Chanson À Francis Magnard.
Le présent, le passé, l'avenir d'une femme,
Des gens fort sérieux prétendent tout avoir.
Ils prendraient volontiers son image au miroir,
Au papillon son aile, au diamant sa flamme.
Dans l'abîme insondable ils aimeraient à voir,
Avec leurs gros yeux ronds, ces bourgeois de vieux drame,
La perle blanche éclose aux profondeurs de l'âme,
Ils seraient assez fous pour oser la vouloir.
Moi je sais une femme aux cheveux d'un blond fauve,
Que retient sur l'oreille un petit ruban mauve,
Et d'elle, pour ma part, je ne voudrais pas tant :
Errant dans son sillage, un soir, je l'ai suivie,
Et je donnerais bien tous les jours de ma vie
Pour avoir de sa lèvre un baiser d'un instant.
il y a 7 mois
A
André Velter
@andreVelter
Chanson Encore la voix
Secret des fauves À l'abordage
De nos guitares
Tu es le sang
Tu es le sens
Ressuscites
En deux accords
Mes sire
Polo
Che
Guevara
Ça n'a plus d'âge
Tu es en moi
Néant nouveau —
Tout est plus vaste
il y a 7 mois
A
Aristide Bruant
@aristideBruant
À la place Maubert Je m’demande à quoi qu’on songe
En prolongeant la ru’ Monge,
À quoi qu’ ça nous sert
Des esquar’s, des estatues,
Quand on démolit nos rues,
À la Plac’ Maubert ?
L’été nous étions à l’ombre,
C’était coquet, c’était sombre,
Quand l’ soleil, l’hiver,
Inondait la capitale,
L’ jour était encor’ pus sale,
À la Plac’ Maubert.
Quand on n’avait pas d’ marmite,
On bouffait chez l’ pèr’ Lafrite
Pour un peu d’auber ;
Le soir on l’vait eun’ pétasse...
Un choléra sans limace,
À la Plac’ Maubert
Pour trois ronds chez l’ pèr’ Lunette,
Où qu’ chantait la môm’ Toinette,
On s’ payait l’ concert ;
Pour six ronds au Château-Rouge,
On sorguait avec sa gouge,
À la Plac’ Maubert.
Aussi, bon Dieu ! j’ vous l’ demande,
Quand yaura pus d’ ru’ Galande,
Pus d’Hôtel Colbert,
Oùsque vous voulez qu’i’s aillent
Les purotins qui rouscaillent,
À la Plac’ Maubert ?
Qu’on leur foute au moins des niches,
Comme on en fout aux caniches,
Qu’i’s soy’ à couvert
Sous quéqu’ chos’ qui les abrite
Quand i’s trouveront pus d’ gîte,
À la Plac’ Maubert.
Car quand i’s r’fil’ront la cloche,
I’s auront tous dans leur poche
El’ surin ouvert,
Et c’ jour-là, mes camarluches,
La nuit gare aux laqu’reauxmuches
De la Plac’ Maubert.
il y a 7 mois
C
Claude Hopil
@claudeHopil
Cantique Lii Solitaire hauteur, sainte horreur ravissante,
Silence glorieux,
Beau sein des
Séraphins ', ombre resplendisss
Douce mort de nos yeux,
Extase des esprits, jusqu'à vous ma pensée
Ne peut être élancée.
Je connais par la foi que vous êtes
Dieu même
Qui ne peut être vu,
De vos pures clartés un seul rayon suprême
Ayant l'âme entrevu,
En un petit moment il se change en nuage
Dans le mystique ombrage.
L'œil de l'entendement par la main de mon
Ange
Étant fermé, je vois
Par celui de l'amour un objet qui ne change,
Et soudain j'en vois trois,
Je dis trois purs rayons au
Soleil qui m'embrase
Et me met en extase.
J'admire cet objet en cette prison noire
Dans le divin miroir,
Dieu me donne un esprit pour adorer sa gloire,
Non des yeux pour le voir,
Je l'aime purement, mon cœur en ce lieu sombre
Voit son
Soleil à l'ombre.
il y a 7 mois
C
Claude Hopil
@claudeHopil
Cantique Xi Qu'est-ce donc que je vois?
Quelle vision pure!
Je vois le
Créateur, en lui la créature,
Je vois l'être et le rien,
Je vois le rien en
Dieu, l'être qui l'être pâme,
Si l'un me fait mourir, l'autre ravit mon âme
Dans son souverain bien.
Je vois le néant simple en la nature belle.
Quel prodige ! un néant du néant se révèle
En moi par le péché;
Mais si sortant de moi j'élève au ciel la vue,
Je vois le
Dieu de
Dieu, dans une claire nue
Le
Soleil est caché.
Tirez un peu le voile, ô gardien céleste,
Afin que comme amour mon
Dieu se manifeste,
Non comme vérité;
Je ne sais que je dis, l'amour, la sapience
Avec la vérité sont une même essence
Dedans la
Trinité.
Hé! qu'est-ce que je vois? je ne vois nulle chose;
Si fait, je vois un
Tout; l'effet ne voit la cause;
Ha! j'ai perdu l'esprit;
Hé ! qui ne le perdrait devant cet Être immense
Dans lequel l'Ange trouve en sainte défaillance
La vie en
Jésus-Christ?
il y a 7 mois
C
Claude Hopil
@claudeHopil
Cantique Xxx Du rien je m'achemine aux pieds de
Jésus-Christ,
Des pieds à son côté où je reçois l'esprit
Qui fait parvenir l'homme à la divine bouche;
On jouit en ce lieu d'une si grande paix
Que la sainte âme veut demeurer à jamais
Dans cette heureuse couche.
ô beau lit de l'époux plein d'œillets et de lys !
N'êtes-vous pas de
Dieu le très doux
Paradis ?
Dans ce lit à mi-jour sommeiUe la sainte âme,
EUe y dort, eUe y veille, et tandis qu'eUe y dort,
L'époux veiUant pour eUe, au baiser de la mort
Ravie eUe se pâme.
Le
Père vient en elle et lui donne un baiser
De la bouche du
Verbe, et la vient épouser,
Le feu du
Saint-Esprit l'enflamme et la dévore
En respirant sur elle; en ce lit non pareil
Voyant trois purs rayons * elle adore un soleil
Qui reluit sans aurore.
Dans le pur orient du firmament de
Dieu
Luit un midi de gloire, en ce lieu sur tout lieu,
Midi qui sans changer toujours midi demeure;
Qui ne voudrait mourir pour vivre en ce séjour? Ô mon
Dieu, pour vous voir, faites donc que d'amour
En extase je meure.
il y a 7 mois
C
Claude Mermet
@claudeMermet
Chanson Pour les hommes
Si tu te plains que ta femme est trop bonne,
L'ayant gardée trois semaines en tout,
Attends un an, et tu perdras à coup
L'occasion de t'en plaindre à personne.
Mais si elle est malicieuse et fière,
Par mon conseil, ne l'en estime moins ;
Je prouverai toujours par bons témoins
Que la mauvaise est bonne ménagère.
Si par nature elle est opiniâtre,
Commande-lui toute chose à rebours ;
Et tu seras servi suivant le cours
De ton dessein, sans frapper ni sans battre.
Si elle dort la grasse matinée,
C'est ton profit, d'autant qu'elle n'a pas
Tel appétit, quand ce vient au repas,
Et son dormir lui vaut demi-dîner.
Si elle fait la malade par mine,
Va lui percer la veine doucement
Sans la blesser, et tu verras comment
Tel aiguillon lui porte médecine.
Si elle est vieille ou malade sans cesse,
Tu la sauras, sage, contre-garder,
Attendant mieux, et tu pourras garder,
Pour un besoin, la fleur de ta jeunesse.
Si tu te plains que ta femme se passe
De faire enfants, par faute d'un seul point,
Sois patient ; mieux vaut ne s'en voir point,
Que d'en avoir qui font honte à leur race.
Mais si tu dis que la charge te pèse
D'enfants petits, dont la tête te deult,
Ne te soucie, il n'en a pas qui veut :
Ils t'aideront à vivre en ta vieillesse.
Si quelquefois du vin elle se donne ;
Cela lui fait sa malice vomir ;
C'est un pavot qui la fait endormir ;
Femme qui dort ne fait mal à personne.
il y a 7 mois
Eugène Guillevic
@eugeneGuillevic
Chanson Au carrefour des trois brouillards
Il passait bien quelques passants.
En passent ils gardaient leur sang,
Des plus lourds jusqu'aux plus fuyards.
Ceux qui ne doutaient pas d'eux-mêmes
Au carrefour des trois nuages
Gardaient le nom de leur village
Et leurs chants et leurs anathèmes.
Au carrefour des trois brouillards
Ceux qui passaient perdaient pourtant
Mais pas plus que le peu de temps
Qu'ils auraient à donner plus tard.
il y a 7 mois
F
Francis Vielé Griffin
@francisVieleGriffin
Chanson J'ai pris de la pluie dans mes mains tendues
—
De la pluie chaude comme des larmes —
Je l'ai bue comme un philtre, défendu
A cause d'un charme ;
Afin que mon âme en ton âme dorme.
J'ai pris du blé dans la grange obscure
—
Du blé qui choit comme la grêle aux dalles —
Et je l'ai semé sur le labour dur
A cause du givre matinal ;
Afin que tu goûtes à la moisson sûre.
J'ai pris des herbes et des feuilles rousses
—
Des feuilles et des herbes longtemps mortes —
J'en ai fait une flamme haute et douce
A cause de l'essence des sèves fortes ;
Afin que ton attente d'aube fût douce.
Et j'ai pris la pudeur de tes joues et ta bouche
Et tes gais cheveux et tes yeux de rire,
Et je m'en suis fait une aurore farouche
Et des rayons de joie et des cordes de lyre
—
Et le jour est sonore comme un chant de ruche !
il y a 7 mois
François de Malherbe
@francoisDeMalherbe
Chanson (I) C'est faussement qu'on estime
Qu'il ne soit point de beautés
Où ne se trouve le crime
De se plaire aux nouveautés.
Si ma dame avait envie
D'aimer des objets divers,
Serait-elle pas suivie
Des yeux de tout l'univers ?
Est-il courage si brave
Qui pût avecque raison
Fuir d'être son esclave
Et de vivre en sa prison ?
Toutefois cette belle âme,
À qui l'honneur sert de loi,
Ne hait rien tant que le blâme
D'aimer un autre que moi.
Tous ces charmes de langage
Dont on s'offre à la servir
Me l'assurent davantage,
Au lieu de me la ravir.
Aussi ma gloire est si grande
D'un trésor si précieux,
Que je ne sais quelle offrande
M'en peut acquitter aux cieux.
Tout le soin qui me demeure
N'est que d'obtenir du sort
Que ce qu'elle est à cette heure
Elle soit jusqu'à la mort.
De moi, c'est chose sans doute
Que l'astre qui fait les jours
Luira dans une autre voûte
Quand j'aurai d'autres amours.
il y a 7 mois
Germain Nouveau
@germainNouveau
Chanson Puisque de Sisteron à Nantes,
Au cabaret, tout français chante,
Puisque je suis ton échanson,
Je veux, ô Française charmante,
Te fredonner une chanson ;
Une chanson de ma manière,
Pour toi d'abord, et mes amis,
En buvant gaiement dans mon verre
À la santé de ton pays.
Amis, buvons à la Fortune
De la France, Mère commune,
Entre Shakespeare et Murillo :
On y voit la blonde et la brune,
On y boit la bière... et non l'eau.
Doux pays, le plus doux du monde,
Entre Washington... et Chauvin,
Tu baises la brune et la blonde,
Tu fais de la bière et du vin.
Ton cœur est franc, ton âme est fière ;
Les soldats de la Terre entière
T'attaqueront toujours en vain.
Tu baises la blonde et la bière
Comme on boit la brune et le vin.
La brune a le con de la lune,
La blonde a les poils... du mâtin...
Garde bien ta bière et ta brune,
Garde bien ta blonde et ton vin !
On tire la bière de l'orge,
La baïonnette de la forge,
Avec la vigne on fait du vin.
Ta blonde a deux fleurs sur la gorge,
Ta brune a deux grains de raisin.
L'une accroche sa jupe aux branches,
L'autre sourit sous les houblons :
Garde bien leurs garces de hanches,
Garde bien leurs bougres de cons.
Pays vaillant comme un archange,
Pays plus gai que la vendange
Et que l'étoile du matin,
Ta blonde est une douce orange,
Mais ta brune ah !... sacré mâtin !
Ta brune a la griffe profonde ;
Ta rousse a le teint du jasmin ;
Garde-les bien ! Garde ta blonde
Garde-la, le sabre à la main.
Que tes canons n'aient pas de rouilles,
Que tes fileuses de quenouilles
Puissent en paix rire et dormir,
Et se repose sur tes couilles
Du présent et de l'avenir.
C'est sur elles que tu travailles
Sous les toisons d'ombre ou d'or fin :
Garde-les des regards canailles,
Garde-les du coup d'œil hautain !
Pays galant, la langue est claire
Comme le soleil dans ton verre,
Plus que le grec et le latin ;
Autant que ta blonde et ta bière
Garde-la bien, comme ton vin.
Pays plus beau que le Soleil, Lune,
Étoile, aube, aurore et matins.
Aime bien ta blonde et ta brune,
Et fais-leur... beaucoup de catins !
il y a 7 mois
G
Guy de Coucy
@guyDeCoucy
Chanson La douce voix du rossignol sauvage
Qu'ouïs nuit et jour gaiement retentir,
M'adoucit tant mon cœur et le soulage
Qu'ai désir de chanter pour m'ébaudir.
Bien dois chanter puisqu'il vient à plaisir
Celle à qui j'ai fait de mon cœur hommage.
Je dois avoir grande joie en mon cœur,
Si me veut à son service retenir.
One envers ell n'eus cœur faux ni volage,
Il m'en devrait pour ce mieux advenir ;
Je l'aime et sers et adore par usage,
Et ne lui ose mes pensers découvrir.
Car sa beauté me fait tant ébahir
Que je ne sais devant ell' nul langage,
Ni regarder n'ose son simple visage,
Tant en redoute mes yeux à départir.
Tant ai en elle ferme assis mon cœur
Qu'ailleurs ne pense, et
Dieu m'en laisse jouïr ;
Jamais
Tristan, cil qui but le breuvage,
Si tendrement n'aima sans repentir.
Car j'y mets tout, coeur et corps et désir,
Sens et savoir, ne sais si fais folie,
Encore me doute qu'en toute ma vie
Ne puisse assez elle et s'amour servir.
Je ne dis pas que je fasse folie,
Ni si pour elle, il me faudra mourir ;
Car au monde n'est si belle ni si sage,
Et nulle chose n'est tant à mon plaisir.
Moult aime mes yeux qui me la firent choisir;
Dès que la vis, lui laissai en otage
Mon cœur qui depuis y a fait long stage,
Et ja nul jour ne l'en quiers départir.
Chanson, va t'en pour faire mon message
Là où je n'ose retourner ni aller,
Car tant redoute la maie gent jalouse
Qui devine avant que puissent advenir
Les biens d'amour;
Dieu les puisse maudire!
A maint amant ont fait ire et dommage,
Mais j'ai sur eux ce cruel avantage,
Qu'il me faut vaincre mon cœur pour obéir.
il y a 7 mois
Honoré d'Urfé
@honoreDurfe
Chanson Dessus les bords d'une fontaine
D'humide mousse revêtus,
Dont l'onde à maints replis tortus
S'allait égarant dans la plaine,
Un berger se mirant en l'eau
Chantait ces vers au chalumeau * :
Cessez un jour, cessez, la belle,
Avant ma mort d'être cruelle.
Se peut-il qu'un si grand supplice
Que pour vous je souffre en aimant,
Si les dieux sont faits de justice,
Soit enfin souffert vainement?
Peut-il être qu'une amitié
N'émeuve jamais à pitié,
Même quand l'amour est extrême,
Comme est celle dont je vous aime ?
Ces yeux de qui les mignardises *
M'ont souvent contraint d'espérer,
Encores que plein de feintises,
Veulent-ils bien se parjurer?
Ils m'ont dit souvent que son cœur
Quitterait enfin sa rigueur,
Accordant à ce faux langage
Le reste de son beau visage.
Mais quoi ? les beaux yeux des bergères
Se trouveront aussi trompeurs
Que des cours les attraits pipeurs ?
Doncques ces beautés bocagères,
Quoique sans fard dessus le front,
Dedans le cœur se farderont
Et n'apprendront en leurs écoles
Qu'à ne donner que des paroles ?
C'est assez, il est temps, ma belle,
De finir cette cruauté,
Et croyez que toute beauté
Qui n'a la douceur avec elle,
C'est un œil qui n'a point de jour,
Et qu'une belle sans amour,
Comme indigne de cette flamme,
Ressemble* un corps qui n'a point d'âme.
(Première partie, livre
IV)
il y a 7 mois
Jacques Prévert
@jacquesPrevert
Chanson Le malheur avait mis les habits du mensonge
Ils étaient d'un beau rouge couleur du sang du cœur
Mais son cœur à lui était gris
Penché sur la margelle
il me chantait l'amour
Sa voix grinçait comme la poulie
Et moi
dans mon costume de vérité
je me taisais et je riais
et je dansais
au fond du puits
Et sur l'eau qui riait aussi
la lune brillait contre le malheur
la lune se moquait de lui.
il y a 7 mois
J
Jaufre Rudel
@jaufreRudel
Chanson Quand la source du ruisseau
S'éblouit de soleil neuf
Quand naît la fleur d'églantier
Quand au bois le rossignol
Module, affine, répète
Sa chanson qu'il veut parfaite,
Je reprends le mien refrain.
Amour de terre lointaine
Pour vous j'ai le cœur dolent. À mon mal point de remède
Si l'amie tant désirée
Par attrait, par soif d'union,
Ne m'appelle à l'unisson
En chambre close ou verger.
Si mon cœur reste impuissant
Puis-je m'étonncr qu'il brûle ?
Dieu n'a pas voulu qu'on vît
Jamais plus belle chrétienne.
Ni
Juive, ni
Sarrasine !
Pour qui goûte à son amour
C'est festin tombé du ciel.
Étemelle soif du cœur !
À elle seule j'aspire.
Mais si me prend convoitise
Mon désir sera douleur
Car plus piquant que l'épine
(Allons, je ne m'en plains pas !)
Est ce mal que
Joie guérit.
Sans lettre ni parchemin
J'envoie ces vers à chanter
En simple langue romane À
Uc le
Brun, par
Filhol,
Et que les gens du
Poitou,
Berry,
Guyenne et
Bretagne
Aient plaisir à les ouïr.
Chanson
Quand les jours s'allongent en mai
Me plaît un chant d'oiseaux lointain
Et de ce doux lieu éloigné
Me revient un amour lointain.
Je vais pensif les yeux baissés,
Chant dans l'arbre et fleur d'églantier
Me sont comme gelée d'hiver.
J'ai foi en
Dieu le
Seigneur vrai.
Je verrai donc l'amour lointain.
Mais pour un bien qui m'en échoit
J'ai deux maux, tant il m'est lointain.
Si j'étais au loin pèlerin
Ses beaux yeux peut-être verraient
Mon bourdon et ma couverture !
Quel plaisir de lui demander,
Au nom de
Dieu, abri lointain !
Et s'il lui plaît je logerai
Tout près d'elle, moi le lointain.
Quels mots charmants nous nous dirons.
Et quelle paix nous en aurons.
Ami lointain si proche d'elle !
Triste et joyeux je quitterai
(si je la vois) l'amour lointain.
Je ne sais quand la reverrai.
Car nos pays sont trop lointains.
Si nombreux sont chemins et routes !
Comment savoir ce qui viendra ?
Qu'il en soit comme
Dieu voudra !
Jamais d'amour ne jouirai
Si je n'ai cet amour lointain.
Je n'en sais plus doux ni meilleur.
D'aucune part, proche ou lointain.
Son mérite est d'un si grand prix
Que je voudrais me trouver pris
Au loin en terre sarrasine.
Dieu qui fit toutes choses vives
Et créa cet amour lointain
Qu'il veuille ce que veut mon cœur
Voir un jour cet amour lointain
En vente, ou que ce soit
Moindre chambre ou moindre jardin
Me seraient toujours un palais !
Quelqu'un m'appelle et c'est bien vrai
L'homme au désir d'amour lointain
Car nulle autre joie ne me plaît
Comme jouir d'amour lointain
Mais mon désir m'est ennemi
Mon parrain me l'avait promis
Je suis amant sans être aimé
Mais mon désir m'est ennemi
Que maudit soit qui a voue
Mon cœur à n'être point aimé !
il y a 7 mois
Jean Bertaut
@jeanBertaut
Chanson O beaux cheveux dont la blondeur égale
Celle du lin mêlé de filets d'or,
O douce chaîne à mon âme fatale,
Et de l'amour le plus rare trésor,
Si tout lien vous était comparable,
Qui vivrait libre, il vivrait misérable.
Comme jadis la puissance invincible
D'un grand héros en un poil consistait,
Qui, lui rendant l'impossible possible,
Les forts lions à ses pieds abattait,
Ainsi l'amour tient de vous la puissance
Qui des plus fiers lui soumet l'arrogance.
O beaux cheveux, mille âmes amoureuses
Que sans pitié captives vous tenez,
En leur prison se tiendraient bienheureuses,
Voyant leurs bras de vos nœuds enchaînés ;
Et plus leurs mains s'en trouveraient chargées,
Plus leurs douleurs s'en verraient allégées.
Mais la beauté dont les mains inhumaines
N'usent de vous que pour prendre des cœurs,
Extrêmement libérale de peines,
Et plus encor avare de faveurs,
Convertissant vos doux nœuds en martyre,
Plus vous refuse à qui plus vous désire.
Que c'est qu'Amour ! que sa puissance est grande !
Et quels effets elle va produisant !
Le prisonnier une chaîne demande,
Et le geôlier la lui va refusant :
Tant l'un se tient assuré de sa prise,
Tant l'autre a peur de revoir sa franchise.
O doux liens qui captivez les ailes
De mes désirs aux lacs de mon vainqueur,
Arrêtez-les de chaînes éternelles,
Et de cent nœuds emprisonnez mon cœur.
Mais non, beaux lacs, vous n'en avez que faire :
Pourquoi lier un captif volontaire ?
Tant seulement faites-lui cette grâce,
Vous qui prendriez les plus volants esprits,
Qu'il puisse voir dans le nœud qui l'enlace
Son grand vainqueur
Amour lui-même pris :
Afin qu'au moins il s'éjouisse d'être
En sa prison compagnon de son maître.
il y a 7 mois
Jean Moréas
@jeanMoreas
Chanson Vous, avec vos yeux, avec tes yeux,
Dans la bastille que tu hantes !
Celui qui dormait s'est éveillé
Au tocsin des heures beuglantes.
Il prendra sans doute
Son bâton de route
Dans ses mains aux paumes sanglantes.
Il ira, du tournoi au combat,
À la défaite réciproque ;
Qu'il fende heaumes beaux et si clairs,
Son pennon, qu'il ventèle, est loque !
Le haubert qui lace
il y a 7 mois
J
Jean-François Sarasin
@jeanFrancoisSarasin
Chanson Charme secret des maux les plus puissants
Aimable solitude,
Console un peu la douleur que je sens ;
Zéphyrs, ruisseaux, volez plus lentement,
Coulez plus doucement ;
Et ne pouvant finir ma triste inquiétude,
Tâchez au moins d'adoucir mon tourment.
Doux rossignol, divin roi des forêts,
Qui chantez sans étude,
Mêlez vos voix à mes faibles regrets ;
Zéphyrs, ruisseaux, volez plus lentement,
Coulez plus doucement,
Et ne pouvant finir ma triste inquiétude,
Tâchez au moins d'adoucir mon tourment.
il y a 7 mois
Jules Supervielle
@julesSupervielle
Chanson Jésus, tu sais chaque feuille
Qui verdira la forêt,
La racine en terre, seule,
Qui dévore son secret,
La terreur de l'éphémère
A l'approche de la nuit,
Et le soupir de la
Terre
Dans le silence infini.
Tu peux suivre les poissons
Tourmentant les profondeurs,
Quand ils tournent et retournent
Et si s'arrête leur cœur.
Tu fais naître des chansons
Si loin au-delà des mers
Que la fille qui les chante
En tremble au fond de sa chair.
Ecoutez-le bien, demain,
Jésus aura oublié,
Ne sera qu'une statue
Peinte sur la cheminée.
il y a 7 mois
Léon Dierx
@leonDierx
Chanson Le ciel est loin ; les dieux sont sourds.
Mais nos âmes sont immortelles !
La terre s'ouvre ; où s'en vont-elles ?
Souffrirons-nous encor, toujours ?
L'amour est doux ; l'amour s'émousse.
Un serment, combien dure-t-il ?
Le coeur est faux, l'ennui, subtil.
Sur la tombe en paix croît la mousse !
La vie est courte et le jour long.
Mais nos âmes, que cherchent-elles ?
Ah ! leurs douleurs sont immortelles !
Et rien n'y fait, trou noir, ni plomb !
il y a 7 mois
P
Paul Neuhuys
@paulNeuhuys
Autre chanson Par la ville chaude avecque nos dames
Nous baguenaudâmes à la billebaude
Odette,
Odette, si je te quitte serai-je quitte de toute dette?
Mon cœur,
Ida,
N'a pas plus chaud que le soldat dans son cachot
Droit comme un cippe devant la stèle le bel
Alcippe séduit
Estelle
Par la ville chaude avecque nos dames
Nous baguenaudâmes à la billebaude
il y a 7 mois
Paul Scarron
@paulScarron
Chanson Phylis, vous vous plaignez que je n'ai point d'esprit
A vous parler de mon martyre.
Hélas !
Ignorez-vous qu'un mal que l'on peut dire
N'est jamais si grand que l'on dit ?
Un
Amant dit assez quand il est interdit,
Quand il languit, quand il soupire ;
Mais apprenez,
Phylis, qu'un mal que l'on peut dire
N'est jamais si grand que l'on dit.
il y a 7 mois
Paul Verlaine
@paulVerlaine
Autre chanson pour boire Je triomphe et j'ai ce
Schiedam (Qui ne me vient point d'Amsterdam
Mais de
La
Haye),
Et j'en ai bu beaucoup, beaucoup.
Trop peut-être et j'ai vu le loup
Sauter la haie.
La haie, hélas ! de ma raison.
Sauter et fuir à l'horizon
Tel un cortège
A lui tout seul, ce loup, de loups
Et je dis : il me serait doux.
Puisque m'assiège
Le remords — car c'est du remords,
Et le remords c'est des rats morts
Dont l'odeur pue —
De n'avoir encor partagé
Ce
Schiedam ô si fort que j'ai !
Avec tel dont la note est due,
—
De partager (un peu) ce fier
Schiedam que j'ai.
il y a 7 mois
P
Peire Raimon de Toulouse
@peireRaimonDeToulouse
Chanson Certes j'ai appris d'Amour
Comme il sait piquer du dard.
Mais j'ignore encor comment
Il sait guérir gentement.
Je connais le médecin
Qui seul me rendrait la vie,
Mais si je n'ose, à quoi bon
Lui dévoiler ma blessure !
Ma sottise me tuera
Si je ne peux pas lui dire
Et lui montrer mon chagrin.
Nul ne peut me secourir.
Sauf elle, courtoise, gaie,
Que j'aime, que je chéris.
Mais quoi, demander merci ?
J'ai trop peur de lui déplaire !
Au loin quand je l'aperçois
J'ai grand désir de pouvoir À genoux venir à elle.
Et parvenu à ses pieds.
Mains jointes lui rendre hommage
Comme serf doit au seigneur.
Puis implorer sa pitié
Sans souci des malveillants.
En vous seule, bonne
Dame,
Tout bonheur germe et fleurit.
Je vous aime et vous désire.
C'est de foi bonne et limpide
Que je demande pitié.
Je promets d'être discret
Et plus fidèle (Dieu m'aide !)
Que ne fut
Landric à
Aye.
Mon cher
Diamant, mon jongleur.
Je t'en prie, cours à
Toulouse
Chanter le chant que voilà.
il y a 7 mois
P
Philippe Delaveau
@philippeDelaveau
Chanson Le temps ravit les jours anciens
Les mois les heures les années
Ce que je suis ne sera plus
Je ne puis revenir aux lieux ensevelis Aux maisons froides aux jardins morts Je dirai sur la splendeur étale des plaines L'horizon où s'enfuirent les nues
Je suis la terre et le déclin des branches Le chant l'oubli du chant la parole déprise Sollicitude sans emploi mains aux ressources vagues J'ai connu la douleur l'espérance la
joie
Le temps ravit les jours anciens
Les mois les heures les années
Ce que je suis ne sera plus
Tristes oiseaux craignant le froid Les jours défilent puis se rompent La mort se cache dans le soir Quand la lampe faible s'allume
S'en reviendront l'hiver et les pas étouffés Dans la neige immobile sur les trottoirs L'heure pâlit à la fin de l'été Ce que je suis ne sera plus
Le temps ravit les jours anciens
Les mois les heures les années
Je n'étais rien le temps me dilapide.
il y a 7 mois
Philippe Desportes
@philippeDesportes
Chanson Que vous m'allez tourmentant
De m'estimer infidèle !
Non, vous n'êtes point plus belle
Que je suis ferme et constant.
Pour bien voir quelle est ma foi,
Regardez-moi dans votre âme :
C'est comme j'en fais,
Madame;
Dans la mienne je vous vois.
Si vous pensez me changer,
Ce miroir me le rapporte ;
Voyez donc, de même sorte,
En vous, si je suis léger.
Pour vous, sans plus, je fus né,
Mon cœur n'en peut aimer d'autre :
Las ! si je ne suis plus vôtre,
A qui m'avez-vous donné?
il y a 7 mois
Pierre Corneille
@pierreCorneille
Chanson Si je perds bien des maîtresses,
J'en fais encor plus souvent,
Et mes vœux et mes promesses
Ne sont que feintes caresses,
Et mes vœux et mes promesses
Ne sont jamais que du vent.
il y a 7 mois
Rémi Belleau
@remiBelleau
Chanson Faites-vous la sourde, Macée ?
Voyez Combaut qui vient à vous,
Pour ravoir ce que votre œil doux
Lui a tiré de sa pensée.
Vous l'avez, et lui ne l'a plus,
Voyez sa couleur jaune et fade,
Et tout le reste si malade,
Qu'il en est demeuré perclus.
M'amour, si vous voulez qu'il vive,
Rendez-lui tôt, car vous l'avez :
Regardez ses yeux tous cavés,
Qui de vivre n'ont plus d'envie.
Ou le gardez, si votre amour
Souhaite, cruelle, qu'il meure :
Car en plus gentille demeure
Ne saurait faire son séjour.
II vous aime plus que l'Avette
Au mois d'avril n'aime les fleurs,
Plus que le berger aux chaleurs
L'ombre mollet de la coudrette.
II est brun, mais la terre brune
Toujours porte les beaux épis,
Et parmi les ombreuses nuits
II n'est clarté que de la Lune.
II n'est ni trop laid ni trop beau,
Hier je regardais sa face
Dedans la fontaine qui passe
Contre le pied de cet ormeau.
II est riche assez pour vous deux,
Et si n'a bien qu'il ne vous donne,
Aimez-le seulement, mignonne,
Mon Dieu, il sera trop heureux !
II a déjà trois cochons de lait,
Qui sont sous le ventre de leur mère
Et trois brebis avec le père
Qui nourrissent un agnelet.
Toujours il a dans sa logette
Du fromage gras à foison,
Et du lait en toute saison
Avec la châtaigne mollette.
II sait le train du pâturage,
Et sait la terre ensemencer,
Et si sait aussi bien danser
Que jouvenceau (*) de ce village.
II vous aime plus que son cœur,
Que tenez en prison cruelle :
Ne lui soyez donc plus rebelle,
Et le prenez pour serviteur.
* Jouvenceau : Jeune homme.
il y a 7 mois
Victor Hugo
@victorHugo
Autre Chanson L'aube naît, et ta porte est close !
Ma belle, pourquoi sommeiller ?
À l'heure où s'éveille la rose
Ne vas-tu pas te réveiller ?
Ô ma charmante,
Ecoute ici
L'amant qui chante
Et pleure aussi !
Tout frappe à ta porte bénie.
L'aurore dit : Je suis le jour !
L'oiseau dit : Je suis l'harmonie !
Et mon cœur dit : Je suis l'amour !
Ô ma charmante,
Ecoute ici
L'amant qui chante
Et pleure aussi !
Je t'adore ange et t'aime femme.
Dieu qui par toi m'a complété
A fait mon amour pour ton âme
Et mon regard pour ta beauté !
Ô ma charmante,
Ecoute ici
L'amant qui chante
Et pleure aussi !
Février 1829.
il y a 7 mois
Victor Hugo
@victorHugo
Avant que mes chansons aimées Amor de mi pecho,
Pecho de mi amor !
Arbol, que has hecho,
Que has hecho del flor ?
ROMANCE.
Avant que mes chansons aimées,
Si jeunes et si parfumées,
Du monde eussent subi l'affront,
Loin du peuple ingrat qui les foule,
Comme elles fleurissaient en foule,
Vertes et fraîches sur mon front !
De l'arbre à présente détachées,
Fleurs par l'aquilon desséchées,
Vains débris qu'on traîne en rêvant,
Elles errent éparpillées,
De fange ou de poudre souillées,
Au gré du lot, au gré du vent.
Moi, comme des feuilles flétries,
Je les vois, toutes défleuries,
Courir sur le sol dépouillé ;
Et la foule qui m'environne,
En broyant du pied ma couronne,
Passe et rit de l'arbre effeuillé !
Le 6 septembre 1828.