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Titre : A mon fils

Auteur : Doëtte Angliviel

Le soir où dans ma chair je perçus ta présence, Ce miracle aux abords des déserts de la nuit, Quand je sus que de moi jaillirait ton enfance, Lumière du jet d'eau née à l'ombre du puits; Quand je te devinai comme la frêle graine Promise à la beauté de nacre de la fleur, Mes artères vers toi s'ouvrirent en fontaines Afin de te baigner de force et de vigueur. Mon fils, je ne fus plus que ferveur et qu'attente, Qu'arbre de vie ouvert aux semences du temps, Aux troubles de mon corps je devins vigilante, Avide de te voir naître dans le printemps! Je t'ai porté comme l'on porte une lumière. Sur toi, la main fermée en auvent.de douceur, Ma chair féconde ne fut plus qu'une prière, Car mon sang se donnait pour te forger un cœur. Et te versant le feu qui coulait en mes veines, Ce feu mobile et vif qui brûle les Latins, Mon fils, je t'ai voulu droit comme un jeune chêne, Ivre de cette ardeur qui jamais ne s'éteint. J'ai bu le miel du ciel aux coupes des aurores, Afin que tu sois fait de rosée et d'azur, J'ai voulu que ta pulpe, ô mon beau fruit, se dore, Lorsque tu tomberais de moi, vivant et mûr! Et je ne fus plus rien qu'une branche alourdie, Qu'un rameau pavoisé de songes et de chants, Qu'une tige de joie et de désir, que plie Le souffle déchaîné des tièdes autans. Tout ce que je donnais à la saison qui passe, Mes rires éblouis, mes rêves et mes jeux, La glane de mon sang et l'éclat de ma grâce, Vers toi j'en dirigeais les élans et les feux. Et te voici, souple et léger comme une palme Qui danse toute d'or dans le vent du destin, Opposant à l'orage rouge ton front calme, Ô fraîche adolescence et pudeur du matin! La grande peur gémit aux quatre coins du monde. Quels chemins douloureux allons nous parcourir? Mais, ô mon fils, dressant ta haute tête blonde, Tu t'avances en souriant vers l'avenir.