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Passion

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Passion

Poésies de la collection passion

    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    À m'avouer pour son amant A m'avouer pour son amant Il faudra bien qu'on s'habitue. — Du marbre pur, rose et charmant. J'ai fait jaillir une statue. J'ai taillé le bloc de façon Que ma main s'y puisse connaître ; Et l'on doit garder le soupçon Que je demeurerai son maître. Des bras pourront la posséder Et fléchir sous sa blanche étreinte ; Nul œil jaloux la regarder, Sans qu'il y trouve mon empreinte !

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Comme une grande fleur Comme une grande fleur trop lourde qui défaille, Parfois, toute en mes bras, tu renverses ta taille Et plonges dans mes yeux tes beaux yeux verts ardents, Avec un long sourire où miroitent tes dents… Je t’enlace ; j’ai comme un peu de l’âpre joie Du fauve frémissant et fier qui tient sa proie. Tu souris… je te tiens pâle et l’âme perdue De se sentir au bord du bonheur suspendue, Et toujours le désir pareil au coeur me mord De t’emporter ainsi, vivante, dans la mort. Incliné sur tes yeux où palpite une flamme Je descends, je descends, on dirait, dans ton âme… De ta robe entr’ouverte aux larges plis flottants, Où des éclairs de peau reluisent par instants, Un arôme charnel où le désir s’allume Monte à longs flots vers moi comme un parfum qui fume. Et, lentement, les yeux clos, pour mieux m’en griser, Je cueille sur tes dents la fleur de ton baiser !

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Idéal Hors la ville de fer et de pierre massive, À l’aurore, le choeur des beaux adolescents S’en est allé, pieds nus, dans l’herbe humide et vive, Le coeur pur, la chair vierge et les yeux innocents. Toute une aube en frissons se lève dans leurs âmes. Ils vont rêvant de chars dorés, d’arcs triomphaux, De chevaux emportant leur gloire dans des flammes, Et d’empires conquis sous des soleils nouveaux ! Leur pensée est pareille au feuillage du saule À toute heure agité d’un murmure incertain ; Et leur main fièrement rejette sur l’épaule Leur beau manteau qui claque aux souffles du matin. En eux couve le feu qui détruit et qui crée ; Et, croyant aux clairons qui renversaient les tours, Ils vont remplir l’amphore à la source sacrée D’où sort, large et profond, le fleuve ancien des jours. Ils ont l’amour du juste et le mépris des lâches, Et veulent que ton règne arrive enfin, seigneur ! Et déjà leur sang brûle, en lavant toutes taches, De jaillir, rouge, aux pieds sacrés de la douleur ! Tambours d’or, clairons d’or, sonnez par les campagnes ! Orgueil, étends sur eux tes deux ailes de fer ! Ce qui vient d’eux est pur comme l’eau des montagnes, Et fort comme le vent qui souffle sur la mer ! Sur leurs pas l’allégresse éclate en jeunes rires, La terre se colore aux feux divins du jour, Le vent chante à travers les cordes de leurs lyres, Et le coeur de la rose a des larmes d’amour. Là-bas, vers l’horizon roulant des vapeurs roses, Vers les hauteurs où vibre un éblouissement, Ivres de s’avancer dans la beauté des choses, Et d’être à chaque pas plus près du firmament ; Vers les sommets tachés d’écumes de lumière Où piaffent, tout fumants, les chevaux du soleil, Plus haut, plus haut toujours, vers la cime dernière Au seuil de l’Empyrée effrayant et vermeil ; Ils vont, ils vont, portés par un souffle de flamme… Et l’espérance, triste avec des yeux divins, Si pâle sous son noir manteau de pauvre femme, Un jour encore, au ciel lève ses vieilles mains ! * ** Pieds nus, manteaux flottants dans la brise, à l’aurore, Tels, un jour, sont partis les enfants ingénus, Le coeur vierge, les mains pures, l’âme sonore… Oh ! Comme il faisait soir, quand ils sont revenus ! Pareils aux émigrants dévorés par les fièvres, Ils vont, l’haleine courte et le geste incertain. Sombres, l’envie au foie et l’ironie aux lèvres ; Et leur sourire est las comme un feu qui s’éteint. Ils ont perdu la foi, la foi qui chante en route Et plante au coeur du mal ses talons frémissants. Ils ont perdu, rongés par la lèpre du doute, Le ciel qui se reflète aux yeux des innocents. Même ils ont renié l’orgueil de la souffrance, Et dans la multitude au front bas, au coeur dur, Assoupie au fumier de son indifférence, Ils sont rentrés soumis comme un bétail obscur. Leurs rêves engraissés paissent parmi les foules ; Aux fentes de leur coeur d’acier noble bardé, Le sang altier des forts goutte à goutte s’écoule, Et puis leur coeur un jour se referme, vidé. Matrone bien fardée au seuil clair des boutiques, Leur âme épanouie accueille les passants ; Surtout ils sont dévots aux seuls dieux authentiques, Et, le front dans la poudre, adorent les puissants. Ils veulent des soldats, des juges, des polices, Et, rassurés par l’ordre aux solides étaux, Ils regardent grouiller au vivier de leurs vices Les sept vipères d’or des péchés capitaux. Pourtant, parfois, des soirs, ils songent dans les villes À ceux-là qui près d’eux gravissaient l’avenir, Et qui, ne voulant pas boire aux écuelles viles, S’étant couchés là-haut, s’y sont laissés mourir ; Et le remords les prend quand, au penchant des cimes, Un éclair leur fait voir, les deux bras étendus, Des cadavres hautains, dont les yeux magnanimes Rêvent, tout grands ouverts, aux idéals perdus !

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    L’Andalouse Avez-vous vu, dans Barcelone, Une Andalouse au sein bruni ? Pâle comme un beau soir d’automne ! C’est ma maîtresse, ma lionne ! La marquesa d’Amaëgui ! J’ai fait bien des chansons pour elle, Je me suis battu bien souvent. Bien souvent j’ai fait sentinelle, Pour voir le coin de sa prunelle, Quand son rideau tremblait au vent. Elle est à moi, moi seul au monde. Ses grands sourcils noirs sont à moi, Son corps souple et sa jambe ronde, Sa chevelure qui l’inonde, Plus longue qu’un manteau de roi ! C’est à moi son beau corps qui penche Quand elle dort dans son boudoir, Et sa basquina sur sa hanche, Son bras dans sa mitaine blanche, Son pied dans son brodequin noir. Vrai Dieu ! Lorsque son oeil pétille Sous la frange de ses réseaux, Rien que pour toucher sa mantille, De par tous les saints de Castille, On se ferait rompre les os. Qu’elle est superbe en son désordre, Quand elle tombe, les seins nus, Qu’on la voit, béante, se tordre Dans un baiser de rage, et mordre En criant des mots inconnus ! Et qu’elle est folle dans sa joie, Lorsqu’elle chante le matin, Lorsqu’en tirant son bas de soie, Elle fait, sur son flanc qui ploie, Craquer son corset de satin ! Allons, mon page, en embuscades ! Allons ! la belle nuit d’été ! Je veux ce soir des sérénades À faire damner les alcades De Tolose au Guadalété.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    Madame la marquise Vous connaissez que j’ai pour mie Une Andalouse à l’oeil lutin, Et sur mon coeur, tout endormie, Je la berce jusqu’au matin. Voyez-la, quand son bras m’enlace, Comme le col d’un cygne blanc, S’enivrer, oublieuse et lasse, De quelque rêve nonchalant. Gais chérubins ! veillez sur elle. Planez, oiseaux, sur notre nid ; Dorez du reflet de votre aile Son doux sommeil, que Dieu bénit ! Car toute chose nous convie D’oublier tout, fors notre amour : Nos plaisirs, d’oublier la vie ; Nos rideaux, d’oublier le jour. Pose ton souffle sur ma bouche, Que ton âme y vienne passer ! Oh ! restons ainsi dans ma couche, Jusqu’à l’heure de trépasser ! Restons ! L’étoile vagabonde Dont les sages ont peur de loin Peut-être, en emportant le monde, Nous laissera dans notre coin. Oh ! viens ! dans mon âme froissée Qui saigne encor d’un mal bien grand, Viens verser ta blanche pensée, Comme un ruisseau dans un torrent ! Car sais-tu, seulement pour vivre, Combien il m’a fallu pleurer ? De cet ennui qui désenivre Combien en mon coeur dévorer ? Donne-moi, ma belle maîtresse, Un beau baiser, car je te veux Raconter ma longue détresse, En caressant tes beaux cheveux. Or voyez qui je suis, ma mie, Car je vous pardonne pourtant De vous être hier endormie Sur mes lèvres, en m’écoutant. Pour ce, madame la marquise, Dès qu’à la ville il fera noir, De par le roi sera requise De venir en notre manoir ; Et sur mon coeur, tout endormie, La bercerai jusqu’au matin, Car on connaît que j’ai pour mie Une Andalouse à l’oeil lutin.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    Rappelle toi Rappelle-toi, quand l’Aurore craintive Ouvre au Soleil son palais enchanté ; Rappelle-toi, lorsque la nuit pensive Passe en rêvant sous son voile argenté ; A l’appel du plaisir lorsque ton sein palpite, Aux doux songes du soir lorsque l’ombre t’invite, Ecoute au fond des bois Murmurer une voix : Rappelle-toi. Rappelle-toi, lorsque les destinées M’auront de toi pour jamais séparé, Quand le chagrin, l’exil et les années Auront flétri ce coeur désespéré ; Songe à mon triste amour, songe à l’adieu suprême ! L’absence ni le temps ne sont rien quand on aime. Tant que mon coeur battra, Toujours il te dira Rappelle-toi. Rappelle-toi, quand sous la froide terre Mon coeur brisé pour toujours dormira ; Rappelle-toi, quand la fleur solitaire Sur mon tombeau doucement s’ouvrira. Je ne te verrai plus ; mais mon âme immortelle Reviendra près de toi comme une soeur fidèle. Ecoute, dans la nuit, Une voix qui gémit : Rappelle-toi.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    Se voir le plus possible… Se voir le plus possible et s’aimer seulement, Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge, Sans qu’un désir nous trompe, ou qu’un remords nous ronge, Vivre à deux et donner son coeur à tout moment ; Respecter sa pensée aussi loin qu’on y plonge, Faire de son amour un jour au lieu d’un songe, Et dans cette clarté respirer librement – Ainsi respirait Laure et chantait son amant. Vous dont chaque pas touche à la grâce suprême, Cest vous, la tête en fleurs, qu’on croirait sans souci, C’est vous qui me disiez qu’il faut aimer ainsi. Et c’est moi, vieil enfant du doute et du blasphème, Qui vous écoute, et pense, et vous réponds ceci : Oui, l’on vit autrement, mais c’est ainsi qu’on aime.

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    André Chénier

    André Chénier

    @andreChenier

    Ainsi le jeune amant Ainsi le jeune amant, seul, loin de ses délices, S’assied sous un mélèze au bord des précipices, Et là, revoit la lettre où, dans un doux ennui, Sa belle amante pleure et ne vit que pour lui. Il savoure à loisir ces lignes qu’il dévore ; Il les lit, les relit et les relit encore, Baise la feuille aimée et la porte à son cœur. Tout à coup de ses doigts l’aquilon ravisseur Vient, l’emporte et s’enfuit. Dieux ! il se lève, il crie, Il voit, par le vallon, par l’air, par la prairie, Fuir avec ce papier, cher soutien de ses jours, Son âme et tout lui-même et toutes ses amours. Il tremble de douleur, de crainte, de colère. Dans ses yeux égarés roule une larme amère. Il se jette en aveugle, à le suivre empressé, Court, saute, vole, et l’œil sur lui toujours fixé, Franchit torrents, buissons, rochers, pendantes cimes, Et l’atteint, hors d’haleine, à travers les abîmes.

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    André Chénier

    André Chénier

    @andreChenier

    Pasiphaé Tu gémis sur l’Ida, mourante, échevelée, Ô reine ! ô de Minos épouse désolée ! Heureuse si jamais, dans ses riches travaux, Cérès n’eût pour le joug élevé des troupeaux ! Tu voles épier sous quelle yeuse obscure, Tranquille, il ruminait son antique pâture ; Quel lit de fleurs reçut ses membres nonchalants Quelle onde a ranimé l’albâtre de ses flancs. Ô nymphes, entourez, fermez, nymphes de Crète, De ces vallons fermez, entourez la retraite. Oh ! craignez que vers lui des vestiges épars Ne viennent à guider ses pas et ses regards. Insensée, à travers ronces, forêts, montagnes, Elle court. Ô fureur ! dans les vertes campagnes, Une belle génisse à son superbe amant Adressait devant elle un doux mugissement. La perfide mourra ; Jupiter la demande. Elle-même à son front attache la guirlande, L’entraine, et sur l’autel prenant le fer vengeur :  » Sois belle maintenant, et plais à mon vainqueur. «  Elle frappe. Et sa haine, à la flamme lustrale, Rit de voir palpiter le coeur de sa rivale.

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    L’ardeur Rire ou pleurer, mais que le coeur Soit plein de parfums comme un vase, Et contienne jusqu’à l’extase La force vive ou la langueur. Avoir la douleur ou la joie, Pourvu que le coeur soit profond Comme un arbre où des ailes font Trembler le feuillage qui ploie ; S’en aller pensant ou rêvant, Mais que le coeur donne sa sève Et que l’âme chante et se lève Comme une vague dans le vent. Que le coeur s’éclaire ou se voile, Qu’il soit sombre ou vif tour à tour, Mais que son ombre et que son jour Aient le soleil ou les étoiles…

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    La nuit Nuit sainte, les amants ne vous ont pas connue Autant que les époux. C’est le mystique espoir De ceux qui tristement s’aiment de l’aube au soir, D’être ensemble enlacés sous votre sombre nue. Comme un plus ténébreux et profond sacrement, Ils convoitent cette heure interdite et secrète Où l’animale ardeur s’avive et puis s’arrête Dans un universel et long apaisement. C’est le vœu le plus pur de ces pauvres complices Dont la tendre unité ne doit pas s’avouer, De surprendre parfois votre austère justice, Et d’endormir parmi votre ombre protectrice Leur amour somptueux, humble et désapprouvé…

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    Anna de Noailles

    Anna de Noailles

    @annaDeNoailles

    À la nuit Nuits où meurent l’azur, les bruits et les contours, Où les vives clartés s’éteignent une à une, Ô nuit, urne profonde où les cendres du jour Descendent mollement et dansent à la lune. Jardin d’épais ombrage, abri des corps déments, Grand cœur en qui tout rêve et tout désir pénètre Pour le repos charnel ou l’assouvissement, Nuit pleine des sommeils et des fautes de l’être. Nuit propice aux plaisirs, à l’oubli, tour à tour, Où dans le calme obscur l’âme s’ouvre et tressaille Comme une fleur à qui le vent porte l’amour, Ou bien s’abat ainsi qu’un chevreau dans la paille. Nuit penchée au-dessus des villes et des eaux, Toi qui regardes l’homme avec tes yeux d’étoiles, Vois mon cœur bondissant ivre comme un bateau, Dont le vent rompt le mât et fait claquer la toile. Regarde, nuit dont l’œil argente les cailloux, Ce cœur phosphorescent dont la vive brûlure Éclairerait ainsi que les yeux des hiboux L’heure sans clair de lune où l’ombre n’est pas sûre. Vois mon cœur plus rompu, plus lourd et plus amer Que le rude filet que les pêcheurs nocturnes Lèvent, plein de poissons, d’algues et d’eau de mer Dans la brume mouillée agile et taciturne. À ce cœur si rompu, si amer et si lourd, Accorde le dormir sans songes et sans peines, Sauve-le du regret, de l’orgueil, de l’amour, Ô pitoyable nuit, mort brève, nuit humaine !…

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    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Fêtes de la faim Ma faim, Anne, Anne, Fuis sur ton âne. Si j’ai du goût, ce n’est guère Que pour la terre et les pierres. Dinn ! dinn ! dinn ! dinn ! je pais l’air, Le roc, les Terres, le fer. Tournez, les faims ! paissez, faims, Le pré des sons ! Puis l’humble et vibrant venin Des liserons ; Les cailloux qu’un pauvre brise, Les vieilles pierres d’églises, Les galets, fils des déluges, Pains couchés aux vallées grises ! Mes faims, c’est les bouts d’air noir ; L’azur sonneur ; – C’est l’estomac qui me tire, C’est le malheur. Sur terre ont paru les feuilles : Je vais aux chairs de fruit blettes. Au sein du sillon je cueille La doucette et la violette. Ma faim, Anne, Anne ! Fuis sur ton âne. (Deuxième version) Ma faim, Anne, Anne, Fuis sur ton âne. Si j’ai du goût, ce n’est guère Que pour la terre et les pierres. Dinn! dinn! dinn! dinn ! Mangeons l’air, Le roc, les charbons, le fer. Mes faims, tournez. Paissez, faims, Le pré des sons ! Attirez le gai venin Des liserons ; Mangez Les cailloux qu’un pauvre brise, Les vieilles pierres d’église, Les galets, fils des déluges, Pains couchés aux vallées grises ! Mes faims, c’est les bouts d’air noir; L’azur sonneur; – C’est l’estomac qui me tire. C’est le malheur. Sur terre ont paru les feuilles ! Je vais aux chairs de fruit blettes. Au sein du sillon je cueille La doucette et la violette. Ma faim, Anne, Anne ! Fuis sur ton âne. Août 1872.

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    Arthur Rimbaud

    Arthur Rimbaud

    @arthurRimbaud

    Les mains de Jeanne-Marie Jeanne-Marie a des mains fortes, Mains sombres que l’été tanna, Mains pâles comme des mains mortes. – Sont-ce des mains de Juana ? Ont-elles pris les crèmes brunes Sur les mares des voluptés ? Ont-elles trempé dans des lunes Aux étangs de sérénités ? Ont-elles bu des cieux barbares, Calmes sur les genoux charmants ? Ont-elles roulé des cigares Ou trafiqué des diamants ? Sur les pieds ardents des Madones Ont-elles fané des fleurs d’or ? C’est le sang noir des belladones Qui dans leur paume éclate et dort. Mains chasseresses des diptères Dont bombinent les bleuisons Aurorales, vers les nectaires ? Mains décanteuses de poisons ? Oh ! quel Rêve les a saisies Dans les pandiculations ? Un rêve inouï des Asies, Des Khenghavars ou des Sions ? – Ces mains n’ont pas vendu d’oranges, Ni bruni sur les pieds des dieux : Ces mains n’ont pas lavé les langes Des lourds petits enfants sans yeux. Ce ne sont pas mains de cousine Ni d’ouvrières aux gros fronts Que brûle, aux bois puant l’usine, Un soleil ivre de goudrons. Ce sont des ployeuses d’échines, Des mains qui ne font jamais mal, Plus fatales que des machines, Plus fortes que tout un cheval ! Remuant comme des fournaises, Et secouant tous ses frissons, Leur chair chante des Marseillaises Et jamais les Eleisons ! Ça serrerait vos cous, ô femmes Mauvaises, ça broierait vos mains, Femmes nobles, vos mains infâmes Pleines de blancs et de carmins. L’éclat de ces mains amoureuses Tourne le crâne des brebis ! Dans leurs phalanges savoureuses Le grand soleil met un rubis ! Une tache de populace Les brunit comme un sein d’hier ; Le dos de ces Mains est la place Qu’en baisa tout Révolté fier ! Elles ont pâli, merveilleuses, Au grand soleil d’amour chargé, Sur le bronze des mitrailleuses À travers Paris insurgé ! Ah ! quelquefois, ô Mains sacrées, À vos poings, Mains où tremblent nos Lèvres jamais désenivrées, Crie une chaîne aux clairs anneaux ! Et c’est un soubresaut étrange Dans nos êtres, quand, quelquefois, On veut vous déhâler, Mains d’ange, En vous faisant saigner les doigts ! Arthur Rimbaud, Poésies  

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    Auguste Brizeux

    Auguste Brizeux

    @augusteBrizeux

    Lina I — «Lorsque l’étang est calme et la lune sereine, Quelle est, gens du pays, cette blanche sirène Qui peigne ses cheveux, debout sur ce rocher, Tandis qu’à l’autre bord chante un jeune nocher Dont la barque magique, à peine effleurant l’onde, Rapide comme un trait, vole à la nymphe blonde? Et jusqu’au point du jour, par la vague bercés, Ils errent, mollement l’un à l’autre enlacés! — Oh! c’est là, voyageur, une touchante histoire! Mon père me l’a dite, et vous pouvez y croire». II Fille d’un sang royal, espoir de sa maison, Blanche comme l’hermine à la blanche toison, Lina, qui n’avait vu que sa quinzième année, Amèrement pleurait déjà sa destinée: — «Plutôt que de tomber sous ta serre, ô vautour, «Dans ce lac qui m’attend trouver mon dernier jour; «Oui, dans ses froides eaux éteindre ma jeune ame, «Dur ravisseur, plutôt que me nommer ta femme! «Peut-être de ma mort naîtra ton désespoir, «Et tu vieilliras triste et seul dans ton manoir». Près de l’Étang-au-Duc (le duc, son noble père, Sous qui notre Armorique alors vivait prospère), Lina, la blanche, ainsi parlait dans son effroi, Car du château voisin, sur un noir palefroi, Vers la vierge tremblante accourait hors d’haleine Un poursuivant d’amour qui n’avait que sa haine. Acharné sur sa trace, à toute heure, en tout lieu, Au temple il se plaçait sans peur entre elle et Dieu; Il la suivait aux champs, hideux spectre, à la ville, Et jusqu’en ce désert, près de ce lac tranquille. Ses pieds nus sur le sable et les cheveux au vent, Là, depuis le matin, jouait la belle enfant, Et les cailloux dorés sous les eaux transparentes, Les insectes errants, les mouches murmurantes, Les poissons familiers venant mordre le pain, Le pain de chaque jour émietté par sa main, Ou le vol d’un oiseau, la senteur des eaux douces, Les saules frissonnants, les herbages, les mousses, Tout dans ce cœur mobile allait se reflétant… Puis, Lina n’était pas seule au bord de l’étang; Le long du pré passait, repassait la nacelle De son frère de lait, jeune et riant comme elle. Dès que, de son jardin descendant l’escalier, De loin apparaissait Lina, le batelier, Pareil à l’alcyon qui chante sur les lames, Loïs, chantant aussi, voguait à toutes rames; Et lorsque, les bras nus, le col tout en sueur, Vers sa sœur bien-aimée abordait le rameur, C’étaient pour elle, après maintes tendres paroles, Des fleurs roses du lac aux humides corolles, Des touffes de glaïeuls sur l’onde s’allongeant, Et, comme un beau calice, un nénuphar d’argent; Puis, de tous ces présents déposés sur la berge, Le jeune batelier parait la jeune vierge, Et, leur front entouré d’algues et de roseaux, On les eût pris tous deux pour les Esprits des eaux. — « Jetez cette couronne immonde, ô ma duchesse, « Offrande d’un vilain, digne de sa largesse! « Moi, pour vos blonds cheveux j’ai des couronnes d’or, « Des perles que Merlin cachait dans son trésor; « J’ai pour vous un anneau de fine pierreries, « Où votre nom au mien avec art se marie « Un mot de vous, madame, et mes mains poseront « La bague à votre doigt, la perle à votre front; « Et, s’il faut plus encor, dites comment vous plaire: « Il n’est labeur trop grand pour un si grand salaire. — « Sire (et les yeux troublés de l’enfant, ses grands yeux « Brillèrent, de malice et d’espoir radieux), « J’obéis: donc, seigneur, que votre complaisance « Joigne à l’Étang-au-Duc votre Étang-de-Plaisance. « Le jour où les deux lacs s’uniront, je prendrai, « Unie à vous, l’anneau nuptial et sacré. — « Par les saints! c’est trop peu demander, ô princesse! « Pourtant, à moi mon œuvre; à vous votre promesse!» Et, d’un air de vainqueur regagnant son manoir, Le noir baron pressait aux flancs son coursier noir. III O sort! ô changements des choses et des âges! Un double étang couvrait jadis ces marécages, Sur leur bord un manoir s’élevait crénelé: Le haut manoir n’est plus, un étang s’est comblé; Et le profond canal dont l’habile structure Vint unir ce qu’avait séparé la nature, A peine le chasseur, dans ces joncs égaré, En distingue sous l’herbe un vestige ignoré; Grande œuvre par l’orgueil péniblement construite, Mais que maudit l’amour et par le temps détruite IV Dames et chevaliers, artisans et vassaux, Du manoir de Plaisance inondent les préaux: L’évêque est sous un dais avec tous ses chanoines; Dans la foule reluit le front chauve des moines; Les sonneurs sont aussi venus et les jongleurs. Pour le maître du lieu, sous un arceau de fleurs, Debout et rayonnant, il contemple en silence Une barque dorée et que l’étang balance. C’est qu’un puissant travail, et des maîtres vanté, Aujourd’hui s’inaugure avec solennité: Tous sont priés, et noble, et bourgeois, et manœuvre; Et monseigneur de Vanne a voulu bénir l’œuvre. Çà donc! joyeux sonneurs, cornemuses, haut-bois, Harpes des anciens jours, éclatez à la fois! De sa cour entouré, le bon duc de Bretagne Vous arrive, et Lina, sa fille, l’accompagne; Et, par ce jeune bras soutenu, le vieux duc, Sous l’or de son manteau chancelant et caduc, Se traîne en saluant la multitude avide, Oublieux de son rang, mais tout fier de son guide. Or, pourquoi si dolente et ce front sérieux, Elle vers qui s’en vont tous les cœurs et les yeux, Depuis un an cloîtrée avec de saintes vierges, Pâlit-elle si vite à la lueur des cierges? Ou si son cœur redoute en secret quelque mal? Cependant la voici près de l’arc triomphal, Et, la main dans la main, le seigneur du domaine Vers la barque dorée en souriant la mène. Là, parmi les rameurs du léger batelet, Moins triste, elle sourit à son frère de lait. Elle ne pâlit plus, la timide recluse, Quand, le lac traversé, les portes d’une écluse, Aux voix des instrumens qui donnaient le signal. S’ouvrant, l’esquif vainqueur entra dans le canal Qui, par de grands travaux franchissant la distance. Joignait l’Étang-au-Duc à l’Étang-de-Plaisance; Mais, tel un condamné que l’on traîne à la mort. Ses regards lentement erraient sur chaque bord, Comme dans un adieu saluant la prairie Et l’étang paternel où s’éveilla sa vie… Alors le fier seigneur, penché courtoisement: — «Voici mon œuvre. Et vous, dame, votre serment — «Je m’en souviens!…» dit-elle. Et sa main virginale Sans trembler accepta la bague nuptiale; Puis, s’enlaçant au cou du jeune batelier, Tous deux tombaient au fond du lac hospitalier. V — «Lorsque l’étang est calme et la lune sereine, Vous savez, voyageur, quelle est cette sirène Qui peigne ses cheveux, debout sur ce rocher, Tandis qu’à l’autre bord chante un jeune nocher Dont la barque magique, à peine effleurant l’onde, Rapide comme un trait, vole à la nymphe blonde; Et jusqu’au point du jour, par la vague bercés, Ils errent mollement l’un à l’autre enlacés. — O merveilleux conteur, merci pour ton histoire! Elle est triste, mais douce, et mon cœur y veut croire».

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    Benjamin Peret

    Benjamin Peret

    @benjaminPeret

    Clin d'Oeil Des vols de perroquets traversent ma tête quand je te vois de profil et le ciel de graisse se strie d’éclairs bleus qui tracent ton nom dans tous les sens Rosa coiffée d’une tribu nègre égarée sur un escalier où les seins aigus des femmes regardent par les yeux des hommes Aujourd’hui je regarde par tes cheveux Rosa d’opale du matin et je m’éveille par tes yeux Rosa d’armure et je pense par tes seins d’explosion Rosa d’étang verdi par les grenouilles et je dors dans ton nombril de mer Caspienne Rosa d’églantine pendant la grève générale et je m’égare entre tes épaules de voie lactée fécondée par des comètes Rosa de jasmin dans la nuit de lessive Rosa de maison hantée Rosa de forêt noire inondée de timbres poste bleus et verts Rosa de cerf-volant au-dessus d’un terrain vague où se battent des enfants Rosa de fumée de cigare Rosa d’écume de mer faite cristal Rosa

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    La muse malade Ma pauvre muse, hélas ! qu’as-tu donc ce matin ? Tes yeux creux sont peuplés de visions nocturnes, Et je vois tour à tour réfléchis sur ton teint La folie et l’horreur, froides et taciturnes. Le succube verdâtre et le rose lutin T’ont-ils versé la peur et l’amour de leurs urnes ? Le cauchemar, d’un poing despotique et mutin, T’a-t-il noyée au fond d’un fabuleux Minturnes ? Je voudrais qu’exhalant l’odeur de la santé Ton sein de pensers forts fût toujours fréquenté, Et que ton sang chrétien coulât à flots rythmiques, Comme les sons nombreux des syllabes antiques, Où règnent tour à tour le père des chansons, Phoebus, et le grand Pan, le seigneur des moissons.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    La musique La musique souvent me prend comme une mer ! Vers ma pâle étoile, Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther, Je mets à la voile ; La poitrine en avant et les poumons gonflés Comme de la toile, J’escalade le dos des flots amoncelés Que la nuit me voile ; Je sens vibrer en moi toutes les passions D’un vaisseau qui souffre ; Le bon vent, la tempête et ses convulsions Sur l’immense gouffre Me bercent. D’autres fois, calme plat, grand miroir De mon désespoir !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Le jeu Dans des fauteuils fanés des courtisanes vieilles, Pâles, le sourcil peint, l’oeil câlin et fatal, Minaudant, et faisant de leurs maigres oreilles Tomber un cliquetis de pierre et de métal ; Autour des verts tapis des visages sans lèvre, Des lèvres sans couleur, des mâchoires sans dent, Et des doigts convulsés d’une infernale fièvre, Fouillant la poche vide ou le sein palpitant ; Sous de sales plafonds un rang de pâles lustres Et d’énormes quinquets projetant leurs lueurs Sur des fronts ténébreux de poètes illustres Qui viennent gaspiller leurs sanglantes sueurs ; Voilà le noir tableau qu’en un rêve nocturne Je vis se dérouler sous mon oeil clairvoyant. Moi-même, dans un coin de l’antre taciturne, Je me vis accoudé, froid, muet, enviant, Enviant de ces gens la passion tenace, De ces vieilles putains la funèbre gaieté, Et tous gaillardement trafiquant à ma face, L’un de son vieil honneur, l’autre de sa beauté ! Et mon coeur s’effraya d’envier maint pauvre homme Courant avec ferveur à l’abîme béant, Et qui, soûl de son sang, préférerait en somme La douleur à la mort et l’enfer au néant !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Le poison Le vin sait revêtir le plus sordide bouge D’un luxe miraculeux, Et fait surgir plus d’un portique fabuleux Dans l’or de sa vapeur rouge, Comme un soleil couchant dans un ciel nébuleux. L’opium agrandit ce qui n’a pas de bornes, Allonge l’illimité, Approfondit le temps, creuse la volupté, Et de plaisirs noirs et mornes Remplit l’âme au delà de sa capacité. Tout cela ne vaut pas le poison qui découle De tes yeux, de tes yeux verts, Lacs où mon âme tremble et se voit à l’envers… Mes songes viennent en foule Pour se désaltérer à ces gouffres amers. Tout cela ne vaut pas le terrible prodige De ta salive qui mord, Qui plonge dans l’oubli mon âme sans remord, Et, charriant le vertige, La roule défaillante aux rives de la mort !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Les litanies de satan Ô toi, le plus savant et le plus beau des Anges, Dieu trahi par le sort et privé de louanges, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Ô Prince de l’exil, à qui l’on a fait tort, Et qui, vaincu, toujours te redresses plus fort, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui sais tout, grand roi des choses souterraines, Guérisseur familier des angoisses humaines, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui, même aux lépreux, aux parias maudits, Enseignes par l’amour le goût du Paradis, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Ô toi qui de la Mort, ta vieille et forte amante, Engendras l’Espérance, — une folle charmante ! Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui fais au proscrit ce regard calme et haut Qui damne tout un peuple autour d’un échafaud, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui sais en quels coins des terres envieuses Le Dieu jaloux cacha les pierres précieuses, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi dont l’œil clair connaît les profonds arsenaux Où dort enseveli le peuple des métaux, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi dont la large main cache les précipices Au somnambule errant au bord des édifices, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui, magiquement, assouplis les vieux os De l’ivrogne attardé foulé par les chevaux, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui, pour consoler l’homme frêle qui souffre, Nous appris à mêler le salpêtre et le soufre, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui poses ta marque, ô complice subtil, Sur le front du Crésus impitoyable et vil, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Toi qui mets dans les yeux et dans le cœur des filles Le culte de la plaie et l’amour des guenilles, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Bâton des exilés, lampe des inventeurs, Confesseur des pendus et des conspirateurs, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! Père adoptif de ceux qu’en sa noire colère Du paradis terrestre a chassés Dieu le Père, Ô Satan, prends pitié de ma longue misère ! PRIÈRE Gloire et louange à toi, Satan, dans les hauteurs Du Ciel, où tu régnas, et dans les profondeurs De l’Enfer, où, vaincu, tu rêves en silence ! Fais que mon âme un jour, sous l’Arbre de Science, Près de toi se repose, à l’heure où sur ton front Comme un Temple nouveau ses rameaux s’épandront !

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Sonnet d'automne Ils me disent, tes yeux, clairs comme le cristal : " Pour toi, bizarre amant, quel est donc mon mérite ? " - Sois charmante et tais-toi ! Mon coeur, que tout irrite, Excepté la candeur de l'antique animal, Ne veut pas te montrer son secret infernal, Berceuse dont la main aux longs sommeils m'invite, Ni sa noire légende avec la flamme écrite. Je hais la passion et l'esprit me fait mal ! Aimons-nous doucement. L'Amour dans sa guérite, Ténébreux, embusqué, bande son arc fatal. Je connais les engins de son vieil arsenal : Crime, horreur et folie ! - Ô pâle marguerite ! Comme moi n'es-tu pas un soleil automnal, Ô ma si blanche, ô ma si froide Marguerite ?

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    C

    Charles Guérin

    @charlesGuerin

    Ce cœur plaintif, ce cœur d'automne Ce cœur plaintif, ce cœur d'automne, Qui veut l'aimer ? Ma belle enfant, on vous le donne Pour un baiser. Amusez-vous, car je vous vois Inoccupée, A le briser, comme autrefois Votre poupée. Ce sera moins long que les roses A déchirer, Puis vous irez à d'autres choses, Et moi pleurer.

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    C

    Charles Marie René Leconte de Lisle

    @charlesMarieReneLeconteDeLisle

    Le colibri Le vert colibri, le roi des collines, Voyant la rosée et le soleil clair Luire dans son nid tissé d’herbes fines, Comme un frais rayon s’échappe dans l’air. Il se hâte et vole aux sources voisines Où les bambous font le bruit de la mer, Où l’açoka rouge, aux odeurs divines, S’ouvre et porte au cœur un humide éclair. Vers la fleur dorée il descend, se pose, Et boit tant d’amour dans la coupe rose, Qu’il meurt, ne sachant s’il l’a pu tarir. Sur ta lèvre pure, ô ma bien-aimée, Telle aussi mon âme eût voulu mourir Du premier baiser qui l’a parfumée !

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    C

    Charles Marie René Leconte de Lisle

    @charlesMarieReneLeconteDeLisle

    Les oiseaux de proie Je m’étais assis sur la cime antique Et la vierge neige, en face des Dieux ; Je voyais monter dans l’air pacifique La procession des Morts glorieux. La Terre exhalait le divin cantique Que n’écoute plus le siècle oublieux, Et la chaîne d’or du Zeus homérique D’anneaux en anneaux l’unissait aux cieux. Mais, ô Passions, noirs oiseaux de proie, Vous avez troublé mon rêve et ma joie : Je tombe du ciel, et n’en puis mourir ! Vos ongles sanglants ont dans mes chairs vives Enfoncé l’angoisse avec le désir, Et vous m’avez dit : – Il faut que tu vives. –

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    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    Charles-Augustin Sainte-Beuve

    @charlesAugustinSainteBeuve

    Les passions, la guerre Les passions, la guerre ; une âme en frénésie, Qu'un éclatant forfait renverse du devoir ; Du sang ; des rois bannis, misérables à voir ; Ce n'est pas là-dedans qu'est toute poésie. De soins plus doux, la Muse est quelquefois saisie ; Elle aime aussi la paix, les champs, l'air frais du soir, Un penser calme et fort, mêlé de nonchaloir ; Le lait pur des pasteurs lui devient ambroisie. Assise au bord d'une eau qui réfléchit les cieux, Elle aime la tristesse et ses élans pieux ; Elle aime les parfums d'une âme qui s'exhale, La marguerite éclose, et le sentier fuyant, Et quand novembre étend sa brume matinale, Une fumée au loin qui monte en tournoyant. Septembre 1829.

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    Christian Mégrelis

    @christianMegrelis

    As above so below Toutes ces nuits glacées à l’âcre gout de cendre, Tous ces jours de lumières au sombre gout de nuit. Tout mon amour en friche et cet immense ennui, Et mille souvenirs pour survivre et attendre. Chaqu’aurore clôt des rêves qu’il faut encor apprendre, Chaque veille abolit l’espoir d’étreintes enfuies. Chaque lune dissipe tes parfums épanouis, Et mille mots d’amour qui cherchent une âme tendre. Ô chère, t’en souviens- tu ? De ce lagon magique, Des Zaterre pimpants, des fjords des antipodes, Où toutes nos années coulaient en cascatelles, De toutes ces merveilles, sourds témoins incommodes De murmures d’amants se mimant immortels, Qui nous cachaient des temps le dénouement tragique !

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    Clément Marot

    Clément Marot

    @clementMarot

    Ballade de la passion de notre seigneur Jesus-Christ Le pélican de la forêt célique Entre ses faits tant beaux et nouvelets, Après les cieux et l'ordre archangélique. Voulue créer ses petits oiselets, Puis s'envola, les laissa tous seulets, Et leur donna, pour mieux sur la terre estre, La grand'forêt de paradis terrestre, D'arbres de vie amplement revêtue, Plantés par lui, qu'on peut dite en tout estre Le pélican, qui pour les siens se tue. Mais cependant qu'en ramage musique Chantent au bois comme rossignolets, Un oiseleur cauteleux et inique Les a déçus2 à glu, rets et filets ; Dont sont bannis de jardins verdelets, Car des hauts fruits trop voulurent repaître, Par quoi en lieu sentant poudre et salpêtre Par plusieurs ans mainte souffrance ont eue, En attendant du beau lieu champêtre Le pélican qui pour les siens se tue. Pour eux mourut cet oisel déifique, Car du haut bois, plein de saints angeiets, Vola ça bas par charité pudique. Où il trouva corbeaux très ords3 et laids, Qui de son sang ont fait maints ruisselets, Le tourmentant à dextre et à senestre, Si que sa mort, comme l'on peut connaître A ses petits a la vie rendue. Ainsi leur fit sa bonté apparaître Le pélican qui pour les siens se tue. ENVOI Les corbeaux sont ces juifs exilés, Qui ont à tort les membres mutilés Du pélican, c'est du seul Dieu et maître. Les oiselets sont humains qu'il fit naître ; Et l'oiseleur, la serpente tortue Qui les déçut leur faisant méconnaître Le pélican, qui pour les siens se tue.

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    Clément Marot

    Clément Marot

    @clementMarot

    De la passion notre Seigneur Jésus-Christ Le Pélican de la forêt célique ', Entre ses faits tant beaux et nouvelets, Après les cieux et l'ordre archangélique, Voulut créer ses petits oiselets. Puis s'envola, les laissa tous seulets, Et leur donna, pour mieux sur la terre estre, La grand forêt de Paradis terrestre, D'arbres de vie amplement revêtue, Plantés par lui, qu'on peut dire en tout estre Le Pélican, qui pour les siens se tue. Mais cependant qu'en ramage musique Chantent au bois comme rossignolcts, Un oiseleur cauteleux et inique Les a déçus à glus, rets et filets : Dont sont bannis des jardins verdelets, Car des hauts fruits trop voulurent repaistre. Parquoi en lieu sentant poudre et salpestre Par plusieurs ans mainte souffrance ont eue, En attendant hors du beau lieu champestre Le Pélican, qui pour les siens se tue. Pour eux mourut cet oiscl déifique, Car du haut bois plein de saints Angelets Vola çà-bas par charité pudique, Où il trouva corbeaux très ords et laids : Qui de son sang ont fait maints ruisselets, Le tourmentant à dextre et à senestre, Si que sa mort, comme l'on peut connoistre, A ses petits a la vie rendue. Ainsi leur fit sa bonté apparoistre Le Pélican, qui pour les siens se tue. ENVOI Les Corbeaux sont ces Juifs exilés, Qui ont à tort les membres mutilés Du Pélican : c'est du seul Dieu et maistre. Les Oiselets, sont Humains, qu'il fit naistre ; Et l'Oiseleur, la Serpente tortue Qui les déçut, leur faisant méconnaistre Le Pélican, qui pour les siens se tue.

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    D

    Didier Venturini

    @didierVenturini

    Catrina La robe fendue sur une cuisse mince la jambe tendue pour quelque prince mais souviens toi que tu mourras quand dans mes bras tu renaitras regarde beau gosse ce cheval sombre ce ciel de noce au d’ssus des tombes dia de los muertos viens dans ma danse joyeux mortel suis la cadence du grand sommeil sur cet autel où tu m’honores soyons fidèles même dans la mort je suis défunte déjà squelette pour quelques feintes rire des défaites un beau chapeau venu de France couvre mes os de sa clémence buvons encore à nos santés le pain des morts est bien doré

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