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Nature

377 poésies en cours de vérification
Nature

Poésies de la collection nature

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    Elodie Santos

    @elodieSantos

    Pluie de printemps Pluie de Printemps tombe du ciel parfumée au Soleil qui vient pointer son nez Les plantes sourient à la lueur du jour Et viennent offrir leur coeur à ses gouttes semées Pluie de printemps plus belle que l’Automne Vient rafraîchir les coeurs, vient inonder les cours Et bientôt donne tout ce qu’attend la Nature L’Eau si précieuse et pure pour tout recommencer

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    E

    Elodie Santos

    @elodieSantos

    Printemps qui vient… Printemps qui vient fleurir le temps arrive un jour sans qu’on le voit venir Printemps qui vient comme le vent souffler sur l’hiver et le faire partir Printemps qui vient renaître à nouveau nous caresser la peau et nous faire sourire Printemps qui vient avec la Douceur accueillir le Soleil qu’on avait oublié Printemps qui vient nous réchauffer arroser les jardins, faire jaillir les fleurs Printemps qui vient nous dire Je t’aime Afin qu’on puisse tout recommencer

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    E

    Elodie Santos

    @elodieSantos

    Promenade blanche de vieille France L’écrasement de la neige sous les bottes Les branches cassées sur le chemin Le cliquetis régulier de quelques gouttes s’échappant des stalactites de glace Des flocons perdus aux quatre vents tombent des arbres aplatis Les cheminées dégagent des parfums de tarte de grand mère Les chalets chauds au pied des pentes raides ou s’étirent jusqu’au firmament les grands sapins Les luges qui glissent sans laisser place au silence de ce lieu la nuit Des cris de joie, Des boules de neige, Le ciel et ses nuages blancs Tout est ici comme l’enfance comme un voyage du temps jadis Tout est ici comme en vieille France Images d’Epinal, simplicité, absence, magie C’est la plus belle promenade blanche de ma vie

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    E

    Elodie Santos

    @elodieSantos

    Promenade bleu caillou Les pierres craquent sous les semelles L’herbe transpire ce matin Un beau soleil de printemps éclate au firmament Sous ce ciel bleu, on perçoit la couleur du vent Au pied de la colline va s’élevant un chemin près d’un étang Les cyprès dansent à l’horizon au dessus des vignes et des blés On entend un petit bruit de moteur tout juste près, tout juste doux Une petite fourgonette passe, c’est le marchand du village d’à côté On marche sur un mur de pierres, un petit pont est devant nous Dessous passe une rivière, couleur de pluie, souffle d’antan Cette promenade bleu caillou, couleur d’amour, je l’aime tant c’est pour moi tout ce qu’il y a de plus pur et de plus beau dans cette vie Couleur d’argent

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Autour de ma maison Pour vivre clair, ferme et juste, Avec mon coeur, j’admire tout Ce qui vibre, travaille et bout Dans la tendresse humaine et sur la terre auguste. L’hiver s’en va et voici mars et puis avril Et puis le prime été, joyeux et puéril. Sur la glycine en fleurs que la rosée humecte, Rouges, verts, bleus, jaunes, bistres, vermeils, Les mille insectes Bougent et butinent dans le soleil. Oh la merveille de leurs ailes qui brillent Et leur corps fin comme une aiguille Et leurs pattes et leurs antennes Et leur toilette quotidienne Sur un brin d’herbe ou de roseau ! Sont-ils précis, sont-ils agiles ! Leur corselet d’émail fragile Est plus changeant que les courants de l’eau ; Grâce à mes yeux qui les reflètent Je les sens vivre et pénétrer en moi Un peu ; Oh leurs émeutes et leurs jeux Et leurs amours et leurs émois Et leur bataille, autour des grappes violettes ! Mon coeur les suit dans leur essor vers la clarté, Brins de splendeur, miettes de beauté, Parcelles d’or et poussière de vie ! J’écarte d’eux l’embûche inassouvie : La glu, la boue et la poursuite des oiseaux Pendant des jours entiers, je défends leurs travaux ; Mon art s’éprend de leurs oeuvres parfaites ; Je contemple les riens dont leur maison est faite Leur geste utile et net, leur vol chercheur et sûr, Leur voyage dans la lumière ample et sans voile Et quand ils sont perdus quelque part, dans l’azur, Je crois qu’ils sont partis se mêler aux étoiles. Mais voici l’ombre et le soleil sur le jardin Et des guêpes vibrant là-bas, dans la lumière ; Voici les longs et clairs et sinueux chemins Bordés de lourds pavots et de roses trémières ; Aujourd’hui même, à l’heure où l’été blond s’épand Sur les gazons lustrés et les collines fauves, Chaque pétale est comme une paupière mauve Que la clarté pénètre et réchauffe en tremblant. Les moins fiers des pistils, les plus humbles des feuilles Sont d’un dessin si pur, si ferme et si nerveux Qu’en eux Tout se précipite et tout accueille L’hommage clair et amoureux des yeux. L’heure des juillets roux s’est à son tour enfuie, Et maintenant Voici le soleil calme avec la douce pluie Qui, mollement, Sans lacérer les fleurs admirables, les touchent ; Comme eux, sans les cueillir, approchons-en nos bouches Et que notre coeur croie, en baisant leur beauté Faite de tant de joie et de tant de mystère, Baiser, avec ferveur, délice et volupté, Les lèvres mêmes de la terre. Les insectes, les fleurs, les feuilles, les rameaux Tressent leur vie enveloppante et minuscule Dans mon village, autour des prés et des closeaux. Ma petite maison est prise en leurs réseaux. Souvent, l’après-midi, avant le crépuscule, De fenêtre en fenêtre, au long du pignon droit, Ils s’agitent et bruissent jusqu’à mon toit ; Souvent aussi, quand l’astre aux Occidents recule, J’entends si fort leur fièvre et leur émoi Que je me sens vivre, avec mon coeur, Comme au centre de leur ardeur. Alors les tendres fleurs et les insectes frêles M’enveloppent comme un million d’ailes Faites de vent, de pluie et de clarté. Ma maison semble un nid doucement convoité Par tout ce qui remue et vit dans la lumière. J’admire immensément la nature plénière Depuis l’arbuste nain jusqu’au géant soleil Un pétale, un pistil, un grain de blé vermeil Est pris, avec respect, entre mes doigts qui l’aiment ; Je ne distingue plus le monde de moi-même, Je suis l’ample feuillage et les rameaux flottants, Je suis le sol dont je foule les cailloux pâles Et l’herbe des fossés où soudain je m’affale Ivre et fervent, hagard, heureux et sanglotant.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Des fleurs fines et mousseuses comme l’écume Des fleurs fines et mousseuses comme l’écume Poussaient au bord de nos chemins Le vent tombait et l’air semblait frôler tes mains Et tes cheveux avec des plumes. L’ombre était bienveillante à nos pas réunis En leur marche, sous le feuillage ; Une chanson d’enfant nous venait d’un village Et remplissait tout l’infini. Nos étangs s’étalaient dans leur splendeur d’automne Sous la garde des longs roseaux Et le beau front des bois reflétait dans les eaux Sa haute et flexible couronne. Et tous les deux, sachant que nos coeurs formulaient Ensemble une même pensée, Nous songions que c’était notre vie apaisée Que ce beau soir nous dévoilait. Une suprême fois, tu vis le ciel en fête Se parer et nous dire adieu ; Et longtemps et longtemps tu lui donnas tes yeux Pleins jusqu’aux bords de tendresses muettes.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Dédié au sud-ouest Sur la bruyère longue infiniment voici le vent cornant novembre ; Sur la bruyère, infiniment, Voici le vent Qui se déchire et se démembre, En souffles lourds, battant les bourgs ; Voici le vent, Le vent sauvage de Novembre. Aux puits des fermes, Les seaux de fer et les poulies Grincent ; Aux citernes des fermes. Les seaux et les poulies Grincent et crient Toute la mort, dans leurs mélancolies. Le vent rafle, le long de l’eau, Les feuilles mortes des bouleaux, Le vent sauvage de Novembre ; Le vent mord, dans les branches, Des nids d’oiseaux ; Le vent râpe du fer Et peigne, au loin, les avalanches, Rageusement du vieil hiver, Rageusement, le vent, Le vent sauvage de Novembre.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Heure d’automne C’est bien mon deuil, le tien, ô l’automne dernière ! Râles que roule, au vent du nord, la sapinière, Feuillaison d’or à terre et feuillaison de sang, Sur des mousses d’orée ou des mares d’étang, Pleurs des arbres, mes pleurs, mes pauvres pleurs de sang. C’est bien mon deuil, le tien, ô l’automne dernière ! Secousses de colère et rages de crinière, Buissons battus, mordus, hachés, buissons crevés, Au double bord des longs chemins, sur les pavés, Bras des buissons, mes bras, mes pauvres bras levés. C’est bien mon deuil, le tien, ô l’automne dernière ? Quelque chose, là-bas, broyé dans une ornière, Qui grince immensément ses désespoirs ardus Et qui se plaint, ainsi que des arbres tordus, Cris des lointains, mes cris, mes pauvres cris perdus.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    L’arbre Tout seul, Que le berce l’été, que l’agite l’hiver, Que son tronc soit givré ou son branchage vert, Toujours, au long des jours de tendresse ou de haine, Il impose sa vie énorme et souveraine Aux plaines. Il voit les mêmes champs depuis cent et cent ans Et les mêmes labours et les mêmes semailles ; Les yeux aujourd’hui morts, les yeux Des aïeules et des aïeux Ont regardé, maille après maille, Se nouer son écorce et ses rudes rameaux. Il présidait tranquille et fort à leurs travaux ; Son pied velu leur ménageait un lit de mousse ; Il abritait leur sieste à l’heure de midi Et son ombre fut douce A ceux de leurs enfants qui s’aimèrent jadis. Dès le matin, dans les villages, D’après qu’il chante ou pleure, on augure du temps ; Il est dans le secret des violents nuages Et du soleil qui boude aux horizons latents ; Il est tout le passé debout sur les champs tristes, Mais quels que soient les souvenirs Qui, dans son bois, persistent, Dès que janvier vient de finir Et que la sève, en son vieux tronc, s’épanche, Avec tous ses bourgeons, avec toutes ses branches, – Lèvres folles et bras tordus – Il jette un cri immensément tendu Vers l’avenir. Alors, avec des rais de pluie et de lumière, Il frôle les bourgeons de ses feuilles premières, Il contracte ses noeuds, il lisse ses rameaux ; Il assaille le ciel, d’un front toujours plus haut ; Il projette si loin ses poreuses racines Qu’il épuise la mare et les terres voisines Et que parfois il s’arrête, comme étonné De son travail muet, profond et acharné. Mais pour s’épanouir et régner dans sa force, Ô les luttes qu’il lui fallut subir, l’hiver ! Glaives du vent à travers son écorce. Cris d’ouragan, rages de l’air, Givres pareils à quelque âpre limaille, Toute la haine et toute la bataille, Et les grêles de l’Est et les neiges du Nord, Et le gel morne et blanc dont la dent mord, jusqu’à l’aubier, l’ample écheveau des fibres, Tout lui fut mal qui tord, douleur qui vibre, Sans que jamais pourtant Un seul instant Se ralentît son énergie A fermement vouloir que sa vie élargie Fût plus belle, à chaque printemps. En octobre, quand l’or triomphe en son feuillage, Mes pas larges encore, quoique lourds et lassés, Souvent ont dirigé leur long pèlerinage Vers cet arbre d’automne et de vent traversé. Comme un géant brasier de feuilles et de flammes, Il se dressait, superbement, sous le ciel bleu, Il semblait habité par un million d’âmes Qui doucement chantaient en son branchage creux. J’allais vers lui les yeux emplis par la lumière, Je le touchais, avec mes doigts, avec mes mains, Je le sentais bouger jusqu’au fond de la terre D’après un mouvement énorme et surhumain ; Et J’appuyais sur lui ma poitrine brutale, Avec un tel amour, une telle ferveur, Que son rythme profond et sa force totale Passaient en moi et pénétraient jusqu’à mon coeur. Alors, j’étais mêlé à sa belle vie ample ; Je me sentais puissant comme un de ses rameaux ; Il se plantait, dans la splendeur, comme un exemple ; J’aimais plus ardemment le sol, les bois, les eaux, La plaine immense et nue où les nuages passent ; J’étais armé de fermeté contre le sort, Mes bras auraient voulu tenir en eux l’espace ; Mes muscles et mes nerfs rendaient léger mon corps Et je criais :  » La force est sainte. Il faut que l’homme imprime son empreinte Tranquillement, sur ses desseins hardis : Elle est celle qui tient les clefs des paradis Et dont le large poing en fait tourner les portes « . Et je baisais le tronc noueux, éperdument, Et quand le soir se détachait du firmament, je me perdais, dans la campagne morte, Marchant droit devant moi, vers n’importe où, Avec des cris jaillis du fond de mon coeur fou.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    La barque Il gèle et des arbres pâlis de givre clair Montent au loin, ainsi que des faisceaux de lune ; Au ciel purifié, aucun nuage ; aucune Tache sur l’infini silencieux de l’air. Le fleuve où la lueur des astres se réfracte Semble dallé d’acier et maçonné d’argent ; Seule une barque est là, qui veille et qui attend, Les deux avirons pris dans la glace compacte. Quel ange ou quel héros les empoignant soudain Dispersera ce vaste hiver à coups de rames Et conduira la barque en un pays de flammes Vers les océans d’or des paradis lointains ? Ou bien doit-elle attendre à tout jamais son maître, Prisonnière du froid et du grand minuit blanc, Tandis que des oiseaux libres et flagellant Les vents, volent, là-haut, vers les printemps à naître ?

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    La glycine est fanée et morte est l’aubépine La glycine est fanée et morte est l’aubépine ; Mais voici la saison de la bruyère en fleur Et par ce soir si calme et doux, le vent frôleur T’apporte les parfums de la pauvre Campine. Aime et respire-les, en songeant à son sort Sa terre est nue et rêche et le vent y guerroie ; La mare y fait ses trous, le sable en fait sa proie Et le peu qu’on lui laisse, elle le donne encor. En automne, jadis, nous avons vécu d’elle, De sa plaine et ses bois, de sa pluie et son ciel, Jusqu’en décembre où les anges de la Noël Traversaient sa légende avec leurs grands coups d’aile. Ton coeur s’y fit plus sûr, plus simple et plus humain ; Nous y avons aimé les gens des vieux villages, Et les femmes qui nous parlaient de leur grand âge Et de rouets déchus qu’avaient usés leurs mains. Notre calme maison dans la lande brumeuse Etait claire aux regards et facile à l’accueil, Son toit nous était cher et sa porte et son seuil Et son âtre noirci par la tourbe fumeuse. Quand la nuit étalait sa totale splendeur Sur l’innombrable et pâle et vaste somnolence, Nous y avons reçu des leçons du silence Dont notre âme jamais n’a oublié l’ardeur. A nous sentir plus seuls dans la plaine profonde Les aubes et les soirs pénétraient plus en nous ; Nos yeux étaient plus francs, nos coeurs étaient plus doux Et remplis jusqu’aux bords de la ferveur du monde. Nous trouvions le bonheur en ne l’exigeant pas, La tristesse des jours même nous était bonne Et le peu de soleil de cette fin d’automne Nous charmait d’autant plus qu’il semblait faible et las. La glycine est fanée, et morte est l’aubépine ; Mais voici la saison de la bruyère en fleur. Ressouviens-toi, ce soir, et laisse au vent frôleur T’apporter les parfums de la pauvre Campine.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Le chant de l’eau L’entendez-vous, l’entendez-vous Le menu flot sur les cailloux ? Il passe et court et glisse Et doucement dédie aux branches, Qui sur son cours se penchent, Sa chanson lisse. Là-bas, Le petit bois de cornouillers Où l’on disait que Mélusine Jadis, sur un tapis de perles fines, Au clair de lune, en blancs souliers, Dansa ; Le petit bois de cornouillers Et tous ses hôtes familiers Et les putois et les fouines Et les souris et les mulots Ecoutent Loin des sentes et loin des routes Le bruit de l’eau. Aubes voilées, Vous étendez en vain, Dans les vallées, Vos tissus blêmes, La rivière, Sous vos duvets épais, dès le prime matin, Coule de pierre en pierre Et murmure quand même. Si quelquefois, pendant l’été, Elle tarit sa volupté D’être sonore et frémissante et fraîche, C’est que le dur juillet La hait Et l’accable et l’assèche. Mais néanmoins, oui, même alors En ses anses, sous les broussailles Elle tressaille Et se ranime encor, Quand la belle gardeuse d’oies Lui livre ingénument la joie Brusque et rouge de tout son corps. Oh ! les belles épousailles De l’eau lucide et de la chair, Dans le vent et dans l’air, Sur un lit transparent de mousse et de rocailles ; Et les baisers multipliés du flot Sur la nuque et le dos, Et les courbes et les anneaux De l’onduleuse chevelure Ornant les deux seins triomphaux D’une ample et flexible parure ; Et les vagues violettes ou roses Qui se brisent ou tout à coup se juxtaposent Autour des flancs, autour des reins ; Et tout là-haut le ciel divin Qui rit à la santé lumineuse des choses ! La belle fille aux cheveux roux Pose un pied clair sur les cailloux. Elle allonge le bras et la hanche et s’inclina Pour recueillir au bord, Parmi les lotiers d’or, La menthe fine ; Ou bien encor S’amuse à soulever les pierres Et provoque la fuite Droite et subite Des truites Au fil luisant de la rivière. Avec des fleurs de pourpre aux deux coins de sa bouche, Elle s’étend ensuite et rit et se recouche, Les pieds dans l’eau, mais le torse au soleil ; Et les oiseaux vifs et vermeils Volent et volent, Et l’ombre de leurs ailes Passe sur elle. Ainsi fait-elle encor A l’entour de son corps Même aux mois chauds Chanter les flots. Et ce n’est qu’en septembre Que sous les branches d’or et d’ambre, Sa nudité Ne mire plus dans l’eau sa mobile clarté, Mais c’est qu’alors sont revenues Vers notre ciel les lourdes nues Avec l’averse entre leurs plis Et que déjà la brume Du fond des prés et des taillis S’exhume. Pluie aux gouttes rondes et claires, Bulles de joie et de lumière, Le sinueux ruisseau gaiement vous fait accueil, Car tout l’automne en deuil Le jonche en vain de mousse et de feuilles tombées. Son flot rechante au long des berges recourbées, Parmi les prés, parmi les bois ; Chaque caillou que le courant remue Fait entendre sa voix menue Comme autrefois ; Et peut-être que Mélusine, Quand la lune, à minuit, répand comme à foison Sur les gazons Ses perles fines, S’éveille et lentement décroise ses pieds d’or, Et, suivant que le flot anime sa cadence, Danse encor Et danse.

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Novembre Les grand’routes tracent des croix A l’infini, à travers bois ; Les grand’routes tracent des croix lointaines A l’infini, à travers plaines ; Les grand’routes tracent des croix Dans l’air livide et froid, Où voyagent les vents déchevelés A l’infini, par les allées. Arbres et vents pareils aux pèlerins, Arbres tristes et fous où l’orage s’accroche, Arbres pareils au défilé de tous les saints, Au défilé de tous les morts Au son des cloches, Arbres qui combattez au Nord Et vents qui déchirez le monde, Ô vos luttes et vos sanglots et vos remords Se débattant et s’engouffrant dans les âmes profondes ! Voici novembre assis auprès de l’âtre, Avec ses maigres doigts chauffés au feu ; Oh ! tous ces morts là-bas, sans feu ni lieu, Oh ! tous ces vents cognant les murs opiniâtres Et repoussés et rejetés Vers l’inconnu, de tous côtés. Oh ! tous ces noms de saints semés en litanies, Tous ces arbres, là-bas, Ces vocables de saints dont la monotonie S’allonge infiniment dans la mémoire ; Oh ! tous ces bras invocatoires Tous ces rameaux éperdument tendus Vers on ne sait quel christ aux horizons pendu. Voici novembre en son manteau grisâtre Qui se blottit de peur au fond de l’âtre Et dont les yeux soudain regardent, Par les carreaux cassés de la croisée, Les vents et les arbres se convulser Dans l’étendue effarante et blafarde, Les saints, les morts, les arbres et le vent, Oh l’identique et affolant cortège Qui tourne et tourne, au long des soirs de neige ; Les saints, les morts, les arbres et le vent, Dites comme ils se confondent dans la mémoire Quand les marteaux battants A coups de bonds dans les bourdons, Ecartèlent leur deuil aux horizons, Du haut des tours imprécatoires. Et novembre, près de l’âtre qui flambe, Allume, avec des mains d’espoir, la lampe Qui brûlera, combien de soirs, l’hiver ; Et novembre si humblement supplie et pleure Pour attendrir le coeur mécanique des heures ! Mais au dehors, voici toujours le ciel, couleur de fer, Voici les vents, les saints, les morts Et la procession profonde Des arbres fous et des branchages tords Qui voyagent de l’un à l’autre bout du monde. Voici les grand’routes comme des croix A l’infini parmi les plaines Les grand’routes et puis leurs croix lointaines A l’infini, sur les vallons et dans les bois !

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    Emile Verhaeren

    Emile Verhaeren

    @emileVerhaeren

    Un matin Dès le matin, par mes grand’routes coutumières Qui traversent champs et vergers, Je suis parti clair et léger, Le corps enveloppé de vent et de lumière. Je vais, je ne sais où. Je vais, je suis heureux ; C’est fête et joie en ma poitrine ; Que m’importent droits et doctrines, Le caillou sonne et luit sous mes talons poudreux ; Je marche avec l’orgueil d’aimer l’air et la terre, D’être immense et d’être fou Et de mêler le monde et tout A cet enivrement de vie élémentaire. Oh ! les pas voyageurs et clairs des anciens dieux ! Je m’enfouis dans l’herbe sombre Où les chênes versent leurs ombres Et je baise les fleurs sur leurs bouches de feu. Les bras fluides et doux des rivières m’accueillent ; Je me repose et je repars, Avec mon guide : le hasard, Par des sentiers sous bois dont je mâche les feuilles. Il me semble jusqu’à ce jour n’avoir vécu Que pour mourir et non pour vivre : Oh ! quels tombeaux creusent les livres Et que de fronts armés y descendent vaincus ! Dites, est-il vrai qu’hier il existât des choses, Et que des yeux quotidiens Aient regardé, avant les miens, Se pavoiser les fruits et s’exalter les roses ! Pour la première fois, je vois les vents vermeils Briller dans la mer des branchages, Mon âme humaine n’a point d’âge ; Tout est jeune, tout est nouveau sous le soleil. J’aime mes yeux, mes bras, mes mains, ma chair, mon torse Et mes cheveux amples et blonds Et je voudrais, par mes poumons, Boire l’espace entier pour en gonfler ma force. Oh ! ces marches à travers bois, plaines, fossés, Où l’être chante et pleure et crie Et se dépense avec furie Et s’enivre de soi ainsi qu’un insensé !

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Après l’Homme Après l’Homme, après l’Homme, Qui dira aux fleurs comment elles se nomment ? Après l’Homme, après l’Homme, quand aura passé l’heure de vie du dernier Homme. Qui dira aux fleurs combien elles sont belles ? N’y aura de coeur à battre pour elles. Après l’Homme, après l’Homme, que sera encore le mot « merveilleux » ? Après l’Homme, après l’Homme, quand le dernier des hommes aura vidé les lieux. Qui dira de la Terre Qu’elle est sans pareille et que dans l’Univers elle est fleur de Soleil ? Après l’Homme, après l’Homme… Viens-t’en donc pour lors, viens-t’en donc l’ami, et chantons encore le jour d’aujourd’hui.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Cogitations Et s’usera le temps au rythme des saisons. S’useront mes printemps. Et moi… je reste… Je me voudrais marée au rythme imperturbable. Je me voudrais jetée. Ou je me voudrais sable. Et s’useront mes rêves. Et s’usera ma joie. S’useront mes combats. Et s’usera ma sève. Je me voudrais étang à surface de moire où les aubes et les soirs se mirent infiniment.. S’usera ma gaieté. S’useront mes attentes. S’useront mes projets. S’useront mes tourmentes. Je me voudrais le vent. Je me voudrais la mer. Je me voudrais le temps au rythme de la terre. S’useront les images qu’on garde au fond de soi. Et s’useront les pages qu’on se fit pas à pas. Alors tel un vieux loup au bout de son chemin, je me voudrai caillou au rythme de plus rien !

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    Esther Granek

    @estherGranek

    En gris L’homme est né de la terre, à la terre s’en retourne et redevient poussière. Ainsi les choses tournent. * Or, pour son plus grand bien, la nature a prévu qu’avant de n’être plus, gris-poussière l’homme devint. * Car si l’heureux destin lui prête longue vie, tout en l’homme devient gris, cheveu, poil, oeil et teint. * Ainsi, du grand passage s’amoindrit le dommage. C’est douce préparation, qu’on la camoufle ou non. * Et grisâtres mouvements et grisâtres pensées et grisâtres vêtements déjà l’ont imprégné. * Dans cette brume uniforme tous les vieux ont même forme comme antiques tapisseries tournant toutes au même gris. * Ainsi, du grand passage s’amoindrit le dommage…

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Enceinte Je suis enceinte de prés verts… Je porte en moi des pâturages… Que mon humeur soit drôle ou sage, je suis enceinte de prés verts… Belle est l’image ! Doux le langage… « Je porte en moi des pâturages… » Et tout à la fois, mais qu’y faire ? je suis enceinte de déserts. Et de mirages. Et de chimères De grands orages. De regrets à tort à travers. De rires à ne savoir qu’en faire. Et mes grossesses cohabitent. En tout mon être. Sans limite.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    J’ai attrapé un chant d’oiseau J’ai attrapé un chant d’oiseau Et je l’ai mis dans ma guitare. Il en sort un refrain de paix Qui fait trêve de mes regrets. J’ai rapporté des verts coteaux Un peu de leurs parfums sauvages. J’ai rapporté couleurs de mai Et les ai mises en un bouquet. J’ai emporté dans mes voyages Et ta présence et ton visage. Et c’est comme un cadeau des cieux Car étant seul je suis à deux.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Mea-culpa Me maintenant comme à l’écart de par mes choix et ma manière, coupable, suis, d’être en lisière tout aussi bien qu’en un tiroir et d’y rester. Verdict austère que j’entendis plus qu’à mon gré mais ne puis que le ratifier. De m’y soustraire, il ne me sied. Bien trop j’ai négligé les fleurs et fort peu j’ai parlé des arbres. A tout artiste ils font honneur. Grandes lacunes en mon labeur ! Et qu’en est-il de mon crédit ? Des manquements je paie le prix ! car j’ai trop négligé les fleurs et fort peu j’ai parlé des arbres… Ah ! voyez-vous, que n’ai-je écrit pour m’éviter accueil de marbre et m’intégrer dans un circuit et avoir un pied dans la place (bien qu’ignorant ce qui s’y passe) ah ! voyez-vous, que n’ai-je écrit : « Les éléphants chantaient dans les arbres et les hirondelles étaient en fleurs ».

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Offrande Au creux d’un coquillage Que vienne l’heure claire Je cueillerai la mer Et je te l’offrirai. Y dansera le ciel Que vienne l’heure belle. Y dansera le ciel Et un vol d’hirondelle Et un bout de nuage Confondant les images En l’aurore nouvelle Dans un reflet moiré Dans un peu de marée Dans un rien de mirage Au fond d’un coquillage. Et te les offrirai.

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    Esther Granek

    @estherGranek

    Promenade Un banc, des coteaux, des fleurs, une treille, rayons de soleil me chauffant le dos. Des troncs noirs et hauts. Émois du matin… Que je me sens bien ! Bocages, ramures. Un toit qui rassure. Abri où je dure. Du rêve. Un piano. Des livres à gogo. Pour moi un festin ! Que je me sens bien ! Et quittant la rade, parfois en balade ou en randonnée, je prends le sentier, coeur et pied légers. Appel quotidien… Que je me sens bien ! S’allongent les lieues. Au vent mes cheveux. Fatigue aux mollets. Un coin oublié. Un silence ailé. Gazouillis soudain… Que je me sens bien ! Des baies, des épines. Et l’air qui burine. Odeurs de résine et de chèvrefeuille. Un saut d’écureuil. Soleil au déclin… Que je me sens bien ! Chemin du retour. Rougeoiement du jour. Et paix alentour. Au loin en beauté, mon toit, mon grenier. En moi un refrain… Que je me sens bien !… Que je me sens bien !… Que je me sens bien !… Que je me sens bien !…

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    Eugène Guillevic

    Eugène Guillevic

    @eugeneGuillevic

    Graminées Des graminées Comme pour tout un jour. Comme si le jour N'était pas là Pour la tuerie.Comme s'il y avait De quoi guérir du vent A travers les nuages. De quoi guérir de l'eau Qui se glisse au ruisseau, Qui paraît se complaire A couler vers plus bas, En se laissant ravir Même ses dimensions. Des graminées Offertes sans montée Au calvaire, Sans vengeance. Des graminées tremblant A peine. Comme si ce n'était Que de savoir la fin Et de ne pas vouloir Y consacrer leur temps. Comme pour tout un jour Qui n'en finirait pas, Des graminées debout Traversant les couteaux Aiguisés par un air Toujours prêt au travail.

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    Francis Etienne Sicard

    @francisEtienneSicard

    Baldaquins d’ombres L’ombre d’une glycine au goût de caramel Saupoudre les murets d’une mèche de miel Où baignent des lézards au corps immatériel, Immobiles et froids écuyers du dégel. La dentelle d’un roc à la saveur de sel, Richement découpée au feutre bleu du ciel, Ruisselle en vague d’or sur le feu torrentiel D’une anémone en soie aux robes d’archipel. Passe un souffle de rêve au parfum de lilas, Comme un brin de muguet déguisé en pierrot, Et les myosotis se parent de taffetas. Goutte à goutte le temps distille sa liqueur Dans l’immense alambic où cuit le berlingot D’un jour naissant ainsi dans l’antre du bonheur.

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    Francis Etienne Sicard

    @francisEtienneSicard

    Clef de torrents Fugace il vide l’aube enlacée au brouillard, Et lentement dilue au brocard des clairières, Ces pierreries en feu dont les jeunes meunières Tapissent leurs bras nus habillés de blizzard. Lorsqu’une truite agile au regard vétillard Froisse sa peau taillée au cristal des aiguières, Une ride fuyante envahit les verrières D’un ciel bouillant de nuit et souvent égrillard. Il s’enfonce soudain dans un taillis secret, Et seule de sa voix, l’écho résonne encore, Jusqu’au prochain bassin où s’ébroue un sacret. En quittant la montagne il dénude ses eaux De leurs voiles de perle aux si beaux doigts d’aurore, Et se meurt dans le foin de paisibles canaux.

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    Francis Etienne Sicard

    @francisEtienneSicard

    Couleurs d’imagerie Sur la toile des champs des fleurs de verdelier Balancent leur houssoir comme une gorge d’ange Dont le souffle du soir au parfum de l’orange, Évente la splendeur autour d’un grand collier. Les pages du palais courant dans le cellier, Chuchotent à demi mot des pages de louange, Et ruissellent de rire au frisson d’une frange Qui glisse sa main nue au bras d’un vieil ânier. Les cloches de la messe appelant au recueil Réveillent les fourrés où se cache un chevreuil, Dont le craintif regard scrute une coccinelle. Puis un silence en plomb coule sur le ruisseau Où glisse une vermille invisible et mortelle Que la truite innocente avalera sous l’eau.

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    Francis Etienne Sicard

    @francisEtienneSicard

    Hirondelle Etanché de sa soif, évidé de racines, Escortant le soleil et son arc rougissant, L’oiseau palpe le temps d’une palme de vent Puis griffonne sa chair aux fusains des marines. Son plumage émargé d’un regard sans rétine, Glisse sa peau de miel et son teint de réglisse Entre les plis fardés d’un ciel crû où blanchissent La mousse des marais et les pins à résines. Il fige le plaisir au bout de ses deux ailes, Brise le roc des flots, et d’un stylet de glace, Tranche la soie du jour d’une ganse rebelle. Lors, son vol passe le Nil, les lacs et les terres Où déjà meurt l’orient sur les hautes terrasses, Pour suivre un lourd radeau dont les voiles s’enferrent.

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    Francis Jammes

    Francis Jammes

    @francisJammes

    Comme un insecte… Comme un insecte, la faucheuse mécanique parcourt le foin. Son cliquetis irrégulier semble accroître la torpeur qui se communique à la vigne et à l’horloge de l’escalier. Laissez-moi ne penser à rien. C’est un ennui que de n’entendre parler que d’appendicite, de Nietzsche, de la Vie, d’on ne sait quoi ensuite. Les cornes des beaux bœufs luisent violemment, et la lumière bleue enflamme le froment. Les roses du jardin ont une odeur terrible, et leurs pétales secs sont de sable torride. Et la lourde écolière ainsi qu’un tournesol s’endort et son atlas est tombé sur le sol.

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    Francis Jammes

    Francis Jammes

    @francisJammes

    Il va neiger Il va neiger dans quelques jours. Je me souviens de l’an dernier. Je me souviens de mes tristesses au coin du feu. Si l’on m’avait demandé : qu’est-ce? J’aurais dit : laissez-moi tranquille. Ce n’est rien. J’ai bien réfléchi, l’année avant, dans ma chambre, pendant que la neige lourde tombait dehors. J’ai réfléchi pour rien. À présent comme alors je fume une pipe en bois avec un bout d’ambre. Ma vieille commode en chêne sent toujours bon. Mais moi j’étais bête parce que ces choses ne pouvaient pas changer et que c’est une pose de vouloir chasser les choses que nous savons. Pourquoi donc pensons-nous et parlons-nous? C’est drôle; nos larmes et nos baisers, eux, ne parlent pas et cependant nous les comprenons, et les pas d’un ami sont plus doux que de douces paroles. On a baptisé les étoiles sans penser qu’elles n’avaient pas besoin de nom, et les nombres qui prouvent que les belles comètes dans l’ombre passeront, ne les forceront pas à passer. Et maintenant même, où sont mes vieilles tristesses de l’an dernier? À peine si je m’en souviens. Je dirais : laissez-moi tranquille, ce n’est rien, si dans ma chambre on venait me demander : qu’est-ce?

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    François Coppée

    François Coppée

    @francoisCoppee

    À une tulipe Ô rare fleur, ô fleur de luxe et de décor, Sur ta tige toujours dressée et triomphante, Le Velasquez eût mis à la main d’une infante Ton calice lamé d’argent, de pourpre et d’or. Mais, détestant l’amour que ta splendeur enfante, Maîtresse esclave, ainsi que la veuve d’Hector, Sous la loupe d’un vieux, inutile trésor, Tu t’alanguis dans une atmosphère étouffante. Tu penses à tes sœurs des grands parcs, et tu peux Regretter le gazon des boulingrins pompeux, La fraîcheur du jet d’eau, l’ombrage du platane ; Car tu n’as pour amant qu’un bourgeois de Harlem, Et dans la serre chaude, ainsi qu’en un harem, S’exhalent sans parfum tes ennuis de sultane.

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