splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi

Lieux

190 poésies en cours de vérification
Lieux

Poésies de la collection lieux

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Les temps nouveaux Amis, j’ai de bonnes nouvelles pour vous : les choses s’améliorent. Les Cubains peuvent enfin se rendre à Miami, et inversement Les relations entre le Capital et le Travail se normalisent. À La Havane, la prostitution, enfin, se réactive. Amis, je suis optimiste pour le futur. Les défilés reprennent entre République et Bastille certes, les vieux PC sont démodés mais en contrepartie à La Havane, les prostituées s’activent. Amis, j’avais un rêve qui s’est révélé une illusion de rêve, une chimère, mais Dieu merci, ils ont tué le Che : à La Havane, la prostitution s’active. Amis, je vous annonce un brillant futur les choses s’améliorent il est enfin possible de concilier le rêve et la réalité le rêve aux poètes, et la réalité aux autres. Et parfois les deux, pour les deux. Même il paraît qu’on peut dans une même vie passer pour un poète, et être un autre. Amis, fêtons les Temps Nouveaux et réjouissons nous : le Monde s’améliore. Les Cubains peuvent enfin aller à Miami. Et la prostitution reprend son cours, à La Havane.

    en cours de vérification

    J

    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Sur la route d’Elizondo A M… « queda la palabra « Yo » para esa, por triste, por su atroz soledad, decreto la peor de las penas : vivir conmigo hasta el final » « Reste le « Je ».Pour ce mot-là, pour sa tristesse, pour son atroce solitude, je décrète la pire des peines : il vivra avec moi jusqu’à la fin » María Mercedes Carranza je t’ai demandé de me suivre sur la route d’Elizondo aux croisements étaient des noms que nous ne comprenions pas sinon par la langue du coeur j’ai voulu t’apprendre la langue du coeur je t’ai dit que plus jamais ne serions tristes sur la route d’Elizondo suivant les sentiers de fougères rouges et les cols descendaient vers un pays autrefois nôtre cheminant vers l’Est, nous avons croisé des pèlerins aux pieds nus ; dans leur regard, d’autres mondes je t’ai dit qu’existaient d’autres mondes j’ai espéré pour nous un pays de silence sur la route d’Elizondo les vautours étaient ce silence tournant dans un ciel de lumière je t’ai dit que le soleil ne se couchait jamais sur la route d’Elizondo qu’ici s’arrêtait le monde, cessaient de déclamer les messagers de mort ici s’écoutait le silence de dieu ; sous les hêtres d’anciennes neiges parfois nous perdant par jeu sur la route d’Elizondo je t’ai demandé de rester pousser une porte sur laquelle jamais il n’y eut de clé seulement un loquet lever le loquet, pousser la porte, poser le sac sur le bat-flanc et s’étendre et la chanson si monotone de la pluie sur la route d’Elizondo un feu de bois pour écarter la mort. J’ai voulu t’épargner la tristesse de la nuit que nos jours se lèvent sur d’autres ciels bleus d’autres sentiers d’autres cols vers des pays étranges sur la route d’Elizondo «escribo en la oscuridad, entre cosas sin forma, como el humo que no vuelve… … palabras que no tienen destino y que es muy probable que nadie lea igual que una carta devuelta. Así escribo» « j’écris dans l’obscurité, parmi des choses sans forme, comme la fumée qui ne revient pas… …des mots sans destination et que très probablement personne ne lira. Comme une lettre renvoyée. Ainsi j’écris » María Mercedes Carranza

    en cours de vérification

    J

    José Maria de Heredia

    @joseMariaDeHeredia

    Bretagne Pour que le sang joyeux dompte l’esprit morose, Il faut, tout parfumé du sel des goëmons, Que le souffle atlantique emplisse tes poumons ; Arvor t’offre ses caps que la mer blanche arrose. L’ajonc fleurit et la bruyère est déjà rose. La terre des vieux clans, des nains et des démons, Ami, te garde encor, sur le granit des monts, L’homme immobile auprès de l’immuable chose. Viens. Partout tu verras, par les landes d’Arèz, Monter vers le ciel morne, infrangible cyprès, Le menhir sous lequel gît la cendre du Brave ; Et l’Océan, qui roule en un lit d’algues d’or Is la voluptueuse et la grande Occismor, Bercera ton cour triste à son murmure grave.

    en cours de vérification

    J

    José Maria de Heredia

    @joseMariaDeHeredia

    À un fondateur de ville Las de poursuivre en vain l'Ophir insaisissable, Tu fondas, en un pli de ce golfe enchanté Où l'étendard royal par tes mains fut planté, Une Carthage neuve au pays de la Fable. Tu voulais que ton nom ne fût point périssable, Et tu crus l'avoir bien pour toujours cimenté A ce mortier sanglant dont tu fis ta cité ; Mais ton espoir, Soldat, fut bâti sur le sable. Carthagène étouffant sous le torride azur, Avec ses noirs palais voit s'écrouler ton mur Dans l'Océan fiévreux qui dévore sa grève ; Et seule, à ton cimier brille, ô Conquistador, Héraldique témoin des splendeurs de ton rêve, Une Ville d'argent qu'ombrage un palmier d'or.

    en cours de vérification

    J

    José Maria de Heredia

    @joseMariaDeHeredia

    À une ville morte Morne Ville, jadis reine des Océans ! Aujourd'hui le requin poursuit en paix les scombres Et le nuage errant allonge seul des ombres Sur ta rade où roulaient les galions géants. Depuis Drake et l'assaut des Anglais mécréants, Tes murs désemparés croulent en noirs décombres Et, comme un glorieux collier de perles sombres, Des boulets de Pointis montrent les trous béants. Entre le ciel qui brûle et la mer qui moutonne, Au somnolent soleil d'un midi monotone, Tu songes, ô Guerrière, aux vieux Conquistadors ; Et dans l'énervement des nuits chaudes et calmes, Berçant ta gloire éteinte, ô Cité, tu t'endors Sous les palmiers, au long frémissement des palmes.

    en cours de vérification

    J

    Jules Breton

    @julesBreton

    Courrières Lorsqu’à travers ta brume, ô plaine de Courrière, L’ombre monte au clocher dans l’or bruni du soir, Que s’inclinent tes blés comme pour la prière, Et que ton marais fume, immobile encensoir ; Quand reviennent des bords fleuris de ta rivière, Portant le linge frais qu’a blanchi le lavoir, Tes filles le front ceint d’un nimbe de lumière, Je n’imagine rien de plus charmant à voir. D’autres courent bien loin pour trouver des merveilles ; Laissons-les s’agiter : dans leurs fiévreuses veilles, Ils ne sentiraient pas ta tranquille beauté. Tu suffis à mon cœur, toi qui vis mes grands-pères, Lorsqu’ils passaient joyeux, en leurs heures prospères, Sur ces mêmes chemins, aux mêmes soirs d’été.

    en cours de vérification

    J

    Jules Delavigne

    @julesDelavigne

    Mon ami Il attend sous la pluie Le droit de faire ce qu’il veut de sa vie Sa femme lui avait dit De rentrer Mais il attend La gare St Lazare Il la connait, et pas par hasard Les pigeons qui la fréquentent Tout comme lui, font grise mine Ils font ce qu’ils doivent faire De leurs jours Ils regardent, ils attendent Dans le bar du coin le serveur s’empresse Et avec un minimum de tendresse Il lui lance : « bonjour, comment ça va aujourd’hui ? » Le temps s’arrête un instant, il cherche sa réponse Et comme hier, il dit Que tout va bien

    en cours de vérification

    Jules Laforgue

    Jules Laforgue

    @julesLaforgue

    Guitare Astre sans coeur et sans reproche, O Maintenon de vieille roche ! Très-Révérende Supérieure Du cloître où l’on ne sait plus l’heure, D’un Port-Royal port de Circée Où Pascal n’a d’autres Pensées Que celles du roseau qui jase Ne sait plus quoi, ivre de vase ….. Oh ! qu’un Philippe de Champaigne, Mais né pierrot, vienne et te peigne ! Un rien, une miniature De la largeur d’une tonsure ; Ça nous ferait un scapulaire Dont le contact anti-solaire, Par exemple aux pieds de la femme, Ah ! nous serait tout un programme !

    en cours de vérification

    Jules Laforgue

    Jules Laforgue

    @julesLaforgue

    La petite infanticide Ô saisons d’Ossian, ô vent de province, Je mourrais encor pour peu que t’y tinsses Mais ce serait de la démence Oh! je suis blasée Sur toute rosée Le toit est crevé, l’averse qui passe En évier public change ma paillasse, Il est temps que ça cesse Les gens d’en bas Et les voisins se plaignent Que leur plafond déteigne Oh! Louis m’a promis, car je suis nubile De me faire voir Paris la grand ville Un matin de la saison nouvelle Oh ! mère qu’il me tarde D’avoir là ma mansarde… Des Édens dit-il, des belles musiques Où des planches anatomiques passent… Tout en faisant la noce Et des sénats de ventriloques Dansons la farandole Louis n’a qu’une parole Et puis comment veut-on que je précise Dès que j’ouvre l’oeil tout me terrorise. Moi j’ai que l’extase, l’extase Tiens, qui fait ce vacarme ?… Ah ! ciel le beau gendarme Qui entr’ par la lucarne. Taïaut! taïaut ! À l’échafaud ! Et puis on lui a guillotiné son cou, Et ça n’a pas semblé l’affecter beaucoup (de ce que ça n’ait pas plus affecté sa fille) Mais son ami Louis ça lui a fait tant de peine Qu’il s’a du pont des Arts jeté à la Seine Mais un grand chien terr’ neuve L’a retiré du fleuve Or justement passait par là La marquise de Tralala, Qui lui a offert sa main D’un air républicain.

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Beyrouth Que pouvez-vous mânes de nos ancêtres Phéniciens inventeurs de l’alphabet ? Un cratère de quarante-trois mètres réponse des explosions à votre apport à l’humanité et une ville en proie à la dévastation Libanais, Libanais, peuple dont la culture depuis longtemps s’est éprise patrie de Gibran qu’arbitrairement l’on martyrise Beyrouth ancienne capitale de la joie d’exister maintes fois meurtrie et pourtant toujours debout à présent frappée à mort par des puissances qui transforment l’or de vivre en funèbre boue

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Contrastes Vous avez la statue de la Liberté à l’entrée de la baie d’Hudson Nous avons de la nature la vérité et l’amour infini des personnes Bercés par le bourdonnement des abeilles et le chant de l’oiseau nous marchons au pied de vos gratte-ciels parmi des citadins-robots Le flot de voitures sous un soleil urbain ne vaut pas le vent dans les ramures et la lumière du matin C’est vrai la célèbre Manhattan fait rêver certains êtres humains cette île où l’on se damne pour ressembler aux Américains C’est là que bat le coeur de la « Big Apple » New-York et ses rockers, la ville de la perpétuelle insomnie Nous préférons cette vie au ralenti où palpite la lenteur où l’on ne nous a pas menti sur la recette du bonheur

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Fleurs Roses de Marrakech et chrysanthèmes de la Toussaint cette ville où des calèches circulent et vous, offrandes aux défunts Son bleu du ciel et le vert de ses palmiers contraste avec ce gris, ce fiel ridicule et une nature anémiée Voyez cette vie simple qui bourdonne et la joie des couleurs qui éclatent dans les souks et sur la place Jamaa el fna tandis que pour vous sonne le glas Marrakech, ville du Sud riche de ses mystères avec le soleil pour inséparable compagnon loin, si loin de votre solitude mille et une merveilles, étonnante oasis nous t’aimons

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Paris Ville-lumière ils t’ont de nouveau plongée dans le noir comme aux heures les plus sombres de ton histoire Toi emblème de la gaieté vivant poème meurtrie par la mort de tes citadins innocents sache que les fous de Dieu qui au divertissement préfèrent le bain de sang ne briseront pas le pacte fraternel O Paris la rebelle faite de l’heureux mélange de la liberté des idéaux et des confessions et pour laquelle vivre ensemble est une passion

    en cours de vérification

    K

    Kamal Zerdoumi

    @kamalZerdoumi

    Voyage A Paris mon pas décroît dans le crépuscule de vivre Sous la cruauté d’un ciel gris malgré l’indifférence et l’odyssée souterraine mon corps vieux navire traverse l’année en fendant les flots de l’espérance pour atteindre l’autre rive son soleil ami et baigner l’âme dans le bleu de ses cieux

    en cours de vérification

    Louis Aragon

    Louis Aragon

    @louisAragon

    Absent de Paris I Souviens-toi La senteur des magnolias blancs Te parlait le langage amoureux des Tropiques Dans le chemin de la Photographie-Hippique Le soir se faisait tendre à la Croix-Catelan Ce n'est qu'un lieu de valse où l'été s'abandonne Mais qu'une ombrelle donne à l'ombre ses bras nus C'est assez d'un soupir ouvert sur l'inconnu Et la Madone noire un autre chant fredonne Dans la chaleur tombée avec le jour défunt Les bouches ont toujours un air de la blessure Leur morsure a le goût de sang des pommes sures Un songe de la mort tourne au cœur des partums Il meurt d'avoir vanté ces parfums qu'il apporte Celui dont le fantôme erre au fond de la nuit Et Philippe-le-Bel regarde avec ennui Arnauld de Catelan tué par son escorte Comme elle va pleurer Madame de Savoie Odorant messager qui venait de Provence J'avais tremblé pour toi comme si par avance Je savais que jamais je n'entendrais ta voix On disait qu'elle était si belle et déchirante Qu'une fois qu'on l'avait par malheur entendue On en oubliait Dieu le temps et l'étendue Les reines l'écoutaient aux rois indifférentes Beaux assassins vous avez fait là du joli Fallait-il qu'un de vous de lui-même vous vende Qui lut au bal danser ruisselant de lavande Et laissa dans son lit l'odeur du néroli Ignorant aujourd'hui N'était cette croix blanche Qui saurait maintenant où ce poète gît Que le roi fut ému que l'herbe fut rcugie Et le doux rossignol mis entre quatre planches Ce n'est pas qu'un chanteur que Paris oublia Les drames plus récents 1 embaument d'autre essence Ces morts-là voyez-vous ressemblent aux naissances Et parfument la nuit d'autres magnolias II Dans l'étrange Paris de Philippe-le-Bel Le Roi même faisait de la fausse monnaie On entendait les loups près du Louvre et ce n'est Qu'au galop qu'on fuyait les hommes de gabelle Il me semble parfois qu'il n'est rien de changé On se découvre encore au passage des reines Quand les seigneurs s'en vont chasser dans la varenne Autre est l'émerillon comme autre est le danger Mais le peuple ressemble au peuple Ses haillons Ressemblent aux haillons de la vieille misère Comme au désert ressemble toujours le désert Et la bouche a toujours la forme du bâillon Le siècle a son éclat qui se lit aux dorures Le nom des rois s'écrit au pli de leur manteau Pour le cœur poignardé qu'importe le couteau Le linceul est le même à tous ceux qui moururent L'éternité renaît aux yeux agonisants Les arbres foudroyés qui peut en dire l'âge Qui peut dire la date atroce de l'orage Sur la fosse commune il n'est pas de gisants La mort et non l'amour est l'unique domaine Où l'homme se démasque et se découvre enfin Les traits décomposés d'un enfant qui a faim La mort et non l'amour nous rend la face humaine Regarde-toi mon frère anonyme et sanglant La mort et non l'amour soit notre Véronique Son linge gardera notre image panique À ce portrait divin nous voici ressemblants Les beaux invariants des passions vulgaires Marquent notre visage à l'instant du trépas Regarde-toi mon frère et ne sanglote pas C'est toi pourtant c'est toi qui péris à la guerre Et toi qui disparus Le ciel sait où tu es Un autre encore un autre Écartez ce calice Mes amis mes amis tombés dans les supplices Vous avez fatigué le bourreau de tuer Il avait conservé le geste séculaire Qui fait choir une tête et trembler l'échafaud Les condamnés pliaient la nuque comme il faut Cétait un bon bourreau qui tuait sans colère C'était un bon bourreau qui perdit son latin Vous proclamiez tout haut le grand espoir du monde Confessez-le mon fils la terre n'est pas ronde Mais votre chant montait dans le petit matin Votre Dies irae semblait incendiaire C'est vers l'an treize cent que ceci se passait Au psaume très ancien s'ajoutent des versets Sur les lèvres de feu de nos héros d'hier On entendait les loups près du Louvre et ce n'est Qu'au galop qu'on fuyait les hommes de gabelle Dans l'étrange Paris de Philippe-Ie-Bel Le Roi même faisait de la fausse monnaie III Ce n'est qu'un lieu de valse où la lumière tente Les papillons de nuit couleur de nos regrets Et le Pré-Catelan nous verse feu secret Ce faux jour de Champagne aux épaules chantantes Orchestre où Vienne meurt dans le vent d'Hawaï Un ciel napolitain s'éteint aux airs des ranchs Les grands yeux du passé qui brillent sous les branches Bleuissent de porter ce loup de Chantilly La musique se tait quand faiblissent les rimes Dans l'ombre les bijoux font chuchoter les fées Et le Bois de Boulogne à leur sein dégrafé Laisse errer les doigt longs des tziganes du crime La lune éveille au loin les hautes cheminées La ville dort tout près lassée énorme et noire Et la Seine au tournant de son lent promenoir Reçoit l'aveu des eaux que l'homme a machinées Brindilles Souvenirs Ah tout ce qui s'accroche A la traîne qui suit nos pas dans les allées J'écoute dans mon cœur les gouttes étoilées Des cascades qui sont la mémoire des roches Rien qui ne se prolonge en moi comme un sanglot Un dimanche à bécane ivre de grenadine Les fleurs d'acacia les boîtes de sardines Le long de la promenade du Bord de l'Eau Au-dessus de Saint-Cloud les lumières ont-elles Cette légèreté que leur donnaient vingt ans On n'imagine pas comme il faisait beau temps Poussières du passé Roses de Bagatelle On voudrait que la vie ait la douceur d'un chant La douceur d'un amour la douceur d'un visage Ou la blancheur au moins que font au paysage Les tribunes du champ de courses de Longchamp La vie Elle aura pris des routes singulières On dirait une noce avec des mirlitons Mais le cocher se penche et demande Où va-t-on Qui répondrait Chacun songe à sa cavalière La vie est après tout une longue agonie Qu'importe qu'on rumine aux ruelles du sort L'essentiel c'est qu'au bout du compte on s'endort Lorsque le jour déjà jaunit Gethsémani Si tu pleures Jésus est-ce de ton calvaire Ne sais-tu pas que comme toi tous nous mourrons La passion la pire est celle des larrons Jamais ressuscites à ce triste univers Au pays du soupir peut-être songeais-tu A ceux qui sans pleurer ont connu la torture Et qui n'ont pas mêlé le ciel à l'aventure Qui n'auront ni vitrail ni palme ni statue Les morts qu'on ne distingue pas des autres gens Les morts de tous les jours dont nul ne sait le nom Ceux qui sont morts un jour d'avoir répondu non Les morts qu'on ne fait pas entrer dans la légende Au pays du soupir où parmi les buissons A la fin fatigués s'endormaient les Apôtres Qui ne furent que des hommes comme les autres Et vous savez mon Dieu ce que les autres sont IV Arnauld de Catelan tué par votre escorte Vous ne reverrez plus ce pays d'oliviers Et vous n'avez pas vu Paris dont vous rêviez Je me lamente ici mais c'est d'une autre sorte Vous dormez dans la terre où veille mon tourment Quand la nouvelle vint frapper au cœur la France Vous ne pouvez savoir quelle fut ma souffrance Dans l'école déserte au soir d'un bourg normand Ô douleur qu'une larme à la fin ne délivre Je criai tous les mots que le délire crée Comme Jésus pleura j'aurais voulu pleurer Paris humilié j'enviais ne plus vivre J'eus beau la supplier la mort n'a pas faibli Dans la forêt du Maine où je cherchais les chars Les chênes me voyant croyaient voir le Roi Charles Regrettait-il le Louvre au noir de sa folie Son cheval a pris peur disaient les gens de cour Le Roi de France est fou disaient les médecins Et les poignards luisaient aux yeux des assassins Où court-il Où court-il On ne sait pas II court Il court pour oublier le deuil et l'impuissance Isabeau qu'il aima que le peuple haït Les princes conspirant et ses rêves trahis Mais si loin qu'il courût il retrouva l'absence L'absence Elle est pareille aux passages d'oiseaux Qui nous parlent au ciel d'une terre lointaine Le Roi fou se mirant au bassin des fontaines L'ombre d'un vol y vint décoiffer les roseaux L'absence Elle est aux yeux cernés des courtisanes Et qui rêvent d'un autre en vous parlant tout bas Elle est dans les chansons Elle est dans le tabac Elle est dans le vieillard au bain guettant Suzanne L'absence Elle est partout présente dans les rues L'absence Elle est dans ce bouquet de violettes Elle est au fond du verre et le vin la reflète Ô diane au matin des nouvelles recrues On s'arrache à la nuit comme un corps à l'armure On retrouve la vie encore enténébrée Quand on n'est pas chez soi c'est toujours la chambrée Je rêve à toi ma ville entre ces quatre murs Qui me redonnera le pavé de Paris Et le Palais-Royal et la rue Bonaparte Odette imagina pour vous les jeux de cartes Sire et-vous retourniez toujours le mistigri Odette autour des yeux si j'avais moins de rides Je croirais voir vraiment mon double en ce valet N'était-ce pas lui qui surgit de la tremblaie Et prit dépenaillé mon cheval à la bride Je l'ai vu dans la glace au soir de l'incendie Lorsque l'Hôtel Saint-Paul brûlait avec son bal Il était habillé comme un roi cannibale Et le feu de l'enfer entourait le Maudit Que me veux-tu jeune homme à la figure impaire Toi qui t'en vas sans cœur sans femme et sans ami N'as-tu jamais gémi N'as-tu jamais frémi Quand j'ai le plus beau jeu tu parais et je perds Dis-moi qui est ton maître est-ce mon oncle Jean Qui t'a payé dis-moi pour faire mon malheur D'où viens-tu chien de pique Où vas-tu bateleur J'ai joué ma couronne et j'ai joué mes gens Et le Chevalier Noir de Paris-près-Gonesse Souriant comme le font les anges des tableaux Je suis murmura-t-il l'âme de ce complot Que tout homme à mi-voix appelle sa jeunesse Je te ressemble ô Roi qui perdis la raison Je suis le pain rompu dont ta vie est la Cène Tu gardes dans tes yeux les couleurs de la Seine Tu peux fuir Je serai toujours ton horizon Je berce ta folie et je suis ta défense Ô monarque dément qu'on a dépossédé Qu'importe d'avoir brisé le fil de tes idées Si tu portes en toi le ciel de ton enfance V Mais il n'est pas le mien ce ciel et pas le mien Ce pays d'oliviers qui fleure les fenouils l Où ce n'est pas un dieu l'homme qui s'agenouille Et tu n'es pas mon Dieu Dieu jérusalémien Tout ce bleu me paraît un beau temps de louage Et ma mélancolie est ceile du marin Sur un coup de cafard qui voit avec chagrin Son corps à tout jamais couvert de tatouages Ô cactus de l'exil Parfum des orangers Pour un peu de vin blanc je donnerais ces palmes Ce soleil sans pardon cette mer toujours calme Où le nuage et moi nous sentons étrangers Les fleurs offrent aux yeux leur débauche adorable Les amours odorants des œillets se marient À la rue où respire un air de griserie Nulle part je n'éprouve être autant misérable Nulle part comme ici tous les jours le tantôt Dans ce marché bruyant devant la Préfecture La rose ne paraît masquer des sépultures Les lilas y sont lourds comme au campo-santo Ces rêves embaumés vainement s'harmonisent Mimosa primevère iris ou giroflée Ils ont les coloris des bulles mal soufflées Et la fragilité du verre de Venise Pourquoi me souvient-il avec mélancolie À cet instant du monde et de ma propre histoire D'un vers de Dante au chant treize du Purgatoire Une âme qui vécut aubaine en Italie (1) Comme cette âme-là nous vivons dans l'exil D'un paradis terrestre auquel secrètement Nous préférons l'enfer Paris et ses tourments Grand merci pour l'aubaine et l'azur et l'asile Et Charles renversant la table et les tarots A ses fantômes cire Ô Maillotins courage Nous voici maintenant réunis par l'orage Chassez l'Anglais de France et rouez les bourreaux Rendez-moi mon Paris le Louvre et les Tournelles Moi je vous donnerai mes bijoux Citadins Aux cartes s'asseyant sur les bancs des jardins Nous jouerons vous et moi les choses éternelles La Gabelle perdue en cinq points d'écarté Montfaucon soit l'enjeu de la seconde manche Vous gagnez À tout coup je tombe sur un manche Quitte ou double Au tapis jetons ma royauté Peuple je n'aurai plus bientôt que ma chemise Veux-tu mon droit d'aînesse contre un cerf-volant Quelle guigne Un carré quand j'avais un brelan Où prends-tu tous ces rois pour me rafler mes mises Quel gage acceptes-tu si nous recommençons Mêle Je couperai Tu tournes la manille Je parierai ma liberté pour tes guenilles La liberté Paris vaut plus qu'une chanson Les gestes du dément comme un vol de cigognes Engendraient sur le mur de noirs chasses-croisés Odette l'épiait craignant de se blouser Pour faire son rapport à Jean Duc de Bourgogne Le geôlier s'étonne au judas Qu'est-ce qu'il fout . La chandelle illumine à demi la cellule Les chauves-souris s'y changent en libellules Une paillette d'or brille aux yeux du Roi Fou VI Poésie ô danger des mots à la dérive Dans la limaille d'ombre il faudrait un aimant Et la forêt s'étoile et devient firmament Dans la vigne des nuits il monte un chant de grive Fleurs de Provence fleurs de la sorcellerie Je vous retrouve au vent voluptueux des valses Arnauld de Catelan fût-il mort à cheval S'il n'eût dans ses flacons respiré sa patrie Et s'il n'avait formé de vos parfums trop lourds Pour les hommes du roi de si belles chansons Que songeurs s'appuyant dressés à leurs arçons Le meurtre à la prunelle allumant son phosphore Ils crurent qu'un trésor de Golconde dormait Dans les caisses de bois de cyprès sur les mules Poésie ô danger dont les flammes simulent Les bijoux qu'en mourant Cléôpâtre se met Fleurs de Provence fleurs entre toutes les fleurs J'ai trop médit de vous II faut me pardonner Vous qui sentez le ciel étoiles incarnées Et qui faites les yeux de toutes les couleurs Vous chassez de Paris la nuit qui l'endeuillait Du côté de Montrouge une voix vous appelle On demande l'azur à la Sainte-Chapelle A la place Dauphine on a besoin d'ceillets On demande l'espoir du côté de Vincennes Et je veux que l'espoir ait l'accent du midi Les chants désespérés Niez ce qu'on en dit N'ont que faire aujourd'hui sur les bords de la Seine Ceux qui portent des fleurs ont de la France aux bras Et mettent du soleil dans notre nuit frugale Non Sous les oliviers où chantent les cigales Je ne veux pas pleurer comme Jésus pleura Je ne veux plus pleurer car pleurer nous désarme Et c'est bon pour un Dieu de plier le genou De Provence ou d'Artois les hommes de chez nous Sachant vivre debout savent mourir sans larmes Comme les fleurs de Nice et les rimes choisies Si du Nord au Midi notre cœur en forme une Que tout serve à chanter notre chanson commune Et Paris mon Paris soit notre poésie

    en cours de vérification

    Marcel Proust

    Marcel Proust

    @marcelProust

    Dordrecht Ton ciel toujours un peu bleu Le matin souvent un peu pleut Dordrecht endroit si beau Tombeau De mes illusions chéries Quand j’essaye à dessiner Tes canaux, tes toits, ton clocher Je me sens comme aimer Des patries Mais le soleil et les cloches Ont bien vite resséché Pour la grand-messe et les brioches Ton luisant clocher Ton ciel bleu Souvent pleut Mais dessous toujours un peu Reste bleu.

    en cours de vérification

    Marceline Desbordes-Valmore

    Marceline Desbordes-Valmore

    @marcelineDesbordesValmore

    À Rouen, rue Ancrière Je n'ai vu qu'un regard de cette belle morte À travers le volet qui touche à votre porte, Ma soeur, et sur la vitre où passa ce regard, Ce fut l'adieu d'un ange obtenu par hasard. Et dans la rue encore on dirait, quand je passe, Que l'adieu reparaît à la claire surface. Mais il est un miroir empreint plus tristement De l'image fuyante et visible un moment : Ce miroir, c'est mon âme où, portrait plein de larmes, Revit la belle morte avec ses jeunes charmes.

    en cours de vérification

    Marceline Desbordes-Valmore

    Marceline Desbordes-Valmore

    @marcelineDesbordesValmore

    La maison de ma Mère Maison de la naissance, ô nid, doux coin du monde ! O premier univers où nos pas ont tourné ! Chambre ou ciel, dont le cœur garde la mappemonde, Au fond du temps je vois ton seuil abandonné. Je m'en irais aveugle et sans guide à ta porte. Toucher le berceau nu qui daigna me nourrir ; Si je deviens âgée et faible, qu'on m'y porte ! Je n'y pus vivre enfant ; j'y voudrais bien mourir ; Marcher dans notre cour où croissait un peu d'herbe. Où l'oiseau de nos toits descendait boire, et puis, Pour coucher ses enfants, becquetait l'humble gerbe, Entre les cailloux bleus que mouillait le grand puits ! De sa fraîcheur lointaine il lave encor mon âme, Du présent qui me brûle il étanche la flamme, Ce puits large et dormeur au cristal enfermé, Où ma mère baignait son enfant bien-aimé : Lorsqu'elle berçait l'air avec sa voix rêveuse, Qu'elle était calme et blanche et paisible le soir. Désaltérant le pauvre assis, comme on croit voir Aux ruisseaux de la bible une fraîche laveuse : Elle avait des accents d'harmonieux amour, Que je buvais du cœur en jouant dans la cour ! Ciel ! où prend donc sa voix une mère qui chante. Pour aider le sommeil à descendre au berceau ? Dieu mit-il plus de grâce au souffle d'un ruisseau ? Est-ce l'Éden rouvert à son hymne louchante. Laissant sur l'oreiller de l'enfant qui s'endort. Poindre tous les soleils qui lui cachent la mort ? Et l'enfant assoupi sous cette âme voilée. Reconnaît-il les bruits d'une vie écoulée ? Est-ce un cantique appris à son départ du ciel, Où l'adieu d'un jeune ange épancha quelque miel ? Elle se défendait de me faire savante ; "Apprendre, c'est vieillir, disait-elle, et l'enfant "Se nourrira trop tôt du fruit que Dieu défend ; "Fruit fiévreux à la sève aride et décevante ; "L'enfant sait tout qui dit à son ange gardien : "— Donnez-nous aujourd'hui notre pain quotidien ! "C'est assez demander à cette vie amère ; "Assez de savoir suivre et regarder sa mère, "Et nous aurons appris pour un long avenir, "Si nous savons prier, nous soumettre et bénir !" Et je ne savais rien à dix ans qu'être heureuse ; Rien, que jeter au ciel ma voix d'oiseau, mes fleurs ; Rien, durant ma croissance aiguë et douloureuse. Que plonger dans ses bras mon sommeil ou mes Je n'avais rien appris, rien lu que ma prière, [pleurs : Quand mon sein se gonfla de chants mystérieux ; J'écoutais Notre-Dame et j'épelais les cieux Et la vague harmonie inondait ma paupière ; Les mots seuls y manquaient ; mais je croyais qu'un [jour. On m'entendrait aimer pour me répondre : amour !

    en cours de vérification

    Marceline Desbordes-Valmore

    Marceline Desbordes-Valmore

    @marcelineDesbordesValmore

    L’église d’Arona On est moins seul au fond d’une église déserte : De son père inquiet c’est la porte entr’ouverte ; Lui qui bénit l’enfant, même après son départ, Lui, qui ne dit jamais : « N’entrez plus, c’est trop tard ! » Moi, j’ai tardé, seigneur, j’ai fui votre colère, Comme l’enfant qui tremble à la voix de son père, Se dérobe au jardin tout pâle, tout en pleurs, Retient son souffle et met sa tête dans les fleurs ; J’ai tardé ! Retenant le souffle de ma plainte, J’ai levé mes deux mains entre vous et ma crainte ; J’ai fait la morte ; et puis, en fermant bien les yeux, Me croyant invisible aux lumières des cieux, Triste comme à ténèbre au milieu de mon âme, Je fuyais. Mais, Seigneur ! votre incessante flamme, Perçait de mes détours les fragiles remparts, Et dans mon coeur fermé rentrait de toutes parts ! C’est là que j’ai senti, de sa fuite lassée, Se retourner vers vous mon âme délaissée ; Et me voilà pareille à ce volage enfant, Dépouillé par la ville, et qui n’a bien souvent Que ses débiles mais pour voiler son visage, Quand il dit à son père : Oh ! que n’ai-je été sage !

    en cours de vérification

    M

    Max Elskamp

    @maxElskamp

    Horloge admirable Or, en aujourd’hui et mes heures, Marie du temps quotidien Pour le travail et pour le pain Des vies qui rient, des vies qui pleurent, Je vous salue, Marie-aux-heures ; Et vous salue, Marie-au-peuple, Mon peuple bon de chrétienté, Et si patient d’équité Depuis des temps d’éternité, Et vous salue, Marie, mon peuple. Or les villes, Marie-aux-cloches, Mes villes d’hiver et d’été Et de tout près, et d’à côté, Mes villes de bois ou de roche Bien vous saluent, Marie-aux-cloches ; Et vous saluent, Marie-aux-îles, Que font les bons chez les mauvais, Les coeurs naïfs et les muets Aux heures longues de ces villes Qui vous saluent, Marie-aux-îles, Et puis aussi, Marie-du-temps, Ceux du présent, et les absents Aux joies du rire ou dans la peine ; Et puis aussi, Marie-du-temps, Moi dans la vie comme à la traîne.

    en cours de vérification

    Michel Butor

    Michel Butor

    @michelButor

    A l'italienne O Madonna Mona Lisa Mamma mia bellissima Signorina per piacere grazie tante dopo di lei Antipasti torinesi tagliatelle bolognese Scaloppine saltimbocche gorgonzola provolone Panettone parmigiano tutti frutti capucini Orvieto Chianti Barolo Prosecco Valpolicella Materiali scolastici giocattoli per bambini Tipografia manoscritti stampe giornali ricordi Uffizi Brera Giardini quattrocento rinascente Scala San Carlo Fenice per la donna è mobile Sospiri cuore amore baci notte luna stelle

    en cours de vérification

    N

    Nadia Ben Slima

    @nadiaBenSlima

    Rumeur urbaine Soudain… Le brouillard les passants sont alors hagards. Sur la route bitumée ornée de peupliers on devine à peine le passage le sentier devient moins sûre un air d’automne dans les marrons mûrs Le trafic de la ville s’intensifie au loin obligations, ruminations, la ville s’affole, le temps s’emballe et la fraîcheur augurante de l’hiver blanc ne perturbe pas les pas des passants trépignent dans les klaxons s’engouffrent dans les stations en mouvement dans les rituels illusoirement éternels Alors mieux vaut être un ingénu Dans cette ville Où les saisons veillent Au grain, au dessein Enchanté. Pour qui le voit À travers la brume d’émoi.

    en cours de vérification

    N

    Nashmia Noormohamed

    @nashmiaNoormohamed

    Morceaux choisis Diop a écrit, Afrique mon Afrique, Et il a décrit, Celle qu’il a aimée. Moi, je me souscris, Au continent Afrique, Qui m’a nourrie, Et de son sel (et de son eau), j’ai avalé. Continent nègre, Négresse du monde, Ma gratitude est maigre, Et mon ivresse gronde. Ma mémoire se souvient, inique, Tu m’enchantes et je m’écrie, Afrique mon Afrique, Diop a écrit.

    en cours de vérification

    Nicolas Boileau

    Nicolas Boileau

    @nicolasBoileau

    Plaintes contre les tuileries Agréables jardins où les Zéphyrs et Flore Se trouvent tous les jours au lever de l’Aurore; Lieux charmants qui pouvez dans vos sombres réduits, Des plus tristes amants adoucir les ennuis, Cessez de rappeler, dans mon âme insensée, De mon premier bonheur la gloire enfin passée. Ce fut, je m’en souviens, dans cet antique bois Que Philis m’apparut pour la première fois. C’est ici que souvent, dissipant mes alarmes, Elle arrêtait d’un mot mes soupirs et mes larmes. Et que me regardant d’un oeil si gracieux, Elle m’offrait le ciel, ouvert dans ses beaux yeux. Aujourd’hui cependant, injustes que vous êtes, Je sais qu’à mes rivaux vous prêtez vos retraites, Et qu’avec elle assis sur vos tapis de fleurs, Ils triomphent contents de mes vaines douleurs. Allez, jardins dressés par une main fatale, Tristes enfants de l’art du malheureux Dédale, Vos bois, jadis pour moi si charmants et si beaux; Ne sont plus qu’un désert, refuge des corbeaux; Qu’un séjour infernal où cent mille vipères, Tous les jours, en naissant, assassinent leurs mères.

    en cours de vérification

    N

    Nérée Beauchemin

    @nereeBeauchemin

    La maison vide Petite maison basse, au grand chapeau pointu, Qui, d’hiver en hiver, semble s’être enfoncée Dans la terre sans fleurs, autour d’elle amassée. Petite maison grise, au grand chapeau pointu, Au lointain bleu, là-bas, dis-le-moi, que vois-tu ? Par les yeux clignotants de ta lucarne rousse, Pour voir plus clair, plus loin, tu sembles faire effort, Et froncer les sourcils sous ton chapeau de mousse. Vers ces couchants de rêve où le soleil s’endort, Pour voir plus clair, plus loin, tu sembles faire effort. Il est couché, là-bas, au fond du cimetière, Celui qui t’aime encore autant que tu l’aimais. Petite maison vieille, au chapeau de poussière, Celui qui t’aime encore autant que tu l’aimais, L’absent, tant regretté, ne reviendra jamais.

    en cours de vérification

    N

    Nérée Beauchemin

    @nereeBeauchemin

    Québec Comme un factionnaire immobile au port d’arme, Dans ces murs où l’on croit ouïr se prolonger Le grave écho lointain d’un qui vive d’alarme, À ses gloires Québec semble encore songer. L’humble paix pastorale a replié son aile Sur l’âpre terre où gît le sombre camp des morts : Du bugle ensanglanté, la plaine solennelle N’entend plus retentir les tragiques accords. Au flanc de la redoute, aux poternes ouvertes, Aux créneaux de la tour, aux brèches des remparts, La mousse dont l’avril a teint les franges vertes, Suspend ses verts pavois et ses verts étendards. Au port ne viendront plus mouiller les caravelles. Qu’importe ? contre toute espérance, on attend. On attend qu’on nous fasse assavoir des nouvelles Des bourgs d’où sont venus les purs Français d’antan. Hanté du souvenir qui le tient en tristesse, De par delà les mers, du lointain, de là-bas. L’ancien logis qu’enchante une immortelle hôtesse, De jours en jours attend quelqu’un qui ne vient pas. Souventes fois, la nuit, comme aux jours des grands sièges, Vibrent d’étranges sons de cors et de tambours : Et, souvent, l’on a cru voir de pompeux cortèges Défiler, radieux, sous l’ombre des faubourgs. Une garde fantôme, une ronde macabre, Passe, marchant à pas sonore et régulier, Et l’on entend tinter des cliquetis de sabre Sur les marches de bois du gothique escalier. Ô Québec, reste fier, reste haut sur la rampe Que dore le passé. Pour nous hausser le coeur, Pour brandir fièrement les couleurs de ta hampe, Sois-tu toujours debout, soit-tu toujours vainqueur ! Tant que les doux rivaux du divin Crémazie, Inclinés sous le vol d’un lyrisme idéal, Invoquant à genoux la sainte poésie, Chanteront à plein coeur l’hymne national : Tant que le pur accent d’une langue immortelle Vibrera dans l’ancien parler pur de chez nous ; Tant qu’un rayon d’amour luira dans la prunelle De la Canadienne aux clairs jolis yeux doux ! À plein ciel, sur les toits, sur les places publiques, Les hivers succédant aux hivers, neigeront. Les châsses où la France a serti ses reliques Sous leur rouille de gloire oncques ne périront. Aujourd’hui le coeur s’ouvre, et tout revit. Sur l’onde Dansent les rayons d’or du clair soleil pascal. Le roc s’ouvre. Qui vive ?… Il faut que l’on réponde, Sans peur, à haute voix : Frontenac et Laval.

    en cours de vérification

    Paul Éluard

    Paul Éluard

    @paulEluard

    Courage Paris a froid Paris a faim Paris ne mange plus de marrons dans la rue Paris a mis de vieux vêtements de vieille Paris dort tout debout sans air dans le métro Plus de malheur encore est imposé aux pauvres Et la sagesse et la folie De Paris malheureux C’est l’air pur c’est le feu C’est la beauté c’est la bonté De ses travailleurs affamés Ne crie pas au secours Paris Tu es vivant d’une vie sans égale Et derrière la nudité De ta pâleur de ta maigreur Tout ce qui est humain se révèle en tes yeux Paris ma belle ville Fine comme une aiguille forte comme une épée Ingénue et savante Tu ne supportes pas l’injustice Pour toi c’est le seul désordre Tu vas te libérer Paris Paris tremblant comme une étoile Notre espoir survivant Tu vas te libérer de la fatigue et de la boue Frères ayons du courage Nous qui ne sommes pas casqués Ni bottés ni gantés ni bien élevés Un rayon s’allume en nos veines Notre lumière nous revient Les meilleurs d’entre nous sont morts pour nous Et voici que leur sang retrouve notre cœur Et c’est de nouveau le matin un matin de Paris La pointe de la délivrance L’espace du printemps naissant La force idiote a le dessous Ces esclaves nos ennemis S’ils ont compris S’ils sont capables de comprendre Vont se lever. 1942

    en cours de vérification

    Paul Éluard

    Paul Éluard

    @paulEluard

    La grande maison inhabitable Au milieu d’une île étonnante Que ses membres traversent Elle vit d’un monde ébloui. La chair que l’on montre aux curieux Attend là comme les récoltes La chute sur les rives. En attendant pour voir plus loin Les yeux plus grands ouverts sous le vent de ses mains Elle imagine que l’horizon a pour elle dénoué sa ceinture.

    en cours de vérification

    Paul Verlaine

    Paul Verlaine

    @paulVerlaine

    À la promenade Le ciel si pâle et les arbres si grêles Semblent sourire à nos costumes clairs Qui vont flottant légers avec des airs De nonchalance et des mouvements d’ailes. Et le vent doux ride l’humble bassin, Et la lueur du soleil qu’atténue L’ombre des bas tilleuls de l’avenue Nous parvient bleue et mourante à dessein. Trompeurs exquis et coquettes charmantes Cœurs tendres mais affranchis du serment Nous devisons délicieusement, Et les amants lutinent les amantes De qui la main imperceptible sait Parfois donner un soufflet qu’on échange Contre un baiser sur l’extrême phalange Du petit doigt, et comme la chose est Immensément excessive et farouche, On est puni par un regard très sec, Lequel contraste, au demeurant, avec La moue assez clémente de la bouche.

    en cours de vérification

    Paul-Jean Toulet

    Paul-Jean Toulet

    @paulJeanToulet

    Éléphant de Paris Ah, Curnonsky, non plus que l’aube, N’était bien rigolo Il regardait le fil de l’eau. C’était avant les Taube. Et moi j’apercevais – pourtant Qu’on fût loin de Cythère – Un objet singulier. Mystère : C’est un éléphant. Notre maison étant tout proche, On le prit avec nous. Il mettait, pour chercher des sous Sa trompe dans ma poche. Hélas, rue-de-Villersexel, La porte était trop basse. On a beau dire que tout passe Non – ni le riche au Ciel.

    en cours de vérification