Titre : Le dîner de Vénus a Port-La-Galère
Auteur : Michel Deguy
A Vénus Khoury-Ghata
Vénus, aux tard venus
Ton bijou pendait sous les palmes d'août
La systole rouge de
Régulus entre les pieds du
Lion
Donnait le pouls de l'horizon
Véga cloutait le zénith bleu
Tu cherchais la polaire en vain
La chaise cassée de
Cassiopée tu
La rangeas en paix où je te dis sur les terrasses
Et je sortis de ton coffret
Comme l'assistant du prestidigitateur
La
Couronne et
Déneb la triangulaire
Ton cœur de salade fila dans ma bouche
J'ai lu pour toi encore
Arcturus et les
Ourses
Avec des rimes et cette ligne mieux venue
J'aurais pu faire ton sonnet,
Vénus
Tout
Polyphonix échoua down town
aux portes de la veuve de
Max
Ernst
«
The party is over »
Il fallait remonter
Mais à
New
York
Gherassim
Luca perdait l'orie:
Nous prîmes un express tardif et ressortâmes
où il ne fallait pas, e et
Fifth, à peu près
«
On the dark side you are » dit le taxi portoricain
A deux heures un dernier bar open on
Amsterdam
mais rien que du bourbon et des nuts
Et à trois heures
Gherassim ne savait toujours pas
de quel collège de
Columbia il était l'hôte
J'ai un portrait de lui polaroïd contre la grille du
Réservoir un large chapeau noir éclaire son sourire souriant
J'écris avec un crayon rouge de la
Bodleian
Library
Acheté en même temps que la carte postale
Aussitôt envoyée à
Jacques
Derrida
Avec
Jacques
Roubaud rios voyages ne sont pas finis
De
Nashville à
La
Nouvelle-Orléans il a le détail dans son carnet
T.W.
Bundy nous montra des factures de
Baudelaire
La barge à touristes fit
circuler le
Mississippi
A
Cambridge nous avons lu
John
Montague posait sa fiole sur la table
A
Barcelone le sereno d'hôtel
intervertit nos passeports
et nous avons quitté l'Espagne léthargiquement
chacun sous l'identité de l'autre
C'est
Jacques qui s'en est aperçu
Repartant pour
Oslo
il me téléphone
Il en rit volontiers et me dit
L'an prochain
Il faudrait que tu viennes à
Oslo