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Titre : Les baisers

Auteur : Germain Nouveau Recueil : Valentines, 1885

Sonnez, sonnez haut sur la joue, Baisers de la franche amitié, Comme un fils de neuf ans qui joue, Petit tapageur sans pitié. Baiser du respect qui s'imprime À la porte du cœur humain, Comme avec l'aile d'une rime, Effleurez à peine la main ; Baiser d'affection armée, De la mère au cœur noble et fier Sur le front de la tête aimée, Vibrez mieux que le bruit du fer. Baiser d'affection aînée, Ou de mère, le jour des prix, Sur chaque tête couronnée Laissez-vous tomber, sans mépris. Baisers d'affections voisines, Voltigez du rire joyeux Des sœurs ou des jeunes cousines Sur le nez, la bouche ou les yeux ; Baiser plus doux que des paroles, Baiser des communes douleurs, Ferme en soupirant les corolles Des yeux d'où s'échappent les pleurs : Baiser de la passion folle Baise la trace de ses pas, Réellement, sans hyperbole, Pour montrer que tu ne mens pas. Baise un bas ourlet de sa robe, L'éventail quitté par ses doigts, Et si tout objet se dérobe, Feins dans l'air de baiser sa voix ; Et si l'on garde le silence, Tu dois t'en aller, c'est plus sûr ; Mais avant ton aile s'élance Et tu t'appliques sur son mur. Reviens plus joyeux que la veille, Mouille son ongle musical, Les bords riants de son oreille. Que le monde te soit égal ! Baiser du désir qui veut mordre, Pose-toi derrière le cou, Dans la nuque où l'on voit se tordre Une mèche qui te rend fou. Sur sa bouche et sur sa promesse, Profond et pur comme le jour, Plus long qu'un prêtre à la grand messe, Oubliez-vous, Baiser d'amour.