Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.

Ligne de crête

Jacques Moreuil est un « rebelle ». S'il a voulu obtenir un diplôme qui lui permettra, plus tard, de se « caser » dans la Société, c'est pour mieux échapper à ce monde dans lequel il se sent un étranger. Après tant d'années d'études et de réclusion, il part à l'aventure, à la poursuite de la ferveur, de l'amour peut-être, et peut-être aussi de lui-même. Parvenu, par hasard, au désert où se déroulent les vraies tentations - un étrange désert de montagne - il se trouve affronté à de singuliers personnages : Brandt le professeur ; sa fille, l'énigmatique Maria-Pia ; Jean Lorre, un prêtre à la foi prophétique et qui fait peur. Alors des questions inattendues surgissent. Le passé se mêle au présent, les ressentiments d'une éducation religieuse et morale faussée remontent à la surface. Comment accepter les mélanges, les compromis d'une religion installée qui vit trop souvent de pressions et de peurs ? Mais où conduit la foi nue de ce prêtre, que Moreuil observe avec une intense curiosité ? Moreuil l'apprend bientôt. Il est dans l'ordre que les prophètes soient massacrés. Moreuil prendra la fuite. Jusques à quand fuira-t-il ? Malhabile à se tromper il comprend d'ailleurs qu'il ne s'intéresse qu'en spectateur aux tragédies de l'âme. Tout lui manque. L'amour même de Maria-Pia, tendre et fraternelle, lui est enlevé par un autre amour. Moreuil reste seul, incapable de se duper avec de fausses solutions. Rien de moins conventionnel et de plus insolite que cette histoire grave et passionnée, à travers laquelle apparaît une autre histoire, plus intérieure, qui s'adresse à ceux qui cherchent comme une direction, à ceux qui doutent comme une réponse, à ceux qui croient comme une terrible interrogation.

Le voyage intérieur

À travers plus de deux cents entrées, cet Abécédaire pose un regard neuf sur l'oeuvre de Jean Sulivan (1913-1980), écrivain atypique, prêtre, directeur de collection aux Éditions Gallimard, grand cinéphile, et auteur de nombreux romans, écrits spirituels, articles et entretiens. Ce recueil, en effet, entrecroise et rapproche de façon inédite les grands thèmes de ses livres (la foi, la rébellion, la liberté, l'intériorité) et propose de nombreuses ouvertures sur la philosophie, les spiritualités orientales, et l'histoire de l'art - sources souterraines de l'écriture de Jean Sulivan. 
Conçu par Charles Austin, ce parcours met en lumière le caractère percutant et actuel de l'oeuvre de Jean Sulivan, une réflexion originale et souvent provocante sur l'homme, l'Église et la société.

Abécédaire

Mais il y a la mer

Durant deux ans et demi, les chroniques de Jean Sulivan dans le mensuel chrétien Panorama Aujourd'hui furent un rendez-vous essentiel pour des milliers de lecteurs passionnés, attirés par cette « parole du passant » qui réveille, stimule, et bouscule même jusqu'à parfois déconcerter.

Ces chroniques regroupées ici ont gardé, dix ans plus tard, leur pleine actualité. Chrétiens ou agnostiques, on ne peut que se sentir appelés par cette voix qui nous invite à vivre libres - d'une liberté vécue intérieurement. La quête spirituelle de Sulivan, qui n'est pas sans rappeler par certains côtés celle des Orientaux, s'exprime dans une langue étrangère à tous les conformismes, enracinée dans le quotidien, toujours vivante parce qu'éclairée à la lueur de ce qu'il nomme l'instant éternité. Le passant s'est éloigné vers d'autres horizons, mais sa parole demeure pour nous nourriture de l'âme.

Jean Sulivan (1913-1980), prêtre libéré de ses obligations ecclésiastiques pour devenir pleinement écrivain, est l'auteur de nombreux romans, récits et essais : Matinales, Joie errante, Mais il y a la mer, Car je t'aime ô éternité.

Parole du passant

«Afin d'échapper à l'asphyxie, vous, moi, ce doit être pour cela que j'écris chaque matin. Pour descendre jusqu'à l'humus de la vie, à l'heure où ceux des miens qui n'ont pas rejoint la ville ou ne sont pas encore sous la terre sortent pour labourer, faucher l'herbe. Vous débaucher. Je veux. Vous mettre en presque chômage. Vous inciter à descendre dans vos cavernes murées. Non pas moi, mais la voix intraitable qui est en vous. Afin que votre pensée souterraine émerge et fasse craquer vos idées claires, tandis que frappe à la porte l'inconnu muet. Comme il arrive qu'une nuit, un rêve déchirant de beauté survienne annonciateur de l'impossible... Vous avez raison. Quittez ce livre. Passez au large. Défendez-vous du poème. Cessez de jouer avec, on ne sait jamais avec lui. Il vous plante soudain un couteau dans le coeur. C'en est fini de vos projets. Ne vous y trompez pas. J'en veux à votre vie.» «Écrivain public, j'écris les lettres de n'importe qui. J'écris avec vos existences.» Comme dans Itinéraire spirituel, qui composait le premier volume des Matinales, ce second volume, La traversée des illusions, est tout à la fois journal, récit, essai et parabole. Il est fait de rencontres, de blessures et de joies.

Matinales - ii - la traversee des illusions

Tandis que les fusées sillonnaient le ciel, que l'on préparait la guerre, que l'on faisait la guerre pour la défense de la « civilisation chrétienne », tandis que les vedettes épousaient, divorçaient, enfantaient parfois, pour la délectation d'une foule qui, n'aimant plus sa propre vie, se gavait d'amours étrangères, de fausses intimités, de scandales et de publicité, un prince, un jour, eut honte et, s'étant échappé de sa princerie, brouilla si bien les pistes que les héros du papier-choc perdirent sa trace. Sous un nom d'emprunt, il entra dans un lointain monastère, y jeta le trouble d'ailleurs, malhabile à croire que Dieu demeure dans les pierres anciennes quand les pauvres souffrent au dehors. Revenu malgré lui au pouvoir dans sa principauté, il supprima l'armée, la police et la cérémonie. Le monde entier prit peur... L'érotisme et la guerre, la vie et la mort transformées en spectacle - voire certaines formes dégradées de religion - sont une même réalité, semble dire Jean Sulivan, dans un récit délibérément pulvérisé : l'énorme divertissement d'un monde qui refuse d'assumer son âme et sa liberté.

Le prince et le mal

«Ce que l'on dirait à voix basse à un ami, si l'on n'avait plus que peu de temps à vivre», ainsi apparaît ce livre posthume de Jean Sulivan. Il est fait de pensées rassemblées par lui-même, des derniers feuillets de ses carnets, d'esquisses de nouvelles, tout ce qu'il écrivait au moment de sa mort accidentelle, en 1980. Dans ces pages sans apprêt, Sulivan livre le fond de sa pensée. Il perce à jour, parfois avec effroi, aussi bien les pouvoirs politiques que les structures de l'Église, aussi bien les révoltes que les conforts, aussi bien les morales que les théories laxistes, aussi bien le peuple même, ou les peuples, que les rites ou les concepts. Il ne s'épargne pas lui-même. «Que de temps il m'aura fallu, écrit-il, pour apercevoir que j'avais vécu pour complaire aux miens, à l'Église officielle, avant de comprendre qu'il importait de défaire l'être de convention sincère, la doublure de soi, et qu'on ne peut être fidèle à Dieu si on ne l'est à sa parole intérieure.»

Ligne de crête

Résumé

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