Guillaume Apollinaire
@guillaumeApollinaire
La sauterelle Voici la fine sauterelle, La nourriture de saint Jean. Puissent mes vers être comme elle, Le régal des meilleures gens.@guillaumeApollinaire
La sauterelle Voici la fine sauterelle, La nourriture de saint Jean. Puissent mes vers être comme elle, Le régal des meilleures gens.@guillaumeApollinaire
Le cheval Mes durs rêves formels sauront te chevaucher, Mon destin au char d’or sera ton beau cocher Qui pour rênes tiendra tendus à frénésie, Mes vers, les parangons de toute poésie.@guillaumeApollinaire
Les fiançailles Le printemps laisse errer les fiancés parjures Et laisse feuilloler longtemps les plumes bleues Que secoue le cyprès où niche l’oiseau bleu Une Madone à l’aube a pris les églantines Elle viendra demain cueillir les giroflées Pour mettre aux nids des colombes qu’elle destine Au pigeon qui ce soir semblait le Paraclet Au petit bois de citronniers s’enamourèrent D’amour que nous aimons les dernières venues Les villages lointains sont comme leurs paupières Et parmi les citrons leurs cœurs sont suspendus Mes amis m’ont enfin avoué leur mépris Je buvais à pleins verres les étoiles Un ange a exterminé pendant que je dormais Les agneaux les pasteurs des tristes bergeries De faux centurions emportaient le vinaigre Et les gueux mal blessés par l’épurge dansaient Étoiles de l’éveil je n’en connais aucune Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune Des croque-morts avec des bocks tintaient des glas À la clarté des bougies tombaient vaille que vaille Des faux-cols sur des flots de jupes mal brossées Des accouchées masquées fêtaient leurs relevailles La ville cette nuit semblait un archipel Des femmes demandaient l’amour et la dulie Et sombre sombre fleuve je me rappelle Les ombres qui passaient n’étaient jamais jolies Je n’ai plus même pitié de moi Et ne puis exprimer mon tourment de silence Tous les mots que j’avais à dire se sont changés en étoiles Un Icare tente de s’élever jusqu’à chacun de mes yeux Et porteur de soleils je brûle au centre de deux nébuleuses Qu’ai-je fait aux bêtes théologales de l’intelligence Jadis les morts sont revenus pour m’adorer Et j’espérais la fin du monde Mais la mienne arrive en sifflant comme un ouragan J’ai eu le courage de regarder en arrière Les cadavres de mes jours Marquent ma route et je les pleure Les uns pourrissent dans les églises italiennes Ou bien dans de petits bois de citronniers Qui fleurissent et fructifient En même temps et en toute saison D’autres jours ont pleuré avant de mourir dans des tavernes Où d’ardents bouquets rouaient Aux yeux d’une mulâtresse qui inventait la poésie Et les roses de l’électricité s’ouvrent encore Dans le jardin de ma mémoire Pardonnez-moi mon ignorance Pardonnez-moi de ne plus connaître l’ancien jeu des vers Je ne sais plus rien et j’aime uniquement Les fleurs à mes yeux redeviennent des flammes Je médite divinement Et je souris des êtres que je n’ai pas créés Mais si le temps venait où l’ombre enfin solide Se multipliait en réalisant la diversité formelle de mon amour J’admirerais mon ouvrage J’observe le repos du dimanche Et je loue la paresse Comment comment réduire L’infiniment petite science Que m’imposent mes sens L’un est pareil aux montagnes au ciel Aux villes à mon amour Il ressemble aux saisons Il vit décapité sa tête est le soleil Et la lune son cou tranché Je voudrais éprouver une ardeur infinie Monstre de mon ouïe tu rugis et tu pleures Le tonnerre te sert de chevelure Et tes griffes répètent le chant des oiseaux Le toucher monstrueux m’a pénétré m’empoisonne Mes yeux nagent loin de moi Et les astres intacts sont mes maîtres sans épreuve La bête des fumées a la tête fleurie Et le monstre le plus beau Ayant la saveur du laurier se désole À la fin les mensonges ne me font plus peur C’est la lune qui cuit comme un œuf sur le plat Ce collier de gouttes d’eau va parer la noyée Voici mon bouquet de fleurs de la Passion Qui offrent tendrement deux couronnes d’épines Les rues sont mouillées de la pluie de naguère Des anges diligents travaillent pour moi à la maison La lune et la tristesse disparaîtront pendant Toute la sainte journée Toute la sainte journée j’ai marché en chantant Une dame penchée à sa fenêtre m’a regardé longtemps M’éloigner en chantant Au tournant d’une rue je vis des matelots Qui dansaient le cou nu au son d’un accordéon J’ai tout donné au soleil Tout sauf mon ombre Les dragues les ballots les sirènes mi-mortes À l’horizon brumeux s’enfonçaient les trois-mâts Les vents ont expiré couronnés d’anémones Ô Vierge signe pur du troisième mois Templiers flamboyants je brûle parmi vous Prophétisons ensemble ô grand maître je suis Le désirable feu qui pour vous se dévoue Et la girande tourne ô belle ô belle nuit Liens déliés par une libre flamme Ardeur Que mon souffle éteindra Ô Morts à quarantaine Je mire de ma mort la gloire et le malheur Comme si je visais l’oiseau de la quintaine Incertitude oiseau feint peint quand vous tombiez Le soleil et l’amour dansaient dans le village Et tes enfants galants bien ou mal habillés Ont bâti ce bûcher le nid de mon courage@guillaumeApollinaire
Lul de faltenin Sirènes j’ai rampé vers vos Grottes tiriez aux mers la langue En dansant devant leurs chevaux Puis battiez de vos ailes d’anges Et j’écoutais ces chœurs rivaux Une arme ô ma tête inquiète J’agite un feuillard défleuri Pour écarter l’haleine tiède Qu’exhalent contre mes grands cris Vos terribles bouches muettes Il y a là-bas la merveille Au prix d’elle que valez-vous Le sang jaillit de mes otelles À mon aspect et je l’avoue Le meurtre de mon double orgueil Si les bateliers ont ramé Loin des lèvres à fleur de l’onde Mille et mille animaux charmés Flairant la route à la rencontre De mes blessures bien-aimées Leurs yeux étoiles bestiales Éclairent ma compassion Qu’importe ma sagesse égale Celle des constellations Car c’est moi seul nuit qui t’étoile Sirènes enfin je descends Dans une grotte avide J’aime Vos yeux Les degrés sont glissants Au loin que vous devenez naines N’attirez plus aucun passant Dans l’attentive et bien-apprise J’ai vu feuilloler nos forêts Mer le soleil se gargarise Où les matelots désiraient Que vergues et mâts reverdissent Je descends et le firmament S’est changé très vite en méduse Puisque je flambe atrocement Que mes bras seuls sont les excuses Et les torches de mon tourment Oiseaux tiriez aux mers la langue Le soleil d’hier m’a rejoint Les otelles nous ensanglantent Dans le nid des Sirènes loin Du troupeau d’étoiles oblongues@guillaumeApollinaire
L’ermite Un ermite déchaux près d’un crâne blanchi Cria Je vous maudis martyres et détresses Trop de tentations malgré moi me caressent Tentations de lune et de logomachies Trop d’étoiles s’enfuient quand je dis mes prières Ô chef de morte Ô vieil ivoire Orbites Trous Des narines rongées J’ai faim Mes cris s’enrouent Voici donc pour mon jeûne un morceau de gruyère Ô Seigneur flagellez les nuées du coucher Qui vous tendent au ciel de si jolis culs roses Et c’est le soir les fleurs de jour déjà se closent Et les souris dans l’ombre incantent le plancher Les humains savent tant de jeux l’amour la mourre L’amour jeu des nombrils ou jeu de la grande oie La mourre jeu du nombre illusoire des doigts Seigneur faites Seigneur qu’un jour je m’enamoure J’attends celle qui me tendra ses doigts menus Combien de signes blancs aux ongles les paresses Les mensonges pourtant j’attends qu’elle les dresse Ses mains enamourées devant moi l’Inconnue Seigneur que t’ai-je fait Vois Je suis unicorne Pourtant malgré son bel effroi concupiscent Comme un poupon chéri mon sexe est innocent D’être anxieux seul et debout comme une borne Seigneur le Christ est nu jetez jetez sur lui La robe sans couture éteignez les ardeurs Au puits vont se noyer tant de tintements d’heures Quand isochrones choient des gouttes d’eau de pluie J’ai veillé trente nuits sous les lauriers-roses As-tu sué du sang Christ dans Gethsémani Crucifié réponds Dis non Moi je le nie Car j’ai trop espéré en vain l’hématidrose J’écoutais à genoux toquer les battements Du cœur le sang roulait toujours en ses artères Qui sont de vieux coraux ou qui sont des clavaires Et mon aorte était avare éperdument Une goutte tomba Sueur Et sa couleur Lueur Le sang si rouge et j’ai ri des damnés Puis enfin j’ai compris que je saignais du nez À cause des parfums violents de mes fleurs Et j’ai ri du vieil ange qui n’est point venu De vol très indolent me tendre un beau calice J’ai ri de l’aile grise et j’ôte mon cilice Tissé de crins soyeux par de cruels canuts Vertuchou Riotant des vulves des papesses De saintes sans tetons j’irai vers les cités Et peut-être y mourir pour ma virginité Parmi les mains les peaux les mots et les promesses Malgré les autans bleus je me dresse divin Comme un rayon de lune adoré par la mer En vain j’ai supplié tous les saints aémères Aucun n’a consacré mes doux pains sans levain Et je marche Je fuis ô nuit Lilith ulule Et clame vainement et je vois de grands yeux S’ouvrir tragiquement Ô nuit je vois tes cieux S’étoiler calmement de splendides pilules Un squelette de reine innocente est pendu À un long fil d’étoile en désespoir sévère La nuit les bois sont noirs et se meurt l’espoir vert Quand meurt le jour avec un râle inattendu Et je marche je fuis ô jour l’émoi de l’aube Ferma le regard fixe et doux de vieux rubis Des hiboux et voici le regard des brebis Et des truies aux tetins roses comme des lobes Des corbeaux éployés comme des tildes font Une ombre vaine aux pauvres champs de seigle mûr Non loin des bourgs où des chaumières sont impures D’avoir des hiboux morts cloués à leur plafond Mes kilomètres longs Mes tristesses plénières Les squelettes de doigts terminant les sapins Ont égaré ma route et mes rêves poupins Souvent et j’ai dormi au sol des sapinières Enfin Ô soir pâmé Au bout de mes chemins La ville m’apparut très grave au son des cloches Et ma luxure meurt à présent que j’approche En entrant j’ai béni les foules des deux mains Cité j’ai ri de tes palais tels que des truffes Blanches au sol fouillé de clairières bleues Or mes désirs s’en vont tous à la queue leu leu Ma migraine pieuse a coiffé sa cucuphe Car toutes sont venues m’avouer leurs péchés Et Seigneur je suis saint par le vœu des amantes Zélotide et Lorie Louise et Diamante On dit Tu peux savoir ô toi l’effarouché Ermite absous nos fautes jamais vénielles Ô toi le pur et le contrit que nous aimons Sache nos cœurs cache les jeux que nous aimons Et nos baisers quintessenciés comme du miel Et j’absous les aveux pourpres comme leur sang Des poétesses nues des fées des fornarines Aucun pauvre désir ne gonfle ma poitrine Lorsque je vois le soir les couples s’enlaçant Car je ne veux plus rien sinon laisser se clore Mes yeux couple lassé au verger pantelant Plein du râle pompeux des groseilliers sanglants Et de la sainte cruauté des passiflores@guillaumeApollinaire
Nuit rhénane Mon verre est plein d’un vin trembleur comme une flamme Écoutez la chanson lente d’un batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu’à leurs pieds Debout chantez plus haut en dansant une ronde Que je n’entende plus le chant du batelier Et mettez près de moi toutes les filles blondes Au regard immobile aux nattes repliées Le Rhin le Rhin est ivre où les vignes se mirent Tout l’or des nuits tombe en tremblant s’y refléter La voix chante toujours à en râle-mourir Ces fées aux cheveux verts qui incantent l’été Mon verre s’est brisé comme un éclat de rire@guillaumeApollinaire
Vendémiaire Hommes de l’avenir souvenez-vous de moi Je vivais à l’époque où finissaient les rois Tour à tour ils mouraient silencieux et tristes Et trois fois courageux devenaient trismégistes Que Paris était beau à la fin de septembre Chaque nuit devenait une vigne où les pampres Répandaient leur clarté sur la ville et là-haut Astres mûrs becquetés par les ivres oiseaux De ma gloire attendaient la vendange de l’aube Un soir passant le long des quais déserts et sombres En rentrant à Auteuil j’entendis une voix Qui chantait gravement se taisant quelquefois Pour que parvint aussi sur les bords de la Seine La plainte d’autres voix limpides et lointaines Et j’écoutai longtemps tous ces chants et ces cris Qu’éveillait dans la nuit la chanson de Paris J’ai soif villes de France et d’Europe et du monde Venez toutes couler dans ma gorge profonde Je vis alors que déjà ivre dans la vigne Paris Vendangeait le raisin le plus doux de la terre Ces grains miraculeux qui aux treilles chantèrent Et Rennes répondit avec Quimper et Vannes Nous voici ô Paris Nos maisons nos habitants Ces grappes de nos sens qu’enfanta le soleil Se sacrifient pour te désaltérer trop avide merveille Nous t’apportons tous les cerveaux les cimetières les murailles Ces berceaux pleins de cris que tu n’entendras pas Et d’amont en aval nos pensées ô rivières Les oreilles des écoles et nos mains rapprochées Aux doigts allongés nos mains les clochers Et nous t’apportons aussi cette souple raison Que le mystère clôt comme une porte la maison Ce mystère courtois de la galanterie Ce mystère fatal fatal d’une autre vie Double raison qui est au delà de la beauté Et que la Grèce n’a pas connue ni l’Orient Double raison de la Bretagne où lame à lame L’océan châtre peu à peu l’ancien continent Et les villes du Nord répondirent gaîment Ô Paris nous voici boissons vivantes Les viriles cités où dégoisent et chantent Les métalliques saints de nos saintes usines Nos cheminées à ciel ouvert engrossent les nuées Comme fit autrefois l’Ixion mécanique Et nos mains innombrables Usines manufactures fabriques mains Où les ouvriers nus semblables à nos doigts Fabriquent du réel à tant par heure Nous te donnons tous cela Et Lyon répondit tandis que les anges de Fourvières Tissaient un ciel nouveau avec la soie des prières Désaltère toi Paris avec les divines paroles Que mes lèvres le Rhône et la Saône murmurent Toujours le même culte de sa mort renaissant Divise ici les saints et fait pleuvoir le sang Heureuse pluie ô gouttes tièdes ô douleur Un enfant regarde les fenêtres s’ouvrir Et des grappes de têtes à d’ivres oiseaux s’offrir Les villes du Midi répondirent alors Noble Paris seule raison qui vis encore Qui fixes notre humeur selon ta destinée Et toi qui te retires Méditerranée Partagez-vous nos corps comme on rompt des hosties Ces très hautes amours et leur danse orpheline Deviendront ô Paris le vin pur que tu aimes Et un râle infini qui venait de Sicile Signifiait en battement d’ailes ces paroles Les raisins de nos vignes on les a vendangés Et ces grappes de morts dont les grains allongés Ont la saveur du sang de la terre et du sel Les voici pour ta soif ô Paris sous le ciel Obscurci de nuées faméliques Que caresse Ixion le créateur oblique Et où naissent sur la mer tous les corbeaux d’Afrique Ô raisins Et ces yeux ternes et en famille L’avenir et la vie dans ces treilles s’ennuyent Mais où est le regard lumineux des sirènes Il trompa les marins qu’aimaient ces oiseaux-là Il ne tournera plus sur l’écueil de Scylla Où chantaient les trois voix suaves et sereines Le détroit tout à coup avait changé de face Visages de la chair de l’onde de tout Ce que l’on peut imaginer Vous n’êtes que des masques sur des faces masquées Il souriait jeune nageur entre les rives Et les noyés flottant sur son onde nouvelle Fuyaient en le suivant les chanteuses plaintives Elles dirent adieu au gouffre et à l’écueil À leurs pâles époux couchés sur les terrasses Puis ayant pris leur vol vers le brûlant soleil Les suivirent dans l’onde où s’enfoncent les astres Lorsque la nuit revint couverte d’yeux ouverts Errer au site où l’hydre a sifflé cet hiver Et j’entendis soudain ta voix impérieuse Ô Rome Maudire d’un seul coup mes anciennes pensées Et le ciel où l’amour guide les destinées Les feuillards repoussés sur l’arbre de la croix Et même la fleur de lys qui meurt au Vatican Macèrent dans le vin que je t’offre et qui a La saveur du sang pur de celui qui connaît Une autre liberté végétale dont tu Ne sais pas que c’est elle la suprême vertu Une couronne de trirègne est tombée sur les dalles Les hiérarques la foulent sous leurs sandales Ô splendeur démocratique qui pâlit Vienne la nuit royale où l’on tuera les bêtes La louve avec l’agneau l’aigle avec la colombe Une foule de rois ennemis et cruels Ayant soif comme toi dans la vigne éternelle Sortiront de la terre et viendront dans les airs Pour boire de mon vin par deux fois millénaire La Moselle et le Rhin se joignent en silence C’est l’Europe qui prie nuit et jour à Coblence Et moi qui m’attardais sur le quai à Auteuil Quand les heures tombaient parfois comme les feuilles Du cep lorsqu’il est temps j’entendis la prière Qui joignait la limpidité de ces rivières Ô Paris le vin de ton pays est meilleur que celui Qui pousse sur nos bords mais aux pampres du nord Tous les grains ont mûri pour cette soif terrible Mes grappes d’hommes forts saignent dans le pressoir Tu boiras à longs traits tout le sang de l’Europe Parce que tu es beau et que seul tu es noble Parce que c’est dans toi que Dieu peut devenir Et tous mes vignerons dans ces belles maisons Qui reflètent le soir leurs feux dans nos deux eaux Dans ces belles maisons nettement blanches et noires Sans savoir que tu es la réalité chantent ta gloire Mais nous liquides mains jointes pour la prière Nous menons vers le sel les eaux aventurières Et la ville entre nous comme entre des ciseaux Ne reflète en dormant nul feu dans ses deux eaux Dont quelque sifflement lointain parfois s’élance Troublant dans leur sommeil les filles de Coblence Les villes répondaient maintenant par centaines Je ne distinguais plus leurs paroles lointaines Et Trèves la ville ancienne À leur voix mêlait la sienne L’univers tout entier concentré dans ce vin Qui contentait les mers les animaux les plantes Les cités les destins et les astres qui chantent Les hommes à genoux sur la rive du ciel Et le docile fer notre bon compagnon Le feu qu’il faut aimer comme on s’aime soi-même Tous les fiers trépassés qui sont un sous mon front L’éclair qui luit ainsi qu’une pensée naissante Tous les noms six par six les nombres un à un Des kilos de papier tordus comme des flammes Et ceux-là qui sauront blanchir nos ossements Les bons vers immortels qui s’ennuient patiemment Des armées rangées en bataille Des forêts de crucifix et mes demeures lacustres Au bord des yeux de celle que j’aime tant Les fleurs qui s’écrient hors de bouches Et tout ce que je ne sais pas dire Tout ce que je ne connaîtrai jamais Tout cela tout cela changé en ce vin pur Dont Paris avait soif Me fut alors présenté Actions belles journées sommeils terribles Végétation Accouplements musiques éternelles Mouvements Adorations douleur divine Mondes qui vous ressemblez et qui nous ressemblez je vous ai bu et ne fus pas désaltéré Mais je connus dès lors quelle saveur a l’univers Je suis ivre d’avoir bu tout l’univers Sur le quai d’où je voyais l’onde couler et dormir les bélandres Écoutez-moi je suis le gosier de Paris Et je boirai encore s’il me plaît l’univers Écoutez mes chants d’universelle ivrognerie Et la nuit de septembre s’achevait lentement Les feux rouges des ponts s’éteignaient dans la Seine Les étoiles mouraient le jour naissait à peine@ilireZajmi
Vanité Toute la journée Je regarde les gens se promener Je bois du café amer, fume des cigarettes bon marché Devant et derrière moi je ne vois personne Je flirte avec des hommes que je n'aime pas Raconte des blagues et ne ris pas Ecris des poèmes sous la lune et les déchire sous le soleil Les promesses faites le matin Le soir je les oublie Je m'éloigne de la vie et elle me nargue J’ai peur de perdre la mémoire Encore plus que du feu Et je me sens seule Comme une bête blessée dans cette cage Serai-je totalement Morte quand je mourrai ?@isaacLerutan
L’âme errante Gloire à celui qui sous le feu de l’existence Donna sens à la vie et à ses plaisirs sains Loin de la brume froide, témoin de ses carences De ses pseudo-pouvoirs, un seul n’en fût le sien Par delà les frontières et leurs sols en souffrance Où d’autr’âmes s’entachent d’innombrables venins De cette fourmilière règne son espérance Si l’ombre d’un soleil le pique un beau matin De ces matins fertiles, la vie donna la chance À ce cher inconnu, ignorant son destin Gloire à la poésie et gloire à l’innocence De ce cri, l’âme errante en trouva le chemin…@jqLouison
Juste un petit poème Juste un petit poème, léger Comme le souffle du temps! C'est tout ce qu'ils veulent. C'est là ce qu'ils réclament. Ils ont oublié que Verlaine, Qui toujours célébrait sa mie, Souffrait aussi affreusement. Il est sacré le poète immortel, Bien qu'il plût sur son cœur Comme il pleuvait sur la ville! La nature inondait son âme, Quand l'amour le suppliciait! Ils ont oublié que Baudelaire Aimait cueillir certaines fleurs Qqui étaient loin d'être vertueuses! Des rimes qui dansent toujours, C'est à légitime désir de l'âme. las! Des vers qui pleurent aussi Et racontent la peine et la douleur Foisonneront toujours, chers amis, Pour nous parler du mal de l'être.@jacquesGourvennec
Préface Une note quand même, à propos de moi–même et de Léo Ferré : Je ne suis pas du tout certain que Ferré m'eût accepté en véritable ami. Je suis donc quand même un ami de Ferré, mais par procuration, juste de mon coté, seulement moi pour seul responsable. Sans doute parce que pour moi, Ferré fait partie de ses artistes qui se respectes, et que j’admire, ceux qui pour moi en tous les cas, partagent, ma façon de penser et surtout la façon de le dire, en tous les cas beaucoup de mes idées. Comprenez- moi; Je suis un petit mec, un imposteur, un usurier du temps, un vieux mec de passage aux rictus poétiques. Avec la bouche tantôt en cœur, tantôt en italique, à déchiffrer les cendres d’hypothétiques «Je» ces plusieurs «moi » en « je » et qui n’y comprends rien ! J’apprends à faire la gueule d’une « poésie, je t'aime », avec mention « Ta gueule » pour dernier alibi… Cette imposture qui se trame goutte-à-goutte, avec son chant retricoté, la poétique étrange, toujours sujet à polémique, envitrinée d’images à la fois tendres, et puis rebelles à l’allure poétique. J’écris, en vers, et contre tout, en noir et blanc et en douleur, en bien, en mal, avec ou sans musique. Où tout respire en stéréo, le tabac froid d’un vieux paquet de brunes Celtique. Je me souviens ; Léo Ferré disait - La poésie n'est pas seulement faite pour être lue, il faut aussi qu'elle soit dite. La poésie, c’est avant tout de la musique. Il ne faut donc pas tenir compte de sa ponctuation, elle est juste pour moi, qu’une question de repérage pour le souffle. D'ailleurs ma poésie, n'a pas de point et n'a pas de virgule, elle n'a pas non plus de points d'exclamation ou d'interrogation, pas plus qu'elle ne se targue, de points de suspension... Ma poésie ; N'est que de l'air, elle ne m'appartient pas, elle n'appartient pas non plus à la littérature conventionnelle. Elle ne survit que de ses propres règles, ou sinon elle tombe. Ma poésie, elle est d'ailleurs ! Elle naît que d'un souffle, et ne meurt que du vent... Oui mais la poésie, la vraie, me direz-vous ! Celles des autres ! Et bien en fait, je ne la fréquente pas ; Ne la lis pas régulièrement non plus. Libre au poète d’écrire sa propre poésie ou de survivre d’une littérature ancienne à l’âme sénescente, vieille de six ou sept, voire vingt siècles. Comment donner de ces leçons de musicalité, lorsqu’on cultive soi-même une poésie conventionnelle, sponsorisée par le printemps, les oiseaux migrateurs, le silence et les roses ? Comment rendre crédible une moindre diatribe, ourdit de poètes pratiquants, en boétien de la cravate, chevelu en dedans, texte brillantiné, rococo de la rime « poétiquement parlant » de la tête à ses pieds . Ceux qui s’auto-starisent de leurs putains de stances et leurs obsessionnels sonnets, bourrés de règles inutiles et dont la forme lasse de l’uniformité du flajolet ou de la flûte et du pipeau! La poésie constante enfile les costars qu’elle loue à l’histoire, comme un tableau s’accroche à son image toujours présents au même endroit à rester fixe, et qui n’appartient plus qu’à son musée. La poésie n’est pas de ces peintures clouées à tous nos murs, et dont la destinée est de tenir coûte que coûte au même endroit, durant des siècles et des années ; Avec en récompense, toujours les mêmes yeux qui la regardent…@jacquesViallebesset
Les nobles voyageurs En hommage à OV.L de Milosz Chevaliers errants qui rêvent leurs vies et vivent leurs rêves Vagabonds solitaires de l’âme chemineaux anonymes de l’esprit Ils traversent le temps et l’espace sans repos ni trêve Pour venir allumer des soleils noirs au cœur de la nuit Ayant l’âge du sable de la mer et du vent du désert Empruntant les vêtements du siècle où nous sommes Le pain des forts le feu et le sel leur sont offerts Dans des haltes secrètes où s’aiment les hommes Alchimistes du Verbe et forgerons de l’âme Ce sont des maîtres sans temple qui ont rendez-vous Une lanterne sourde à la main protégeant la petite flamme Dans la clairière de l’être où règne l’amour fou Ils pérégrinent de siècle obscur en siècle obscur Portant sur leur épaule droite un noir corbeau Eclairant le chemin des consciences pures Pour que le monde et les jours soient enfin beaux L’œil est le soleil du cœur comme le cœur celui de l’esprit. Venus ici et maintenant dans le monde sans lui appartenir Réincarner dans le creuset des cœurs la parole qui vit En eux s’élève le souffle d’une vie plus forte que la mort à venir.@jeanDeLaFontaine
Contre ceux qui ont le goût difficile Quand j’aurais en naissant reçu de Calliope Les dons qu’à ses Amants cette Muse a promis, Je les consacrerais aux mensonges d’Esope : Le mensonge et les vers de tout temps sont amis. Mais je ne me crois pas si chéri du Parnasse Que de savoir orner toutes ces fictions. On peut donner du lustre à leurs inventions ; On le peut, je l’essaie ; un plus savant le fasse. Cependant jusqu’ici d’un langage nouveau J’ai fait parler le Loup et répondre l’Agneau. J’ai passé plus avant : les Arbres et les Plantes Sont devenus chez moi créatures parlantes. Qui ne prendrait ceci pour un enchantement ? « Vraiment, me diront nos Critiques, Vous parlez magnifiquement De cinq ou six contes d’enfant. – Censeurs, en voulez-vous qui soient plus authentiques Et d’un style plus haut ? En voici : « Les Troyens, « Après dix ans de guerre autour de leurs murailles, « Avaient lassé les Grecs, qui par mille moyens, « Par mille assauts, par cent batailles, « N’avaient pu mettre à bout cette fière Cité, « Quand un cheval de bois, par Minerve inventé, « D’un rare et nouvel artifice, « Dans ses énormes flancs reçut le sage Ulysse, « Le vaillant Diomède, Ajax l’impétueux, « Que ce Colosse monstrueux « Avec leurs escadrons devait porter dans Troie, « Livrant à leur fureur ses Dieux mêmes en proie : « Stratagème inouï, qui des fabricateurs « Paya la constance et la peine. « – C’est assez, me dira quelqu’un de nos Auteurs : La période est longue, il faut reprendre haleine ; Et puis votre Cheval de bois, Vos Héros avec leurs Phalanges, Ce sont des contes plus étranges Qu’un Renard qui cajole un Corbeau sur sa voix : De plus, il vous sied mal d’écrire en si haut style. – Eh bien ! baissons d’un ton. « La jalouse Amarylle « Songeait à son Alcippe, et croyait de ses soins « N’avoir que ses Moutons et son Chien pour témoins. « Tircis, qui l’aperçut, se glisse entre des saules ; « Il entend la bergère adressant ces paroles « Au doux Zéphire, et le priant « De les porter à son Amant. – Je vous arrête à cette rime, Dira mon censeur à l’instant ; Je ne la tiens pas légitime, Ni d’une assez grande vertu : Remettez, pour le mieux, ces deux vers à la fonte. – Maudit censeur, te tairas-tu ? Ne saurais-je achever mon conte ? C’est un dessein très dangereux Que d’entreprendre de te plaire. « Les délicats sont malheureux : Rien ne saurait les satisfaire.@jeanPierreSimeon
Quand je dis Quand je dis Les pommes blanches du plaisir La table ronde du sommeil Et le regard brisé des fontaines Quand je parle de la neige aux chiens bleus Ou de la nuit qui souffre Du vagabond qui va Une bougie d’ombres Dans la main Quand je nomme Verger la patience Raisin le goût des lèvres Et jardin ton visage Je me comprends.@jeanPierreVillebramar
Arc en ciel Poème andernosien « et un arbre avec un nom bizarre, un arbre comme tous les arbres, a grandi en moi, n’importe où » Hilde Domin Mit leichtem Gepäck ce soir, ma machine à tisser les songes se dérobe devant la tragédie cosmique de la vie ; à ma toile se prennent les petits, les sans-grade, les humbles ils crient : où est ton arc-en-ciel? et je rêve que dieu existe ce soir me vient l’envie d’écarter d’un revers de la main des poèmes d’espoir que personne ne lira ne lyra mais les humbles me crient: Villebramar! Villebramar! que fais-tu de ton soleil? Alors me relevant je pose le métier sur la table et j’attends, les humbles, toujours m’interpellant : où est ton arc-en ciel? Ce soir, à ma toile se prennent les petits, les sans-grade, les humbles, et je rêve que dieu existe@jeanPierreVillebramar
Chant du coq «Attention ! le nègre est devenu de plus en plus fort aussi fort que le grand diable» Gabriel Okoundji La poésie se lit les yeux clos S’écoute dans le silence du sommeil Se vit dans les battements de ton coeur. Elle s’écrit sur les murs de cavernes anciennes, témoignage de l’angoisse des premiers temps. S’enroule sur la crête de très hautes vagues, retombe à l’approche des brisants. La poésie s’écrit. La poésie s’écrit sur le sable. La poésie est le sable même, la poésie est Nous. N’en restera que la plage, en fin. La poésie ne s’écrit pas. Entre les pages de l’herbier, une fleur a perdu le souffle, et les pétales, leur couleur. Ainsi est le poème. Non, la poésie ne s’écrit pas. Tenez sa main si le pouvez, mais n’espérez rien. Ne dites mot. Car les esprits de la poésie et ceux de la forêt sont les mêmes : ils disparaissent au premier chant du coq.@jeanPierreVillebramar
Comme toujours dans la vraie vie Certains soirs, en poésie, il y a des poèmes qui ne parlent plus fatigués par une trop longue journée de travail on a envie de leur dire : allez ailleurs raconter vos histoires de désespoir ou d’amour fou ou de n’importe quoi c’est pareil, allez ailleurs je suis fatigué. Certains soirs dans la vie il y a des hommes qui ne parlent plus. Parfois en poésie, on n’a plus envie ni d’amour ni d’espoir juste de fermer les yeux et dormir. Arrive alors, en poésie qu’ouvrant au hasard une page explosent quatre vers comme un volcan, un sourd-muet en pleurerait retrouvant la parole un désespéré sa joie de vivre. Il arrive que dans la vie, parfois, des hommes explosent. Il est vrai que toujours, en poésie rire rêver pleurer : un seul et même mot. Comme toujours. Dans la vraie vie.@jeanPierreVillebramar
Croix blanche Comment écrire quand on n’écrit plus exister quand on n’existe plus aimer quand on ne sait plus il y a dans l’air d’automne des couleurs qui me font mal j’ai demandé aux gens heureux aux enfants aux chats aux chiens les étendant à d’autres mammifères (marins compris) les gens heureux n’écrivent pas resté : le chat m’a regardé de ses yeux verts et ironique immobile puis de sa patte, sur le sable a écrit « comment écrire, quand on n’écrit plus ? » dans le pré vert où coule la rivière il y a une croix blanche@jeanPierreVillebramar
Improvisation Écrire pour son simple plaisir, écrire sans penser au regard, au regard des autres, écrire comme coule un ruisseau, et comme lui se laisser descendre vers la mer écrire pour moi aussi longtemps qu’il y aura une douleur dans le monde une femme à aimer et maintenant seulement une femme à regarder statue de sel mais ni regrets ni larme écrire sans se demander comment sera demain ni si mes vers font quatre ou six ou douze pieds sur ou sous terre écrire comme une improvisation comme faisait Glen Gould de Jean Sébastien Bach écrire comme sur son piano Yamaha avec ses doigts d’ours, écrire avec mes doigts de vivant, et lui, jouer encore avec ses doigts de musicien mort dire à la page blanche, lui dire quoi ? rien de bien grave, page, page blanche c’est seulement un ruisseau qui coule, une âme en perdition sur les routes de la voie lactée écrire enfin en pensant à toi et comme j’ai aimé combien combien et follement je t’ai aimée avec l’espoir fou de rentrer dans ton corps corps et âme rentrer rentrer pour plus jamais n’en ressortir écrire alors que courent les minutes de la nuit, écrire et ce ruisseau, personne ne le voit couler vers la mer, comme personne ne m’a vu t’aimer dans tous les ports du monde dans les pays où jamais nous ne fûmes sinon en rêve sinon en rêve sinon en rêve vaisseau fantôme port fantôme poème fantôme t’aimer comme coule un ruisseau et comme lui descendre vers la mer la mer comme un poème improvisé improvisé.@joachimDuBellay
Je ne veux point fouiller au sein de la nature Je ne veux point fouiller au sein de la nature, Je ne veux point chercher l'esprit de l'univers, Je ne veux point sonder les abîmes couverts, Ni dessiner du ciel la belle architecture. Je ne peins mes tableaux de si riche peinture, Et si hauts arguments ne recherche à mes vers : Mais suivant de ce lieu les accidents divers, Soit de bien, soit de mal, j'écris à l'aventure. Je me plains à mes vers, si j'ai quelque regret : Je me ris avec eux, je leur dis mon secret, Comme étant de mon coeur les plus sûrs secrétaires. Aussi ne veux-je tant les peigner et friser, Et de plus braves noms ne les veux déguiser Que de papiers journaux ou bien de commentaires.@joachimDuBellay
Las où est maintenant ce mépris de Fortune Las où est maintenant ce mépris de Fortune Où est ce coeur vainqueur de toute adversité, Cet honnête désir de l'immortalité, Et cette honnête flamme au peuple non commune ?@kamalZerdoumi
Argile Vous de la patience l’incarnation et des rêves la corne d’abondance donnez à l’obscure matière la clarté des formes et la divine présence faites-moi singulière hors du naturel cimetière vivante éphémère dans la rumeur humaine@kamalZerdoumi
Change Pour être la vie et la mort pour rire des coups du sort pour être les quatre saisons pour être sans rime ni raison change Pour ne ressembler à personne pour être le cosmos dans un atome pour être la femme et l’homme change Pour rendre envieuses les statues pour narguer le temps qui te tue pour aimer ce qui s’écoule pour être cette pierre qui sans cesse roule change@kamalZerdoumi
Chopin Le moulage original de ta main gauche d’une bouleversante blancheur dans sa prison de verre relique de ton passage parmi nous Assieds-toi au piano et joue ces étranges Nocturnes qui nous font quitter la Terre chacun de tes doigts traduisant les nuances de l’âme Compositeur de la désincarnation venu de Pologne qui mit son exil en musique nous laissant le frisson de son génie étoilé@kamalZerdoumi
Conversation Disséminé dans les lignes mon corps vous parlera encore De soie ou de marbre mes mots d’un revers de main chasseront la poussière des ans Sous la lampe ou au soleil votre sourire ou votre air studieux me donneront la réplique ô vous mes lecteurs complices Ainsi va l’écriture cet élixir de vie ennemie de la mortelle rature@kamalZerdoumi
En classe Pendant que le maître aborde un nouveau chapitre du vieux savoir l’enfant pousse les portes de corne ou d’ivoire dormeur émerveillé qui suit du regard le vol de l’oiseau derrière la vitre là-bas dans le ciel bleu Sa distraction déplaît au pitre qui menace de le punir Cet homme ignore que dans le rêve est l’avenir@kamalZerdoumi
La spectatrice Je suis ce qu’on appelle un artiste un clown sur une piste Sur les gradins une absence informe biffe des noms sur une liste Mes pitreries la laissent de marbre et son silence est celui du sabre avant la boucherie J’essaie en vain de la regarder dans les yeux pauvre écrivain et son filet de mots qui cherche à capturer les dieux@kamalZerdoumi
Le peintre Dans sa main la palette où dort le magma des couleurs Entre ses doigts qu’anime la merveille les pinceaux teintés d’éternité donnent la parole à la toile muette Bientôt sonnera l’heure de l’art et le peintre corps dissous ne sera plus que son nom en osmose avec l’oeuvre@kamalZerdoumi
Littérature Écrire avec le sang répandu les maisons qui s’effondrent l’avenir en ruines d’une fillette aux cheveux blancs Écrire comme on sourit aux maîtres avec nos signes de traitres Écrire pour n’être personne glas de papier qui sonne peut-être ce poème qui de tout délivre même de soi-même@kamalZerdoumi
Mots Ce sont nos amis sur le ruban de la route Ce sont nos rubis dans la nuit du doute ce sont nos voix dans le désert du langage C’est l’horizon qui rougeoie et son soleil qui déçoit Ce sont nos ombres qui s’allongent et nos conversations qui se prolongent