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Titre : Les saisons

Auteur : Gaston Couté

Printemps Le printemps va bientôt naître. Les hirondelles Pour que l’azur s’en vienne égayer son berceau Fendent le crêpe du brouillard à grands coups Prestes et nets ainsi que des coups de ciseaux. Des rustres stupides et des corbeaux voraces Qui s’engraissaient parmi les horreurs de l’hiver En voyant les oiseaux d’espoir traverser l’air Se liguent aussitôt pour leur donner la chasse. Les hirondelles agonisent en des cages, Leur aile saigne sous la serre des corbeaux, Mais parmi l’azur qui crève enfin les nuages Voici l’Avril ! Voici le printemps jeune et beau. O gouvernants bourgeois à la poigne cruelle Emprisonnez les gens, faites en des martyrs, Tuez si ça vous plaît toutes les hirondelles, Vous n’empêcherez pas le printemps de venir. Eté Pour emblaver ces champs, quelques sas ont suffi Ils n’ont jeté que quelques poignées de semence Mais le miracle blond de l’Eté s’accomplit Cent faucheurs sont penchés sur la moisson immense. De chaque grain tombé dans la nuit du sillon Un bel épi s’est élancé vers la lumière Et nul ne peut, sous le vol bleu des faucillons Compter tous les épis de la récolte entière. O vous, plus isolés encor que les semeurs Qui sont passés dans la plaine au temps des emblaves, En la nuit des cerveaux et l’intensité des cœurs Jetez votre bon grain sur Je champ des Esclaves. Fiers semeurs de l’Ida, jetez votre bon grain. il dormira comme le blé dort dans la terre. Mais innombrable, aux beaux jours de l’Eté prochain, Votre moisson resplendira dans la lumière1 Automne Comme un monde qui meurt écrasé sous son Or, La Forêt automnale en son faste agonise Et ses feuilles, comme les pièces d’un trésor, S’amoncellent sous le râteau fou de la bise. Parmi la langueur des sous-bois, on sent flotter La même odeur de lente mort et de luxure Qui vous accable au cœur des trop riches cités : Tout l’Or de la Forêt s’exhale en pourriture ! Mais nous savons que de l’amas de ce fumier Doit fleurir, en l’élan de la sève prochaine, La gaieté des coucous, la grâce des aubiers, La douceur de la mousse et la beauté des chênes. Notre Société ressemble à la Forêt, Nous sommes en Novembre, et l’Automne est en elle. O fumier d’aujourd’hui ! plus ton lit est épais Plus l’Avril sera vert dans la Forêt nouvelle ! Hiver Tristes, mornes, muets, voûtés comme une échine De malheureux tâcherons , les vieux monts ont l’air D’un peuple d’ouvriers sur un chemin d’usine, Et leur long défilé semble entrer dans l’hiver. En un effeuillement lent de pétales sombres La neige tombe comme tombe la Douleur Et la Misère sur le dos des travailleurs. La neige tombe sur les monts. La neige tombe. Emprisonnant leur flanc, écrasant leur sommet, Sous un suaire dont la froideur s’accumule Encor ! Toujours ! plus fort ! la neige tombe. Mais Au simple bruit d’un pas heurtant le crépuscule, Les vieux monts impassibles travaillent soudain Et leur révolte gronde en avalanche blanche Qui renverse et qui brise tout sur son chemin… Sur notre monde un jour, quelle horrible avalanche !