splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi

Vieillesse

126 poésies en cours de vérification
Vieillesse

Poésies de la collection vieillesse

    Pierre de Ronsard

    Pierre de Ronsard

    @pierreDeRonsard

    Stances J’ay varié ma vie en devidant la trame Que Clothon me filoit entre malade et sain, Maintenant la santé se logeoit en mon sein, Tantost la maladie extreme fleau de l’ame. La goutte ja vieillard me bourrela les veines, Les muscles et les nerfs, execrable douleur, Montrant en cent façons par cent diverses peines Que l’homme n’est sinon le subject de malheur. L’un meurt en son printemps, l’autre attend la vieillesse, Le trespas est tout un, les accidens divers : Le vray tresor de l’homme est la verte jeunesse, Le reste de nos ans ne sont que des hivers. Pour long temps conserver telle richesse entiere Ne force ta nature, ains ensuy la raison, Fuy l’amour et le vin, des vices la matiere, Grand loyer t’en demeure en la vieille saison. La jeunesse des Dieux aux hommes n’est donnee Pour gouspiller sa fleur, ainsi qu’on void fanir La rose par le chauld, ainsi mal gouvernee La jeunesse s’enfuit sans jamais revenir.

    en cours de vérification

    Raymond Queneau

    Raymond Queneau

    @raymondQueneau

    Ballade en proverbes du vieux temps Il faut de tout pour faire un monde Il faut des vieillards tremblotants Il faut des milliards de secondes Il faut chaque chose en son temps En mars il y a le printemps II est un mois où l'on moissonne Il est un jour ou bout de l'an L'hiver arrive après l'automne La pierre qui roule est sans mousse Béliers tondus gèlent au vent Entre les pavés l'herbe pousse Que voilà de désagréments Chaque arbre vêt son linceul blanc Le soleil se traîne tout jone C'est la neige après le beau temps L'hiver arrive après l'automne Quand on est vieux on n'est plus jeune On finit par perdre ses dents Après avoir mangé on jeûne Personne n'est jamais content On regrette ses jouets d'enfant On râle après le téléphone On pleure comme un caïman L'hiver arrive après l'automne Envoi Prince! tout ça c'est le chiendent C'est encor pis si tu raisonnes La mort t'a toujours au tournant L'hiver arrive après l'automne

    en cours de vérification

    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    Ce qui dure Le présent se fait vide et triste, Ô mon amie, autour de nous ; Combien peu de passé subsiste ! Et ceux qui restent changent tous. Nous ne voyons plus sans envie Les yeux de vingt ans resplendir, Et combien sont déjà sans vie Des yeux qui nous ont vus grandir ! Que de jeunesse emporte l'heure, Qui n'en rapporte jamais rien ! Pourtant quelque chose demeure : Je t'aime avec mon cœur ancien, Mon vrai cœur, celui qui s'attache Et souffre depuis qu'il est né, Mon cœur d'enfant, le cœur sans tache Que ma mère m'avait donné ; Ce cœur où plus rien ne pénètre, D'où plus rien désormais ne sort ; Je t'aime avec ce que mon être A de plus fort contre la mort ; Et, s'il peut braver la mort même, Si le meilleur de l'homme est tel Que rien n'en périsse, je t'aime Avec ce que j'ai d'immortel.

    en cours de vérification

    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    La vieillesse Viennent les ans ! J'aspire à cet âge sauveur Où mon sang coulera plus sage dans mes veines, Où, les plaisirs pour moi n'ayant plus de saveur, Je vivrai doucement avec mes vieilles peines. Quand l'amour, désormais affranchi du baiser, Ne me brûlera plus de sa fièvre mauvaise Et n'aura plus en moi d'avenir à briser, Que je m'en donnerai de tendresse à mon aise ! Bienheureux les enfants venus sur mon chemin ! Je saurai transporter dans les buissons l'école ; Heureux les jeunes gens dont je prendrai la main ! S'ils aiment, je saurai comment on les console. Et je ne dirai pas : « C'était mieux de mon temps. » Car le mieux d'autrefois c'était notre jeunesse ; Mais je m'approcherai des âmes de vingt ans Pour qu'un peu de chaleur en mon âme renaisse ; Pour vieillir sans déchoir, ne jamais oublier Ce que j'aurai senti dans l'âge où le cœur vibre, Le beau, l'honneur, le droit qui ne sait pas plier, Et jusques au tombeau penser en homme libre. Et vous, oh ! Quel poignard de ma poitrine ôté, Femmes, quand du désir il n'y sera plus traces, Et qu'alors je pourrai ne voir dans la beauté Que le dépôt en vous du moule pur des races ! Puissé-je ainsi m'asseoir au faîte de mes jours Et contempler la vie, exempt enfin d'épreuves, Comme du haut des monts on voit les grands détours Et les plis tourmentés des routes et des fleuves !

    en cours de vérification

    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    Le coucher du soleil Si j’ose comparer le déclin de ma vie A ton coucher sublime, ô Soleil ! je t’envie. Ta gloire peut sombrer, le retour en est sûr : Elle renaît immense avec l’immense azur. De ton sanglant linceul tout le ciel se colore, Et le regard funèbre où luit ton dernier feu, Ce regard sombre et doux, dont tu couves encore Le lys que ta ferveur a fait naguère éclore, Est triste infiniment, mais n’est pas un adieu.

    en cours de vérification

    Sully Prudhomme

    Sully Prudhomme

    @sullyPrudhomme

    L’automne L’azur n’est plus égal comme un rideau sans pli. La feuille, à tout moment, tressaille, vole et tombe ; Au bois, dans les sentiers où le taillis surplombe, Les taches de soleil, plus larges, ont pâli. Mais l’oeuvre de la sève est partout accompli : La grappe autour du cep se colore et se bombe, Dans le verger la branche au poids des fruits succombe, Et l’été meurt, content de son devoir rempli. Dans l’été de ta vie enrichis-en l’automne ; Ô mortel, sois docile à l’exemple que donne, Depuis des milliers d’ans, la terre au genre humain ; Vois : le front, lisse hier, n’est déjà plus sans rides, Et les cheveux épais seront rares demain : Fuis la honte et l’horreur de vieillir les mains vides.

    en cours de vérification

    R

    Renee Vivien

    @reneeVivien

    La vieillesse commençante C'est en vain aujourd'hui que le songe me leurre. Me voici face à face inexorablement Avec l'inévitable et terrible moment : Affrontant le miroir trop vrai, mon âme pleure. Tous les remèdes vains exaspèrent mon mal, Car nul ne me rendra la jeunesse ravie... J'ai trop porté le poids accablant de la vie Et sanglote aujourd'hui mon désespoir final. Hier, que m'importaient la lutte et l'effort rude ! Mais aujourd'hui l'angoisse a fait taire ma voix. Je sens mourir en moi mon âme d'autrefois, Et c'est la sombre horreur de la décrépitude !

    en cours de vérification

    R

    Renee Vivien

    @reneeVivien

    Vieillesse commençante C’est en vain aujourd’hui que le songe me leurre. Me voici face à face inexorablement Avec l’inévitable et terrible moment : Affrontant le miroir trop vrai, mon âme pleure. Tous les remèdes vains exaspèrent mon mal, Car nul ne me rendra la jeunesse ravie… J’ai trop porté le poids accablant de la vie Et sanglote aujourd’hui mon désespoir final. Hier, que m’importaient la lutte et l’effort rude ! Mais aujourd’hui l’angoisse a fait taire ma voix. Je sens mourir en moi mon âme d’autrefois, Et c’est la sombre horreur de la décrépitude !

    en cours de vérification

    R

    Richard Taillefer

    @richardTaillefer

    Sans dire un mot… Il y a la langue Les yeux toujours baissés Pleins de trous vides de mémoire Et cette peur du noir Tous ces matins escamotés au réveil La fatigue dans les os et la frustration du silence Comme tout le monde Qu’on finit par s’y faire Sans dire un mot…

    en cours de vérification

    R

    Richard Taillefer

    @richardTaillefer

    À ma mère Elle est assise Dans l’embrasure de la grande fenêtre C’est l’endroit du monde Où l’on voit le mieux tout le monde Un peu de mer Un peu de ciel Elle aime cet endroit Où son cœur s’apaise Un rayon de soleil paresseux avance devant elle La lumière flirte avec le fond de la pièce Là elle ne pense plus à rien Elle n’oublie pas ! Les gens Les choses Les visages De ceux qui lui sont proches Et pourtant si lointains Ni Pépète La petite chienne aux poils si noirs Réfugiée sur ses genoux de douleur Elle écoute Une étrange musique Rythmée par les caprices du vent Tournoyant dans les arbres

    en cours de vérification

    R

    Robert Tirvaudey

    @robertTirvaudey

    L’éffroi de l’oubli Ils s’assemblent souvent, pour combattre Les affres de l’oubli tenace Sur leur canne, dans un regard fugace Nos vieillards se souviennent sans se battre Elle est loin la bataille de Verdun Nos poilus sans barbe viennent de loin Et pourtant tout est là sans entrain Ils auraient voulu battre le foin Le frère n’est plus, le cousin non plus Les Anciens ne peuvent tout raconter Ils chuchotent des chansons qui leur ont plu Les belles années défilent sans compter Ils pleurent, ils savent, les morts sans mémoire Qui se souviendra du capitaine Fusillé, mutin, refus de gloire Sur la croix blanche, son nom, sans haine

    en cours de vérification

    Rémi Belleau

    Rémi Belleau

    @remiBelleau

    Douce et belle bouchelette Ainsi, ma douce guerrière Mon cœur, mon tout, ma lumière, Vivons ensemble, vivons Et suivons Les doux sentiers de la jeunesse : Aussi bien une vieillesse Nous menace sur le port, Qui, toute courbe et tremblante, Nous entraîne chancelante La maladie et la mort.

    en cours de vérification

    S

    Sabine Sicaud

    @sabineSicaud

    La vieille femme de la lune On a beaucoup parlé dans la chambre, ce soir. Couché, bordé, la lune entrant par la fenêtre, On évoque à travers un somnolent bien-être, La vieille qui, là-haut, porte son fagot noir. Qu’elle doit être lasse et qu’on voudrait connaître Le crime pour lequel nous pouvons tous la voir Au long des claires nuits cheminer sans espoir ! Pauvre vieille si vieille, est-ce un vol de bois mort Qui courbe son vieux dos sur la planète ronde ? Elle a très froid, qui sait, quand le vent souffle fort. Va-t-elle donc marcher jusqu’à la fin du monde ? Et pourquoi dans le ciel la traîner jusqu’au jour ! On dort… Nous fermerons les yeux à double tour… Lune, laisse-la donc s’asseoir une seconde.

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    De l’enfant que j’étais, au vieillard devenu… Il était beau le temps Où mes pommettes roses S’érigeaient au vent. Les genoux écorchés Par les ronces Au bord des sentiers oubliés, Je m’en souviens encore. … Les feuilles mortes Se sont envolées, Ont tout emporté Avec elles, Souvenirs et passé. … De l’enfant que j’étais Il ne me reste plus que Des rides, Des sourires, Des cheveux blancs. Au vieillard devenu, J’ai oublié le temps…

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    Effleurement d’être Dehors est-ce la nuit – L’infini – Un ciel qui jette l’ancre Aux vents blessés Où le froid ronge Les heures. Au fond de l’âme La mémoire s’effrite Inexorablement. – Entre silence et rêve L’éphémère souvenir –

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    Jardin de grand-père C’était il y a longtemps – Ta main Dans la mienne L’horizon A perte de vue Le grillage De rouille Et les herbes mortes Ta main Ridée Qui crevasse la terre La mienne Si rose Effleurant les ronces Tes yeux Dans les miens Le bleu du ciel En morsure de lèvres Et quelques grains de terre Entre nos doigts C’était il y a longtemps Et aujourd’hui encore Ces quelques grains de terre Rident ma chair

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    Prisonnière A genoux Dans sa cellule de 8 m² Elle attend. Une poignée de secondes Entre les doigts Elle attend. Les lèvres Cousues de silence Et la chair Rongée par l’hier Elle attend. Derrière le verrou Le froid inonde Son corps Son être – Tic-Tac – A genoux Seule son ombre Résiste A la grâce de Dieu.

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    Regard d’EHPAD Assise derrière la fenêtre Elle attend. Un moineau picore Les dernières miettes De son déjeuner. Elle lui sourit. Les jours ne comptent plus. Les nuits ne sont plus nuits. Le silence hurle A ses oreilles sourdes. Elle attend. D’en bas de la fenêtre Je te vois. Tu es toujours aussi belle Grand-mère. Ton sourire ricoche à mes pupilles Et j’envoie valser Ma main jusqu’à toi. Le désir de te serrer dans mes bras, De caresser ton visage. Un rêve, une illusion. Bientôt, je te le promets …

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    Un ailleurs A l’heure où la nuit se tord Une page se tourne Dans un éphémère silence – Le visage fané Refleurira sous un autre jour, Dans un autre temps. Un ailleurs se dessine Mais nul ne le sait. … Vieillir sans oublier Vieillir et effacer ses rides Ou bien les garder Pour laisser poindre un nouveau jour.

    en cours de vérification

    S

    Sandrine Davin

    @sandrineDavin

    La vieille Elle est ici « La vieille » Assise sur ce banc Là, au fond du parc Comme hier, comme toujours Comme demain. Des pigeons pour seuls amis Lui font la conversation Comme hier, comme toujours Comme demain. Elle est bien seule « La vieille », Personne ne pense à elle « La vieille ». Elle pourrait bien Mourir demain Qui sera là pour lui tenir La main ? Elle est si seule « La vieille ». … Elle pense et repense Au bon vieux temps A l’insouciance, aux fleurs des champs A son enfance, Comme hier, comme toujours Comme demain. Le soleil s’est éteint Les pigeons se sont fait la malle Elle n’est plus là « La vieille » Elle n’a plus mal…

    en cours de vérification

    S

    Sabine Sicaud

    @sabineSicaud

    La vieille femme de la Lune On a beaucoup parlé dans la chambre, ce soir. Couché, bordé, la lune entrant par la fenêtre, On évoque à travers un somnolent bien-être, La vieille qui, là-haut, porte son fagot noir. Qu'elle doit être lasse et qu'on voudrait connaître Le crime pour lequel nous pouvons tous la voir Au long des claires nuits cheminer sans espoir ! Pauvre vieille si vieille, est-ce un vol de bois mort Qui courbe son vieux dos sur la planète ronde ? Elle a très froid, qui sait, quand le vent souffle fort. Va-t-elle donc marcher jusqu'à la fin du monde ? Et pourquoi dans le ciel la traîner jusqu'au jour ! On dort... Nous fermerons les yeux à double tour... Lune, laisse-la donc s'asseoir une seconde.

    en cours de vérification

    S

    Sophie d'Arbouville

    @sophieDarbouville

    L'hirondelle Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ? Moi, sous le même toit, je trouve tour à tour Trop prompt, trop long, le temps que peut durer un jour. J'ai l'heure des regrets et l'heure du sourire, J'ai des rêves divers que je ne puis redire ; Et, roseau qui se courbe aux caprices du vent, L'esprit calme ou troublé, je marche en hésitant. Mais, du chemin je prends moins la fleur que l'épine, Mon front se lève moins, hélas ! qu'il ne s'incline ; Mon cœur, pesant la vie à des poids différents, Souffre plus des hivers qu'il ne rit des printemps. Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ? J'évoque du passé le lointain souvenir ; Aux jours qui ne sont plus je voudrais revenir. De mes bonheurs enfuis, il me semble au jeune agi N'avoir pas à loisir savouré le passage, Car la jeunesse croit qu'elle est un long trésor, Et, si l'on a reçu, l'on attend plus encor. L'avenir nous parait l'espérance éternelle, Promettant, et restant aux promesses fidèle ; On gaspille des biens que l'on rêve sans fin... Mais, qu'on voudrait, le soir, revenir au matin ! Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ? De mes jours les plus doux je crains le lendemain, Je pose sur mes yeux une tremblante main. L'avenir est pour nous un mensonge, un mystère ; N'y jetons pas trop tôt un regard téméraire. Quand le soleil est pur, sur les épis fauchés Dormons, et reposons longtemps nos fronts penchés ; Et ne demandons pas si les moissons futures Auront des champs féconds, des gerbes aussi mûres. Bornons notre horizon.... Mais l'esprit insoumis Repousse et rompt le frein que lui-même avait mis. Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ? Souvent de mes amis j'imagine l'oubli : C'est le soir, au printemps, quand le jour affaibli Jette l'ombre en mon cœur ainsi que sur la terre ; Emportant avec lui l'espoir et la lumière ; Rêveuse, je me dis : « Pourquoi m'aimeraient-ils ? De nos affections les invisibles fils Se brisent chaque jour au moindre vent qui passe, Comme on voit que la brise enlève au loin et casse Ces fils blancs de la Vierge, errants au sein des cieux ; Tout amour sur la terre est incertain comme eux ! » Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ? C'est que, petit oiseau, tu voles loin de nous ; L'air qu'on respire au ciel est plus pur et plus doux. Ce n'est qu'avec regret que ton aile légère, Lorsque les cieux sont noirs, vient effleurer la terre. Ah ! que ne pouvons-nous, te suivant dans ton vol, Oubliant que nos pieds sont attachés au sol, Élever notre cœur vers la voûte éternelle, Y chercher le printemps comme fait l'hirondelle, Détourner nos regards d'un monde malheureux, Et, vivant ici-bas, donner notre âme aux cieux ! Ô petite hirondelle Qui bats de l'aile, Et viens contre mon mur, Comme abri sûr, Bâtir d'un bec agile Un nid fragile, Dis-moi, pour vivre ainsi Sans nul souci, Comment fait l'hirondelle Qui bat de l'aile ?

    en cours de vérification

    S

    Sophie d'Arbouville

    @sophieDarbouville

    La grand-mère Dansez, fillettes du village, Chantez vos doux refrains d'amour : Trop vite, hélas ! un ciel d'orage Vient obscurcir le plus beau jour. En vous voyant, je me rappelle Et mes plaisirs et mes succès ; Comme vous, j'étais jeune et belle, Et, comme vous, je le savais. Soudain ma blonde chevelure Me montra quelques cheveux blancs… J'ai vu, comme dans la nature, L'hiver succéder au printemps. Dansez, fillettes du village, Chantez vos doux refrains d'amour ; Trop vite, hélas ! un ciel d'orage Vient obscurcir le plus beau jour. Naïve et sans expérience, D'amour je crus les doux serments, Et j'aimais avec confiance… On croit au bonheur à quinze ans ! Une fleur, par Julien cueillie, Était le gage de sa foi ; Mais, avant qu'elle fût flétrie, L'ingrat ne pensait plus à moi ! Dansez, fillettes du Village, Chantez vos doux refrains d'amour ; Trop vite, hélas ! un ciel d'orage Vient obscurcir le plus beau jour. À vingt ans, un ami fidèle Adoucit mon premier chagrin ; J'étais triste, mais j'étais belle, Il m'offrit son cœur et sa main. Trop tôt pour nous vint la vieillesse ; Nous nous aimions, nous étions vieux… La mort rompit notre tendresse… Mon ami fut le plus heureux !

    en cours de vérification

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    Théodore Agrippa d'Aubigné

    @theodoreAgrippaDaubigne

    L’hyver Mes volages humeurs, plus sterilles que belles, S’en vont ; et je leur dis : Vous sentez, irondelles, S’esloigner la chaleur et le froid arriver. Allez nicher ailleurs, pour ne tascher, impures, Ma couche de babil et ma table d’ordures ; Laissez dormir en paix la nuict de mon hyver. D’un seul poinct le soleil n’esloigne l’hemisphere ; Il jette moins d’ardeur, mais autant de lumiere. Je change sans regrets, lorsque je me repens Des frivoles amours et de leur artifice. J’ayme l’hyver qui vient purger mon cœur de vice, Comme de peste l’air, la terre de serpens. Mon chef blanchit dessous les neiges entassées. Le soleil, qui reluit, les eschauffe, glacées, Mais ne les peut dissoudre, au plus court de ses mois. Fondez, neiges ; venez dessus mon cœur descendre, Qu’encores il ne puisse allumer de ma cendre Du brazier, comme il fit des flammes autrefois. Mais quoi ! serai-je esteint devant ma vie esteinte ? Ne luira plus sur moi la flamme vive et sainte, Le zèle flamboyant de la sainte maison ? Je fais aux saints autels holocaustes des restes, De glace aux feux impurs, et de naphte aux celestes : Clair et sacré flambeau, non funebre tison ! Voici moins de plaisirs, mais voici moins de peines. Le rossignol se taist, se taisent les Sereines. Nous ne voyons cueillir ni les fruits ni les fleurs ; L’esperance n’est plus bien souvent tromperesse, L’hyver jouit de tout. Bienheureuse vieillesse La saison de l’usage, et non plus des labeurs ! Mais la mort n’est pas loin ; cette mort est suivie D’un vivre sans mourir, fin d’une fausse vie : Vie de nostre vie, et mort de nostre mort. Qui hait la seureté, pour aimer le naufrage ? Qui a jamais esté si friant de voyage Que la longueur en soit plus douce que le port ?

    en cours de vérification

    Théophile Gautier

    Théophile Gautier

    @theophileGautier

    Vieux de la vieille Par l’ennui chassé de ma chambre, J’errais le long du boulevard : IL faisait un temps de décembre, Vent froid, fine pluie et brouillard ; Et là je vis, spectacle étrange, Échappés du sombre séjour, Sous la bruine et dans la fange, Passer des spectres en plein jour. Pourtant c’est la nuit que les ombres, Par un clair de lune allemand, Dans les vieilles tours en décombres, Reviennent ordinairement ; C’est la nuit que les Elfes sortent Avec leur robe humide au bord, Et sous les nénuphars emportent Leur valseur de fatigue mort ; C’est la nuit qu’a lieu la revue Dans la ballade de Zedlitz, Où l’Empereur, ombre entrevue, Compte les ombres d’Austerlitz. Mais des spectres près du Gymnase, A deux pas des Variétés, Sans brume ou linceul qui les gaze, Des spectres mouillés et crottés ! Avec ses dents jaunes de tartre, Son crâne de mousse verdi, A Paris, boulevard Montmartre, Mob se montrant en plein midi ! La chose vaut qu’on la regarde : Trois fantômes de vieux grognards, En uniformes de l’ex-garde, Avec deux ombres de hussards ! On eût dit la lithographie Où, dessinés par un rayon, Les morts, que Raffet déifie, Passent, criant : Napoléon ! Ce n’était pas les morts qu’éveille Le son du nocturne tambour, Mais bien quelques vieux de la vieille Qui célébraient le grand retour. Depuis la suprême bataille, L’un a maigri, l’autre a grossi ; L’habit jadis fait à leur taille, Est trop grand ou trop rétréci. Nobles lambeaux, défroque épique, Saints haillons, qu’étoile une croix, Dans leur ridicule héroïque Plus beaux que des manteaux de rois ! Un plumet énervé palpite Sur leur kolbach fauve et pelé ; Près des trous de balle, la mite A rongé leur dolman criblé ; Leur culotte de peau trop large Fait mille plis sur leur fémur ; Leur sabre rouillé, lourde charge, Creuse le sol et bat le mur ; Ou bien un embonpoint grotesque, Avec grand’peine boutonné, Fait un poussah, dont on rit presque, Du vieux héros tout chevronné. Ne les raillez pas, camarade ; Saluez plutôt chapeau bas Ces Achilles d’une Iliade Qu’Homère n’inventerait pas. Respectez leur tête chenue ! Sur leur front par vingt cieux bronzé, La cicatrice continue Le sillon que l’âge a creusé. Leur peau, bizarrement noircie, Dit l’Égypte aux soleils brûlants ; Et les neiges de la Russie Poudrent encor leurs cheveux blancs. Si leurs mains tremblent, c’est sans doute Du froid de la Bérésina ; Et s’ils boitent, c’est que la route Est longue du Caire à Wilna ; S’ils sont perclus, c’est qu’à la guerre Les drapeaux étaient leurs seuls draps ; Et si leur manche ne va guère, C’est qu’un boulet a pris leur bras. Ne nous moquons pas de ces hommes Qu’en riant le gamin poursuit ; Ils furent le jour dont nous sommes Le soir et peut-être la nuit. Quand on oublie, ils se souviennent ! Lancier rouge et grenadier bleu, Au pied de la colonne, ils viennent Comme à l’autel de leur seul dieu. Là, fiers de leur longue souffrance, Reconnaissants des maux subis, Ils sentent le coeur de la France Battre sous leurs pauvres habits. Aussi les pleurs trempent le rire En voyant ce saint carnaval, Cette mascarade d’empire Passer comme un matin de bal ; Et l’aigle de la grande armée Dans le ciel qu’emplit son essor, Du fond d’une gloire enflammée, Étend sur eux ses ailes d’or !

    en cours de vérification

    Tristan Corbière

    Tristan Corbière

    @tristanCorbiere

    Au vieux Roscoff berceuse en Nord-Ouest mineur Trou de flibustiers, vieux nid À corsaires! — dans la tourmente, Dors ton bon somme de granit Sur tes caves que le flot hante... Ronfle à la mer, ronfle à la brise; Ta corne dans la brume grise, Ton pied marin dans les brisans... — Dors : tu peux fermer ton œil borgne Ouvert sur le large, et qui lorgne Les Anglais, depuis trois cents ans. — Dors, vieille coque bien ancrée; Les margats et les cormorans Les margats et les cormorans Tes grands poètes d'ouragans Viendront chanter à la marée... — Dors, vieille fille-à-matelots; Plus ne te soûleront ces flots Qui te faisaient une ceinture Dorée, aux nuits rouges de vin, De sang, de feu! — Dors... Sur ton sein L'or ne fondra plus en friture. — Où sont les noms de tes amants... — La mer et la gloire étaient folles! — Noms de lascars! noms de géants! Crachés des gueules d'espingoles... Où battaient-ils, ces pavillons, Ëcharpant ton ciel en haillons!... — Dors au ciel de plomb sur tes dunes... Dors : plus ne viendront ricocher Les boulets morts, sur ton clocher Criblé — comme un prunier — de prunes... — Dors : sous les noires cheminées, Ecoute rêver tes enfants, Mousses de quatre-vingt-dix ans, Épaves des belles années... Il dort ton bon canon de fer, À plat-ventre aussi dans sa souille. Grêlé par les lunes d'hyver... Il dort son lourd sommeil de rouille, — Va : ronfle au vent, vieux ronfleur, Tiens toujours ta gueule enragée Braquée à l'Anglais!... et chargée De maigre jonc-marin en fleur

    en cours de vérification

    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Ne vous contentez pas, madame, d'être belle Ne vous contentez pas, madame, d'être belle. Notre cœur vieillit mal s'il ne se renouvelle. Il faut songer, penser, lire, avoir de l'esprit. Être, pendant dix ans, une rose qui rit, Cela passe... — La vie est une triste chose, Un travail de ruine et de métamorphose Qui fait d'une beauté sortir une laideur. Fixez votre œil charmant, parfois un peu boudeur, Sur les deux termes sûrs d'une vie achevée, Sur le point de départ et le point d'arrivée, Chemin que parcourront, hélas ! vos pas tremblants, — Dents blanches, cheveux noirs ; — dents noires, cheveux blancs ! Moi, j'estime la femme, humble et sage personne, Qui ne s'éblouit pas, belle, veut être bonne, Songe à la saison dure ainsi que les fourmis, Et qui fait pour l'hiver provision d'amis. Vieillir, c'est remplacer par la clarté la flamme ; Le cœur doit lentement rentrer derrière l'âme.

    en cours de vérification

    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Où est donc le bonheur ? Où donc est le bonheur ? disais-je. - Infortuné ! Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l'avez donné. Naître, et ne pas savoir que l'enfance éphémère, Ruisseau de lait qui fuit sans une goutte amère, Est l'âge du bonheur, et le plus beau moment Que l'homme, ombre qui passe, ait sous le firmament ! Plus tard, aimer, - garder dans son coeur de jeune homme Un nom mystérieux que jamais on ne nomme, Glisser un mot furtif dans une tendre main, Aspirer aux douceurs d'un ineffable hymen, Envier l'eau qui fuit, le nuage qui vole, Sentir son coeur se fondre au son d'une parole, Connaître un pas qu'on aime et que jaloux on suit, Rêver le jour, brûler et se tordre la nuit, Pleurer surtout cet âge où sommeillent les âmes, Toujours souffrir ; parmi tous les regards de femmes, Tous les buissons d'avril, les feux du ciel vermeil, Ne chercher qu'un regard, qu'une fleur, qu'un soleil ! Puis effeuiller en hâte et d'une main jalouse Les boutons d'orangers sur le front de l'épouse ; Tout sentir, être heureux, et pourtant, insensé Se tourner presque en pleurs vers le malheur passé ; Voir aux feux de midi, sans espoir qu'il renaisse, Se faner son printemps, son matin, sa jeunesse, Perdre l'illusion, l'espérance, et sentir Qu'on vieillit au fardeau croissant du repentir, Effacer de son front des taches et des rides ; S'éprendre d'art, de vers, de voyages arides, De cieux lointains, de mers où s'égarent nos pas ; Redemander cet âge où l'on ne dormait pas ; Se dire qu'on était bien malheureux, bien triste, Bien fou, que maintenant on respire, on existe, Et, plus vieux de dix ans, s'enfermer tout un jour Pour relire avec pleurs quelques lettres d'amour ! Vieillir enfin, vieillir ! comme des fleurs fanées Voir blanchir nos cheveux et tomber nos années, Rappeler notre enfance et nos beaux jours flétris, Boire le reste amer de ces parfums aigris, Être sage, et railler l'amant et le poète, Et, lorsque nous touchons à la tombe muette, Suivre en les rappelant d'un oeil mouillé de pleurs Nos enfants qui déjà sont tournés vers les leurs ! Ainsi l'homme, ô mon Dieu ! marche toujours plus sombre Du berceau qui rayonne au sépulcre plein d'ombre. C'est donc avoir vécu ! c'est donc avoir été ! Dans la joie et l'amour et la félicité C'est avoir eu sa part ! et se plaindre est folie. Voilà de quel nectar la coupe était remplie ! Hélas ! naître pour vivre en désirant la mort ! Grandir en regrettant l'enfance où le coeur dort, Vieillir en regrettant la jeunesse ravie, Mourir en regrettant la vieillesse et la vie ! Où donc est le bonheur, disais-je ? - Infortuné ! Le bonheur, ô mon Dieu, vous me l'avez donné ! Le 28 mai 1830.

    en cours de vérification

    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine ; Puisque j'ai dans tes mains posé mon front pâli ; Puisque j'ai respiré parfois la douce haleine De ton âme, parfum dans l'ombre enseveli ; Puisqu'il me fut donné de t'entendre me dire Les mots où se répand le cœur mystérieux ; Puisque j'ai vu pleurer, puisque j'ai vu sourire Ta bouche sur ma bouche et tes yeux sur mes yeux ; Puisque j'ai vu briller sur ma tête ravie Un rayon de ton astre, hélas ! voilé toujours ; Puisque j'ai vu tomber dans l'onde de ma vie Une feuille de rose arrachée à tes jours ; Je puis maintenant dire aux rapides années : - Passez ! passez toujours ! je n'ai plus à vieillir ! Allez-vous-en avec vos fleurs toutes fanées ; J'ai dans l'âme une fleur que nul ne peut cueillir ! Votre aile en le heurtant ne fera rien répandre Du vase où je m'abreuve et que j'ai bien rempli. Mon âme a plus de feu que vous n'avez de cendre ! Mon cœur a plus d'amour que vous n'avez d'oubli !

    en cours de vérification

    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Ô mes lettres d'amour Ô mes lettres d'amour, de vertu, de jeunesse, C'est donc vous ! Je m'enivre encore à votre ivresse ; Je vous lis à genoux. Souffrez que pour un jour je reprenne votre âge ! Laissez-moi me cacher, moi, l'heureux et le sage, Pour pleurer avec vous !

    en cours de vérification