Titre : La première
Auteur : François Coppée Recueil : Le cahier rouge, 1892
Ce n'est pas qu'elle fût bien belle ;
Mais nous avions tous deux vingt ans,
Et ce jour-là, – je me rappelle, –
Était un matin de printemps.
Ce n'est pas qu'elle eût l'air bien grave ;
Mais je jure ici que jamais
Je n'ai rien osé de plus brave
Que de lui dire que j'aimais.
Ce n'est pas qu'elle eût le cœur tendre ;
Mais c'était si délicieux
De lui parler et de l'entendre
Que les pleurs me venaient aux yeux.
Ce n'est pas qu'elle eût l'âme dure ;
Mais pourtant elle m'a quitté,
Et, depuis, ma tristesse dure,
Et c'est pour une éternité.