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Femmes

179 poésies en cours de vérification
Femmes

Poésies de la collection femmes

    Théophile Gautier

    Théophile Gautier

    @theophileGautier

    Le poème de la femme Un jour, au doux rêveur qui l'aime, En train de montrer ses trésors, Elle voulut lire un poème, Le poème de son beau corps. D'abord, superbe et triomphante Elle vint en grand apparat, Traînant avec des airs d'infante Un flot de velours nacarat : Telle qu'au rebord de sa loge Elle brille aux Italiens, Ecoutant passer son éloge Dans les chants des musiciens. Ensuite, en sa verve d'artiste, Laissant tomber l'épais velours, Dans un nuage de batiste Elle ébaucha ses fiers contours. Glissant de l'épaule à la hanche, La chemise aux plis nonchalants, Comme une tourterelle blanche Vint s'abattre sur ses pieds blancs. Pour Apelle ou pour Cléoméne, Elle semblait, marbre de chair, En Vénus Anadyomène Poser nue au bord de la mer. De grosses perles de Venise Roulaient au lieu de gouttes d'eau, Grains laiteux qu'un rayon irise, Sur le frais satin de sa peau. Oh ! quelles ravissantes choses, Dans sa divine nudité, Avec les strophes de ses poses, Chantait cet hymne de beauté ! Comme les flots baisant le sable Sous la lune aux tremblants rayons, Sa grâce était intarissable En molles ondulations. Mais bientôt, lasse d'art antique, De Phidias et de Vénus, Dans une autre stance plastique Elle groupe ses charmes nus. Sur un tapis de Cachemire, C'est la sultane du sérail, Riant au miroir qui l'admire Avec un rire de corail ; La Géorgienne indolente, Avec son souple narguilhé, Etalant sa hanche opulente, Un pied sous l'autre replié. Et comme l'odalisque d'Ingres, De ses reins cambrant les rondeurs, En dépit des vertus malingres, En dépit des maigres pudeurs ! Paresseuse odalisque, arrière ! Voici le tableau dans son jour, Le diamant dans sa lumière ; Voici la beauté dans l'amour ! Sa tête penche et se renverse ; Haletante, dressant les seins, Aux bras du rêve qui la berce, Elle tombe sur ses coussins. Ses paupières battent des ailes Sur leurs globes d'argent bruni, Et l'on voit monter ses prunelles Dans la nacre de l'infini. D'un linceul de point d'Angleterre Que l'on recouvre sa beauté : L'extase l'a prise à la terre ; Elle est morte de volupté ! Que les violettes de Parme, Au lieu des tristes fleurs des morts Où chaque perle est une larme, Pleurent en bouquets sur son corps ! Et que mollement on la pose Sur son lit, tombeau blanc et doux, Où le poète, à la nuit close, Ira prier à deux genoux.

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    Tristan Corbière

    Tristan Corbière

    @tristanCorbiere

    Femme Lui — cet être faussé, mal aimé, mal souffert, Mal haï — mauvais livre… et pire : il m’intéresse. — S’il est vide après tout… Oh mon dieu, je le laisse, Comme un roman pauvre — entr’ouvert. Cet homme est laid… — Et moi, ne suis-je donc pas belle, Et belle encore pour nous deux ! — En suis-je donc enfin aux rêves de pucelle ?… — Je suis reine : Qu’il soit lépreux ! Où vais-je — femme ! — Après… suis-je donc pas légère Pour me relever d’un faux pas ! Est-ce donc Lui que j’aime ! — Eh non ! c’est son mystère… Celui que peut-être Il n’a pas. Plus Il m’évite, et plus et plus Il me poursuit… Nous verrons ce dédain suprême. Il est rare à croquer, celui-là qui me fuit !… Il me fuit — Eh bien non !… Pas même. … Aurais-je ri pourtant ! si, comme un galant homme, Il avait allumé ses feux… Comme Ève — femme aussi — qui n’aimait pas la Pomme, Je ne l’aime pas — et j’en veux ! — C’est innocent. — Et lui ?… Si l’arme était chargée… — Et moi, j’aime les vilains jeux ! Et… l’on sait amuser, avec une dragée Haute, un animal ombrageux. De quel droit ce regard, ce mauvais œil qui touche : Monsieur poserait le fatal ? Je suis myope, il est vrai… Peut-être qu’il est louche ; Je l’ai vu si peu — mais si mal. — … Et si je le laissais se draper en quenouille, Seul dans sa honteuse fierté !… — Non. Je sens me ronger, comme ronge la rouille, Mon orgueil malade, irrité. Allons donc ! c’est écrit — n’est-ce pas — dans ma tête, En pattes-de-mouche d’enfer ; Écrit, sur cette page où — là — ma main s’arrête. — Main de femme et plume de fer. — Oui ! — Baiser de Judas — Lui cracher à la bouche Cet amour ! — Il l’a mérité — Lui dont la triste image est debout sur ma couche, Implacable de volupté. Oh oui : coller ma langue à l’inerte sourire Qu’il porte là comme un faux pli ! Songe creux et malsain, repoussant… qui m’attire ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . — Une nuit blanche…. un jour sali…

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    Tristan Corbière

    Tristan Corbière

    @tristanCorbiere

    Féminin singulier Eternel Féminin de l’éternel jocrisse ! Fais-nous sauter, pantins nous pavons les décors ! Nous éclairons la rampe… Et toi, dans la coulisse, Tu peux faire au pompier le pur don de ton corps. Fais claquer sur nos dos le fouet de ton caprice, Couronne tes genoux ! … et nos têtes dix-corps ; Ris ! montre tes dents ! … mais … nous avons la police, Et quelque chose en nous d’eunuque et de recors. … Ah tu ne comprends pas ? … – Moi non plus – Fais la belle, Tourne : nous sommes soûls ! Et plats ; Fais la cruelle ! Cravache ton pacha, ton humble serviteur!… Après, sache tomber ! – mais tomber avec grâce – Sur notre sable fin ne laisse pas de trace ! … – C’est le métier de femme et de gladiateur.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    A une femme Enfant ! si j’étais roi, je donnerais l’empire, Et mon char, et mon sceptre, et mon peuple à genoux Et ma couronne d’or, et mes bains de porphyre, Et mes flottes, à qui la mer ne peut suffire, Pour un regard de vous ! Si j’étais Dieu, la terre et l’air avec les ondes, Les anges, les démons courbés devant ma loi, Et le profond chaos aux entrailles fécondes, L’éternité, l’espace, et les cieux, et les mondes, Pour un baiser de toi !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Aimons toujours ! Aimons encore Aimons toujours ! Aimons encore ! Quand l’amour s’en va, l’espoir fuit. L’amour, c’est le cri de l’aurore, L’amour c’est l’hymne de la nuit. Ce que le flot dit aux rivages, Ce que le vent dit aux vieux monts, Ce que l’astre dit aux nuages, C’est le mot ineffable : Aimons ! L’amour fait songer, vivre et croire. Il a pour réchauffer le coeur, Un rayon de plus que la gloire, Et ce rayon c’est le bonheur ! Aime ! qu’on les loue ou les blâme, Toujours les grand coeurs aimeront : Joins cette jeunesse de l’âme A la jeunesse de ton front ! Aime, afin de charmer tes heures ! Afin qu’on voie en tes beaux yeux Des voluptés intérieures Le sourire mystérieux ! Aimons-nous toujours davantage ! Unissons-nous mieux chaque jour. Les arbres croissent en feuillage ; Que notre âme croisse en amour ! Soyons le miroir et l’image ! Soyons la fleur et le parfum ! Les amants, qui, seuls sous l’ombrage, Se sentent deux et ne sont qu’un ! Les poètes cherchent les belles. La femme, ange aux chastes faveurs, Aime à rafraîchir sous ses ailes Ces grand fronts brûlants et rêveurs. Venez à nous, beautés touchantes ! Viens à moi, toi, mon bien, ma loi ! Ange ! viens à moi quand tu chantes, Et, quand tu pleures, viens à moi ! Nous seuls comprenons vos extases. Car notre esprit n’est point moqueur ; Car les poètes sont les vases Où les femmes versent leur coeurs. Moi qui ne cherche dans ce monde Que la seule réalité, Moi qui laisse fuir comme l’onde Tout ce qui n’est que vanité, Je préfère aux biens dont s’enivre L’orgueil du soldat ou du roi, L’ombre que tu fais sur mon livre Quand ton front se penche sur moi. Toute ambition allumée Dans notre esprit, brasier subtil, Tombe en cendre ou vole en fumée, Et l’on se dit :  » Qu’en reste-t-il ? «  Tout plaisir, fleur à peine éclose Dans notre avril sombre et terni, S’effeuille et meurt, lis, myrte ou rose, Et l’on se dit :  » C’est donc fini ! «  L’amour seul reste. Ô noble femme Si tu veux dans ce vil séjour, Garder ta foi, garder ton âme, Garder ton Dieu, garde l’amour ! Conserve en ton coeur, sans rien craindre, Dusses-tu pleurer et souffrir, La flamme qui ne peut s’éteindre Et la fleur qui ne peut mourir !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Aux femmes Quand tout se fait petit, femmes, vous restez grandes. En vain, aux murs sanglants accrochant des guirlandes, Ils ont ouvert le bal et la danse ; ô nos soeurs, Devant ces scélérats transformés en valseurs Vous haussez, — châtiment ! — vos charmantes épaules. Votre divin sourire extermine ces drôles. En vain leur frac brodé scintille ; en vain, brigands, Pour vous plaire ils ont mis à leurs griffes des gants, Et de leur vil tricorne ils ont doré les ganses ; Vous bafouez ces gants, ces fracs, ces élégances, Cet empire tout neuf et déjà vermoulu. Dieu vous a tout donné, femmes ; il a voulu Que les seuls alcyons tinssent tête à l'orage, Et qu'étant la beauté, vous fussiez le courage. Les femmes ici-bas et là-haut les aïeux, Voilà ce qui nous reste ! Abjection ! nos yeux Plongent dans une nuit toujours plus épaissie. Oui, le peuple français, oui, le peuple messie, Oui, ce grand forgeron du droit universel Dont, depuis soixante ans, l'enclume sous le ciel Luit et sonne, dont l'âtre incessamment pétille, Qui fit voler au vent les tours de la Bastille, Qui broya, se dressant tout à coup souverain, Mille ans de royauté sous son talon d'airain, Ce peuple dont le souffle, ainsi que des fumées, Faisait tourbillonner les rois et les armées, Qui, lorsqu'il se fâchait, brisait sous son bâton Le géant Robespierre et le titan Danton, Oui, ce peuple invincible, oui, ce peuple superbe Tremble aujourd'hui, pâlit, frissonne comme l'herbe, Claque des dents, se cache et n'ose dire un mot Devant Magnan, ce reître, et Troplong, ce grimaud ! Oui, nous voyons cela ! Nous tenant dans leurs serres, Mangeant les millions en face des misères, Les Fortoul, les Rouher, êtres stupéfiants, S'étalent ; on se tait. Nos maîtres ruffians À Cayenne, en un bagne, abîme d'agonie, Accouplent l'héroïsme avec l'ignominie ; On se tait. Les pontons râlent ; que dit-on ? rien. Des enfants sont forçats en Afrique ; c'est bien. Si vous pleurez, tenez votre larme secrète. Le bourreau, noir faucheur, debout dans sa charrette, Revient de la moisson avec son panier plein Pas un souffle. Il est là, ce Tibère-Ezzelin Qui se croit scorpion et n'est que scolopendre, Fusillant, et jaloux de Haynau qui peut pendre ; Eclaboussé de sang, le prêtre l'applaudit ; Il est là, ce César chauve-souris qui dit Aux rois : voyez mon sceptre ; aux gueux : voyez mon crime Ce vainqueur qui, béni, lavé, sacré, sublime, De deux pourpres vêtu, dans l'histoire s'assied Le globe dans sa main, un boulet à son pied ; Il nous crache au visage, il règne ! nul ne bouge. Et c'est à votre front qu'on voit monter le rouge, C'est vous qui vous levez et qui vous indignez, Femmes ; le sein gonflé, les yeux de pleurs baignés, Vous huez le tyran, vous consolez les tombes, Et le vautour frémit sous le bec des colombes ! Et moi, proscrit pensif, je vous dis : Gloire à vous ! Oh ! oui, vous êtes bien le sexe fier et doux, Ardent au dévouement, ardent à la souffrance, Toujours prêt à la lutte, à Béthulie, en France, Dont l'âme à la hauteur des héros s'élargit, D'où se lève Judith, d'où Charlotte surgit ! Vous mêlez la bravoure à la mélancolie. Vous êtes Porcia, vous êtes Cornélie, Vous êtes Arria qui saigne et qui sourit ; Oui, vous avez toujours en vous ce même esprit Qui relève et soutient les nations tombées, Qui suscite la Juive et les sept Machabées, Qui dans toi, Jeanne d'Arc, fait revivre Amadis, Et qui, sur le chemin des tyrans interdits, Pour les épouvanter dans leur gloire éphémère, Met tantôt une vierge et tantôt une mère ! Si bien que, par moments, lorsqu'en nos visions Nous voyons, secouant un glaive de rayons, Dans les cieux apparaître une figure ailée, Saint-Michel sous ses pieds foulant l'hydre écaillée, Nous disons : c'est la Gloire et c'est la Liberté ! Et nous croyons, devant sa grâce et sa beauté, Quand nous cherchons le nom dont il faut qu'on le nomme, Que l'archange est plutôt une femme qu'un homme ! Jersey, le 30 mai 1853.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    De la femme au ciel L'âme a des étapes profondes. On se laisse d'abord charmer, Puis convaincre. Ce sont deux mondes. Comprendre est au-delà d'aimer. Aimer, comprendre : c'est le faîte. Le Coeur, cet oiseau du vallon, Sur le premier degré s'arrête ; L'Esprit vole à l'autre échelon. À l'amant succède l'archange ; Le baiser, puis le firmament ; Le point d'obscurité se change En un point de rayonnement. Mets de l'amour sur cette terre Dans les vains brins d'herbe flottants. Cette herbe devient, ô mystère ! Le nid sombre au fond du printemps. Ajoute, en écartant son voile, De la lumière au nid béni. Et le nid deviendra l'étoile Dans la forêt de l'infini.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Dizain de femmes Une de plus que les muses ; Elles sont dix. On croirait, Quand leurs jeunes voix confuses Bruissent dans la forêt, Entendre, sous les caresses Des grands vieux chênes boudeurs, Un brouhaha de déesses Passant dans les profondeurs. Elles sont dix châtelaines De tout le pays voisin. La ruche vers leurs haleines Envoie en chantant l'essaim. Elles sont dix belles folles, Démons dont je suis cagot ; Obtenant des auréoles Et méritant le fagot. Que de coeurs cela dérobe, Même à nous autres manants ! Chacune étale à sa robe Quatre volants frissonnants, Et court par les bois, sylphide Toute parée, en dépit De la griffe qui, perfide, Dans les ronces se tapit. Oh ! ces anges de la terre ! Pensifs, nous les décoiffons ; Nous adorons le mystère De la robe aux plis profonds. Jadis Vénus sur la grève N'avait pas l'attrait taquin Du jupon qui se soulève Pour montrer le brodequin. Les antiques Arthémises Avaient des fronts élégants, Mais n'étaient pas si bien mises Et ne portaient point de gants. La gaze ressemble au rêve ; Le satin, au pli glacé, Brille, et sa toilette achève Ce que l'oeil a commencé. La marquise en sa calèche Plaît, même au butor narquois ; Car la grâce est une flèche Dont la mode est le carquois. L'homme, sot par étiquette, Se tient droit sur son ergot ; Mais Dieu créa la coquette Dès qu'il eut fait le nigaud. Oh ! toutes ces jeunes femmes, Ces yeux où flambe midi, Ces fleurs, ces chiffons, ces âmes, Quelle forêt de Bondy ! Non, rien ne nous dévalise Comme un minois habillé, Et comme une Cydalise Où Chapron a travaillé ! Les jupes sont meurtrières. La femme est un canevas Que, dans l'ombre, aux couturières Proposent les Jéhovahs. Cette aiguille qui l'arrange D'une certaine façon Lui donne la force étrange D'un rayon dans un frisson. Un ruban est une embûche, Une guimpe est un péril ; Et, dans l'Éden, où trébuche La nature à son avril, Satan — que le diable enlève ! — N'eût pas risqué son pied-bot Si Dieu sur les cheveux d'Ève Eût mis un chapeau d'Herbaut. Toutes les dix, sous les voûtes, Des grands arbres, vont chantant ; On est amoureux de toutes ; On est farouche et content. On les compare, on hésite Entre ces robes qui font La lueur d'une visite Arrivant du ciel profond. Oh ! pour plaire à cette moire, À ce gros de Tours flambé, On se rêve plein de gloire, On voudrait être un abbé. On sort du hallier champêtre, La tête basse, à pas lents, Le coeur pris, dans ce bois traître, Par les quarante volants.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Elle était déchaussée, elle était décoiffée Elle était déchaussée, elle était décoiffée, Assise, les pieds nus, parmi les joncs penchants ; Moi qui passais par là, je crus voir une fée, Et je lui dis : Veux-tu t'en venir dans les champs ? Elle me regarda de ce regard suprême Qui reste à la beauté quand nous en triomphons, Et je lui dis : Veux-tu, c'est le mois où l'on aime, Veux-tu nous en aller sous les arbres profonds ?

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Guitare Gastibelza, l’homme à la carabine, Chantait ainsi:  » Quelqu’un a-t-il connu doña Sabine ? Quelqu’un d’ici ? Dansez, chantez, villageois ! la nuit gagne Le mont Falù. – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou ! Quelqu’un de vous a-t-il connu Sabine, Ma señora ? Sa mère était la vieille maugrabine D’Antequera Qui chaque nuit criait dans la Tour-Magne Comme un hibou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou ! Dansez, chantez! Des biens que l’heure envoie Il faut user. Elle était jeune et son oeil plein de joie Faisait penser. – À ce vieillard qu’un enfant accompagne jetez un sou ! … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Vraiment, la reine eût près d’elle été laide Quand, vers le soir, Elle passait sur le pont de Tolède En corset noir. Un chapelet du temps de Charlemagne Ornait son cou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Le roi disait en la voyant si belle A son neveu : – Pour un baiser, pour un sourire d’elle, Pour un cheveu, Infant don Ruy, je donnerais l’Espagne Et le Pérou ! – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Je ne sais pas si j’aimais cette dame, Mais je sais bien Que pour avoir un regard de son âme, Moi, pauvre chien, J’aurais gaîment passé dix ans au bagne Sous le verrou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Un jour d’été que tout était lumière, Vie et douceur, Elle s’en vint jouer dans la rivière Avec sa soeur, Je vis le pied de sa jeune compagne Et son genou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Quand je voyais cette enfant, moi le pâtre De ce canton, Je croyais voir la belle Cléopâtre, Qui, nous dit-on, Menait César, empereur d’Allemagne, Par le licou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Dansez, chantez, villageois, la nuit tombe ! Sabine, un jour, A tout vendu, sa beauté de colombe, Et son amour, Pour l’anneau d’or du comte de Saldagne, Pour un bijou … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Sur ce vieux banc souffrez que je m’appuie, Car je suis las. Avec ce comte elle s’est donc enfuie ! Enfuie, hélas ! Par le chemin qui va vers la Cerdagne, Je ne sais où … – Le vent qui vient à travers la montagne Me rendra fou. Je la voyais passer de ma demeure, Et c’était tout. Mais à présent je m’ennuie à toute heure, Plein de dégoût, Rêveur oisif, l’âme dans la campagne, La dague au clou … – Le vent qui vient à travers la montagne M’a rendu fou !

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

    @victorHugo

    Jolies femmes On leur fait des sonnets, passables quelquefois ; On baise cette main qu'elles daignent vous tendre ; On les suit à l'église, on les admire au bois ; On redevient Damis, on redevient Clitandre ; Le bal est leur triomphe, et l'on brigue leur choix ; On danse, on rit, on cause, et vous pouvez entendre, Tout en valsant, parmi les luths et les hautbois, Ces belles gazouiller de leur voix la plus tendre : - La force est tout ; la guerre est sainte ; l'échafaud Est bon ; il ne faut pas trop de lumière ; il faut Bâtir plus de prisons et bâtir moins d'écoles ; Si Paris bouge, il faut des canons plein les forts. Et ces colombes-là vous disent des paroles A faire remuer d'horreur les os des morts. Juillet 1870.

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    Victor Hugo

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    @victorHugo

    La femme Je l'ai dit quelque part, les penseurs d'autrefois, Épiant l'inconnu dans ses plus noires lois, Ont tous étudié la formation d'Ève. L'un en fit son problème et l'autre en fit son rêve. L'horreur sacrée étant dans tout, se pourrait-il Que la femme, cet être obscur, puissant, subtil, Fût double, et, tout ensemble ignorée et charnelle, Fît hors d'elle l'aurore, ayant la nuit en elle ? Le hibou serait-il caché dans l'alcyon ? Qui dira le secret de la création ? Les germes, les aimants, les instincts, les effluves ! Qui peut connaître à fond toutes ces sombres cuves ? Est-ce que le Vésuve et l'Etna, les reflux Des forces s'épuisant en efforts superflus, Le vaste tremblement des feuilles remuées, Les ouragans, les fleurs, les torrents, les nuées, Ne peuvent pas finir par faire une vapeur. Qui se condense en femme et dont le sage a peur ? Tout fait Tout, et le même insondable cratère Crée à Thulé la lave et la rose à Cythère. Rien ne sort des volcans qui n'entre dans les coeurs. Les oiseaux dans les bois ont des rires moqueurs Et tristes, au-dessus de l'amoureux crédule. N'est-ce pas le serpent qui vaguement ondule Dans la souple beauté des vierges aux seins nus ? Les grands sages étaient d'immenses ingénus ; Ils ne connaissaient pas la forme de ce globe, Mais, pâles, ils sentaient traîner sur eux la robe De la sombre passante, Isis au voile noir ; Tout devient le soupçon quand Rien est le savoir ; Pour Lucrèce, le dieu, pour Job, le kéroubime Mentaient ; on soupçonnait de trahison l'abîme ; On croyait le chaos capable d'engendrer La femme, pour nous plaire et pour nous enivrer, Et pour faire monter jusqu'à nous sa fumée ; La Sicile, la Grèce étrange, l'Idumée, L'Iran, l'Egypte et l'Inde, étaient des lieux profonds ; Qui sait ce que les vents, les brumes, les typhons Peuvent apporter d'ombre à l'âme féminine ? Les tragiques forêts de la chaîne Apennine, La farouche fontaine épandue à longs flots Sous l'Olympe, à travers les pins et les bouleaux, L'antre de Béotie où dans l'ombre diffuse On sent on ne sait quoi qui s'offre et se refuse, Chypre et tous ses parfums, Delphe et tous ses rayons, Le lys que nous cueillons, l'azur que nous voyons, Tout cela, c'est auguste, et c'est peut-être infâme. Tout, à leurs yeux, était sphinx, et quand une femme Venait vers eux, parlant avec sa douce voix, Qui sait ? peut-être Hermès et Dédale, les bois, Les nuages, les eaux, l'effrayante Cybèle, Toute l'énigme était mêlée à cette belle. L'univers aboutit à ce monstre charmant. La ménade est déjà presque un commencement De la femme chimère, et d'antiques annales Disent qu'avril était le temps des bacchanales, Et que la liberté de ces fêtes s'accrut Des fauves impudeurs de la nature en rut ; La nature partout donne l'exemple énorme De l'accouplement sombre où l'âme étreint la forme ; La rose est une fille ; et ce qu'un papillon Fait à la plante, est fait au grain par le sillon. La végétation terrible est ignorée. L'horreur des bois unit Flore avec Briarée, Et marie une fleur avec l'arbre aux cent bras. Toi qui sous le talon d'Apollon te cabras, Ô cheval orageux du Pinde, tes narines Frémissaient quand passaient les nymphes vipérines, Et, sentant là de l'ombre hostile à ta clarté, Tu t'enfuyais devant la sinistre Astarté. Et Terpandre le vit, et Platon le raconte. La femme est une gloire et peut être une honte Pour l'ouvrier divin et suspect qui la fit. A tout le bien, à tout le mal, elle suffit. Haine, amour, fange, esprit, fièvre, elle participe Du gouffre, et la matière aveugle est son principe. Elle est le mois de mai fait chair, vivant, chantant. Qu'est-ce que le printemps ? une orgie. A l'instant, Où la femme naquit, est morte l'innocence. Les vieux songeurs ont vu la fleur qui nous encense Devenir femme à l'heure où l'astre éclôt au ciel, Et, pour Orphée ainsi que pour Ézéchiel, La nature n'étant qu'un vaste hymen, l'ébauche D'un être tentateur rit dans cette débauche ; C'est la femme. Elle est spectre et masque, et notre sort Est traversé par elle ; elle entre, flotte et sort. Que nous veut-elle ? A-t-elle un but ? Par quelle issue Cette apparition vaguement aperçue S'est-elle dérobée ? Est-ce un souffle de nuit Qui semble une âme errante et qui s'évanouit ? Les sombres hommes sont une forêt, et l'ombre Couvre leurs pas, leurs voix, leurs yeux, leur bruit, leur nombre ; Le genre humain, mêlé sous les hauts firmaments, Est plein de carrefours et d'entre-croisements, Et la femme est assez blanche pour qu'on la voie A travers cette morne et blême claire-voie. Cette vision passe ; et l'on reste effaré. Aux chênes de Dodone, aux cèdres de Membré, L'hiérophante ému comme le patriarche Regarde ce fantôme inquiétant qui marche. Non, rien ne nous dira ce que peut être au fond Cet être en qui Satan avec Dieu se confond : Elle résume l'ombre énorme en son essence. Les vieux payens croyaient à la toute puissance De l'abîme, du lit sans fond, de l'élément ; Ils épiaient la mer dans son enfantement ; Pour eux, ce qui sortait de la tempête immense, De toute l'onde en proie aux souffles en démence Et du vaste flot vert à jamais tourmenté, C'était le divin sphinx féminin, la Beauté, Toute nue, infernale et céleste, insondable, Ô gouffre ! et que peut-on voir de plus formidable, Sous les cieux les plus noirs et les plus inconnus, Que l'océan ayant pour écume Vénus ! Aucune aile ici-bas n'est pour longtemps posée. Quand elle était petite, elle avait un oiseau ; Elle le nourrissait de pain et de rosée, Et veillait sur son nid comme sur un berceau. Un soir il s'échappa. Que de plaintes amères ! Dans mes bras en pleurant je la vis accourir... Jeunes filles, laissez, laissez, ô jeunes mères, Les oiseaux s'envoler et les enfants mourir ! C'est une loi d'en haut qui veut que tout nous quitte. Le secret du Seigneur, nous le saurons un jour. Elle grandit. La vie, hélas ! marche si vite ! Elle eut un doux enfant, un bel ange, un amour. Une nuit, triste sort des choses éphémères ! Cet enfant s'éteignit, sans pleurer, sans souffrir... Jeunes filles, laissez, laissez, ô jeunes mères, Les oiseaux s'envoler et les enfants mourir ! Le 22 juin 1842.

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    Victor Hugo

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    @victorHugo

    La fête chez Thérèse La chose fut exquise et fort bien ordonnée. C'était au mois d'avril, et dans une journée Si douce, qu'on eût dit qu'amour l'eût faite exprès. Thérèse la duchesse à qui je donnerais, Si j'étais roi, Paris, si j'étais Dieu, le monde, Quand elle ne serait que Thérèse la blonde ; Cette belle Thérèse, aux yeux de diamant, Nous avait conviés dans son jardin charmant. On était peu nombreux. Le choix faisait la fête. Nous étions tous ensemble et chacun tête à tête. Des couples pas à pas erraient de tous côtés. C'étaient les fiers seigneurs et les rares beautés, Les Amyntas rêvant auprès des Léonores, Les marquises riant avec les monsignores ; Et l'on voyait rôder dans les grands escaliers Un nain qui dérobait leur bourse aux cavaliers. A midi, le spectacle avec la mélodie. Pourquoi jouer Plautus la nuit ? La comédie Est une belle fille, et rit mieux au grand jour. Or, on avait bâti, comme un temple d'amour, Près d'un bassin dans l'ombre habité par un cygne, Un théâtre en treillage où grimpait une vigne. Un cintre à claire-voie en anse de panier, Cage verte où sifflait un bouvreuil prisonnier, Couvrait toute la scène, et, sur leurs gorges blanches, Les actrices sentaient errer l'ombre des branches. On entendait au loin de magiques accords ; Et, tout en haut, sortant de la frise à mi-corps, Pour attirer la foule aux lazzis qu'il répète, Le blanc Pulcinella sonnait de la trompette. Deux faunes soutenaient le manteau d'Arlequin ; Trivelin leur riait au nez comme un faquin. Parmi les ornements sculptés dans le treillage, Colombine dormait dans un gros coquillage, Et, quand elle montrait son sein et ses bras nus, On eût cru voir la conque, et l'on eût dit Vénus. Le seigneur Pantalon, dans une niche, à droite, Vendait des limons doux sur une table étroite, Et criait par instants : " Seigneurs, l'homme est divin. — Dieu n'avait fait que l'eau, mais l'homme a fait le vin. " Scaramouche en un coin harcelait de sa batte Le tragique Alcantor, suivi du triste Arbate ; Crispin, vêtu de noir, jouait de l'éventail ; Perché, jambe pendante, au sommet du portail, Carlino se penchait, écoutant les aubades, Et son pied ébauchait de rêveuses gambades.

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    Victor Hugo

    Victor Hugo

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    Le doigt de la femme Dieu prit sa plus molle argile Et son plus pur kaolin, Et fit un bijou fragile, Mystérieux et câlin. Il fit le doigt de la femme, Chef-d’œuvre auguste et charmant, Ce doigt fait pour toucher l’âme Et montrer le firmament. Il mit dans ce doigt le reste De la lueur qu’il venait D’employer au front céleste De l’heure où l’aurore naît. Il y mit l’ombre du voile, Le tremblement du berceau, Quelque chose de l’étoile, Quelque chose de l’oiseau. Le Père qui nous engendre Fit ce doigt mêlé d’azur, Très fort pour qu’il restât tendre, Très blanc pour qu’il restât pur, Et très doux, afin qu’en somme Jamais le mal n’en sortît, Et qu’il pût sembler à l’homme Le doigt de Dieu, plus petit. Il en orna la main d’Ève, Cette frêle et chaste main Qui se pose comme un rêve Sur le front du genre humain. Cette humble main ignorante, Guide de l’homme incertain, Qu’on voit trembler, transparente, Sur la lampe du destin. Oh ! dans ton apothéose, Femme, ange aux regards baissés, La beauté, c’est peu de chose, La grâce n’est pas assez ; Il faut aimer. Tout soupire, L’onde, la fleur, l’alcyon ; La grâce n’est qu’un sourire, La beauté n’est qu’un rayon ; Dieu, qui veut qu’Ève se dresse Sur notre rude chemin, Fit pour l’amour la caresse, Pour la caresse ta main. Dieu, lorsque ce doigt qu’on aime Sur l’argile fut conquis, S’applaudit, car le suprême Est fier de créer l’exquis. Ayant fait ce doigt sublime, Dieu dit aux anges : Voilà ! Puis s’endormit dans l’abîme ; Le diable alors s’éveilla. Dans l’ombre où Dieu se repose, Il vint, noir sur l’orient, Et tout au bout du doigt rose Mit un ongle en souriant.

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    Les femmes sont sur la terre Les femmes sont sur la terre Pour tout idéaliser ; L'univers est un mystère Que commente leur baiser. C'est l'amour qui, pour ceinture, A l'onde et le firmament, Et dont toute la nature, N'est, au fond, que l'ornement. Tout ce qui brille, offre à l'âme Son parfum ou sa couleur ; Si Dieu n'avait fait la femme, Il n'aurait pas fait la fleur. A quoi bon vos étincelles, Bleus saphirs, sans les yeux doux ? Les diamants, sans les belles, Ne sont plus que des cailloux ; Et, dans les charmilles vertes, Les roses dorment debout, Et sont des bouches ouvertes Pour ne rien dire du tout. Tout objet qui charme ou rêve Tient des femmes sa clarté ; La perle blanche, sans Eve, Sans toi, ma fière beauté, Ressemblant, tout enlaidie, A mon amour qui te fuit, N'est plus que la maladie D'une bête dans la nuit. Paris, avril 18...

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    Oh ! n'insultez jamais une femme qui tombe Oh ! n'insultez jamais une femme qui tombe ! Qui sait sous quel fardeau la pauvre âme succombe ! Qui sait combien de jours sa faim a combattu ! Quand le vent du malheur ébranlait leur vertu, Qui de nous n'a pas vu de ces femmes brisées S'y cramponner longtemps de leurs mains épuisées ! Comme au bout d'une branche on voit étinceler Une goutte de pluie où le ciel vient briller, Qu'on secoue avec l'arbre et qui tremble et qui lutte, Perle avant de tomber et fange après sa chute ! La faute en est à nous ; à toi, riche ! à ton or ! Cette fange d'ailleurs contient l'eau pure encor. Pour que la goutte d'eau sorte de la poussière, Et redevienne perle en sa splendeur première, Il suffit, c'est ainsi que tout remonte au jour, D'un rayon de soleil ou d'un rayon d'amour ! Le 6 septembre 1835.

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    Pepita Comme elle avait la résille, D’abord la rime hésita. Ce devait être Inésille… – Mais non, c’était Pepita. Seize ans. Belle et grande fille… – (Ici la rime insista : Rimeur, c’était Inésille. Rime, c’était Pepita.) Pepita… – Je me rappelle ! Oh ! le doux passé vainqueur, Tout le passé, pêle-mêle Revient à flots dans mon coeur ; Mer, ton flux roule et rapporte Les varechs et les galets. Mon père avait une escorte ; Nous habitions un palais ; Dans cette Espagne que j’aime, Au point du jour, au printemps, Quand je n’existais pas même, Pepita – j’avais huit ans – Me disait : – Fils, je me nomme Pepa ; mon père est marquis. – Moi, je me croyais un homme, Etant en pays conquis. Dans sa résille de soie Pepa mettait des doublons ; De la flamme et de la joie Sortaient de ses cheveux blonds. Tout cela, jupe de moire, Veste de toréador, Velours bleu, dentelle noire, Dansait dans un rayon d’or. Et c’était presque une femme Que Pepita mes amours. L’indolente avait mon âme Sous son coude de velours. Je palpitais dans sa chambre Comme un nid près du faucon, Elle avait un collier d’ambre, Un rosier sur son balcon. Tous les jours un vieux qui pleure Venait demander un sou ; Un dragon à la même heure Arrivait je ne sais d’où. Il piaffait sous la croisée, Tandis que le vieux râlait De sa vieille voix brisée : La charité, s’il vous plaît ! Et la belle au collier jaune, Se penchant sur son rosier, Faisait au pauvre l’aumône Pour la faire à l’officier. L’un plus fier, l’autre moins sombre, Ils partaient, le vieux hagard Emportant un sou dans l’ombre, Et le dragon un regard. J’étais près de la fenêtre, Tremblant, trop petit pour voir, Amoureux sans m’y connaître, Et bête sans le savoir. Elle disait avec charme : Marions-nous ! choisissant Pour amoureux le gendarme Et pour mari l’innocent. Je disais quelque sottise ; Pepa répondait : Plus bas ! M’éteignant comme on attise ; Et, pendant ces doux ébats, Les soldats buvaient des pintes Et jouaient au domino Dans les grandes chambres peintes Du palais Masserano.

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    Sara la baigneuse Sara, belle d’indolence, Se balance Dans un hamac, au-dessus Du bassin d’une fontaine Toute pleine D’eau puisée à l’Ilyssus ; Et la frêle escarpolette Se reflète Dans le transparent miroir, Avec la baigneuse blanche Qui se penche, Qui se penche pour se voir. Chaque fois que la nacelle, Qui chancelle, Passe à fleur d’eau dans son vol, On voit sur l’eau qui s’agite Sortir vite Son beau pied et son beau col. Elle bat d’un pied timide L’onde humide Où tremble un mouvant tableau, Fait rougir son pied d’albâtre, Et, folâtre, Rit de la fraîcheur de l’eau. Reste ici caché : demeure ! Dans une heure, D’un oeil ardent tu verras Sortir du bain l’ingénue, Toute nue, Croisant ses mains sur ses bras. Car c’est un astre qui brille Qu’une fille Qui sort d’un bain au flot clair, Cherche s’il ne vient personne, Et frissonne, Toute mouillée au grand air. Elle est là, sous la feuillée, Eveillée Au moindre bruit de malheur ; Et rouge, pour une mouche Qui la touche, Comme une grenade en fleur. On voit tout ce que dérobe Voile ou robe ; Dans ses yeux d’azur en feu, Son regard que rien ne voile Est l’étoile Qui brille au fond d’un ciel bleu. L’eau sur son corps qu’elle essuie Roule en pluie, Comme sur un peuplier ; Comme si, gouttes à gouttes, Tombaient toutes Les perles de son collier. Mais Sara la nonchalante Est bien lente A finir ses doux ébats ; Toujours elle se balance En silence, Et va murmurant tout bas :  » Oh ! si j’étais capitane,  » Ou sultane,  » Je prendrais des bains ambrés,  » Dans un bain de marbre jaune,  » Prés d’un trône,  » Entre deux griffons dorés !  » J’aurais le hamac de soie  » Qui se ploie  » Sous le corps prêt à pâmer ;  » J’aurais la molle ottomane  » Dont émane  » Un parfum qui fait aimer.  » Je pourrais folâtrer nue,  » Sous la nue,  » Dans le ruisseau du jardin,  » Sans craindre de voir dans l’ombre  » Du bois sombre  » Deux yeux s’allumer soudain.  » Il faudrait risquer sa tète  » Inquiète,  » Et tout braver pour me voir,  » Le sabre nu de l’heiduque,  » Et l’eunuque  » Aux dents blanches, au front noir !  » Puis, je pourrais, sans qu’on presse  » Ma paresse,  » Laissez avec mes habits  » Traîner sur les larges dalles  » Mes sandales  » De drap brodé de rubis. «  Ainsi se parle en princesse, Et sans cesse Se balance avec amour, La jeune fille rieuse, Oublieuse Des promptes ailes du jour. L’eau, du pied de la baigneuse Peu soigneuse, Rejaillit sur le gazon, Sur sa chemise plissée, Balancée Aux branches d’un vert buisson. Et cependant des campagnes Ses compagnes Prennent toutes le chemin. Voici leur troupe frivole Qui s’envole En se tenant par la main. Chacune, en chantant comme elle, Passe, et mêle Ce reproche à sa chanson : – Oh ! la paresseuse fille Qui s’habille Si tard un jour de moisson !

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    Une femme m'a dit ceci Une femme m'a dit ceci : - J'ai pris la fuite. Ma fille que j'avais au sein, toute petite, Criait, et j'avais peur qu'on n'entendît sa voix. Figurez-vous, c'était un enfant de deux mois ; Elle n'avait pas plus de force qu'une mouche. Mes baisers essayaient de lui fermer la bouche, Elle criait toujours ; hélas ! elle râlait. Elle voulait téter, je n'avais plus de lait. Toute une nuit s'était de la sorte écoulée. Je me cachais derrière une porte d'allée, Je pleurais, je voyais les chassepots briller. On cherchait mon mari qu'on voulait fusiller. Tout à coup, le matin, sous cette horrible porte, L'enfant ne cria plus. Monsieur, elle était morte. Je la touchai ; monsieur, elle était froide. Alors, Cela m'était égal qu'on me tuât ; dehors, Au hasard, j'emportai ma fille, j'étais folle, J'ai couru, des passants m'adressaient la parole, Mais je me suis enfuie, et, je ne sais plus où, J'ai creusé de mes mains dans la campagne un trou, Au pied d'un arbre, au coin d'un enclos solitaire ; Et j'ai couché mon ange endormi dans la terre ; L'enfant qu'on allaita, c'est dur de l'enterrer. Et le père était là qui se mit à pleurer.

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    À l'homme qui a livré une femme Ô honte ! ce n'est pas seulement cette femme, Sacrée alors pour tous, faible cœur, mais grande âme, Mais c'est lui, c'est son nom dans l'avenir maudit, Ce sont les cheveux blancs de son père interdit, C'est la pudeur publique en face regardée Tandis qu'il s'accouplait à son infâme idée, C'est l'honneur, c'est la foi, la pitié, le serment, Voilà ce que ce juif a vendu lâchement ! Juif : les impurs traitants à qui l'on vend son âme Attendront bien longtemps avant qu'un plus infâme Vienne réclamer d'eux, dans quelque jour d'effroi, Le fond du sac plein d'or qu'on fit vomir sur toi ! Ce n'est pas même un juif ! C'est un payen immonde, Un renégat, l'opprobre et le rebut du monde, Un fétide apostat, un oblique étranger Qui nous donne du moins le bonheur de songer Qu'après tant de revers et de guerres civiles Il n'est pas un bandit écumé dans nos villes, Pas un forçat hideux blanchi dans les prisons, Qui veuille mordre en France au pain des trahisons ! Rien ne te disait donc dans l'âme, ô misérable ! Que la proscription est toujours vénérable, Qu'on ne bat pas le sein qui nous donna son lait, Qu'une fille des rois dont on fut le valet Ne se met point en vente au fond d'un antre infâme, Et que, n'étant plus reine, elle était encor femme ! Rentre dans l'ombre où sont tous les monstres flétris Qui depuis quarante ans bavent sur nos débris ! Rentre dans ce cloaque ! et que jamais ta tête, Dans un jour de malheur ou dans un jour de fête, Ne songe à reparaître au soleil des vivants ! Qu'ainsi qu'une fumée abandonnée aux vents, Infecte, et don chacun se détourne au passage, Ta vie erre au hasard de rivage en rivage ! Et tais-toi ! que veux-tu balbutier encor ! Dis, n'as-tu pas vendu l'honneur, le vrai trésor ? Garde tous les soufflets entassés sur ta joue. Que fait l'excuse au crime et le fard sur la boue ! Sans qu'un ami t'abrite à l'ombre de son toit, Marche, autre juif errant ! marche avec l'or qu'on voit Luire à travers les doigts de tes mains mal fermées ! Tous les biens de ce monde en grappes parfumées Pendent sur ton chemin, car le riche ici-bas A tout, hormis l'honneur qui ne s'achète pas ! Hâte-toi de jouir, maudit ! et sans relâche Marche ! et qu'en te voyant on dise : C'est ce lâche ! Marche ! et que le remords soit ton seul compagnon ! Marche ! sans rien pouvoir arracher de ton nom ! Car le mépris public, ombre de la bassesse, Croît d'année en année et repousse sans cesse, Et va s'épaississant sur les traîtres pervers Comme la feuille au front des sapins toujours verts ! Et quand la tombe un jour, cette embûche profonde Qui s'ouvre tout à coup sous les choses du monde, Te fera, d'épouvante et d'horreur agité, Passer de cette vie à la réalité, La réalité sombre, éternelle, immobile ! Quand, d'instant en instant plus seul et plus débile, Tu te cramponneras en vain à ton trésor ; Quand la mort, t'accostant couché sur des tas d'or, Videra brusquement ta main crispée et pleine Comme une main d'enfant qu'un homme ouvre sans peine, Alors, dans cet abîme où tout traître descend, L'un roulé dans la fange et l'autre teint de sang, Tu tomberas damné, désespéré, banni ! Afin que ton forfait ne soit pas impuni, Et que ton âme, errante au milieu de ces âmes, Y soit la plus abjecte entre les plus infâmes ! Et lorsqu'ils te verront paraître au milieu d'eux, Ces fourbes dont l'histoire inscrit les noms hideux, Que l'or tenta jadis, mais à qui d'âge en âge Chaque peuple en passant vient cracher au visage, Tous ceux, les plus obscurs comme les plus fameux, Qui portent sur leur lèvre un baiser venimeux, Judas qui vend son Dieu, Leclerc qui vend sa ville, Groupe au louche regard, engeance ingrate et vile, Tous en foule accourront joyeux sur ton chemin, Et Louvel indigné repoussera ta main ! Novembre 1832.

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    Victor Hugo

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    À une jeune femme Voyez-vous, un parfum éveille la pensée. Repliez, belle enfant par l'aube caressée, Cet éventail ailé, pourpre, or et vermillon, Qui tremble dans vos mains comme un grand papillon, Et puis écoutez-moi. – Dieu fait l'odeur des roses Comme il fait un abîme, avec autant de choses. Celui-ci, qui se meurt sur votre sein charmant, N'aurait pas ce parfum qui monte doucement Comme un encens divin vers votre beauté pure, Si sa tige, parmi l'eau, l'air et la verdure, Dans la création prenant sa part de tout, N'avait profondément plongé par quelque bout, Pauvre et fragile fleur pour tous les vents béante, Au sein mystérieux de la terre géante. Là, par un lent travail que Dieu lui seul connaît, Fraîcheur du flot qui court, blancheur du jour qui naît, Souffle de ce qui coule, ou végète, ou se traîne, L'esprit de ce qui vit dans la nuit souterraine, Fumée, onde, vapeur, de loin comme de près, – Non sans faire avec tout des échanges secrets, – Elle a dérobé tout, son calme à l'antre sombre, Au diamant sa flamme, à la forêt son ombre, Et peut-être, qui sait ? sur l'aile du matin Quelque ineffable haleine à l'océan lointain ! Et vivant alambic que Dieu lui-même forme, Où filtre et se répand la terre, vase énorme, Avec les bois, les champs, les nuages, les eaux, Et l'air tout pénétré des chansons des oiseaux, La racine, humble, obscure, au travail résignée, Pour la superbe fleur par le soleil baignée, A, sans en rien garder, fait ce parfum si doux, Qui vient si mollement de la nature à vous, Qui vous charme, et se mêle à votre esprit, madame, Car l'âme d'une fleur parle au cœur d'une femme. Encore un mot, et puis je vous laisse rêver. Pour qu'atteignant au but où tout doit s'élever, Chaque chose ici-bas prenne un attrait suprême, Pour que la fleur embaume et pour que la vierge aime, Pour que, puisant la vie au grand centre commun, La corolle ait une âme et la femme un parfum, Sous le soleil qui luit, sous l'amour qui fascine, Il faut, fleur de beauté, tenir par la racine, L'une au monde idéal, l'autre au monde réel, Les roses à la terre et les femmes au ciel. Le 16 mai 1837.

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    Victor Hugo

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    Ô femmes ! chastetés augustes Ô femmes ! chastetés augustes ! fiertés saintes ! Pudeur, crainte sacrée entre toutes les craintes ! Farouche austérité du front pensif et doux ! Ô vous à qui je veux ne parler qu'à genoux, Dont la forme est si noble en notre chaos sombre, Qu'on ne se souvient plus, en la voyant dans l'ombre, De rien que de divin et de mystérieux, Sorte d'oubli tombé sur la terre des cieux, Etres charmants créés pour la plus haute sphère ; Ô femmes, parmi nous que venez-vous donc faire ? Alors questionnant l'inconnu, l'inouï, Aux voix qui disent non tâchant d'arracher oui J'écoute, et je regarde, et, plein de rêveries, Je vais au Luxembourg, je vais aux Tuileries, Parlant à tout ce qui va, vient, passe, et cherchant La réponse à ce cri vague et pur comme un chant ; Et toujours, et partout, et de toutes les femmes, De celles-ci, les coeurs, de celles-là, les âmes, Du brun regard, de l'oeil voilé de blonds cheveux, Sort un sourire immense aux enfants, ces aveux. Le 17 novembre 1879.

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    Vincent Voiture

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    Des portes du matin l'Amante de Céphale Des portes du matin l'Amante de Céphale, Ses roses épandait dans le milieu des airs, Et jetait sur les cieux nouvellement ouverts Ces traits d'or et d'azur qu'en naissant elle étale,

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    Voltaire

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    A Mme du Châtelet L'un des plus beaux poèmes de Voltaire, À Mme du Châtelet, est un texte d'amour qu'il a écrit pour Émilie du Châtelet. Ils se rencontrent en 1733 et elle fût pendant quinze ans sa maitresse et sa muse. Ce poème est composé de neuf quatrains en octosyllabes avec des rimes embrassées et croisées. Si vous voulez que j’aime encore, Rendez-moi l’âge des amours ; Au crépuscule de mes jours Rejoignez, s’il se peut, l’aurore. Des beaux lieux où le dieu du vin Avec l’Amour tient son empire, Le Temps, qui me prend par la main, M’avertit que je me retire. De son inflexible rigueur Tirons au moins quelque avantage. Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur. Laissons à la belle jeunesse Ses folâtres emportements. Nous ne vivons que deux moments : Qu’il en soit un pour la sagesse. Quoi ! pour toujours vous me fuyez, Tendresse, illusion, folie, Dons du ciel, qui me consoliez Des amertumes de la vie !

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    Voltaire

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    Le portrait manqué A Madame de B*** On ne peut faire ton portrait : Folâtre et sérieuse, agaçante et sévère, Prudente avec l’air indiscret, Vertueuse, coquette, à toi-même contraire, La ressemblance échappe en rendant chaque trait. Si l’on te peint constante, on t’aperçoit légère : Ce n’est jamais toi qu’on a fait. Fidèle au sentiment avec des goûts volages, Tous les cœurs à ton char s’enchaînent tour à tour : Tu plais aux libertins, tu captives les sages, Tu domptes les plus fiers courages, Tu fais l’office de l’Amour. On croit voir cet enfant en te voyant paraître ; Sa jeunesse, ses traits, son art, Ses plaisirs, ses erreurs, sa malice peut-être : Serais-tu ce dieu, par hasard ?

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    Voltaire

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    @voltaire

    Les vous et les tu Philis, qu’est devenu ce temps Où, dans un fiacre promenée, Sans laquais, sans ajustements, De tes grâces seules ornée, Contente d’un mauvais soupé Que tu changeais en ambroisie, Tu te livrais, dans ta folie, A l’amant heureux et trompé Qui t’avait consacré sa vie ? Le ciel ne te donnait alors, Pour tout rang et pour tous trésors, Que les agréments de ton âge, Un coeur tendre, un esprit volage, Un sein d’albâtre, et de beaux yeux. Avec tant d’attraits précieux, Hélas ! qui n’eût été friponne ? Tu le fus, objet gracieux ! Et (que l’Amour me le pardonne !) Tu sais que je t’en aimais mieux. Ah ! madame ! que votre vie D’honneurs aujourd’hui si remplie, Diffère de ces doux instants ! Ce large suisse à cheveux blancs, Qui ment sans cesse à votre porte, Philis, est l’image du Temps ; On dirait qu’il chasse l’escorte Des tendres Amours et des Ris ; Sous vos magnifiques lambris Ces enfants tremblent de paraître. Hélas ! je les ai vus jadis Entrer chez toi par la fenêtre, Et se jouer dans ton taudis. Non, madame, tous ces tapis Qu’a tissus la Savonnerie, Ceux que les Persans ont ourdis, Et toute votre orfèvrerie, Et ces plats si chers que Germain A gravés de sa main divine, Et ces cabinets où Martin A surpassé l’art de la Chine ; Vos vases japonais et blancs, Toutes ces fragiles merveilles ; Ces deux lustres de diamants Qui pendent à vos deux oreilles ; Ces riches carcans, ces colliers, Et cette pompe enchanteresse, Ne valent pas un des baisers Que tu donnais dans ta jeunesse.

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    Voltaire

    Voltaire

    @voltaire

    À Madame de Fontaine-Martel Ô très singulière Martel, J’ai pour vous estime profonde ; C’est dans votre petit hôtel, C’est sur vos soupers que je fonde Mon plaisir, le seul bien réel Qu’un honnête homme ait en ce monde. Il est vrai qu’un peu je vous gronde ; Mais, malgré cette liberté, Mon cœur vous trouve, en vérité, Femme à peu de femmes seconde ; Car sous vos cornettes de nuit, Sans préjugés et sans faiblesse, Vous logez esprit qui séduit, Et qui tient fort à la sagesse. Or votre sagesse n’est pas Cette pointilleuse harpie Qui raisonne sur tous les cas, Et qui, triste sœur de l’Envie, Ouvrant un gosier édenté, Contre la tendre volupté Toujours prêche, argumente et crie Mais celle qui si doucement, Sans efforts et sans industrie, Se bornant toute au sentiment, Sait jusqu’au dernier moment Répandre un charme sur la vie. Voyez-vous pas de tous côtés De très décrépites beautés, Pleurant de n’être plus aimables, Dans leur besoin de passion Ne pouvant rester raisonnables, S’affolier de dévotion, Et rechercher l’ambition D’être bégueules respectables ? Bien loin de cette triste erreur, Vous avez, au lieu de vigiles, Des soupers longs, gais et tranquilles ; Des vers aimables et faciles, Au lieu des fatras inutiles De Quesnel et de le Tourneur ; Voltaire, au lieu d’un directeur ; Et, pour mieux chasser toute angoisse, Au curé préférant Campra, Vous avez loge à l’opéra Au lieu de banc dans la paroisse : Et ce qui rend mon sort plus doux, C’est que ma maîtresse, chez vous, La liberté, se voit logée ; Cette liberté mitigée, À l’œil ouvert, au front serein, À la démarche dégagée, N’étant ni prude, ni catin, Décente, et jamais arrangée ; Souriant d’un souris badin À ces paroles chatouilleuses Qui font baisser un œil malin À mesdames les précieuses. C’est là qu’on trouve la gaîté, Cette sœur de la liberté, Jamais aigre dans la satire, Toujours vive dans les bons mots, Se moquant quelquefois des sots, Et très souvent, mais à propos, Permettant au sage de rire. Que le ciel bénisse le cours D’un sort aussi doux que le vôtre ! Martel, l’automne de vos jours Vaut mieux que le printemps d’une autre.

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    Voltaire

    Voltaire

    @voltaire

    A Mademoiselle de guise Vous possédez fort inutilement Esprit, beauté, grâce, vertu, franchise ; Qu’y manque-t-il ? quelqu’un qui vous le dise Et quelque ami dont on en dise autant.

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    Walt Whitman

    Walt Whitman

    @waltWhitman

    Une femme m’attend Une femme m’attend, elle contient tout, rien n’y manque; Mais tout manquerait, si le sexe n’y était pas, et si pas la sève de l’homme qu’il faut. Le sexe contient tout, Corps, âmes, Idées, preuves, puretés, délicatesses, fins, diffusions, Chants, commandements, santé, orgueil, le mystère de la maternité, le lait séminal, Tous espoirs, bienfaisances, dispensations, Toutes passions, amours, beautés, délices de la terre, Tous gouvernements, juges, dieux, conducteurs de la terre, C’est dans le sexe, comme autant de facultés du sexe, et toutes ses raisons d’être. Sans douté, l’homme, tel que je l’aime, sait et avoue les délices de son sexe, Sans doute, la femme, telle que je l’aime, sait et avoue les délices du sien. Ainsi, je n’ai que faire des femmes insensibles, Je veux aller avec celle qui m’attend, avec ces femmes qui ont le sang chaud et peuvent me faire face, Je vois qu’elles me comprennent et ne se détournent pas. Je vois qu’elles sont dignes de moi. C’est de ces femmes que je veux être le solide époux. Elles ne sont pas moins que moi, en rien; Elles ont la face tannée par les soleils radieux et les vents qui passent, Leur chair a la vieille souplesse divine, le bon vieux ressort divin; Elles savent nager, ramer, monter à cheval, lutter, chasser, courir, frapper, fuir et attaquer, résister, se défendre. Elles sont extrêmes dans leur légitimité, – elles sont calmes, limpides, en parfaite possession d’elles-mêmes. Je t’attire à moi, femme. Je ne puis te laisser passer, je voudrais te faire un bien; Je suis pour toi et tu es pour moi, non seulement pour l’amour de nous, mais pour l’amour d’autres encore, En toi dorment de plus grands héros, de plus grands bardes. Et ils refusent d’être éveillés par un autre homme que moi. C’est moi, femme, je vois mon chemin; Je suis austère, âpre, immense, inébranlable, mais je t’aime; Allons, je ne te blesse pas plus qu’il ne te faut, Je verse l’essence qui engendrera des garçons et des filles dignes de ces Etats-Unis; j’y vais d’un muscle rude et attentionné, Et je m’enlace bien efficacement, et je n’écoute nulles supplications, Et je ne puis me retirer avant d’avoir déposé ce qui s’est accumulé si longuement en moi. A travers toi je lâche les fleuves endigués de mon être, En toi je dépose un millier d’ans en avant, Sur toi je greffe le plus cher de moi et de l’Amérique, Les gouttes que je distille en toi grandiront en chaudes et puissantes filles, en artistes de demain, musiciens, bardes; Les enfants que j’engendre en toi engendreront à leur tour, Je demande que des hommes parfaits, des femmes parfaites sortent de mes frais amoureux; Je les attends, qu’ils s’accouplent un jour avec d’autres, comme nous accouplons à cette heure, Je compte sur les fruits de leurs arrosements jaillissants, comme je compte sur les fruits des arrosements jaillissants que je donne en cette heure. Et je surveillerai les moissons d’amour, naissance, vie, mort, immortalité, que je sème en cette heure, si amoureusement.

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