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Lieux

190 poésies en cours de vérification
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Poésies de la collection lieux

    François Coppée

    François Coppée

    @francoisCoppee

    J’adore la banlieue avec ses champs en friche J’adore la banlieue avec ses champs en friche Et ses vieux murs lépreux, où quelque ancienne affiche Me parle de quartiers dès longtemps démolis. Ô vanité ! Le nom du marchand que j’y lis Doit orner un tombeau dans le Père-Lachaise. Je m’attarde. Il n’est rien ici qui ne me plaise, Même les pissenlits frissonnant dans un coin. Et puis, pour regagner les maisons déjà loin, Dont le couchant vermeil fait flamboyer les vitres, Je prends un chemin noir semé d’écailles d’huîtres

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    François Coppée

    François Coppée

    @francoisCoppee

    Mon Père Tenez, lecteur ! – souvent, tout seul, je me promène Au lieu qui fut jadis la barrière du Maine. C’est laid, surtout depuis le siège de Paris. On a planté d’affreux arbustes rabougris Sur ces longs boulevards où naguère des ormes De deux cents ans croisaient leurs ramures énormes. Le mur d’octroi n’est plus ; le quartier se bâtit. Mais c’est là que jadis, quand j’étais tout petit, Mon père me menait, enfant faible et malade, Par les couchants d’été faire une promenade. C’est sur ces boulevards déserts, c’est dans ce lieu Que cet homme de bien, pur, simple et craignant Dieu, Qui fut bon comme un saint, naïf comme un poète, Et qui, bien que très pauvre, eut toujours l’âme en fête, Au fond d’un bureau sombre après avoir passé Tout le jour, se croyant assez récompensé Par la douce chaleur qu’au coeur nous communique La main d’un dernier-né, la main d’un fils unique, C’est là qu’il me menait. Tous deux nous allions voir Les longs troupeaux de boeufs marchant vers l’abattoir, Et quand mes petits pieds étaient assez solides, Nous poussions quelquefois jusques aux Invalides, Où, mêlés aux badauds descendus des faubourgs, Nous suivions la retraite et les petits tambours. Et puis enfin, à l’heure où la lune se lève, Nous prenions pour rentrer la route la plus brève ; On montait au cinquième étage, lentement ; Et j’embrassais alors mes trois soeurs et maman, Assises et cousant auprès d’une bougie. – Eh bien, quand m’abandonne un instant l’énergie, Quand m’accable par trop le spleen décourageant, Je retourne, tout seul, à l’heure du couchant, Dans ce quartier paisible où me menait mon père ; Et du cher souvenir toujours le charme opère. Je songe à ce qu’il fit, cet homme de devoir, Ce pauvre fier et pur, à ce qu’il dut avoir De résignation patiente et chrétienne Pour gagner notre pain, tâche quotidienne, Et se priver de tout, sans se plaindre jamais. – Au chagrin qui me frappe alors je me soumets, Et je sens remonter à mes lèvres surprises Les prières qu’il m’a dans mon enfance apprises.

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    François Villon

    François Villon

    @francoisVillon

    Ballade des femmes de Paris Quoy qu'on tient belles langagières Florentines, Veniciennes, Assez pour estre messagieres, Et mesmement les anciennes; Mais, soient Lombardes, Rommaines, Genevoises, a mes perilz, Pimontoises, Savoisiennes, Il n'est bon bec que de Paris. De très beau parler tiennent chaieres, Ce dit on, les Neapolitaines, Et sont res bonnes caquetieres Allemandes et Pruciennes; Soient Grecques, Egipciennes, De Hongrie ou d'autre pays, Espaignolles ou Cathelennes, Il n'est bon bec que de Paris. Brettes, Suysses, n'y sçavent guieres, Gasconnes, n aussi Toulousaines : De Petit Pont deux harengieres Les concluront, et les Lorraines, Engloises et Calaisiennes, (Ay je beaucoup de lieux compris?) Picardes de Valenciennes ; Il n'est bon bec que de Paris. Prince, aux dames Parisiennes De beau parler donnez le pris; Quoy qu'on die d'Italiennes, Il n'est bon bec que de Paris. Regarde m'en deux, trois, assises Sur le bas du ply de leurs robes, En ces moustiers, en ces églises; Tire toy près, et ne te hobes ; Tu trouveras la que Macrobes Oncques ne fist tels jugemens. Entens; quelque chose en desrobes : Ce sont tous beaulx enseignemens. Item, et au mont de Montmartre, Qui est ung lieu moult ancien, Je luy donne et adjoings le tertre Qu'on dit le mont Valerien, Et, oultre plus, ung quartier d'an Du pardon qu'apportay de Romme : Si ira maint bon crestien Voir l'abbaye ou il n'entre homme. Item, varletz et chamberieres De bons hostelz (riens ne me nuyt) Feront tartes, flans et goyeres, Et grant raillias a mynuit : Riens n'y font sept pintes ne huit, Tant que gisent seigneur et dame; Puis après, sans mener grant bruit, Je leur ramentoy le jeu d'asne. Item, et a filles de bien, Qui ont pères, mères et antes, Par m'ame ! je ne donne rien, Car j'ay tout donné aux servantes. Si fussent ilz de peu contentes, Grant bien leur fissent mains loppins, Aux povres filles advenantes Qui se perdent aux Jacoppins, Aux Celestins et aux Chartreux; Quoy que vie mainent estroite, Si ont ilz largement entre eulx, Dont povres filles ont souffrete : Tesmoing Jaqueline et Perrete Et Ysabeau qui dit : « Enné ! » Puis qu'ilz en ont telle disette, A paine en seroit on damné. Item, a la grosse Margot, Très doulce face et pourtraicture, Foy que doy brelare bigod, Assez dévote créature; Je l'aime de propre nature, Et elle moy, la doulce sade : Qui la trouvera d'aventure, Qu'on luy lise ceste ballade.

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    François-René de Chateaubriand

    François-René de Chateaubriand

    @francoisReneDeChateaubriand

    Les Alpes ou l’Italie Donc reconnaissez-vous au fond de vos abîmes Ce voyageur pensif, Au cœur triste, aux cheveux blanchis comme vos cimes, Au pas lent et tardif ? Jadis de ce vieux bois, où fait une eau limpide, Je sondais l’épaisseur Hardi comme un aiglon, comme un chevreuil rapide, Et gai comme un chasseur. Alpes, vous n’avez point subi mes destinées ! Le temps ne vous peut rien; Vos fronts légèrement ont porté les années Qui pèsent sur le mien. Pour la première fois, quand, rempli d’espérance, Je franchis vos remparts, Ainsi que l’horizon, un avenir immense S’ouvrait à mes regards. L’Italie à mes pieds, et devant moi le monde, Quel champ pour mes désirs ! Je volai, j’évoquai cette Rome féconde En puissants souvenirs. Du Tasse une autre fois je revis la patrie : Imitant Godefroi, Chrétien et chevalier, j’allais vers la Syrie Plein d’ardeur et de foi. Ils ne sont plus ces jours que point mon cœur n’oublie, Et ce cœur aujourd’hui Sous le brillant soleil de la belle Italie, Ne sent plus que l’ennui. Pompeux ambassadeurs que la faveur caresse, Ministres, valez-vous Les obscurs compagnons de ma vive jeunesse Et mes plaisirs si doux ? Vos noms aux bords riants que l’Adige décore Du temps seront vaincus, Que Catulle et Lesbie enchanteront encore Les flots du Bénacus. Politiques, guerriers, vous qui prétendez vivre Dans la postérité, J’y consens : mais on peut arriver sans vous suivre, A l’immortalité. J’ai vu ces fiers sentiers tracés par la Victoire, Au milieu des frimas, Ces rochers du Simplon que le bras de la Gloire Pendit pour nos soldats : Ouvrage d’un géant, monument du génie, Serez-vous plus connus Que la roche où Saint-Preux contait à Meillerie Les tourments de Vénus ? Je vous peignis aussi, chimère enchanteresse, Fictions des amours ! Aux tristes vérités le temps, qui fuit sans cesse, Livre à présent mes jours. L’histoire et le roman font deux parts de la vie, Qui si tôt se ternit : Le roman la commence, et lorsqu’elle est flétrie L’histoire la finit. 1822

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    A

    Alexis-Félix Arvers

    @alexisFelixArvers

    Ce qui peut arriver à tout le monde I J’ai toujours voulu voir du pays, et la vie Que mène un voyageur m’a toujours fait envie. Je me suis dit cent fois qu’un demi-siècle entier Dans le même logis, dans le même quartier ; Que dix ans de travail, dix ans de patience A lire les docteurs et creuser leur science, Ne valent pas six mois par voie et par chemin, Six mois de vie errante, un bâton à la main. — Eh bien ! me voici prêt, ma valise est remplie ; Où vais-je ! — En Italie. — Ah, fi donc ! l’Italie ! Voyage de badauds, de beaux fils à gants blancs. Qui vont là par ennui, par ton, comme à Coblentz, En poste, au grand galop, traversant Rome entière, Et regardent ton ciel, Naples, par la portière. — Mais ce que je veux, moi, voir avant de mourir, Où je veux à souhait rêver, chanter, courir. C’est l’Espagne, ô mon cœur ! c’est l’hôtesse des Maures, Avec ses orangers et ses frais sycomores, Ses fleuves, ses rochers à pic, et ses sentiers Où s’entendent, la nuit, les chants des muletiers ; L’Espagne d’autrefois, seul débris qui surnage Du colosse englouti qui fut le moyen âge ; L’Espagne et ses couvents, et ses vieilles cités Toutes ceintes de murs que l’âge a respectés ; Madrid. Léon, Burgos, Grenade et cette ville Si belle, qu’il n’en est qu’une au monde. Séville ! La ville des amants, la ville des jaloux, Fière du beau printemps de son ciel andalou, Qui, sous ses longs arceaux de blanches colonnades, S’endort comme une vierge, au bruit des sérénades. Jusqu’à tant que pour moi le jour se soit levé Où je pourrai te voir et baiser ton pavé, Séville ! c’est au sein de cette autre patrie Que je veux, mes amis, mettre, ma rêverie ; C’est là que j’enverrai mon âme et chercherai De doux récits d’amour que je vous redirai. II A Séville autrefois (pour la date il n’importe), Près du Guadalquivir, la chronique rapporte Qu’une dame vivait, qui passait saintement Ses jours dans la prière et le recueillement : Ses charmes avaient su captiver la tendresse De l’alcade, et c’était, comme on dit, sa maîtresse ; Ce qui n’empêchait pas que son nom fût cité Comme un exemple à tous d’austère piété. Car elle méditait souvent les évangiles, Jeûnait exactement quatre-temps et vigiles. Communiait à Pâque, et croyait fermement Que c’est péché mortel d’avoir plus d’un amant A la fois. Ainsi donc, en personne discrète. Elle vivait au fond d’une obscure retraite, Toute seule et n’ayant de gens dans sa maison Qu’une duègne au-delà de l’arrière-saison, Qu’on disait avoir eu, quand elle était jolie. Ses erreurs de jeunesse, et ses jours de folie. Voyant venir les ans, et les amans partir, En femme raisonnable elle avait cru sentir Qu’en son âme, un beau jour, était soudain venue Une vocation jusqu’alors inconnue ; Au monde, qui fuyait, elle avait dit adieu, Et pour ses vieux péchés s’était vouée à Dieu. Une fois, au milieu d’une de ces soirées Que prodigue le ciel à ces douces contrées, Le bras nonchalamment jeté sur son chevet, Paquita (c’est le nom de la dame) rêvait : Son œil s’était voilé, silencieux et triste ; Et tout près d’elle, au pied du lit, sa camariste Disait dévotement, un rosaire à la main, Ses prières du soir dans le rite romain. Voici que dans la rue, au pied de la fenêtre, Un bruit se fit entendre ; elle crut reconnaître Un pas d’homme, prêta l’oreille ; en ce moment Une voix s’éleva qui chantait doucement : « Merveille de l’Andalousie. Étoile qu’un ange a choisie Entre celles du firmament, Ne me fuis pas ainsi ; demeure, Si tu ne veux pas que je meure De désespoir, en te nommant ! J’ai visité les Asturies, Aguilar aux plaines fleuries, Tordesillas aux vieux manoirs : J’ai parcouru les deux Castilles. Et j’ai bien vu sous les mantilles De grands yeux et des sourcils noirs : Mais, ô lumière de ma vie, Dans Barcelone ou Ségovie, Dans Girone au ciel embaumé, Dans la Navarre ou la Galice, Je n’ai rien vu qui ne pâlisse Devant les yeux qui m’ont charmé ! » Quand la nuit est bien noire, et que toute la terre, Comme de son manteau, se voile de mystère, Vous est-il arrivé parfois, tout en rêvant, D’ouïr des sons lointains apportés par le vent ? Comme alors la musique est plus douce ! Il vous semble Que le ciel a des voix qui se parlent ensemble, Et que ce sont les saints qui commencent en chœur Des chants qu’une autre voix achève dans le cœur. — A ces sons imprévus, tout émue et saisie, La dame osa lever un coin de jalousie Avec précaution, et juste pour pouvoir Découvrir qui c’était, mais sans se laisser voir. En ce moment la lune éclatante et sereine Parut au front des cieux comme une souveraine ; A ses pâles rayons un regard avait lui, Elle le reconnut, et dit : « C’est encor lui ! » C’était don Gabriel, que par toute la ville On disait le plus beau cavalier de Séville ; Bien fait, de belle taille et de bonne façon ; Intrépide écuyer et ferme sur l’arçon, Guidant son andalou avec grâce et souplesse, Et de plus gentilhomme et de haute noblesse ; Ce que sachant très bien, et comme, en s’en allant, Son bonhomme de père avait eu le talent De lui laisser comptant ce qu’il faut de richesses Pour payer la vertu de plus de cent duchesses, Il allait tête haute, en homme intelligent Du prix de la noblesse unie avec l’argent. Mais quand le temps d’aimer, car enfin, quoi qu’on dit, Il faut tous en passer par cette maladie, Qui plus tôt, qui plus tard ; quand ce temps fut venu, Et qu’un trouble arriva jusqu’alors inconnu, Soudain il devint sombre : au fond de sa pensée Une image de femme un jour était passée ; Il la cherchait partout. Seul, il venait s’asseoir Sous les arbres touffus d’Alaméda, le soir. A cette heure d’amour où la terre embrasée Voit son sein rafraîchir sous des pleurs de rosée. Un jour qu’il était là, triste, allant sans savoir Où se portaient ses pas, et regardant sans voir, Une femme passa : vision imprévue. Qu’il reconnut soudain sans l’avoir jamais vue ! C’était la Paquita : c’était elle ! elle avait Ces yeux qu’il lui voyait, la nuit, quand il rêvait. Le souris, la démarche et la taille inclinée De l’apparition qu’il avait devinée. Il est de ces moments qui décident des jours D’un homme ! Depuis lors il la suivait toujours, Partout, et c’était lui dont la voix douce et tendre Avait trouvé les chants qu’elle venait d’entendre. III Comment don Gabriel se fit aimer, comment Il entra dans ce cœur tout plein d’un autre amant, Je n’en parlerai pas, lecteur, ne sachant guère, Depuis qu’on fait l’amour, de chose plus vulgaire ; Donc, je vous en fais grâce, et dirai seulement, Pour vous faire arriver plus vite au dénouement. Que la dame à son tour. — car il n’est pas possible Que femme à tant d’amour garde une âme insensible, — Après avoir en vain rappelé sa vertu. Avoir prié longtemps, et longtemps combattu. N’y pouvant plus tenir, sans doute, et dominée Par ce pouvoir secret qu’on nomme destinée, Ne se contraignit plus, et cessa d’écouter Un reste de remords qui voulait l’arrêter : Si bien qu’un beau matin, au détour d’une allée, Gabriel vit venir une duègne voilée, D’un air mystérieux l’aborder en chemin, Regarder autour d’elle, et lui prendre la main En disant : « Une sage et discrète personne, Que l’on ne peut nommer ici, mais qu’on soupçonne Vous être bien connue et vous toucher de près, Mon noble cavalier, me charge tout exprès De vous faire savoir que toute la soirée Elle reste au logis, et serait honorée De pouvoir vous apprendre, elle-même, combien A votre seigneurie elle voudrait de bien. » Banquiers, agents de change, épiciers et notaires, Percepteurs, contrôleurs, sous-chefs de ministères Boutiquiers, électeurs, vous tous, grands et petits. Dans les soins d’ici-bas lourdement abrutis, N’est-il pas vrai pourtant que, dans cette matière, Où s’agite en tous sens votre existence entière. Vous n’avez pu flétrir votre âme, et la fermer Si bien, qu’il n’y demeure un souvenir d’aimer ? Oh ! qui ne s’est, au moins une fois dans sa vie, D’une extase d’amour senti l’âme ravie ! Quel cœur, si desséché qu’il soit, et si glacé, Vers un monde nouveau ne s’est point élancé ? Quel homme n’a pas vu s’élever dans les nues Des chœurs mystérieux de vierges demi-nues ; Et lorsqu’il a senti tressaillir une main, Et qu’une voix aimée a dit tout bas : « Demain », Oh ! qui n’a pas connu cette fièvre brûlante, Ces imprécations à l’aiguille trop lente, Et cette impatience à ne pouvoir tenir En place, et comme un jour a de mal à finir ! — Hélas ! pourquoi faut-il que le ciel nous envie Ces instants de bonheur, si rares dans la vie, Et qu’une heure d’amour, trop prompte à s’effacer, Soit si longue à venir, et si courte à passer ! Après un jour, après un siècle entier d’attente, Gabriel, l’œil en feu, la gorge haletante, Arrive ; on l’attendait. Il la vit, — et pensa Mourir dans le baiser dont elle l’embrassa. IV La nature parfois a d’étranges mystères ! V Derrière le satin des rideaux solitaires Que s’est-il donc passé d’inouï ? Je ne sais : On entend des soupirs péniblement poussés. Et soudain Paquita s’écriant : « Honte et rage ! Sainte mère de Dieu ! c’est ainsi qu’on m’outrage ! Quoi ! ces yeux, cette bouche et cette gorge-là, N’ont de ce beau seigneur obtenu que cela ! Il vient dire qu’il m’aime ! et quand je m’abandonne Aux serments qu’il me fait, grand Dieu ! que je me donne, Que je risque pour lui mon âme, et je la mets En passe d’être un jour damnée à tout jamais, ‘Voilà ma récompense ! Ah ! pour que tu réveilles Ce corps tout épuisé de luxure et de veilles, Ma pauvre Paquita, tu n’es pas belle assez ! Car, ne m’abusez pas, maintenant je le sais. Sorti d’un autre lit, vous venez dans le nôtre Porter des bras meurtris sous les baisers d’une autre : Elle doit s’estimer heureuse, Dieu merci. De vous avoir pu mettre en l’état que voici. Celle-là ! car sans doute elle est belle, et je pense Qu’elle est femme à valoir qu’on se mette en dépense ! Je voudrais la connaître, et lui demanderais De m’enseigner un peu ses merveilleux secrets. Au moins, vous n’avez pas si peu d’intelligence De croire que ceci restera sans vengeance. Mon illustre seigneur ! Ah ! l’aimable roué ! Vous apprendrez à qui vous vous êtes joué ! Çà, vite en bas du lit, qu’on s’habille, et qu’on sorte ! Certes, j’espère bien vous traiter de la sorte Que vous me connaissiez, et de quel châtiment La Paquita punit l’outrage d’un amant ! » Elle parlait ainsi lorsque, tout effarée, La suivante accourut : « A la porte d’entrée, L’alcade et trois amis, qu’il amenait souper, Dit-elle, sont en bas qui viennent de frapper ! — Bien ! dit la Paquita ; c’est le ciel qui l’envoie ! — Ah ! señora ! pour vous, gardez que l’on me voie ! — Au contraire, dit l’autre. Allez ouvrir ! merci. Mon Dieu ; je t’appelais, Vengeance ; te voici ! » Et sitôt que la duègne en bas fut descendue, La dame de crier : « A moi ! je suis perdue ! Au viol ! je me meurs ! au secours ! au secours ! Au meurtre ! à l’assassin ! Ah ! mon seigneur, accours ! » Tout en disant cela, furieuse, éperdue, Au cou de Gabriel elle s’était pendue. Le serrait avec rage, et semblait repousser Ses deux bras qu’elle avait contraints à l’embrasser ; Et lui, troublé, la tête encor tout étourdie, Se prêtait à ce jeu d’horrible comédie, Sans deviner, hélas ! que, pour son châtiment, C’était faire un prétexte et servir d’instrument ! L’alcade cependant, à ces cris de détresse, Accourt en toute hâte auprès de sa maîtresse : « Seigneur ! c’est le bon Dieu qui vous amène ici ; Vengez-vous, vengez-moi ! Cet homme que voici, Pour me déshonorer, ce soir, dans ma demeure… — Femme, n’achevez pas, dit l’alcade ; qu’il meure ! — Qu’il meure ; reprit-elle. — Oui ; mais je ne veux pas Lui taire de ma main un si noble trépas ; Çà, messieurs, qu’on l’emmène, et que chacun pâlisse En sachant à la fois le crime et le supplice ! » Gabriel, cependant, s’étant un peu remis. Tenta de résister ; mais pour quatre ennemis, Hélas ! il était seul, et sa valeur trompée Demanda vainement secours à son épée ; Elle s’était brisée en sa main : il fallut Se rendre, et se soumettre à tout ce qu’on voulut. Devant la haute cour on instruisit l’affaire ; Le procès alla vite, et quoi que pussent faire Ses amis, ses parents et leur vaste crédit. Qu’au promoteur fiscal don Gabriel eût dit : « C’est un horrible piège où l’on veut me surprendre. Un crime ! je suis noble, et je dois vous apprendre, Seigneur, qu’on n’a jamais trouvé dans ma maison De rouille sur l’épée ou de tache au blason ! Seigneur, c’est cette femme elle-même, j’en jure Par ce Christ qui m’entend et punit le parjure. Qui m’avait introduit dans son appartement ; Et comment voulez-vous qu’à pareille heure ?… — Il ment ! Disait la Paquita ; d’ailleurs la chose est claire. J’ai mes témoins : il faut une peine exemplaire. Car je vous l’ai promis, et qu’un juste trépas Me venge d’un affront que vous n’ignorez pas ! » VI Or, s’il faut maintenant, lecteur, qu’on vous apprenne — La fin de tout ceci, par la cour souveraine Il fut jugé coupable à l’unanimité ; Et comme il était noble, il fut décapité.

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    A

    Alexis-Félix Arvers

    @alexisFelixArvers

    L’anniversaire Oh ! qui me donnera d’aller dans vos prairies, Promener chaque jour mes tristes rêveries, Rivages fortunés où parmi les roseaux L’Yonne tortueuse égare au loin ses eaux ! Oui, je veux vous revoir, poétiques ombrages, Bords heureux, à jamais ignorés des orages, Peupliers si connus, et vous, restes touchants, Qui m’avez inspiré jadis mes premiers chants

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    G

    Gaston Couté

    @gastonCoute

    L’école Les p’tiots matineux sont ’jà par les ch’mins Et, dans leu’ malett’ de grousse touél’ blue Qui danse et berlance en leu’ tapant l’cul, I’s portent des liv’s à coûté d’leu pain. L’matin est joli coumm’ trent’-six sourires, Le souleil est doux coumm’ les yeux des bêtes… La vie ouvre aux p’tiots son grand liv’ sans lett’es Oùsqu’on peut apprend’ sans la pein’ de lire : Ah ! les pauv’s ch’tiots liv’s que ceuss’ des malettes ! La mouésson est mûre et les blés sont blonds ; I’ s’ pench’nt vars la terr’ coumm’ les tâcherons . Qui les ont fait v’ni’ et les abattront : Ça sent la galette au fournil des riches Et, su’la rout’, pass’nt des tireux d’pieds d’biche. Les chiens d’ deux troupets qui vont aux pâtis, Les moutons itou et les mé’s barbis Fray’nt et s’ent’erlich’nt au long des brémailles Malgré qu’les bargers se soyin bouquis Un souér d’assemblé’, pour eune garçaille. Dans les ha’s d’aubier qu’en sont ros’s et blanches, Les moignieaux s’accoupl’nt, à tout bout de branches, Sans s’douter qu’les houmm’s se mari’nt d’vant l’maire, Et i’s s’égosill’nt à quérrier aux drôles L’Amour que l’on r’jitt’ des liv’s’de l’école Quasi coumme eun’ chous’ qui s’rait pas à faire. A l’oré’ du boués, i’ s’trouve eun’ grand crouéx, Mais les peupéiers sont pus grands dans l’boués. L’fosséyeux encave un mort sous eun’ pierre, On baptise au bourg : les cloches sont claires Et les vign’s pouss’ vart’s, sur l’ancien cim’tiére ! Ah ! Les pauv’s ch’tiots liv’s que ceuss’ des malettes ! Sont s’ment pas foutus d’vous entrer en tète Et, dans c’ti qu’est là, y a d’quoué s’empli l’coeur ! A s’en empli l’coeur, on d’vienrait des hoummes, Ou méchants ou bons – n’importe ben coumme! – Mais, vrais coumm’ la terre en friche ou en fleurs, L’souleil qui fait viv’e ou la foud’ qui tue. Et francs, aussi francs que la franch’ Nature, Les p’tiots ont marché d’leu’s p’tit’s patt’s, si ben Qu’au-d’ssus des lopins de seigle et d’luzarne, Gris’ coumme eun’ prison, haut’ coumme eun’ casarne L’Ecole est d’vant eux qui leu’ bouch’ le ch’min. L’mét’ d’école les fait mett’e en rangs d’ougnons Et vire à leu’têt’ coumme un général :  » En r’tenu’, là-bas !… c’ti qui pivott’ mal !… » Ça c’est pou’ l’cougner au méquier d’troufion. On rent’ dans la classe oùsqu’y a pus bon d’Guieu : On l’a remplacé par la République ! De d’ssus soun estrad’ le met’ leu-z-explique C’qu’on y a expliqué quand il ‘tait coumme eux. I’leu’ conte en bieau les tu’ri’s d’ l’Histouére, Et les p’tiots n’entend’nt que glouère et victouére : I’ dit que l’travail c’est la libarté, Que l’Peuple est souv’rain pisqu’i’ peut voter, Qu’les loués qu’instrument’nt nous bons députés Sont respectab’s et doiv’nt êt respectées, Qu’faut payer l’impôt…  » Môssieu, j’ai envie ! … – Non ! .., pasque ça vous arriv’ trop souvent ! » I veut démontrer par là aux enfants Qu’y a des régu’s pour tout, mêm’ pou’la vessie Et qu’i’ faut les suiv’déjà, dret l’école. I’pétrit à mêm’ les p’tits çarvell’s molles, I’rabat les fronts têtus d’eun’ calotte, I’ varse soun’ encr’ su’ les fraîch’s menottes Et, menteux, fouéreux, au sortu’ d’ses bancs Les p’tiots sont pus bons qu’â c’qu’i’ les attend: Ça f’ra des conscrits des jours de r’vision Traînant leu’ drapieau par tous les bordels, Des soldats à fout’e aux goul’s des canons Pour si peu qu’les grous ayin d’la querelle, Des bûcheux en grippe aux dents des machines, Des bons citoyens à jugeotte d’ouée : Pousseux d’bull’tins d’vote et cracheux d’impôts, Des cocus devant l’Eglise et la Loué Qui bav’ront aux lév’s des pauv’s gourgandines, Des hounnètes gens, des gens coumme i’faut Qui querv’ront, sarrant l’magot d’un bas d’laine, Sans vouer les étouel’s qui fleuriss’nt au ciel Et l’Avri’ en fleurs aux quat’ coins d’la plaine !… Li ! l’vieux met’ d’école, au fin bout d’ses jours Aura les ch’veux blancs d’un déclin d’âg’ pur ; I’ s’ra ensarré d’l’estime d’tout l’bourg Et touch’ra les rent’s du gouvernement… Le vieux maît’ d’écol’ ne sera pourtant Qu’un grand malfaiseux devant la Nature !..

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    Germain Nouveau

    Germain Nouveau

    @germainNouveau

    Les cathédrales Mais gloire aux cathédrales ! Pleines d’ombre et de feux, de silence et de râles, Avec leur forêt d’énormes piliers Et leur peuple de saints, moines et chevaliers, Ce sont des cités au-dessus des villes, Que gardent seulement les sons irréguliers De l’aumône, au fond des sébiles, Sous leurs porches hospitaliers. Humblement agenouillées Comme leurs sœurs des champs dans les herbes mouillées, Sous le clocher d’ardoise ou le dôme d’étain, Où les angélus clairs tintent dans le matin, Les églises et les chapelles Des couvents, Tout au loin vers elles, Mêlent un rire allègre au rire amer des vents, En joyeuses vassales ; Mais elles, dans les cieux traversés des vautours, Comme au cœur d’une ruche, aux cages de leurs tours, C’est un bourdonnement de guêpes colossales. Voyez dans le nuage blanc Qui traverse là-haut des solitudes bleues, Par-dessus les balcons d’où l’on voit les banlieues, Voyez monter la flèche au coq étincelant, Qui, toute frémissante et toujours plus fluette, Défiant parfois les regards trop lents, Va droit au ciel se perdre, ainsi que l’alouette. Ceux-là qui dressèrent la tour Avec ses quatre rangs d’ouïes Qui versent la rumeur des cloches éblouies, Ceux qui firent la porte avec les saints autour, Ceux qui bâtirent la muraille, Ceux qui surent ployer les bras des arcs-boutants, Dont la solidité se raille Des gifles de l’éclair et des griffes du temps ; Tous ceux dont les doigts ciselèrent Les grands portails du temple, et ceux qui révélèrent Les traits mystérieux du Christ et des Élus, Que le siècle va voir et qu’il ne comprend plus ; Ceux qui semèrent de fleurs vives Le vitrail tout en flamme au cadre des ogives Ces royaux ouvriers et ces divins sculpteurs Qui suspendaient au ciel l’abside solennelle, Dont les ciseaux pieux criaient dans les hauteurs, N’ont point gravé leur nom sur la pierre éternelle ; Vous les avez couverts, poudre des parchemins ! Vous seules les savez, vierges aux longues mains ! Vous, dont les Jésus rient dans leurs barcelonnettes, Artistes d’autrefois, où vous reposez-vous ? Sous quelle tombe où l’on prie à genoux ? Et vous, mains qui tendiez les nerfs des colonnettes, Et vous, doigts qui semiez De saintes le portail où nichent les ramiers, Et qui, dans les rayons dont le soleil l’arrose, Chaque jour encor faites s’éveiller La rosace, immortelle rose Que nul vent ne vient effeuiller ! Ô cathédrales d’or, demeures des miracles Et des soleils de gloire échevelés autour Des tabernacles De l’amour ! Vous qui retentissez toujours de ses oracles, Vaisseaux délicieux qui voguez vers le jour ! Vous qui sacrez les rois, grandes et nobles dames, Qui réchauffez les cœurs et recueillez les âmes Sous votre vêtement fait en forme de croix ! Vous qui voyez, ô souveraines, La ville à vos genoux courber ses toits ! Vous dont les cloches sont, fières de leurs marraines, Comme un bijou sonore à l’oreille des reines ! Vous dont les beaux pieds sont de marbre pur ! Vous dont les voiles Sont d’azur ! Vous dont la couronne est d’étoiles ! Sous vos habits de fête ou vos robes de deuil, Vous êtes belles sans orgueil ! Vous montez sans orgueil vos marches en spirales Qui conduisent au bord du ciel, Ô magnifiques cathédrales, Chaumières de Jésus, Bethléem éternel ! Si longues, qu’un brouillard léger toujours les voile ; Si douces, que la lampe y ressemble à l’étoile, Les nefs aux silences amis, Dans l’air sombre des soirs, dans les bancs endormis, Comptent les longs soupirs dont tremble un écho chaste Et voient les larmes d’or où l’âme se répand, Sous l’œil d’un Christ qui semble, en son calvaire vaste, Un grand oiseau blessé dont l’aile lasse pend. Ah ! bienheureux le cœur qui, dans les sanctuaires, Près des cierges fleuris qu’allument les prières, Souvent, dans l’encens bleu, vers le Seigneur monta, Et qui, dans les parfums mystiques, écouta Ce que disent les croix, les clous et les suaires, Et ce que dit la paix du confessionnal, Oreille de l’amour que l’homme connaît mal !… Avec sa grille étroite et son ombre sévère, Ô sages, qui parliez autour du Parthénon, Le confessionnal, c’est la maison de verre À qui Socrate rêve et qui manque à Zénon ! Grandes ombres du Styx, me répondrez-vous : non ?… Ce que disent les cathédrales, Soit qu’un baptême y jase au bord des eaux lustrales, Soit qu’au peuple, autour d’un cercueil, Un orgue aux ondes sépulcrales Y verse un vin funèbre et l’ivresse du deuil, Soit que la foule autour des tables S’y presse aux repas délectables, Soit qu’un prêtre vêtu de blanc Y rayonne au fond de sa chaise, Soit que la chaire y tonne ou soit qu’elle se taise, Heureux le cœur qui l’écoute en tremblant ! Heureux celui qui vous écoute, Vagues frémissements des ailes sous la voûte ! Comme une clé qui luit dans un trousseau vermeil Quand un rayon plus rouge aux doigts d’or du soleil A clos la porte obscure au seuil de chaque église, Quand le vitrail palpite au vol de l’heure grise, Quand le parvis plein d’ombre éteint toutes ses voix, Ô cathédrales, je vous vois Semblables au navire émergeant de l’eau brune, Et vos clochetons fins sont des mâts sous la lune ; D’invisibles ris sont largués, Une vigie est sur la hune, Car immobiles, vous voguez, Car c’est en vous que je vois l’arche Qui, sur l’ordre de Dieu, vers Dieu s’est mise en marche ; La race de Noé gronde encor dans vos flancs ; Vous êtes le vaisseau des immortels élans, Et vous bravez tous les désastres. Car le maître est Celui qui gouverne les astres, Le pilote, Celui qui marche sur les eaux… Laissez, autour de vous, pousser aux noirs oiseaux Leur croassement de sinistre augure ; Allez, vous êtes la figure Vivante de l’humanité ; Et la voile du Christ à l’immense envergure Mène au port de l’éternité.

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    Germain Nouveau

    Germain Nouveau

    @germainNouveau

    Sonnet d’été Nous habiterons un discret boudoir, Toujours saturé d’une odeur divine, Ne laissant entrer, comme on le devine, Qu’un jour faible et doux ressemblant au soir. Une blonde frêle en mignon peignoir Tirera des sons d’une mandoline, Et les blancs rideaux tout en mousseline Seront réfléchis par un grand miroir. Quand nous aurons faim, pour toute cuisine Nous grignoterons des fruits de la Chine, Et nous ne boirons que dans du vermeil ; Pour nous endormir, ainsi que des chattes Nous nous étendrons sur de fraîches nattes ; Nous oublirons tout, – même le soleil !

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    Grégory Rateau

    @gregoryRateau

    Beyrouth « Ce ne peut être que la fin du monde, en avançant. » Rimbaud Un taxi noir, Celui d’après minuit, Mon chauffeur slame, Mixe de plusieurs langues, Et ses sourcils de loup-garou, Dans les nuits fauves de Beyrouth, Cette montagne dressée au loin, Constellation d’un Pollock en transe, Je décroche À côté de mes pompes, Tel un somnambule, La ville jappe, Puis bat la mesure en rythme, Par la fenêtre Des fils électriques tressés à l’infini, Tout va trop vite, Ça défile, Appartements percés de part en part, Éclats de balle, Des trous de la taille d’un obus, Un goût de poussière, Odeur de pneus brûlés, Ma tête prête à exploser, Comme si des doigts essayaient de me faire avouer Mais quoi ? Je délire, Un gamin court après la voiture, Le feu passe au rouge, Des scooters nous tournent autour, Haine de l’étranger, Je fonce Sur les bords de mer, La lune fait du sur-place, Le ciel pris de folie, Des lucioles rebondissent sur le sable, Des chars défilent, Tremblement, La terre entame son solo de jazz, Je rêve d’une femme, La peau claire, Aux cheveux noirs, Mais j’ai droit à la lampe d’un militaire, Braquée sur mon désir, Il nous fait ranger sur le bas-côté, Fouille au corps, Vérification des papiers, Le loup-garou ne veut pas aller plus loin, Je longe la plage, Des couples se cachent dans des voitures Tous phares éteints, Dans l’eau, elle est là, La femme à la peau claire, Aux cheveux noirs, Elle n’a pas peur des flammes, Des reflets brûlants sur les vagues, Nous plongeons Sous l’eau, une autre nuit, Une longue phrase, Sans un mot, « A love » suprême.

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    Grégory Rateau

    @gregoryRateau

    Ma banlieue Elle se dresse De toutes ses flaques bileuses Relents d’herbes souillées Ce bout de nulle part Ce Pôle nord parisien De mon sous-sol humide Je la contemple aux heures creuses Quand les nuages forment comme un deuxième ciel Je trace alors une ligne droite Vers la grande ville Et dans ce lointain poussif J’idéalise toutes ses lumières Par-delà le périph J’entrevois même ses boulevards Des peaux ocre qui fusionnent dans la même toile Des femmes voilées dans des trench-coats très bien ficelés Mais soudain, la lumière décline Seule la grisaille persiste Cette même teinte uniforme encore et toujours Elle me rentre dans les poumons Ce sentiment récurrent d’être de trop D’être loin de tout De mon centre De l’enfant En équilibre constant sur ce point mort Dont le projet d’ensemble me restera inconnu Face à des toboggans statiques Des chaises de bistrot déformées A force d’accueillir les mêmes chômeurs sans cesse affalés A contempler depuis les coulisses Ces affiches surannées Scotchées moult et moult fois par-dessus d’autres affiches Des témoins oubliés Qui ont fait vœux de silence

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    Grégory Rateau

    @gregoryRateau

    Îles d’Aran Surdité de la roche enseigne érodée un phare dans une lucarne les sanglots de la mer en ricochets glissent sur le silence des buveurs une pinte, deux pintes… molle continuité Calfeutrée devant la cheminée la vieille remet une tourbe claquant sa langue à chaque crépitement un gros nuage orphelin rejoint le troupeau éclaircie virale la lumière mousse drue Les mêmes gueules d’échoués dans le miroir éventré l’écho de la mer jusqu’à la nausée les filets roulés aux pieds du sel au coin des yeux un naufrage de mémoire

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    A l'Italie A Ardengo Soffici L'amour a remué ma vie comme on remue la terre dans la zone des armées J'atteignais l'âge mûr quand la guerre arriva Et dans ce jour d'août 1915 le plus chaud de l'année Bien abrité dans l'hypogée que j'ai creusé moi-même C'est à toi que je songe Italie mère de mes pensées Et déjà quand von Kluck marchait sur Paris avant la Marne J'évoquais le sac de Rome par les Allemands Le sac de Rome qu'ont décrit Un Bonaparte le vicaire espagnol Delicado et l'Arétin Je me disais Est-il possible que la nation Qui est la mère de la civilisation Regarde sans la défendre les efforts qu'on fait pour la détruire Puis les temps sont venus les tombes se sont ouvertes Les fantômes des Esclaves toujours frémissants Se sont dressés en criant SUS AUX TUDESQUES Nous l'armée invisible aux cris éblouissants Plus doux que n'est le miel et plus simples qu'un peu de terre Nous te tournons bénignement le dos Italie Mais ne t'en fais pas nous t'aimons bien Italie mère qui es aussi notre fille Nous sommes là tranquillement et sans tristesse Et si malgré les masques les sacs de sable les rondins nous tombions Nous savons qu'un autre prendrait notre place Et que les Armées ne périront jamais Les mois ne sont pas longs ni les jours ni les nuits C'est la guerre qui est longue Italie Toi notre mère et notre fille quelque chose comme une sœur J'ai comme toi pour me réconforter Le quart de pinard Qui met tant de différence entre nous et les Boches J'ai aussi comme toi l'envol des compagnies de perdreaux des 75 Comme toi je n'ai pas cet orgueil sans joie des Boches et je sais rigoler Je ne suis pas sentimental à l'excès comme le sont ces gens sans mesure que leurs actions dépassent sans qu'ils sachent s'amuser Notre civilisation a plus de finesse que les choses qu'ils emploient Elle est au-delà de la vie confortable Et de ce qui est l'extérieur dans l'art et l'industrie Les fleurs sont nos enfants et non les leurs Même la fleur de lys qui meurt au Vatican La plaine est infinie et les tranchées sont blanche$ Les avions bourdonnent ainsi que des abeilles Sur les roses momentanées des éclatements Et les nuits sont parées de guirlandes d'éblouissements De bulles de globules aux couleurs insoupçonnées Nous jouissons de tout même de nos souffrances Notre humeur est charmante l'ardeur vient quand il faut Nous sommes narquois car nous savons faire la part des choses Et il n'y a pas plus de folie chez celui qui jette les grenades que chez celui qui plume les patates Tu aimes un peu plus que nous les gestes et les mots sonores Tu as à ta disposition les sortilèges étrusques le sens de la majesté héroïque et le courageux honneur individuel Nous avons le sourire nous devinons ce qu'on ne nous dit pas nous sommes démerdards et même ceux qui se dégonflent sauraient à l'occasion faire preuve de l'esprit de sacrifice qu'on appelle la bravoure Et nous fumons du gros avec volupté C'est la nuit je suis dans mon blockhaus éclairé par l'électricité en bâton Je pense à toi pays des 2 volcans Je salue le souvenir des sirènes et des scylles mortes au moment de Messine Je salue le Colleoni équestre de Venise Je salue la chemise rouge Je t'envoie mes amitiés Italie et m'apprête à applaudir aux hauts faits de ta bleusaille Non parce que j'imagine qu'il y aura jamais plus de bonheur ou de malheur en ce monde Mais parce que comme toi j'aime à penser seul et que les Boches m'en empêcheraient Mais parce que le goût naturel de la perfection que nous avons l'un et l'autre si on les laissait faire serait vite remplacé par je ne sais quelles commodités dont je n'ai que faire Et surtout parce que comme toi je sais je veux choisir et qu'eux voudraient nous forcer à ne plus choisir Une même destinée nous lie en cette occase Ce n'est pas pour l'ensemble que je le dis Mais pour chacun de toi Italie Ne te borne point à prendre les terres irrédentes Mets ton destin dans la balance où est la nôtre Les réflecteurs dardent leurs lueurs comme des yeux d'escargots Et les obus en tombant sont des chiens qui jettent de la terre avec leurs pattes après avoir fait leurs besoins Notre armée invisible est une belle nuit constellée Et chacun de nos hommes est un astre merveilleux O nuit ô nuit éblouissante Les morts sont avec nos soldats Les morts sont debout dans les tranchées Ou se glissent souterrainement vers les Bien-Aimécs O Lille Saint-Quentin Laon Maubeuge Vouziers Nous jetons nos villes comme des grenades Nos fleuves sont brandis comme des sabres Nos montagnes chargent comme cavalerie Nous reprendrons les villes les fleuves et les collines De la frontière helvétique aux frontières bataves Entre toi et nous Italie Il y a des patelins pleins de femmes Et près de toi m'attend celle que j'adore O Frères d'Italie Ondes nuages délétères Métalliques débris qui vous rouillez partout O frères d'Italie vos plumes sur la tête Italie Entends crier Louvain vois Reims tordre ses bras Et ce soldat blessé toujours debout Arras Et maintenant chantons ceux qui sont morts Ceux qui vivent Les officiers les soldats Les flingots Rosalie le canon la fusée l'hélice la pelle les chevaux Chantons les bagues pâles les casques Chantons ceux qui sont morts Chantons la terre qui bâille d'ennui Chantons et rigolons Durant des années Italie Entends braire l'âne boche Faisons la guerre à coups de fouets Faits avec les rayons du soleil Italie Chantons et rigolons Durant des années

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    A la Santé I Avant d’entrer dans ma cellule Il a fallu me mettre nu Et quelle voix sinistre ulule Guillaume qu’es-tu devenu Le Lazare entrant dans la tombe Au lieu d’en sortir comme il fit Adieu Adieu chantante ronde Ô mes années ô jeunes filles II Non je ne me sens plus là Moi-même Je suis le quinze de la Onzième Le soleil filtre à travers Les vitres Ses rayons font sur mes vers Les pitres Et dansent sur le papier J’écoute Quelqu’un qui frappe du pied La voûte III Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promène Tournons tournons tournons toujours Le ciel est bleu comme une chaîne Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promène Dans la cellule d’à côté On y fait couler la fontaine Avec le clefs qu’il fait tinter Que le geôlier aille et revienne Dans la cellule d’à coté On y fait couler la fontaine IV Que je m’ennuie entre ces murs tout nus Et peint de couleurs pâles Une mouche sur le papier à pas menus Parcourt mes lignes inégales Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur Toi qui me l’as donnée Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur Le bruit de ma chaise enchainée Et tour ces pauvres coeurs battant dans la prison L’Amour qui m’accompagne Prends en pitié surtout ma débile raison Et ce désespoir qui la gagne V Que lentement passent les heures Comme passe un enterrement Tu pleureras l’heure ou tu pleures Qui passera trop vitement Comme passent toutes les heures VI J’écoute les bruits de la ville Et prisonnier sans horizon Je ne vois rien qu’un ciel hostile Et les murs nus de ma prison Le jour s’en va voici que brûle Une lampe dans la prison Nous sommes seuls dans ma cellule Belle clarté Chère raison

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Allons plus vite Et le soir vient et les lys meurent Regarde ma douleur beau ciel qui me l’envoies Une nuit de mélancolie Enfant souris ô sœur écoute Pauvres marchez sur la grand-route Ô menteuse forêt qui surgis à ma voix Les flammes qui brûlent les âmes Sur le boulevard de Grenelle Les ouvriers et les patrons Arbres de mai cette dentelle Ne fais donc pas le fanfaron Allons plus vite nom de Dieu Allons plus vite Tous les poteaux télégraphiques Viennent là-bas le long du quai Sur son sein notre République A mis ce bouquet de muguet Qui poussait dru le long du quai Allons plus vite nom de Dieu Allons plus vite La bouche en cœur Pauline honteuse Les ouvriers et les patrons Oui-dà oui-dà belle endormeuse Ton frère Allons plus vite nom de Dieu Allons plus vite

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Aquarelliste À Mademoiselle Yvonne M… Yvonne sérieuse au visage pâlot A pris du papier blanc et des couleurs à l’eau Puis rempli ses godets d’eau claire à la cuisine. Yvonnette aujourd’hui veut peindre. Elle imagine De quoi serait capable un peintre de sept ans. Ferait-elle un portrait ? Il faudrait trop de temps Et puis la ressemblance est un point difficile À saisir, il vaut mieux peindre de l’immobile Et parmi l’immobile inclus dans sa raison Yvonnette a fait choix d’une belle maison Et la peint toute une heure en enfant douce et sage. Derrière la maison s’étend un paysage Paisible comme un front pensif d’enfant heureux, Un paysage vert avec des monts ocreux. Or plus haut que le toit d’un rouge de blessure Monte un ciel de cinabre où nul jour ne s’azure. Quand j’étais tout petit aux cheveux longs rêvant, Quand je stellais le ciel de mes ballons d’enfant, Je peignais comme toi, ma mignonne Yvonnette, Des paysages verts avec la maisonnette, Mais au lieu d’un ciel triste et jamais azuré J’ai peint toujours le ciel très bleu comme le vrai.

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Arbre A Frédéric Boutet. Tu chantes avec les autres tandis que les phonographes galopent Où sont les aveugles où sont-ils allés La seule feuille que j’aie cueillie s’est changé en plusieurs mirage Ne m’abandonnez pas parmi cette foule de femmes au marché Ispahan s’est fait un ciel de carreaux émaillés de bleu Et je remonte avec vous une route aux environs de Lyon Je n’ai pas oublié le son de la clochette d’un marchand de coco d’autrefois J’entends déjà le son aigre de cette voix à venir Du camarade qui se promène avec toi en Europe Tout en restant en Amérique Un enfant Un veau dépouillé pendu à l’étal Un enfant Et cette banlieue de sable autour d’une pauvre ville au fond de l’est Un douanier se tenait là comme un ange À la porte d’un misérable paradis Et ce voyageur épileptique écumait dans la salle d’attente des premières Engoulevent Blaireau Et la Taupe-Ariane Nous avions loué deux coupés dans le transsibérien Tour à tour nous dormions le voyageur en bijouterie et moi Mais celui qui veillait ne cachait point un revolver armé Tu t’es promené à Leipzig avec une femme mince déguisé en homme Intelligence car voilà ce que c’est qu’une femme intelligente Et il ne faudrait pas oublier les légendes Dame-Abonde dans un tramway la nuit au fond d’un quartier désert Je voyais une chasse tandis que je montais Et l’ascenseur s’arrêtait à chaque étage Entre les pierres Entre les vêtements multicolores de la vitrine Entre les charbons ardents du marchand de marrons Entre deux vaisseaux norvégiens amarrés à Rouen Il y a ton image Elle pousse entre les bouleaux de la Finlande Ce beau nègre en acier La plus grande tristesse C’est quand tu reçus une carte postale de La Corogne Le vent vient du couchant Le métal des caroubiers Tout est plus triste qu’autrefois Tous les dieux terrestres vieillissent L’univers se plaint par ta voix Et des êtres nouveaux surgissent Trois par trois

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Hôtels La chambre est veuve Chacun pour soi Présence neuve On paye au mois Le patron doute Payera-t-on Je tourne en route Comme un toton Le bruit des fiacres Mon voisin laid Qui fume un âcre Tabac anglais Ô La Vallière Qui boite et rit De mes prières Table de nuit Et tous ensemble Dans cet hôtel Savons la langue Comme à Babel Fermons nos portes À double tour Chacun apporte Son seul amour

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Palais Vers le palais de Rosemonde au fond du Rêve Mes rêveuses pensées pieds nus vont en soirée Le palais don du roi comme un roi nu s’élève Des chairs fouettées de roses de la roseraie On voit venir au fond du jardin mes pensées Qui sourient du concert joué par les grenouilles Elles ont envie des cyprès grandes quenouilles Et le soleil miroir des roses s’est brisé Le stigmate sanglant des mains contre les vitres Quel archer mal blessé du couchant le troua La résine qui rend amer le vin de Chypre Ma bouche aux agapes d’agneau blanc l’éprouva Sur les genoux pointus du monarque adultère Sur le mai de son âge et sur son trente et un Madame Rosemonde roule avec mystère Ses petits yeux tout ronds pareils aux yeux des Huns Dame de mes pensées au cul de perle fine Dont ni perle ni cul n’égale l’orient Qui donc attendez-vous De rêveuses pensées en marche à l’Orient Mes plus belles voisines Toc toc Entrez dans l’antichambre le jour baisse La veilleuse dans l’ombre est un bijou d’or cuit Pendez vos têtes aux patères par les tresses Le ciel presque nocturne a des lueurs d’aiguilles On entra dans la salle à manger les narines Reniflaient une odeur de graisse et de graillon On eut vingt potages dont trois couleur d’urine Et le roi prit deux œufs pochés dans du bouillon Puis les marmitons apportèrent les viandes Des rôtis de pensées mortes dans mon cerveau Mes beaux rêves mort-nés en tranches bien saignantes Et mes souvenirs faisandés en godiveaux Or ces pensées mortes depuis des millénaires Avaient le fade goût des grands mammouths gelés Les os ou songe-creux venaient des ossuaires En danse macabre aux plis de mon cervelet Et tous ces mets criaient des choses nonpareilles Mais nom de Dieu ! Ventre affamé n’a pas d’oreilles Et les convives mastiquaient à qui mieux mieux Ah ! nom de Dieu ! qu’ont donc crié ces entrecôtes Ces grands pâtés ces os à moelle et mirotons Langues de feu où sont-elles mes pentecôtes Pour mes pensées de tous pays de tous les temps

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Un soir Un aigle descendit de ce ciel blanc d’archanges Et vous soutenez-moi Laisserez-vous trembler longtemps toutes ces lampes Priez priez pour moi La ville est métallique et c’est la seule étoile Noyée dans tes yeux bleus Quand les tramways roulaient jaillissaient des feux pâles Sur des oiseaux galeux Et tout ce qui tremblait dans tes yeux de mes songes Qu’un seul homme buvait Sous les feux de gaz roux comme la fausse oronge Ô vêtue ton bras se lovait Vois l’histrion tire la langue aux attentives Un fantôme s’est suicidé L’apôtre au figuier pend et lentement salive Jouons donc cet amour aux dés Des cloches aux sons clairs annonçaient ta naissance Vois Les chemins sont fleuris et les palmes s’avancent Vers toi

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    À travers l’Europe A M. Ch Rotsoge Ton visage écarlate ton biplan transformable en hydroplan Ta maison ronde où il nage un hareng saur Il me faut la clef des paupières Heureusement que nous avons vu M Panado Et nous somme tranquille de ce côté-là Qu’est-ce que tu vois mon vieux M.D… 90 ou 324 un homme en l’air un veau qui regarde à travers le ventre de sa mère J’ai cherché longtemps sur les routes Tant d’yeux sont clos au bord des routes Le vent fait pleurer les saussaies Ouvre ouvre ouvre ouvre ouvre Regarde mais regarde donc Le vieux se lave les pieds dans la cuvette Una volta ho inteso dire chè vuoi je me mis à pleurer en me souvenant de vos enfances Et toi tu me montres un violet épouvantable Ce petit tableau où il y a une voiture m’a rappelé le jour Un jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rouges Où je m’en allais à la campagne avec une charmante cheminée tenant sa chienne en laisse Il n’y en a plus tu n’as plus ton petit mirliton La cheminée fume loin de moi des cigarettes russes La chienne aboie contre les lilas La veilleuse est consumée Sur la robe on chu des pétales Deux anneaux près des sandales Au soleil se sont allumés Mais tes cheveux sont le trolley À travers l’Europe vêtue de petits feux multicolores

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    Guy de Maupassant

    Guy de Maupassant

    @guyDeMaupassant

    Le moulin Fragment … Tandis que devant moi, Dans la clarté douteuse où s’ébauchait sa forme, Debout sur le coteau comme un monstre vivant Dont la lune sur l’herbe étalait l’ombre énorme, Un immense moulin tournait ses bras au vent. D’où vient qu’alors je vis, comme on voit dans un songe Quelque corps effrayant qui se dresse et s’allonge Jusqu’à toucher du front le lointain firmament, Le vieux moulin grandir si démesurément Que ses bras, tournoyant avec un bruit de voiles, Tout à coup se perdaient au milieu des étoiles, Pour retomber, brillant d’une poussière d’or Qu’ils avaient dérobée aux robes des comètes ? Puis, comme pour revoir leurs sublimes conquêtes, A peine descendus, ils remontaient encor. (23-24 octobre 1897)

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    Guy de Maupassant

    Guy de Maupassant

    @guyDeMaupassant

    Légende de la chambre des demoiselles à Étretat Lentement le flot arrive Sur la rive Qu’il berce et flatte toujours. C’est un triste chant d’automne Monotone Qui pleure après les beaux jours. Sur la côte solitaire Est une aire Jetée au-dessus des eaux ; Un étroit passage y mène, Vrai domaine Des mauves et des corbeaux. C’est une grotte perdue, Suspendue Entre le ciel et les mers, Une demeure ignorée Séparée Du reste de l’univers. Jadis plus d’une gentille Jeune fille Y vint voir son amoureux ; On dit que cette retraite Si discrète A caché bien des heureux. On dit que le clair de lune Vit plus d’une Jouvencelle au coeur léger Prendre le sentier rapide, Intrépide Insouciante au danger. Mais comme un aigle tournoie Sur sa proie, Les guettait l’ange déchu, Lui qui toujours laisse un crime Où s’imprime L’ongle de son pied fourchu. Un soir près de la colline Qui domine Ce roc au front élancé, Une fillette ingénue Est venue Attendant son fiancé. Or celui qui perdit Eve, Sur la grève La suivit d’un pied joyeux ; « Hymen, dit-il, vous invite, « Venez vite, « La belle fille aux doux yeux, « Là-bas sur un lit de roses « Tout écloses « Vous attend le jeune Amour ; « Pour accomplir ses mystères « Solitaires « Il a choisi cette tour. » Elle était folle et légère, L’étrangère, Hélas, et n’entendit pas Pleurer son ange fidèle, Et près d’elle Satan qui riait tout bas. Car elle suivit son guide Si perfide Et par le sentier glissant. Bat la rive Mais lui, félon, de la cime, Dans l’abîme Il la jeta, – Dieu Puissant ! Son ombre pâle est restée Tourmentée, Veillant sur l’étroit chemin. Sitôt que de cette roche On approche Elle étend sa blanche main. Depuis qu’en ces lieux, maudite Elle habite, Aucun autre n’est tombé. C’est ainsi qu’elle se venge De l’archange Auquel elle a succombé. Allez la voir, Demoiselles, Jouvencelles Que mon récit attrista, Car pour vous la renommée L’a nommée Cette grotte d’Étretat ! A son pied le flot arrive Bat la rive Qu’il berce et flatte toujours. C’est un triste chant d’automne Monotone Qui pleure après les beaux jours. (15 décembre 1922)

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    Guy le Fevre de la Boderie

    @guyLeFevreDeLaBoderie

    A Monsieur Desprez, Parisien Mon Desprez, si je suis d'esprit pesant et sombre, Si je suis Taciturne, et songeard quelquesfois Comme si un Démon m'avoit humé la voix Au trou Trofonien * plein de nuage et d'ombre, Sache que c'est le corps qui me geine, et m'encombre, Et le travail oyseux où souvent tu me vois M'a rendu solitaire à la ville et aux bois Pour tousjours remirer le principe du nombre. Les raiz de ma pensée autrefois écartez, A voir objets divers, sont tellement artez Et clos au Pavillon où se loge ma fée, Que je n'en sçauroy plus mon nuage briser Ni fors à un seul point en tout le rond viser Car bongré maugré moy toujours L'UN GUIDE

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    À Madame Sand « Ce roc voûté par art, chef-d’oeuvre d’un autre âge, Ce roc de Tarascon hébergeait autrefois Les géants descendus des montagnes de Foix, Dont tant d’os excessifs rendent sûr témoignage. » O seigneur Du Bartas ! Je suis de ton lignage, Moi qui soude mon vers à ton vers d’autrefois ; Mais les vrais descendants des vieux Comtes de Foix Ont besoin de témoins pour parler dans notre âge. J’ai passé près Salzbourg sous des rochers tremblant ; La Cigogne d’Autriche y nourrit les Milans, Barberousse et Richard ont sacré ce refuge. La neige règne au front de leurs pies infranchis ; Et ce sont, m’a-t-on dit, les ossements blanchis Des anciens monts rongés par la mer du Déluge.

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    Gérard de Nerval

    Gérard de Nerval

    @gerardDeNerval

    Espagne Mon doux pays des Espagnes Qui voudrait fuir ton beau ciel, Tes cités et tes montagnes, Et ton printemps éternel ? Ton air pur qui nous enivre, Tes jours, moins beaux que tes nuits, Tes champs, où Dieu voudrait vivre S’il quittait son paradis. Autrefois ta souveraine, L’Arabie, en te fuyant, Laissa sur ton front de reine Sa couronne d’Orient ! Un écho redit encore A ton rivage enchanté L’antique refrain du Maure : Gloire, amour et liberté !

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    J

    Jean-Jacques Viton

    @jeanJacquesViton

    8 panneaux de ville J'imagine que les piétons qui avancent sans hésiter les conducteurs qui roulent tout droit sans ralentir ne poursuivront pas longtemps leur ligne unique je me dis qu'ils se décideront un jour à tourner à droite ou à gauche quelque part à obliquer dans une allée transversale ou à un carrefour s'engageront dans n'importe quelle autre rue et s'ils n'en trouvent pas de praticable ou s'ils n'ont pas de raisons particulières pour enfiler une ruelle une contre-allée un boulevard alors ils penseront à la corniche en bord de mer nous en avons une ici accessible dans les deux sens l'un par le Vieux-Port sur la gauche après le bassin du Carénage l'autre sur la plage du Prado à droite du David j'imagine que ces gens qui se fixent sur la ligne droite feront accomplir un angle de quelques bons degrés à leur ensemble corps-machine et réussiront bien à échapper à la ligne intransigeante harnachée de bandes blanches et d'abris transparents j'imagine que tous ces prisonniers de la piste en parlent seuls et rêvent qu'ils lui échappent mais je n'ai jamais entendu un fileur de ligne avouer je suis allé jusqu'au bout de la droite suivie je me suis arrêté en arrivant à l'horizon j'ai mis des années à avancer comme ça maintenant je suis mort de fatigue et d'ennui je voudrais revenir par un autre chemin mais je n'en trouve pas. Les fileurs de ligne droite ne connaisent personne chez qui aller qui habiterait un angle quelqu'un qui leur ferait signe d'un coin d'un bord d'un creux entre les grilles d'un portail sur la descente d'une cave un sédentaire qui s'exclamerait en surveillant l'heure ah ! c'est le moment de l'échappée ils arrivent ! et qui changerait la disposition des fleurs dans son séjour tapissé de chasses à courre qui rangerait les magazines mettrait un disque pourquoi pas Comme haute est la lune ferait le plein de bières et de vins dans son frigidaire inventerait un geste domestique un peu neuf capable de transformer une habitation ordinaire pour la venue de ces rescapés de la ligne droite anonyme mais je crois que c'est pour les captifs qui ne connaissent personne dans les trous de la ville que ces rails continus sont imposés remarquables sur les grandes cibles New York Mexico Paris Moscou peut-être aussi pour que cavaliers et fourgons jaillissent mieux et dévalent plus vite sur les bras des obliqueurs réunis dans un cortège une manifestation une émeute ce n'est pas ici la question mais ne l'oublions pas je veux dire que ces droites sont des lignes de tunnels ou les fuyards rapides ne sont jamais distraits regardez les pigeons sur les arbres des avenues ils volent en ligne droite dans l'axe du béton ils ne s'envolent jamais vers un autre quartier les plans des villes ressemblent à des cages. Je suis allé voir l'exposition Les Danses Tracées dessins et notations de quelques chorégraphes Nikolaïs Laban Saint-Point Wigman Duboc Huilmand Childs Larrieu dessins et quadrigrams de Nijinski et Trisha Brown les carnets rappellent les réseaux d'une gare de triage les empreintes de Dana Reitz ressemblent à des Soulages Cunningham écrit la danse est un acte visible de la vie ici la lune rousse aux saints de glace est une vision de nuit dans le bar La Canasta sur la sciure et les coques de cacahuètes les souliers frappent les aigus du raï projectiles de rythmes qui filent directement du transistor aux oreilles entre les tournées de Cristal et les flèches traçantes du téléphone à chaque appel un client agite la main pour indiquer qu'il n'est pas là j'ai l'impression de n'y être moi non plus pour personne je pourrais bien être ailleurs c'est vrai n'importe où il faut poser son verre payer sortir entrer dans un autre bar me dira-t-on on vous souhaite la bonnavenue ou bien on vous souhaite une bonne ligne droite était-ce une ligne brisée ou continue que je suivais un jour à Venise en Septembre 81 je descendais seul à onze heures le court escalier du pont de la calle dei Morti j'avais sur l'épaule une sacoche qui renfermait des fruits trois mètres plus bas j'allais quitter la zone de lumière pour entrer dans la zone des ombres d'un quartier inconnu tu ne pourras pas m'y suivre c'est toi qui prends la photo sur laquelle à sa fenêtre une femme te regarde. C'est en préparant une cigarette assis à une table devant une fenêtre d'une pièce qui donne sur un jardin c'est en triant du tabac sur le cuir d'une blague en soufflant pour la saisir sur une feuille de papier en pinçant la portion à fumer jusqu'au petit canal le caniveau que fait la feuille entre les doigts c'est en tassant comme une mécanique en tapotant le mince rouleau lavé de ses minuscules bûches c'est en passant la langue de droite à gauche puis de gauche à droite sur la ligne gommée du papier en calibrant encore une fois entre les phalanges pour donner sa forme à ce qui devient ma cigarette et que j'allume que je me dis après cette hiérarchie de gestes exacts jamais appris jamais confondus que j'ai besoin de donner cette liste d'actes automatiques rendus nécessaires autant que ceux qui me permettent d'ouvrir ou de fermer une porte comme ces gestes accomplis maintenant en tirant à moi la table pour ouvrir la fenêtre sur l'espace réservé de ce futur jardin planté d'obstacles déjà anciens brouette pelles tas de sable tréteaux pioches cercles bassins tas de gravier petites buttes sacs de ciment balisant l'étendue révélée jusqu'aux deux arbres indifférents amandier et olivier entre les trous d'eau à l'intérieur desquels les reflets sont rouilles c'est là que je me rends compte que le triangle de mer saisi au loin dans la vitre est un décor de trop. Elle doit aller à Nice. C'était prévu. Nous descendons ensemble. Je fais le marché. Je bois une pression. Le mistral est violent. Je remonte les vivres. Elle passe à l'atelier. Elle ferme les volets. J'écoute la radio. Je n'aime pas les voix russes. Je bois un Cristal. Surtout Les bateliers de la Volga. Exaspérant. Le folklore. Ni ceux qui disent tout aimer. Insupportable. Ça m'énerve. Le flamenco. Le blues. Les crotales de Cybèle. Les chants eskimos. La cornemuse écossaise. Les chasseurs pygmées. La cithare grecque. Les bergers corses. J'éteins la radio. Elle est dans le train. Je baisse le chauffage. Je ferme la porte. Je redescends. J'achète du vin. Je prends le métro. Je sors où il faut. Je bois un Cristal. Je traverse une Place. Je monte chez mes amis. Je déjeune avec eux. On parle de la Russie. Je reprends le métro. Je sors où il faut. Je ne sais pas quoi faire. Je note les horaires d'un film. Je bois une pression. Je ne pense à rien. Je remonte chez moi. J'enlève ma veste. Je me lave les mains. Je roule une cigarette. Je me fais un café. J'allume la radio. Je décide de travailler. J'invente une lettre. J'en écris trois. Je construis un voyage. Je relis le tout. Je fabrique une surprise. Je déchire la fiction. Je bois une grenadine. Je mange une amande. Je me déshabille. Je mets de vieux vêtements. Je me lave les dents. Je prépare du thé. J'en garde pour boire glacé. Je découpe un citron. J'ai envie de dormir. Impossible l'après-midi. Je suis désemparé. Je me fais un programme. Je classe des invitations. Je siffle des idioties. Je prépare un article. Je cherche trois livres. Je débranche le téléphone. Le soleil est trop fort. Je tire les rideaux. Je n'ai aucun désir. Je m'assois sans rien faire. Je ne suis plus là. J'entends le trafic. Et ce trafic de fumée dans le nuage du trafic-Haven la fumée du carbonisé dans ses colliers de caoutchouc corps saisi à terre ou corps volutes dans l'air quel espace éponges de fumées gonflées striées comme cerveau colosse hémisphères géants abreuvés de courants noirs compacts flottant soudés sur la tôle crevée sur la peau laquée par le feu je lis la mer se meurt la mer est morte quels sont les noms des disparus du tanker ou celui du gisant qui tend ses bras sans mains aux vivants mains dans les poches attroupés pour le cadrage de ces mêmes poses choisies aux guichets des hippodromes pour le classement des arrivées la dernière ligne droite la dernière image la dernière coulée du vent avant la pluie la dernière entrée du soleil sous le rideau de la chambre le dernier sommeil profond avant le rejet du drap la dernière bouchée la dernière parole inaudible le dernier baiser avant la fermeture automatique des portes la dernière mouette après l'arrivée de la nuit la dernière pierre le dernier verre le dernier coup la dernière pensée le dernier regard la dernière explication le dernier sens le dernier livre la dernière faute responsable les dernières réflexions faites seul à haute voix comment trier comment saisir cette vaisselle clandestine ces rigoles ces tuyaux comment prononcer ce trafic devant quelqu'un qui dirait savoir et avancerait la tête ferait très attention à tout et ne comprendrait rien. Je suis allé à midi sur les rochers de la Pointe-Rouge des blocs qui fortifient une cuvette pour barquasses moteur et voile fers à repasser modernes affalés bord à bord douze mois dans cette copie de port je ne touche pas au sandwich apporté il y a un couple allongé pas loin au soleil derrière une grue je vois la tête rouge de la fille très frisée elle sourit je suis assis dans le sens de l'immobilité face à la rade le dos appuyé à la tour gauloise de la capitainerie trente dériveurs dérivent sur une ligne droite imposée chargés d'enfants empêtrés dans leur gilet de survie un dinghy crasseux remonte la colonne piloté par un type en tricot vert il agite un porte-voix je suis dans le vent je n'entends pas ce qu'il crie en direction des gosses la coupole de la basilique de La Garde brille beaucoup gros bubon doré immanquable sur la colline riche les rades me font un effet terrible quelque chose taillé dans l'angoisse et le vide cousus ensemble je trouve les rades trop vastes et trop lointaines je les sais profondes froides bourrées de disparus porteuses de changements de vents et de couleurs et de courant contraires disloquant des plaques de j'arrive à regarder longtemps sans plaisir une rade sur laquelle tout ce qui flotte et bouge paraît suivre en douce les pointillés d'une route immergée cachée sous l'écume douteuse des vagues basses fabriquées je ne sais où misérables et obstinées. A l'heure où les bars de nuit sentent encore le tabac j'ai marché jusqu'au Vieux-Port il faisait beau et frais les oiseaux de mer étaient calmes à Nice elle devait dormir je téléphonerai avant le repas les chalutiers déchargeaient derrière les crieurs bottés le poisson luisait à côté des citrons et du persil arabe de la terrasse du Café je regardais ce grand décor il manquait des blazers roses des ombrelles des canotiers des saxophones et des danseurs de claquettes il manquait beaucoup de choses tout est devenu hostile et tiède la journée commençait mal à Leningrad pour se faire conduire plus sûrement en taxi proposer un dollar et un paquet de Marlboro au chauffeur il dira ne fumer que des Opal faites de tabac bulgare et qu'il appelle larmes des hommes m'a raconté Yvan Mignot au pâle aidait Claude Minière à désigner l'écriture menée contre l'envahissement du travail alimentaire dire au pâle plutôt qu'au noir est une magnifique dérision qui sublime la clandestinité de l'écrivain dans le social je téléphonerai à Nice après avoir mis au clair TRAFIC un poème où je commence par interroger la ligne droite où je poursuis par une narration d'événements et termine en répétant je suis allé jusqu'au bout de la ligne suivie je me suis arrêté en arrivant à l'horizon je ne sais quand j'ai mis des années à avancer comme ça maintenant je suis mort de fatigue et d'ennui et je voudrais revenir par un autre chemin je n'en trouve pas si j'en découvrais un tu ne m'y suivrais pas c'est toi qui prends la photo.

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    Jean-Pierre Villebramar

    @jeanPierreVillebramar

    Dune blanche « Je ne vis que pour me détacher et aborder le voyage cosmique de la mort » Myriam Montoya * Si je m’en vais, ne passe pas sous le grand chêne près du pont de bois si seule Si je m’en vais, ne pousse pas la porte de l’église, quand monte la marée elle effaça nos noms tant de fois point ne les trouveras sous le sable Ne vas pas sur la place de San Sebastian ni à Huesca pour les fêtes de San Lorenzo Sur la carte de notre Espagne à nous, trop de noms de lieux où toi et moi nous aimâmes d’amour Traverse la forêt, monte la dune regarde l’océan et je serai là où tu es dans les oyats là-haut, sur la dune blanche Villebramar, 2020

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    Jean-Pierre Villebramar

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    Fleuve bleu « l’acte poétique, comme l’acte de chair, tant qu’il dure, défend toute échappée sur la misère du monde » André Breton un jour, le téléphone sonne dans le vide et c’est le cœur qui serre si fort qu’il a aimé je vous souhaite d’avoir immensément aimé je vous souhaite d’avoir vu les ciels de feu et les orages sur le Fleuve Bleu de les avoir vécus intensément je vous souhaite d’avoir vécu immensément je vous souhaite de voir un ciel d’étoiles dans la nuit un soir où on se dit : l’amie ne répond plus et le ciel d’août brûle de larmes je vous souhaite de vous souvenir la longue terre et les couleurs des digues à Wuhan, où coule le Chang Jiang. Bouddha sourit Fleuve Bleu, Haut Aragon, Mali, Bandiagara, tant de falaises dans le monde où jamais tu n’iras. Je vous souhaite d’avoir vécu immensément intensément pour que serre le cœur si fort oui, qu’il vous serre encore très fort, très fort trop fort

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    Jean-Pierre Villebramar

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    Haute lande J’aime les nuages… les nuages qui passent… là-bas… là-bas… les merveilleux nuages! Charles Baudelaire Dans la Haute Lande je suis le cours d’un ruisseau, les traces de chevreuils et de sangliers me disent le chemin. Eau jaune. Écume blanche. Ciels bleus ciels gris, nuages, pluies et soleils et nous. Dans la lande, les ruisseaux ignorent le monde, ils suivent la pente de dunes anciennes. Que ne suis-je ruisseau moi-même descendant les dunes, laissant dans le sable des traces que bientôt brouilleront les passages de chevreuils. *** Dans la Haute Lande je suis le cours d’un ruisseau, descendant les dunes, laissant dans le sable des traces mon aimée et moi, nous donnant la main

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