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Amour

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Amour

Poésies de la collection amour

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    Robert Tirvaudey

    @robertTirvaudey

    Amour du lointain Il faut se souvenir. Tu revenais de trop loin. Toi l’homme du lointain. Si loin que rien en toi ne résonnait humain. La barbe trop longue, le chapeau de feutre, presque en accordéon, le soulier éculé, la veste élimée, les mains blanches, le dos voûté. Tout en toi. De trop. Les enfants, cruels, qui répètent, se gaussaient de toi. Les femmes maugréaient des injures. Les hommes criaient l’ignominie. Laquelle ? Ils criaient. C’est tout. Dans toutes les directions. Toi-même. Serait-ce un grief ? Tu t’éloignas. As-tu voulu notre résistance ? As-tu désiré l’entraide ? Tu n’avais que ton Dieu. Cet Être si étranger. Tu avais le tragique de l’homme, mais plus la dignité. Tu étais trop loin, trop lointain. Ta langue. Une barrière. Ton culte. Une borne. Ta manière d’être. Un repli. Tu n’étais pas rien. Mais moins que rien. On te reconnaissait, de peur de tout confondre. Car souvent nous sommes les mêmes. On te distinguera par l’étoile. Étoile de David. Sur ton gilet noir. De la couleur vive du désespoir. Un jaune cru. Tu t’éloignes de toutes les frontières, de toutes les limites. Je suis cette limite, cette frontière. Comme tous. Nous sommes la borne. Le douanier de toute culture. Responsabilité du lointain. Responsables de celui qui s’éloigne de toi, de moi. Nous sommes. Toujours et pour toujours. Il faut. Nous nous devons. Un devoir du lointain.

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    S

    Sophie d'Arbouville

    @sophieDarbouville

    Ne m'aimez pas Ne m'aimez pas !... Je veux pouvoir prier pour vous, Comme pour les amis dont le soir, à genoux, Je me souviens — afin qu'éloignant la tempête, Dieu leur donne un ciel pur pour abriter leur tête. Je veux, de vos bonheurs, prendre tout haut ma part, Le front calme et serein, sans craindre aucun regard ; Je veux, quand vous entrez, vous donner un sourire, Trouver doux de vous voir, en osant vous le dire. Je veux, si vous souffrez, partageant vos destins, Vous dire : « Qu'avez-vous ? » et vous tendre les mains. Je veux, si par hasard votre raison chancelle, Vous réserver l'appui de l'amitié fidèle, Et qu'entraîné par moi dans le sentier du bien, Votre pas soit guidé par la trace du mien. Je veux, si je me blesse aux buissons de la route, Vous chercher du regard, et sans crainte, sans doute, Murmurer à voix basse : « Ami, protégez-moi ! » Et prenant votre bras, m'y pencher sans effroi. Je veux qu'en nos vieux jours, au déclin de la vie, Nous détournant pour voir la route... alors finie, Nos yeux, en parcourant le long sillon tracé, Ne trouvent nul remords dans les champs du passé. Laissez les sentiments qu'on brise ou qu'on oublie ; Gardons notre amitié, que ce soit pour la vie ! Votre sœur, chaque jour, vous suivra pas à pas... Oh ! je vous en conjure, ami, ne m'aimez pas !

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Angoisse Je ne viens pas ce soir vaincre ton corps, ô bête En qui vont les péchés d'un peuple, ni creuser Dans tes cheveux impurs une triste tempête Sous l'incurable ennui que verse mon baiser : Je demande à ton lit le lourd sommeil sans songes Planant sous les rideaux inconnus du remords, Et que tu peux goûter après tes noirs mensonges, Toi qui sur le néant en sais plus que les morts : Car le Vice, rongeant ma native noblesse, M'a comme toi marqué de sa stérilité, Mais tandis que ton sein de pierre est habité Par un cœur que la dent d'aucun crime ne blesse, Je fuis, pâle, défait, hanté par mon linceul, Ayant peur de mourir lorsque je couche seul.

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    Stéphane Mallarmé

    Stéphane Mallarmé

    @stephaneMallarme

    Apparition La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs Vaporeuses, tiraient de mourantes violes De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles. C’était le jour béni de ton premier baiser. Ma songerie aimant à me martyriser S’énivrait savamment du parfum de tristesse Que même sans regret et sans déboire laisse La cueillaison d’un rêve au coeur qui l’a cueilli. J’errais donc, l’oeil rivé sur le pavé vieilli Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue Et dans le soir, tu m’es en riant apparue Et j’ai cru voir la fée au chapeau de clarté Qui jadis sur mes beaux sommeils d’enfant gâté Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées Neiger de blancs bouquets d’étoiles parfumées.

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    S

    Susy Desrosiers

    @susyDesrosiers

    Amertume j’ai épluché nos aventures nos matins sur la grève nos insomnies encadré nos visages tes yeux tes soupirs autant de paradis pillés tes joues réminiscences coups de peur coups de fête ta bouche un lambeau de ciel débordant de tes lèvres un brin d’éternité fragile où je dépose nos cendres j’ai voulu te retenir te cloîtrer faire un chantier de nos paysages hélas nous sommes zone sinistrée

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Amour binaire Tu es l’autre partition solitaire et inséparable. La vie sans toi sera néantisée. Symbiose qui réjouit ou véritable angoisse ? Ta présence enflamme la dichotomie de notre amour, fusionne nos étincelles. Crois-tu pouvoir survivre ? Moi, je sais ! Je marche à la dérive dans un désert en décomposition avec cette seule pensée un jour tu ne seras plus. Et je serai Dépariée.

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Amour en cage T’abreuvant à mes lèvres calice argenté désir tu emprisonnes le fruit mûr de ma tendresse Derrière la lanterne tes yeux seuls regardent ma fleur solitaire éclore Derrière les barreaux de la passion ton regard d’opale frémit Tu as compris c’est notre dernière cène Me transformant en Physalis écrin de volupté j’étoufferai apaisée

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Amour haineux Se levant le poing foudroie tâche la peau d’un bleu incrédule Le cri transperce les murs sourds L’abîme reste impuni Le Verbe destructeur empoisonne les veines démolit l’âme L’oreille voisine se voile Les belles paroles cachent les sanglots Le prince charmant brode l’enfer du quotidien en maitre absolu

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Baptême de soupirs Je suis telle une feuille bouleversée Un pétale suspendu Sur un lit de marguerites L’aube s’infiltre sagement par la fenêtre J’oublie la banalité du passé Tes mains me caressent, transies Je suis enveloppée dans un Saint-Suaire Lasse de tout Prête à rejoindre mon Géniteur Là où il ne peut plus chanter L’esprit transformé Calciné par la beauté de notre amour Enseveli dans un sarcophage de joie

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Emprise toxique Cerveau siphonné âme possédée paroles atrophiées Tu vis dans une île sans mer bercée par le brouillard Tes rêves en décomposition La haine en tempête Ton amour défiguré ta tête éclatée tu regardes ébahie suffoquée par le mensonge sursauts d’effrois le nain de jardin ricane dans son coin écrasée pulvérisée GAME OVER

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    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Le rendez-vous Rendez-vous manqué d’une soyeuse nuit Boule de neige dans la glace de mon esprit Je croyais dans la beauté des paysages blanchis Neige, neige d’un amour englouti Je t’ai attendu Glaçon Tu n’es pas venu La tempête enflammée a fondu mon étincelle Pourquoi ? Tu disais notre amour inéluctable Ton excuse : Parois de glace qui ensevelit Je ne te pardonnerai jamais Rendez-vous d’une mort subite Froid

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Nativité Recroquevillé au fond de l’utérus Il appréhendait le monde Le petit cœur tambourinait au rythme endiablé des printemps qui l’attendaient Il n’a pas eu peur, petit bébé, l’amour le désirait Il a laissé la musique construire son âme Il a laissé les bruits les pas les voix le façonner Il est sorti en guerrier Sourire aux lèvres

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    Primevère de printemps Veillés par une primevère solitaire nous nous sommes retrouvés à la lisière du monde. Les pétales nous regardaient surpris la terre encore blanche de neige les rayons du soleil embrumés. L’hiver est parti, tu l’as senti. Nous avons osé le désir éphémère ensemble nous nous sommes laissés éblouir. La chaleur de tes mains m’a caressée sans me toucher pétale primitif Ton regard m’a modelée neige de printemps Ton souffle a enluminé mon âme rayon de certitudes Tes mots ont su, pour un instant, orner notre futur Eternellement embrumé.

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    S

    Sybille Rembard

    @sybilleRembard

    À maman Je suis là, maman cachée au fond de tes entrailles mes cellules vibrent ton cœur bat fort je sens la chaleur de ta voix elle me caresse déjà Tu es la magie du monde Je ne suis pas encore pourtant je t’aime déjà Je suis un cerf volant emmailloté dans tes bras Le cerf volant du Paradis sans âge Les cloches sonnent Je suis là, maman j’arrive un bouquet parfumé dans mes pensées Sybille Rembard, Beauté fractionnée, 2002

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    A l’éclair violent de ta face divine A l’éclair violent de ta face divine, N’étant qu’homme mortel, ta céleste beauté Me fit goûter la mort, la mort et la ruine Pour de nouveau venir à l’immortalité. Ton feu divin brûla mon essence mortelle, Ton céleste m’éprit et me ravit aux Cieux, Ton âme était divine et la mienne fut telle : Déesse, tu me mis au rang des autres dieux. Ma bouche osa toucher la bouche cramoisie Pour cueillir, sans la mort, l’immortelle beauté, J’ai vécu de nectar, j’ai sucé l’ambroisie, Savourant le plus doux de la divinité. Aux yeux des Dieux jaloux, remplis de frénésie, J’ai des autels fumants comme les autres dieux, Et pour moi, Dieu secret, rougit la jalousie Quand mon astre inconnu a déguisé les Cieux. Même un Dieu contrefait, refusé de la bouche, Venge à coups de marteaux son impuissant courroux, Tandis que j’ai cueilli le baiser et la couche Et le cinquième fruit du nectar le plus doux. Ces humains aveuglés envieux me font guerre, Dressant contre le ciel l’échelle, ils ont monté, Mais de mon paradis je méprise leur terre Et le ciel ne m’est rien au prix de ta beauté.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Accourez au secours de ma mort Accourez au secours à ma mort violente, Amans, nochers experts en la peine où je suis, Vous qui avez suivi la route que je suis Et d’amour esprouvé les flots et la tourmente. Le pilote qui voit une nef perissante, En l’amoureuse mer remarquant les ennuis Qu’autrefois il risqua, tremble et luy est advis Que d’une telle fin il ne pert que l’attente. Ne venez point ici en espoir de pillage ; Vous ne pouvez tirer profit de mon naufrage : Je n’ay que des souspirs, de l’espoir, et des pleurs. Pour avoir mes souspirs les vents lèvent les armes, Pour l’air font mes espoirs volagers et menteurs, La mer me fait perir pour s’enfler de mes larmes.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Amour qui n’est qu’amour Amour qui n’est qu’amour, qui vit sans espérance, De soi-même par soi par soi-même agité, Qui naquit éternel vif à l’éternité Qui surpasse en aimant l’âme et la connaissance, Que cet amour est près de la divinité ! On dit qu’amour est feu, le feu est de deux sortes : L’un se mêle confus avec les éléments, Pour engendrer, nourrir par leurs tempéraments, L’autre assiège du Ciel tout céleste les portes, Prenant en soi la vie et tous ses mouvements. Le premier s’asservit sous les lois de la nature, Se mêle, se démêle et se perd quelquefois. Quand le vivre lui faut, l’autre n’a d’autres lois Que son cours, son esprit, son âme belle et pure, Et feu est toujours feu, sans le secours du bois. L’homme par la raison tient, augmente et possède Le feu qui n’est vrai feu, mais un bien que des dieux Le larron Promethée eut le moins précieux, L’autre qui en beauté tout le dessous excède Ne pouvant être Ciel est le plus près des Cieux. Je veux du feu terrestre et de l’élémentaire Comparer deux amours, dont l’un a pour objet Un désir, un plaisir, imparfait et abject, L’autre se mire en soi, et tout seul se veut plaire Il est la cause et fin, sa vie et son subject. Amants qui abaissez votre amour de la vue, Qui l’endormez enfant au berceau du loisir, De qui le coeur enflé engrossa de désir, Vous voyez l’espérance à la poitrine nue, Faire téter amour au lait de son plaisir. Si votre oeil fasciné un coup se défascine, Si le coeur perd sa fin ou se contente un jour, Si fortune effrayant de quelque lâche tour La nourrice d’amour a séché sa poitrine, Tout meurt, votre désir, l’espérance et l’amour. Mais ceux qui sont épris des plus célestes flammes Ne sont haussés du trop et abaissés du peu, Leur amour n’est enfant de peu de choses esmeu, Rien ne le fait mourir : En ces heureuses âmes, Sans espoir et sans bois vit l’amour et le feu. Un peu d’eau fait mourir une flamme commune. Les larmes font mourir les amours et les feux Des amants espérants, les autres amoureux Triomphent sur les pleurs, commandent la fortune Car l’eau est sous le feu comme il est sous les Cieux. Ah ! que le feu terrestre a sur soi de nuages ! Ah ! que l’autre est couvert d’une belle clarté ! Que l’un a de fumée et l’autre de beauté ! L’un sert même aux enfers, aux peines et aux rages, L’autre aux Cieux, aux plaisirs de la divinité. Pour cause, en mon amour j’aime pour ce que j’aime, J’aime sans désirer que le plaisir d’aimer, Mon âme par son âme apprend à s’animer, Je n’espère en aimant rien plus que l’amour même Et le bois de ce feu ne se peut consumer. Si on dit votre amour est simple et stérile, Sans produire, sans croître et est sans action Le feu pur est ainsi sans dépérition. S’il ne meurt point, pourquoi doit-il être fertile ? Croître et diminuer sont imperfection. Belle divinité qui mon âme a ravie En ton Ciel avec toi, mon âme a pris des yeux Pour contempler de toi le beau, le précieux, Pareil au bienheureux est son heure et sa vie, Car être au paradis, c’est contempler les dieux. Mais ne puis-je espérer de mes beaux feux estaindre ? Mais dois-je désirer d’esteindre ces beaux feux ? Non, c’est ne vouloir point le plaisir que je veux, Je ne puis le vouloir et n’oserais le craindre, Mon amour ne craint pis et n’espère rien mieux. Je vois de mon beau ciel les espérances vaines Des amants abusés, l’un ne peut s’esjouir. Possédant un défaut, l’autre ne peut fuir Le manque et l’imparfait des amitiés humaines Et l’amour sans l’espoir est plus que le jouir. Je ne désire rien, que faut-il que j’espère ? Et je n’espère rien, que puis-je désirer ? Mon amour sait ravie, et non par martyrer, Et sur mon bien parfait, qu’est-ce qui me peut plaire ? Si mon bien ne peut croître, il ne peut empirer. L’élément en hauteur surpasse toute flamme, Le feu est le plus sûr de tous les éléments, Mon âme aime plus haut que tous entendements, Il n’est rien de si beau que le beau de ma dame, Elle efface tous beau, et moi tous les amants.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Au tribunal d’amour, après mon dernier jour Au tribunal d’amour, après mon dernier jour, Mon coeur sera porté diffamé de brûlures, Il sera exposé, on verra ses blessures, Pour connaître qui fit un si étrange tour, A la face et aux yeux de la Céleste Cour Où se prennent les mains innocentes ou pures ; Il saignera sur toi, et complaignant d’injures Il demandera justice au juge aveugle Amour : Tu diras : C’est Vénus qui l’a fait par ses ruses, Ou bien Amour, son fils : en vain telles excuses ! N’accuse point Vénus de ses mortels brandons, Car tu les as fournis de mèches et flammèches, Et pour les coups de trait qu’on donne aux Cupidons Tes yeux en sont les arcs, et tes regards les flèches.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Ce qui a esgalé aux cheveulx de la terre Ce qui a esgalé aux cheveulx de la terre Les tours et les chasteaux qui transpercent les cieux, Ce qui a renversé les palais orgueilleux, Les sceptres indomptez eslevez par la guerre, Ce n’est pas l’ennemy qui un gros camp asserre, Menace et vient de loin redouté, furieux : Ce sont les citoyens, esmeuz, armés contr’eux, Le bourgeois mutiné qui soy mesme s’enferre. Tous mes autres haineux m’attaquans n’avoyent peu Consommer mon espoir, comme sont peu à peu Le débat de mes sens, mon courage inutile, Mes souspirs eschauffez, mes desirs insolents, Mes regrets impuissants, mes sanglots violents, Qui font de ma raison une guerre civile.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Combattu des vents et des flots Combattu des vents et des flots, Voyant tous les jours ma mort preste Et abayé d’une tempeste D’ennemis, d’aguets, de complots, Me resveillant à tous propos, Mes pistolles dessoubs ma teste, L’amour me fait faire le poete, Et les vers cerchent le repos. Pardonne moy, chere Maistresse, Si mes vers sentent la destresse, Le soldat, la peine et l’esmoy : Car depuis qu’en aimant je souffre, II faut qu’ils sentent comme moy La poudre, la mesche, et le souffre.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Complainte à sa dame Ne lisez pas ces vers, si mieux vous n’aimez lire Les escrits de mon coeur, les feux de mon martyre : Non, ne les lisez pas, mais regardez aux Cieux, voyez comme ils ont joint leurs larmes à mes larmes, Oyez comme les vents pour moy levent les armes, A ce sacré papier ne refusez vos yeux. Boute-feux dont l’ardeur incessamment me tuë, Plus n’est ma triste voix digne if estre entenduë : Amours, venez crier de vos piteuses voix Ô amours esperdus, causes de ma folie, Ô enfans insensés, prodigues de ma vie, Tordez vos petits bras, mordez vos petits doigts. Vous accusez mon feu, vous en estes l’amorce, Vous m’accusez d’effort, et je n’ay point de force, Vous vous plaignez de moy, et de vous je me plains, Vous accusez la main, et le coeur luy commande, L’amour plus grand au coeur, et vous encor plus grande, Commandez à l’amour, et au coeur et aux mains. Mon peché fut la cause , et non pas l’entreprendre; Vaincu, j’ay voulu vaincre, et pris j’ay voulu prendre. Telle fut la fureur de Scevole Romain : Il mit la main au feu qui faillit à l’ouvrage, Brave en son desespoir, et plus brave en sa rage, Brusloit bien plus son coeur qu’il ne brusloit sa main. Mon coeur a trop voulu, ô superbe entreprise, Ma bouche d’un baiser à la vostre s’est prise, Ma main a bien osé toucher à vostre sein, Qu’eust -il après laissé ce grand coeur d ‘entreprendre, Ma bouche vouloit l’ame à vostre bouche rendre, Ma main sechoit mon coeur au lieu de vostre sein.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    En un petit esquif esperdu, malheureux En un petit esquif esperdu, malheureux, Exposé à l’horreur de la mer enragee, Je disputoy’ le sort de ma vie engagee Avecq’ les tourbillons des bises outrageux. Tout accourt à ma mort : Orion pluvieux Creve un déluge espais, et ma barque chargee De flotz avecq’ ma vie estait my submergee, N’ayant autre secours que mon cry vers les Cieux. Aussitost mon vaisseau de peur et d’ondes vuide Reçeut à mon secours le couple Tindaride, Secours en desespoir, oportun en destresse ; En la Mer de mes pleurs porté d’un fraile corps, Au vent de mes souspirs pressé de mille morts, J’ay veu l’astre beçon des yeux de ma Deesse.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Je brûle avec mon âme et mon sang rougissant Je brûle avec mon âme et mon sang rougissant Cent amoureux sonnets donnés pour mon martyre, Si peu de mes langueurs qu’il m’est permis d’écrire Soupirant un Hécate, et mon mal gémissant. Pour ces justes raisons, j’ai observé les cent : A moins de cent taureaux on ne fait cesser l’ire De Diane en courroux, et Diane retire Cent ans hors de l’enfer les corps sans monument. Mais quoi ? puis-je connaître au creux de mes hosties, A leurs boyaux fumants, à leurs rouges parties Ou l’ire, ou la pitié de ma divinité ? Ma vie est à sa vie, et mon âme à la sienne, Mon coeur souffre en son coeur. La Tauroscytienne Eût son désir de sang de mon sang contenté.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    J’entreprens hardiment de te rendre eternelle J’entreprens hardiment de te rendre eternelle, Targuant de mes escripts ton nom contre la Mort, Mais en t’eternisant je ne travaille fort ; Ta perfection n’est en aucun poinct mortelle, Rien n’est mortel en toy, ta chasteté est telle Que le temps envieux ne luy peut faire tort. Tes dons, thresors du Ciel, ton nom exemptz du port Et du fleuve d’oubly ont la vie immortelle. Mesmes ce livre heureux vivra infiniment Pour ce que l’infiny sera son argument. Or je rend grâce aux Dieux de ce que j’ay servie Toute perfection de grace et de beauté, Mais je me plein’ à eux que ta sévérité, Comme sont tes vertus, aussi est infinie.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    J’ouvre mon estomac, une tombe sanglante J’ouvre mon estomac, une tombe sanglante De maux ensevelis. Pour Dieu, tourne tes yeux, Diane, et vois au fond mon coeur parti en deux, Et mes poumons gravés d’une ardeur violente, Vois mon sang écumeux tout noirci par la flamme, Mes os secs de langueurs en pitoyable point Mais considère aussi ce que tu ne vois point, Le reste des malheurs qui saccagent mon âme. Tu me brûles et au four de ma flamme meurtrière Tu chauffes ta froideur : tes délicates mains Attisent mon brasier et tes yeux inhumains Pleurent, non de pitié, mais flambants de colère. À ce feu dévorant de ton ire allumée Ton oeil enflé gémit, tu pleures à ma mort, Mais ce n’est pas mon mal qui te déplait si fort Rien n’attendrit tes yeux que mon aigre fumée. Au moins après ma fin que ton âme apaisée Brûlant le coeur, le corps, hostie à ton courroux, Prenne sur mon esprit un supplice plus doux, Étant d’ire en ma vie en un coup épuisée.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Miséricorde, ô cieux, ô cieux impitoyables III Miséricorde, ô Cieux, ô Dieux impitoyables, Espouvantables flots, o vous palles frayeurs Qui mesme avant la mort faites mourir les cœurs. En horreur, en pitié voyez ces misérables ! Ce navire se perd, desgarny de ses cables, Ces cables ses moyens, de ses espoirs menteurs ; La voile est mise à bas, les plus fermes rigueurs D’une fiere beauté sont les rocs imployables ; Les mortels changements sont les sables mouvant, Les sanglots sont esclairs, les souspirs font les vents, Les attentes sans fruict sont escumeuses rives Où aux bords de la mer les esplorés Amours Vogans de petits bras, las et foible secours, Aspirent en nageant à faces demivives.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Nos désirs sont d’amour Nos désirs sont d’amour la dévorante braise, Sa boutique nos corps, ses flammes nos douleurs, Ses tenailles nos yeux, et la trempe nos pleurs, Nos soupirs ses soufflets, et nos sens sa fournaise. De courroux, ses marteaux, il tourmente notre aise Et sur la dureté, il rabat nos malheurs, Elle lui sert d’enclume et d’étoffe nos coeurs Qu’au feu trop violent, de nos pleurs il apaise, Afin que l’apaisant et mouillant peu à peu Il brûle d’avantage et rengrège son feu. Mais l’abondance d’eau peut amortir la flamme. Je tromperai l’enfant, car pensant m’embraser, Tant de pleurs sortiront sur le feu qui m’enflamme Qu’il noiera sa fournaise au lieu de l’arroser.

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    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    Un clairvoyant faucon en volant par rivière Un clairvoyant faucon en volant par rivière Planait dedans le ciel, à se fondre apprêté Sur son gibier blotti. Mais voyant à côté Une corneille, il quitte une pointe première. Ainsi de ses attraits une maîtresse fière S’élevant jusqu’au ciel m’abat sous sa beauté, Mais son vouloir volage est soudain transporté En l’amour d’un corbeau pour me laisser arrière. Ha ! beaux yeux obscurcis qui avez pris le pire, Plus propres à blesser que discrets à élire, Je vous crains abattu, ainsi que fait l’oiseau Qui n’attend que la mort de la serre ennemie Fors que le changement lui redonne la vie, Et c’est le changement qui me traîne au tombeau.

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    Théodore de Banville

    Théodore de Banville

    @theodoreDeBanville

    Amour angélique Oh ! l’amour ! dit-elle, — et sa voix tremblait et son oeil rayon- nait, — c’est être deux et n’être qu’un. Un homme et une femme qui se fondent en un ange, c’est le ciel. Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, liv.II,chap.VII. L’ange aimé qu’ici-bas je révère et je prie Est une enfant voilée avec ses longs cheveux, A qui le ciel, pour qu’elle nous sourie, A donné le regard de la vierge Marie. Ame que l’azur expatrie Pour qu’elle recueille nos voeux, Jeune âme limpide et fleurie Comme les fleurs de la prairie Aux calices roses ou bleus! Comme l’autre Éloa, c’est la soeur des archanges, Qui pour nous faire vivre aux mystiques amours, A quitté les blondes phalanges Et souille ses pieds blancs à parcourir nos fanges. Aussi nos ferveurs sont étranges: Ce sont des rêves sans détours, Ce sont des plaisirs sans mélanges, Des extases et des échanges Qui dureront plus que les jours! C’est un chemin frayé plein d’une douce joie, Un vase de parfums, une coupe de miel, Un météore qui flamboie Comme un beau chérubin dans sa robe de soie. Il ne craint pas que Dieu le voie: C’est un amour pur et sans fiel Où toute notre âme se noie Et dont l’aile ne se déploie Que pour s’élancer vers le ciel! Juin 1842.

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    Théodore de Banville

    Théodore de Banville

    @theodoreDeBanville

    Chanson d'amour Qui veut avant le point du jour, Vers le bien-aimé de mon âme, Parce que je languis d'amour, Porter le secret de ma flamme ? Ô mon cœur, à quel cœur discret Peux-tu te confier encore ? — Si l'alouette a mon secret, Elle ira le dire à l'Aurore. Le désir de son javelot A percé mon cœur qui se brise. — Si je dis mon secret au flot, Le flot l'ira dire à la brise. Un frisson glisse sur mon col, Et glace ma lèvre déclose. — Si je le dis au rossignol, Il ira le dire à la rose. Qui donc saura le supplier De finir mes peines mortelles ? — Si je le dis au blanc ramier, Il l'ira dire aux tourterelles. Je me ploie ainsi qu'un roseau Et ma beauté penche flétrie. — Si je le dis au bleu ruisseau, Il l'ira dire à la prairie. Vous qui voyez mon désespoir, Flots, ailes, brises des montagnes ! — Si je le dis à mon miroir, Il l'ira dire à mes compagnes. Parce que je languis d'amour, Vous qui voyez que je me pâme, — Allez, allez de ce séjour Vers le bien-aimé de mon âme !

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