langueur et l’ivresse.

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    Victoire Donne-moi tes baisers amers comme des larmes, Le soir, quand les oiseaux s’attardent dans leurs vols. Nos longs accouplements sans amour ont les charmes Des rapines, l’attrait farouche des viols. Repousse, délivrant ta haine contenue, Le frisson de ma bouche éprise de ta chair. Pour crier ton dégoût, dresse-toi, froide et nue, Comme un marbre funèbre aux lueurs d’un éclair. Tes yeux ont la splendeur auguste de l’orage… Exhale ton mépris jusqu’en ta pâmoison, O très chère ! — Ouvre-moi tes lèvres avec rage : J’en boirai lentement le fiel et le poison. J’ai l’émoi du pilleur devant un butin rare, Pendant la nuit de fièvre où ton regard pâlit… L’âme des conquérants, éclatante et barbare, Chante dans mon triomphe au sortir de ton lit

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