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Titre : Eurydice

Auteur : Christian Mégrelis

Orphée est allé chercher Eurydice à l’entrée du royaume des morts, ils sont restés suspendus au- dessus de l’abîme plus d’un an, main dans la main, avant d’y retourner ensemble. Quand je suis éveillé je ne pense qu’à toi, Et nos mains se rejoignent. Et quand je dors enfin, je ne rêve qu’à toi Et ma douleur s’éloigne. Longtemps, Chérie, nous nous sommes aimés, Ou plutôt, oui, toujours. Mais nous avions le temps de gravir les sommets Où se nichaient nos amours. Et tout à coup le temps fut maître de nos sorts Le pire nous menaçait Nous n’avions préparé ni nos cœurs ni nos corps Il fallait nous presser. Lorsque la main du temps s’est posée sur ton front Nos mains ne se sont plus quittées. Mains jointes, nous croyions que nous arriverions A défier l’adversité. Le temps nous assiégeait, silencieux et tueur Nous nous sommes battus. L’espérance a toujours conduit notre bonheur, Et nous étions têtus. Et cette année de mort fut une année d’amour Héroïque et brutale, Où l’espoir et la peur alternaient chaque jour Sur nos fronts si pâles. Ensemble nous avons déplacé des montagnes Et ouvert des chemins, Pour que, l’ennui gagnant, la mort enfin regagne Son empire souterrain. Cette année de serments, de mots et de tristesses Le temps nous l’a a donnée ! Ce temps pourtant qui n’a pas de tendresse, Pour nous laisser aimer Mains serrées, dans tes yeux fiévreux j’ai reconnu L’infini de l’amour, Cette force d’aimer que la vie n’a jamais retenue, Qui a nourri nos jours. Ta douleur, ô chérie, a déchiré ma vie, Confisquant l’espérance. Et je souffre encore de ne pas aujourd’hui Partager ta souffrance Mais je sais que viendra bientôt ce temps béni, Qui ne nous sera pas volé, Où côte à côte, nous retrouverons l’infini De ce bonheur passé. Alors nous vieillirons sans jamais le savoir Et le temps aboli Transmuté en amour, remplacera l’espoir Des amants infinis.